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Utilisateur:FabuleuseduTNM/Brouillon

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Sainte Carmen de la Main[modifier | modifier le code]

Sainte Carmen de la Main est une pièce de théâtre du dramaturge québécois Michel Tremblay écrite en 1975. Elle a d’abord été créée par la compagnie Jean-Duceppe du 20 au 22 juillet 1976, au théâtre Maisonneuve de la Place des Arts, dans le cadre du programme « Arts et Culture » du Comité organisateur des Jeux Olympiques[1], dans une mise en scène d'André Brassard. Les costumes étaient réalisés par Françoise Laplante, les décors par Guy Nepveu, puis l'éclairage et la bande sonore par Michel Beaulieu.

La distribution, quant à elle, était composé de Michelle Rossignol (Carmen), Carmen Tremblay (Gloria), Amulette Garneau (Bec-de-lièvre), Denis Drouin (Maurice), Marc Legault (Tooth Pick), Normand Lévesque (Sandra), Louise Saint-Pierre (Rose Beef) ainsi que Hubert Gagnon, Normand Morin, René-Daniel Dubois, Anne Caron, Murielle Dutil et bien d'autres (Chœurs).[2]

Lorraine Pintal, actuellement directrice générale et artistique du TNM, faisait d’ailleurs partie de ce chœur. Elle se rappelle que « Brassard avait pris au pied de la lettre l'idée de la tragédie grecque, qui avait inspiré Michel Tremblay ». Par le fait même, les acteurs jouaient sur un plateau incliné, ce qui « était la signature de Brassard, à l'époque », tandis que le chœur était accoutré de toges, de masques et de cothurnes. « «Ça pouvait avoir l'air figé», songe Lorraine Pintal, qui croit que ce traitement a pu «créer une distance» avec un public venu découvrir un nouveau texte.[3]»[3]

Quant à l’écrivain et journaliste Jean O'Neill, celui-ci n’a pas été émerveillé par cette première présentation.  « Autant je l'ai trouvé plate, autant je me dois de dire que c'est un événement important dans la vie culturelle du peuple canadien-français », écrit dans La Presse du 24 juillet 1976. Il a également trouvé « ennuyeux » le « placotage » que l’on retrouve dans la pièce. « Les personnages de théâtre [...] n'ont de valeur que dans la mesure où ils cessent de se plaindre pour empoigner la réalité à deux mains et la vivre. Quand ils cessent de vivre pour placoter, ils sont aussi merdeux que tous les placoteux. » Malgré tout, il admet avoir aimé le côté mythologique du texte (chœur, martyrologie, etc.).[3]

La critique n'est tout de même pas catégorique : « Tremblay continue de liquider le règne familial et social, avec son inévitable arrière-plan religieux que signalent le titre et la mission apostolique de Carmen. » affirme Gilbert David dans l'article Cahiers de théâtre Jeu (n°3) de 1976. [4]

Les critiques « assassines », malgré les performances célébrées de Michelle Rossignol dans le rôle de Carmen et de Denis Drouin dans celui de Maurice, bouleversent les plans initiaux de la programmation du spectacle qui prévoyait la reprise le 16 septembre 1976 chez Duceppe. En effet, Jean Duceppe ne s'est jamais expliqué publiquement, mais toutes les représentations ont été annulées. « Il n'a jamais dit [qu'il trouvait la pièce trop engagée], mais je pense que c'est la charge politique qui a provoqué l'annulation », affirme Dominique Lafon, spécialiste du théâtre et professeure émérite à l'Université d'Ottawa. Rappelons également que Sainte Carmen de la Main met en scène un personnage féminin qui « […] incarne l'émancipation, la résistance », constate René Richard Cyr (metteur en scène du Chant de Sainte Carmen de la Main de 2013 ) et que la pièce est créée en juillet 1976, que quelques mois avant l’élection générale québécoise qui a porté le Parti québécois au pouvoir avec sa promesse de tenir un référendum sur l'indépendance du Québec. [5][3]

Motivée par l’actrice Michelle Rossignol, la troupe élabora des lectures publiques au Théâtre de la Main à Montréal, du 28 septembre au 3 octobre 1976[6]. « Michelle s'était fait un devoir de faire entendre la pièce », dit Lorraine Pintal. Brassard et Tremblay participaient également aux soirées, alors qu’ils s’occupaient de différents postes à l’accueil.[3]

Toujours est-il que Sainte Carmen de la Main n'est pas restée dans l’ombre à la suite de son faux départ. En effet, Jean-Louis Roux, fondateur et directeur artistique du TNM, ajoute l’œuvre de Tremblay à la programmation de son théâtre dès mai 1978. [3] Celle-ci sera d’ailleurs télédiffusée à Radio-Québec (CIVM-TV), le 7 avril 1980.[6]

Dorénavant, la pièce est exhibée comme la plus ouvertement « engagée » de l'auteur.[2]

Résumé[modifier | modifier le code]

Parti plusieurs mois à Nashville pour perfectionner ses techniques de chant, sous l'ordre de son patron et amant Maurice, Carmen, revient avec de nouvelles chansons et quelques créations. Elle chante habituellement au bar Rodéo sur la rue Sainte-Catherine à Montréal et tout la Main a hâte au retour de la chanteuse western. Le soir venu, elle chante l'histoire de la Main et l’incite à la révolte. À la fin de son spectacle, tout le monde se prépare à célébrer avec Carmen alors que Maurice est furieux de sa rébellion. Celui-ci veut qu’elle revienne à son ancien répertoire, car il pense qu’avec ses nouvelles chansons, elle fera fuir les gens plutôt que de les inciter à rester. Tête forte, Carmen est convaincue qu’elle a pris la bonne décision en chantant des chansons qui parlent directement à la Main et que son rôle est de réveiller cette dernière. En se rendant à sa douche afin de se préparer pour les festivités, Tooth Pick l’assassine sous l'ordre de Maurice, hostile à toutes ces revendications.

Personnages[modifier | modifier le code]

Dans cette pièce, il y a un total de 19 personnages. On y compte 4 femmes, 3 hommes ainsi que deux chœurs totalisant 12 personnes. En général, ce dernier est composé de 6 femmes et de 6 hommes.

  • Carmen: Chanteuse western au Rodéo, elle décide de tenir tête à Maurice, et chante, pour et de la Main, ses propres chansons.
  • Gloria : Ancienne reine de la Main.
  • Bec-de-lièvre : Simone Côté, alias Bec-de-lièvre, est d'abord engagée par son frère Maurice comme gardienne des toilettes du Rodéo. Carmen la prendra ensuite comme habilleuse. À la fin de la pièce, elle sera faussement accusée par Thooth Pick du meurtre de Carmen.
  • Maurice : Appelé Maurice-la-piasse, il règne sur la Main depuis presque vingt-cinq ans. Il est le propriétaire du Rodéo, le club où Carmen produit ses spectacles. Il est donc son patron, en plus d'être son amant. Il est également le frère de Bec-De-Lièvre.
  • Tooth Pick : Homme de main de Maurice.
  • Sandra (Choryphée I )
  • Rose Beef (Choryphée II )
  • Le choeur des travestis de la Main
  • Le choeur des putains de la Main

Reprise[modifier | modifier le code]

Sainte-Carmen of the Main ( 1978)[modifier | modifier le code]

Le texte est traduit en 1977 par John Van Burek sous le titre de Sainte-Carmen of the Main (Talonbooks, Vancouver, 1981). C'est la première production en Anglais de la pièce qui a été créée du 11 janvier au 26 février 1978 par Tarragon Theatre à Toronto[7], dirigé, une fois de plus, par Andrée Brassard.[8]

Sainte Carmen de la Main (1978)[modifier | modifier le code]

Malgré l'aboutissement de la pièce en 1976, Jean-Louis Roux, fondateur et directeur artistique du TNM de l'époque, ajoute Sainte Carmen de la Main à la programmation de son théâtre du 19 mai au 17 juin 1978[9].

Cette représentation théâtrale comporte la même distribution que 1976, à l'exception du personnage de Sandra (maintenant interprété par Gilbert Lepage) ainsi que le personnage de Maurice (désormais joué par Pierre Dufresne). Cette reprise rend hommage à Denis Drouin, décédé le 27 avril 1979 du cancer du poumon, qui faisait partie de la première production.

André Brassard est une fois de plus à la mise en scène. Toutefois, il tente une nouvelle approche. En effet, il renonce aux références formelles de la tragédie grecque. Le metteur en scène s’est rendu compte que ceux-ci n’étaient pas adaptés pour le grand public d’ici. En effet, l’écart, entre les chœurs juchés sur des cothurnes et portant demi-masques et l’action qui se déroulait sur la Main « presque contemporaine, étaient non seulement incompréhensible, mais embrouillant [10]». Il a donc opté, cette fois-ci, pour une représentation visuelle « plus simple et quotidienne ». La structure reste la même avec les monologues et les dialogues entrecoupés par les interventions du chœur, mais les références d’environnement, tel que les costumes, correspondent davantage à la réalité de l’époque.[10]

Selon André Dionne, journaliste pour Le théâtre qu'on joue, « la pièce [de 1978] n'a pas changé, mais la mise en scène d’André Brassard rend le spectacle plus accessible. »[11] En effet, les décors de Guy Neveu appuient l’intention que Brassard avait par rapport à la représentation visuelle plus simple. Les deux côtés de la Main étaient représentés avec des néons criards et la loge de Carmen devenait le centre de la tragédie. De plus, les costumes de François Laplante restaient dans le ton réaliste. Les chœurs se reconnaissaient trop facilement à leurs déguisements. Même Carmen, Maurice, Gloria et Tooth Pick ressemblaient aux vedettes de la Main, affirme Dionne. Ce n’était donc que le texte qui rappelait, par sa structure et ses chœurs, la tragédie grecque. Cependant, le critique a pu voir les mêmes « failles aussi évidentes » que dans le spectacle de 76. « Les monologues abondent. Trop abstraits. Trop didactiques. Sentant l'explication encore « plus fort » que la graisse de frites sur la Main [11]». Heureusement, dit-il, que la performance des comédiens rendait le récit plus vivant. [11]

Adaptation[modifier | modifier le code]

Sainte Carmen of the Main (Opéra)[modifier | modifier le code]

Au printemps 1988, le Festival de Guelph donna la première représentation professionnelle d'une version anglophone de la pièce de Tremblay adapté en opéra. Commandé par le CA Banff, Saint Carmen of the Main de Sydney Hodkinson, était mise en scène par Billie Brigman. « La critique, très partagée, a surtout reproché aux organisateurs de présenter, dans le cadre d'un festival sérieux et de réputation enviable, une oeuvre aussi près de la musique pop et western, dont l'action se situe au coeur d'un quartier interlope, mettant en scène des personnages à l'avenant. »[6][12]

Le Chant de Saint Carmen de la Main[modifier | modifier le code]

La pièce de Michel Tremblay renaît sous les traits d'une tragédie musicale sur les planches du TNM en 2013. La mise en scène, le livret et les paroles des chansons seront signés par René Richard Cyr alors que la musique sera composée par Daniel Bélanger, soit le même duo que celui de la comédie musicale Les Belles-Sœurs, autre pièce de Tremblay. Le chant de Saint Carmen de la Main est produit par Spectra Musique en collaboration avec le Théâtre du Nouveau Monde et B-14 Productions, présenté avec la participation de Radio-Canada. Cette adaptation musicale compte 17 comédiens, dont Maude Guérin, Benoît McGinnis, France Castel, Eveline Gélinas, Normand D’Amours, ainsi que 4 musiciens sous la direction musicale de Philippe Brault. De plus, cette tragédie propose un hommage à la pièce originale de Michel Tremblay créé en 1978, puisqu'elle est rejouée, 35 ans plus tard, sur la même scène du Théâtre du Nouveau Monde situé en plein milieu du quartier des Spectacles de Montréal. « Quartier qui, ironie du sort, a en partie contribué à sa dispersion, voire à sa destruction. [13]»

Néanmoins, tous les éléments du spectacle étaient à la hauteur, autant la distribution, la musique, que la conception des décors et des costumes, selon Cyrielle Dodet, auteur et enseignante à l’Institut d’Études théâtrales et au Département de médiation culturelle de Sorbonne[13]. En effet, elle décrit dans la revue Jeu, que la scène offrait une dimension spectaculaire, entre autres grâce aux structures métalliques qui l’encadraient. D'ailleurs, de nombreux projecteurs étaient à la vue du public.  De plus, un immense mur d’ampoules formait le fond de scène, ce qui plaçait tous les lieux de l’action dans une ambiance de spectacle. «Après le triomphe du tour de chant de Carmen, le mur se [levait] significativement pour occuper le plafond de scène. S’il formait un mur contre lequel les illusions festives se heurtent, il devient une forme de ciel où tous les rêves sont permis […][13]». En d'autres termes, la scénographie donnait une luminosité d’espoir à la pièce. Les couleurs, les formes et les textures de costumes extravagants des personnages, dont les chœurs des putains et des travestis ajoutaient de la grandiosité à l’atmosphère de la pièce. Au moyen de la mise en scène de René Richard Cyr, la tragédie est très atténuée, et ce, par un jeu d’illusion tragique.[13]

Grâce aux critiques élogieuses aussi bien du côté de la presse que du public et des plus de 30 000 billets vendus, des supplémentaires ainsi qu’une tournée dans plus de 17 villes du Québec se sont ajoutés au calendrier entre janvier et avril 2014.[14][15]

Spectra Musique a également immortalisé sur disque la magie musicale du Chant de Sainte Carmen de la Main dans le cadre du 25e anniversaire des FrancoFolies de Montréal. C’est donc à partir du 13 juin 2013 que le public a eu accès aux mélodies du spectacle.[16]

Sainte Carmen de Montréal[17][modifier | modifier le code]

Au printemps 1989, au Théâtre Les Ateliers à Lyon, Gilles Chavassieux (fondeur en 1976 et directeur de ce théâtre en voué à la création d'auteurs contemporains français et étrangers) met en scène et présente pour la première fois en France Saint Carmen de Montréal, une adaptation de Michel Ouimet du texte original de Tremblay. Cette reprise parisienne a d'ailleurs été recréée à Paris au Théâtre de l'Est parisien du 24 avril au 23 mai 1990 par Gilles Chavassieux dans une nouvelle version scénique.

En faisant bien attention de ne pas négliger le message principal de la pièce, le metteur en scène français traite le texte de Michel Tremblay comme une tragédie musicale dans le style du music-hall. De plus, il articule sa mise en scène « à la fois sur la référence à la tragédie antique — l'unité de lieu, de temps et d'intrigue, la composition en cinq actions séparées par les interventions du chœur — et sur la référence littéraire et musicale du thème, à la figure de Carmen de Mérimée et à l'opéra de Bizet[17] ».

Créé par Angelina Herrero, le décor plonge les spectateurs dans l’univers de celui des soirées de cabaret en exploitant autant la scène que la salle. Les paillettes, les tabourets, les lumières colorées, le bar, les musiciens sont au rendez-vous pour offrir aux spectateurs l’ambiance de la Main.  Au-delà du premier plan, la conceptrice renvoie aussi au lieu de références mythiques de la pièce telles que la scène grecque antique et l’arène de combat.

« Par l'originalité de sa conception scénique reposant sur la théâtralité, la forme musicale et la mise en perspective de la problématique de la pièce, le spectacle de Gilles Chavassieux fait date en rompant la tradition plutôt réaliste des mises en scène des œuvres de Michel Tremblay et en ouvrant une nouvelle voie aux approches scéniques de son théâtre.» - Irène Sadowska-Guillon[17]

  1. David, Gilbert, et Lavoie, Pierre,, Le monde de Michel Tremblay. Tome II, Romans et récits, Éd. Lansman, (ISBN 2872825134 et 9782872825134, OCLC 491730387, lire en ligne)
  2. a et b Tremblay, Michel, 1942-, Sainte Carmen de la Main, Leméac, (ISBN 2760901734 et 9782760901735, OCLC 21555126, lire en ligne)
  3. a b c d e et f « Le chant de Sainte Carmen de la Main: le choeur à l'ouvrage », sur La Presse, (consulté le )
  4. « CEAD - Sainte Carmen de la Main », sur www.cead.qc.ca (consulté le )
  5. « Élections générales », sur Élections Québec (consulté le )
  6. a b et c Pierre Lavoie, « Bibliographie commentée », Voix et Images, vol. 7, no 2,‎ , p. 225–306 (ISSN 0318-9201 et 1705-933X, DOI https://doi.org/10.7202/200320ar, lire en ligne, consulté le )
  7. « CEAD - Sainte-Carmen of the Main », sur www.cead.qc.ca (consulté le )
  8. « Saint Carmen of the Main | Tarragon Theatre » (consulté le )
  9. Brochure, Théâtre du Nouveau Monde, 1978
  10. a et b publié par le Théâtre du Nouveau Monde, « Rencontre avec André Brassard », L'envers du Décor : sante-carmen de la main,‎ vol 10 no 7, mai-juin 1978 (ISSN 0319-8550[à vérifier : ISSN invalide])
  11. a b et c André Dionne, « Le théâtre qu’on joue », Lettres québécoises : la revue de l’actualité littéraire, no 11,‎ , p. 45–47 (ISSN 0382-084X et 1923-239X, lire en ligne, consulté le )
  12. « Saint Carmen of the Main | l'Encyclopédie Canadienne », sur www.thecanadianencyclopedia.ca (consulté le )
  13. a b c et d « Le Chant de Sainte Carmen de la Main : Haut la main! », sur JEU Revue de théâtre, (consulté le )
  14. (en) « Le chant de Sainte Carmen de la Main que de bonnes nouvelles ! », sur Spectra Musique (consulté le )
  15. Marie-Josée Boucher, « Info-Culture.biz », sur Info-Culture.biz, (consulté le )
  16. (en) « Le Chant de Sainte Carmen de la Main : l’aventure se poursuit à Montréal...et à travers le Québec en 2014 ! », sur Spectra Musique (consulté le )
  17. a b et c Irène Sadowska-Guillon, « « Sainte Carmen de Montréal » », Jeu : revue de théâtre, no 57,‎ , p. 93–96 (ISSN 0382-0335 et 1923-2578, lire en ligne, consulté le )