Symphonie no 10 de Chostakovitch
Symphonie no 10 en mi mineur Opus 93 | ||||||||
Genre | Symphonie | |||||||
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Nb. de mouvements | 4 | |||||||
Musique | Dmitri Chostakovitch | |||||||
Durée approximative | env. 50 minutes | |||||||
Dates de composition | 1953 | |||||||
Création | Léningrad |
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Interprètes | Orchestre philharmonique de Leningrad Evgeny Mravinsky (dir.) |
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La Symphonie no 10 en mi mineur, op. 93 est une symphonie de Dmitri Chostakovitch. C'est, avec sa Cinquième Symphonie, une des plus connues du compositeur. La période de la composition est incertaine ; bien que certains fragments datent de 1946[1], les lettres de Chostakovitch laissent penser que la Dixième Symphonie a été composée entre juillet et , donc peu après la mort de Staline.
Elle a été créée le à Léningrad par l'Orchestre philharmonique de Leningrad sous la direction de Ievgueni Mravinski.
Structure
[modifier | modifier le code]Elle est composée de quatre mouvements :
Orchestration
[modifier | modifier le code]L'orchestre comprend une flûte piccolo (3e flûte), 2 flûtes, 2 hautbois, 1 cor anglais (3e hautbois), 3 clarinettes dont une piccolo, 2 bassons, 1 contrebasson (3e basson), 4 cors, 3 trompettes, 3 trombones, 1 tuba, percussions (timbales, triangle, petit tambour, tambour, cymbales, grosse caisse, tam-tam, xylophone) et les cordes (violons, altos, violoncelles, contrebasses).
Histoire
[modifier | modifier le code]Composition
[modifier | modifier le code]Cette œuvre a été composée en pleine Guerre froide, période durant laquelle le musicien soviétique était fortement critiqué, avec d'autres, pour ses partitions jugées confuses et discordantes, notamment à la suite de son opéra Lady Macbeth de Mtsensk, en raison du jdanovisme artistique[2] (imposé par Andreï Jdanov, premier secrétaire du parti communiste, section de Léningrad). Sa symphonie précédente (la neuvième) date alors de huit ans.
Création et réception
[modifier | modifier le code]La première a été donnée le , peu de temps après la mort de Joseph Staline survenue le de la même année, sous la direction de Evgeny Mravinsky et remporte d'emblée un franc succès. Elle ne comporte aucun programme mais Chostakovitch avouera plus tard qu'il pensait à Staline dans l'allegro particulièrement oppressant. On peut sans doute voir dans le final, nettement plus optimiste, la fin du dictateur. C’est également la première œuvre dans laquelle il intègre son acronyme musical DSCH (ré – mi bémol – do – si)[2].
Analyse
[modifier | modifier le code]Selon Andris Nelsons, Chostakovitch a peint avec les « couleurs froides » de la Dixième Symphonie un tableau de la peur qui régnait durant la période stalinienne. « On ne savait jamais ce qui pouvait arriver. Et même après la mort de Staline, cette peur est restée. Dans la Dixième, il n’y a pas de joie spontanée ou de soulagement. Dans la répétition frénétique du D-S-C-H, j’entends Chostakovitch dire à Staline avec sarcasme et ironie : "Tu es mort, mais moi, je suis encore vivant ! Je suis encore là !" ».
Moderato
[modifier | modifier le code]Allegro
[modifier | modifier le code]D'une durée d'environ cinq minutes, c'est un mouvement qui piétine tout sur son passage, sans jamais s'arrêter, dans la tonalité sinistre de si bémol mineur. Le thème principal, mélodique, sur un accompagnement sec, reste dans le champ d'attraction de la tonique, si bémol, avant de décoller non sans difficulté. Le second thème, sinueux et chromatique, est joué en tierces superposées aux cordes, tandis qu'un incessant bourdonnement aux contrebasses sert d'assise. Le retour du thème principal, aux cordes graves, trombones et tuba, sur des valeurs longues, donne une dimension tout à fait terrifiante, tandis que le second thème est exposé juste avant la fin, tonitruante et impitoyable. Ce court scherzo est un « portrait au vitriol de Staline »[2].
Allegretto
[modifier | modifier le code]Le troisième mouvement, en ut mineur, est une valse un peu boiteuse, à l'accompagnement arythmique. Le thème principal est descendant et se pose tantôt sur la dominante (sol), tantôt sur la sensible de la dominante (fa dièse). L'ambiance est incertaine, timide, mais l'arrivée du second thème DSCH change la donne : c'est la signature du compositeur, basée sur quatre notes, ré (D), mi bémol (eS), do (C) et si (H), qu'il utilisa aussi dans son Concerto pour violon n°1, et dans son Huitième Quatuor Op. 110. Le troisième thème, introduit par le cor, fut un mystère pendant très longtemps. La vérité ne fut révélée que très récemment par l'intéressée, la pianiste Elmira Nazirova, qui vécut en Azerbaïdjan avant d'émigrer en Israël. Elle avait étudié la composition avec Chostakovitch, et une relation très forte s'instaura entre eux, bien que platonique. Le thème en question est basé sur les notes suivantes : mi (E) la (L) mi (MI) ré (R) la (A) et une fois introduit, alternera avec le thème de DSCH[3]. Au fur et à mesure, le tempo accélère pour devenir une valse tourbillonnante, mais les deux thèmes, bien que rapprochés, ne se toucheront jamais. La valse initiale revient, les deux thèmes DSCH et Elmira s'estompent, mais la signature du compositeur revient une dernière fois sur un accord mahlérien (accord de do majeur non résolu, celui-là même qui conclut Das Lied von der Erde de Gustav Mahler).
Andante — Allegro
[modifier | modifier le code]Le dernier mouvement débute sur une introduction Andante, où le futur thème principal fait son entrée, incertaine, avant de prendre les rênes par l'intermédiaire d'une clarinette provocatrice. L'humour grinçant du finale ne s'arrêtera pas une seconde, coupé net par la réintroduction du thème DSCH qui nous ramène à la réalité avec l'élément initial de l'introduction du final. Mais les thèmes du final reviennent toujours aussi sarcastiques et implacables. Le thème DSCH a toutefois le dernier mot, martelé aux timbales. La symphonie se conclut de manière tonitruante, telle une victoire à la Pyrrhus.
Discographie sélective
[modifier | modifier le code]Radio Classique a réalisé une audition en aveugle des différents enregistrements de la symphonie[4].
Notes et références
[modifier | modifier le code]- Wilson, Elizabeth (1994) p. 262. Shostakovich: A Life Remembered. Princeton University Press. (ISBN 0-691-04465-1).
- « Chostakovitch et Staline », sur symphozik.info (consulté le ).
- « 11.1 Shostakovich's Tenth Symphony The Azerbaijani Link - Elmira Nazirova by Aida Huseinova », sur azer.com (consulté le )
- « La Symphonie n° 10 de Dimitri Chostakovitch - Radio Classique », sur Radio Classique, (consulté le ).
Articles connexes
[modifier | modifier le code]Liens externes
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- Ressources relatives à la musique :
- Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généraliste :