Judaïsme messianique

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Un des symboles.

Le judaïsme messianique est un mouvement religieux moderne qui combine des éléments du christianisme comme la foi que Jésus est le Messie, avec des éléments du judaïsme et de la tradition juive. Sa forme actuelle est apparue dans les années 1960 et 1970. Issu du mouvement missionnaire chrétien, du christianisme évangélique, il combine une théologie chrétienne avec une pratique religieuse partiellement juive. Le mouvement trouve son origine dans l'anglicanisme, en Angleterre, au début du XIXe siècle. Ses fidèles se présentent comme des juifs reconnaissant la messianité de Yeshoua (Jésus).

Après le développement du sionisme à la fin du XIXe, l'apparition du sionisme chrétien, la Seconde Guerre mondiale et la naissance de l’État d’Israël, il prend sa forme actuelle aux États-Unis à partir des années 1960[1],[2]. La victoire israélienne de 1967 et la réunification de Jérusalem sont perçues par les juifs messianiques comme « un « signe des temps » particulièrement fort. Cet événement précéderait la seconde venue de Jésus et l'instauration de son règne de mille ans à Sion, à l'issue de la guerre finale de Gog et Magog »[2].

Les « Juifs messianiques » ne doivent pas être confondus avec les Juifs qui se convertissent au christianisme (catholique, orthodoxe ou protestant). Après leur conversion, ces personnes sont pleinement intégrées à l'Église qu'elles ont rejointe.

Même si certains Juifs messianiques sont juifs selon la Halakha (c'est-à-dire sont juifs selon les critères judaïques non chrétiens), le judaïsme messianique n'est pas reconnu comme un courant du judaïsme, et certaines organisations sont mal perçues en Israël. Les historiens des religions classent le judaïsme messianique dans le christianisme.

Origine et développement

Les origines du mouvement du judaïsme messianique apparaissent dans l'Angleterre du XIXe siècle. Les premières organisations officielles sont dirigées par des Juifs convertis comme la Church's Ministry Among Jewish People, société anglicane de Londres pour la promotion du christianisme parmi les Juifs de Joseph Frey (1809)[3] qui a participé à la traduction du premier Nouveau Testament en hébreu en 1821[4] ; elles rappellent les fondements hébraïques de la foi chrétienne[5]. Puis, la Hebrew-Christian Alliance voit le jour au Royaume-Uni en 1866, suivie par la Hebrew-Christian Aliance of America aux États-Unis en 1915. Cette dernière, en 1976, change de nom et devient la Messianic Jewish American Alliance.

En 1925, une organisation internationale est créée : la Hebrew-Christian Alliance, renommée plus tard International Messianic Jewish Alliance. Enfin, en 1979, est fondée l'Union of the Messianic Jewish Congregations (UMJC).

Le judaïsme messianique au XXe siècle

La synagogue messianique Baruch HaShem à Dallas au Texas.

Le mouvement se développe aux États-Unis au début du XXe siècle, surtout à partir des années 1960 sur les campus américains, ainsi que dans les années 1970, qui voient la fondation des « Juifs pour Jésus » par Moishe Rosen (en), un pasteur d'origine juive converti au christianisme en 1953[6].

En 1996, aux États-Unis, la Convention baptiste du Sud a fait de la conversion des juifs au christianisme évangélique une de ses priorités, allouant des sommes importantes à la poursuite de cet objectif. Nombre de chrétiens born-again sont en effet persuadés que le retour du Christ est lié à la conversion des Juifs[7]. L'argent est notamment investi dans la création de synagogues « judéo-chrétiennes » destinées à accueillir, dans cette visée prosélyte, les Juifs hésitants[7]. D'après le rabbin Bentzion Kravitz, fondateur du mouvement Jews for Judaism (en) en réaction au mouvement Jews for Jesus[8], le nombre de ces synagogues s'élevait en 2006 à plus de 400 et le nombre de convertis à 275 000[7].

Une chercheuse canadienne constate : « Selon les convictions religieuses des [Juifs messianiques], le retour du Messie sera assuré une fois que son peuple élu (le peuple juif) aura reconnu Yeshua comme le Messiah d’Israël. La conversion de chaque Juif au messianisme (chrétien) constitue donc un pas vers le retour du Messie et la rédemption du monde. Dans ce contexte, nous avons constaté, parallèlement à l’accueil chaleureux reçu, de subtils mécanismes de pression pour nous influencer et tenter de nous convaincre d’accepter Yeshua comme notre sauveur. Ainsi, le rabbin a entretenu de longues discussions avec nous afin de démontrer que l’Ancien Testament parlait continuellement de Jésus dans un langage codé[1]. »

L'estimation du nombre de Juifs messianiques de par le monde varie, selon les sources, entre 50 000 et 350 000, dont environ les deux tiers vivent aux États-Unis. Plusieurs sources[9],[10] parlent d'un nombre autour de 50 000 adhérents dont 40 000 aux États-Unis. Ce chiffre paraît le plus probable compte tenu du nombre moyen de personnes affiliées à une congrégation (environ 100, certaines étant très petites) et le nombre de temples messianiques (environ 200 dans le monde dont les deux tiers aux États-Unis).

La plupart des communautés messianiques sont regroupées au sein de l'IMJA (International Messianic Jewish Alliance), dont le siège est aux États-Unis. La branche française de l'IMJA est l’AFJM (Alliance francophone des juifs messianiques).

Doctrine

Sur la base de leur interprétation du Nouveau Testament, leur croyance centrale est l'acceptation de Yeshoua (Jésus) en tant que Messie d'Israël annoncé par les prophètes. Ils soulignent l'importance de leur identité juive, ainsi que des traditions du judaïsme, pour autant qu'elles soient en accord avec l'Évangile. Ils considèrent que Jésus-Christ est le « Berger », et se reposent sur la Bible.

La foi du judaïsme messianique se fonde sur les bases suivantes :

  • Yeshoua (Jésus) est le Fils de Dieu, celui qui était avec Dieu (la Parole), par qui le Père a créé le ciel, la terre, et toutes choses ;
  • La foi en Yeshoua (Jésus), reconnu comme le Messie, sur la base des prophéties du Tanakh : venu en sacrifice expiatoire, pour le rachat des péchés ;
  • L’accès à la grâce de Dieu et au salut (à la vie éternelle et à l’enlèvement) par la repentance et la foi en Yeshoua (Jésus) ;
  • La foi en son retour, pour la délivrance et le rétablissement d'Israël (après sa repentance et sa conversion au christianisme). Et la venue de son règne de paix, dans les Cieux et sur la Terre.

Oppositions

Les communautés juives témoignent une certaine méfiance vis-à-vis de ceux qui se disent Juifs messianiques, parce qu'elles estiment qu'ils ne sont pas réellement Juifs, et qu'elles désapprouvent leurs activités missionnaires visant à convertir les Juifs au christianisme.

En Israël, au sein du Parlement israélien, le Comité d'amitié avec les chrétiens (Christian Allies Caucus) refuse de travailler avec des Juifs messianiques parce qu'ils cherchent à convertir des Juifs. Josh Reinstein, son président, a déclaré : « Nous croyons qu'ils travaillent contre les intérêts de l'État d'Israël »[11].

Le groupe des Jews for Jesus est particulièrement controversé[2], notamment ses membres juifs convertis lorsqu'ils demandent à bénéficier de la nationalité israélienne (Alya). En 1970 un amendement à la Loi du retour en a exclu les Juifs ayant volontairement changé de religion. En la Cour suprême israélienne, dans un arrêt faisant jurisprudence, a confirmé le rejet de la demande de naturalisation introduite par deux Juifs messianiques d'Afrique du sud, Gary et Shirley Beresford[11].

Il peut arriver que des Juifs messianiques se heurtent à des critiques musclées de la part de Juifs ultra orthodoxes, notamment de membres du Yad LeAhim (organisation luttant contre les sectes et les activités missionnaires non-juives en Israël).

David Hills, voulait devenir aumônier dans la marine américaine, lorsqu’il a voulu porter une étoile de David, la décision officielle du sous chef des opérations navales (le ) a été que les Juifs messianiques sont tenus de porter la croix chrétienne[12]

Cette décision interdit essentiellement aux Juifs messianiques de servir comme aumôniers au sein de la marine américaine parce que cela les obligerait à porter un insigne incompatible avec leur foi. À la suite de cette décision, David Hills a choisi de démissionner[12]. Des Juifs qui avaient observé le déroulement de l’affaire ont applaudi la décision de la marine[13].

Bibliographie

  • (en) Peter Hocken, The Challenges of the Pentecostal, Charismatic and Messianic Jewish Movements. The Tensions of the Spirit, Surrey (UK), Ashgate Publishing Ltd, , chapitre 5 : « The Messianic Jewish movement: New Current and old Reality ».
  • (en) Edward Kessler, « Messianic Jews », dans Edward Kessler & Neil Wenborn, A Dictionary Of Jewish-Christian Relations, Cambridge, England, Cambridge University Press, 2005, p. 292 (ISBN 9780521826921). LCCN 2005012923.
  • (en) Shoshanah Feher, Passing over Easter: Constructing the Boundaries of Messianic Judaism, Rowman Altamira, 1998 (ISBN 978-0-7619-8953-0), p. 140.
  • (en) Yaakov Ariel, « Judaism and Christianity Unite! The Unique Culture of Messianic Judaism », dans Eugene V. Gallagher & Michael W. Ashcraft, Jewish and Christian Traditions. Introduction to New and Alternative Religions in America 2, Westport, Conn, Greenwood Publishing Group, 2006, p. 191 (ISBN 978-0-275-98714-5). LCCN 2006022954. OCLC 315689134.
  • (en) Carol Harris-Shapiro, Messianic Judaism: A Rabbi's Journey Through Religious Change in America, Beacon Press, , 218 p. (ISBN 9780807010402, lire en ligne).

Notes et références

  1. a et b Grdu Montreal.
  2. a b et c Juifs messianiques, sur Akadem.
  3. (en)CMJ history : « Frey and a group of his supporters founded the ‘London Society for promoting Christianity amongst the Jews’ (LSCJ) in 1809 », « CMJ’s mission-field soon spread across Europe, South America, Africa, and into Israel and CMJ became the biggest mission organisation in the world ».
  4. (en)WorldCatalog, « Narrative of the Rev. Joseph Samuel C. F. Frey: author of Hebrew grammar; Hebrew, Latin, and English dictionary; and editor of Vander Hooght's Hebrew Bible. »
  5. (en) Yaakov Ariel, « Introduction to New and Alternative Religions in America », Judaîsm and Christianity Unite!: The Unique Culture of Messianic Judaísm.
  6. « Moishe Rosen, 78 ; founded evangelistic group Jews for Jesus », The Washington Post, 20 mai 2010.
  7. a b et c Zidane Mériboute, Islamisme, soufisme, évangélisme : la guerre ou la paix, Labor et Fides, (ISBN 9782830913705, lire en ligne), p. 199-200
  8. (en) George Thomas Kurian et Mark A. Lamport, Encyclopedia of Christianity in the United States, vol. 5, Rowman & Littlefield, (ISBN 9781442244320, lire en ligne), p. 1494-1495.
  9. (en) « adherents », sur archive.wikiwix.com (consulté le ).
  10. (en) « Judaim », sur archive.wikiwix.com (consulté le ).
  11. a et b (en)Aliyah with a cat a dog and Jesus (Alyah avec chat et chien et Jésus), Haaretz, 9 juin 2006.
  12. a et b (en)« Washington - Jews Hail Decision By US Navy Not To Recognize Messianic Jew As Jewish Chaplin ».
  13. « US Navy Tells Messianic Jewish Chaplain He Must Wear Cross ».

Articles connexes

Lien externe