Bataille de la Tannerie (19 janvier 1793)

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Bataille de la Tannerie

Informations générales
Date
Lieu La Tannerie, entre Dondon et Grande-Rivière
Issue Victoire républicaine
Belligérants
Drapeau de la France République française Esclaves insurgés et royalistes
Commandants
Étienne Maynaud Bizefranc de Lavaux Georges Biassou
Toussaint Louverture
Forces en présence
723 hommes[1]
6 canons[2]
Plusieurs milliers d'hommes[3]
14 à 17 canons[2],[4]
Pertes
9 morts[1]
16 blessés[1]
Inconnues
14 à 17 canons capturés[2],[4]

Révolution haïtienne

Batailles

Coordonnées 19° 31′ 59″ nord, 72° 13′ 59″ ouest
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Bataille de la Tannerie

La bataille de La Tannerie a lieu le pendant la révolution haïtienne. Elle s'achève par la victoire des républicains qui s'emparent du camp de la Tannerie, près de Dondon.

Prélude[modifier | modifier le code]

Début janvier 1793, le commissaire Sonthonax donne l'ordre au général Lavaux de marcher contre Jean-François et Georges Biassou qui occupent plusieurs camps dans la région montagneuse située entre Limbé et Marmelade[2]. Le camp de La Tannerie en particulier, situé entre Dondon et Grande-Rivière[5], est fortifiée depuis plusieurs mois par l'armée de Toussaint Louverture[4],[6].

D'après le rapport du général Lavaux, le grand chemin conduisant au fort de La Tannerie est fermé par une double porte à huit pieds d'éloignement l'une de l'autre et la première porte est doublée en cuivre[1]. Un large fossé se situe d'un côté du camp afin d'y faire entrer l'eau de la rivière[1]. De l'autre côté, un fossé monte jusqu'au milieu du morne, garni par une palissade épaisse[1]. Plusieurs batteries d'artillerie sont placées sur une plateforme à mi-morne, protégées par un bastingage[1]. Des ingénieurs blancs faits prisonniers avaient été contraints de diriger les travaux de fortification[2]. De son côté, le médecin Michel Étienne Descourtilz décrit le fort ainsi : « Le camp de la Tannerie, adossé à un morne qui en défendoit les approches par derrière, étoit environné d'un double et large fossé plein d'eau, et d'une palissade à deux rangs, dont les pieux n'étoient rien moins que des arbres entiers, sciés et aiguisés par un bout, et fichés en terre les uns contre les autres; une batterie de canons étoit établie sur un monticule qui se trouvoit au centre des retranchemens, et balayoit tous les environs »[7].

Forces en présence[modifier | modifier le code]

Le corps des volontaires à cheval, constitué majoritairement de jeunes royalistes, les « petits blancs » de Saint-Domingue et les libres de couleurs se montrent tous réticents à participer à l'expédition, aussi Lavaux se retrouve réduit à organiser cette campagne principalement avec les troupes venues de France[2].

Trois colonnes sont mises en mouvement[2],[1]. La première, dite de l'Ouest no 1 et commandée par de Nully, lieutenant-colonel du 84e régiment d'infanterie, doit partir de Marmelade[1]. La deuxième, dite de l'Ouest no 2 et commandée par Desfourneaux, lieutenant-colonel d'un bataillon de volontaires du Pas-de-Calais, occupe Ouanaminthe[1]. Lavaux prend lui-même la tête de la troisième colonne, forte de 225 hommes de ligne, 45 dragons, 331 fantassins et 122 cavaliers de la troupe franche des volontaires du Cap[1], commandés respectivement par les planteurs Dessources et de Russy[2], et six canons[2].

Le camp de la Tannerie est alors défendu par plusieurs milliers d'insurgés[3] commandés par Georges Biassou et son second, Toussaint Louverture[2],[1]. Jean-François occupe quant à lui le camp Piveteau, situé non loin de celui de la Tannerie, mais il ne fait aucun mouvement pour venir en aide à Biassou[2].

Déroulement[modifier | modifier le code]

Le 14 janvier, la colonne de Lavaux se met en marche depuis Le Cap-Français[1]. Dans un premier temps, elle s'empare des habitations Bérard et Langardière[2], puis du morne à Mouton, du morne du Grand-Pré[1] et du camp du morne Milot, que les insurgés livrent aux flammes[1],[2]. Le lendemain, le 18[2] ou le 19 janvier[1], la colonne attaque le camp de La Tannerie[2]. L'assaut est lancé par trois détachements menés par Dubuisson, à la tête des volontaires du Cap, le lieutenant-colonel Desprès, du 41e régiment d'infanterie, et Degouttes, ancien officier au régiment Royal-Auvergne[2].

Les républicains s'emparent d'un petit morne dominant la Tannerie, puis ils se précipitent sur les retranchements[2]. Les soldats franchissent les fossés et escaladent la palissade[2]. Un jeune dragon parvient à ouvrir la première porte de l'enceinte à la cavalerie[1]. Biassou ne cherche alors pas à défendre la deuxième enceinte et prend la fuite[2],[1]. Après un combat de plusieurs heures, le camp de la Tannerie est pris et les républicains hissent le drapeau tricolore en haut des remparts[2],[1].

Dans ses mémoires, le général François Joseph Pamphile de Lacroix estime que « des hommes plus habiles que des esclaves eussent été parfaitement à l'abri d'un coup de main dans le camp de la Tannerie; mais à la vue des troupes du général de Laveaux les bandes de Biassou se laissèrent forcer par la terreur; elles se sauvèrent selon leur coutume, et ne furent point entamées, parce que le terrain était tellement hérissé d'obstacles qu'on ne put entrer dans leur camp qu'un à un »[8].

Les rebelles se replient sur Dondon et Grande-Rivière[9],[2]. Une arrière-garde de 600 hommes menée par Toussaint couvre la retraite des troupes de Biassou[9]. De Russy se lance à la poursuite des fuyards jusque dans la plaine de Grande-Rivière[2].

Pertes[modifier | modifier le code]

Les pertes des insurgés auraient été lourdes, tandis que celles des républicaines sont de neuf morts et seize blessés[1]. Les rebelles abandonnent également, selon les sources, 14[2], 15[1] ou 17 canons[4], dont deux de vingt-quatre livres[4].

Suites[modifier | modifier le code]

Par la suite Lavaux, s'empare du camp Piveteau[2]. Dans ses mémoires, Pamphile de Lacroix rapporte que « Jean-François, leur chef suprême, qui s'y trouvait en personne, eût à peine le temps de fuir de l'habitation Pivoteaux, où il avait établi son quartier-général. Ses hordes, frappées de l'apparition spontanée des troupes, ne surent pas trouver le temps de mettre le feu aux canons : elles partirent à la débandade en poussant des cris affreux; une vingtaine de fuyards furent atteints, entre autres un mulâtre libre, nommé Coco-Laroche, paré de la croix de Saint-Louis, et revêtu de l'uniforme de maréchal des camps et armées du roi, dont il usurpait le titre. Le général de Laveaux lui fit casser la tête, ainsi qu'aux autres prisonniers »[8].

Le 25, la colonne de Nully s'empare de Dondon, que Jean-François abandonne pour se retirer sur Vallières[1]. Nully occupe huit autres positions, ne rencontrant une forte opposition qu'au camp du Petit-Thouars[2].

Le 12 février, Lavaux, malade, est contraint de retourner au Cap, mais il laisse plusieurs garnisons pour tenir les positions conquises[1].

D'après Pamphile de Lacroix, à l'issue de la campagne, des milliers d'insurgés viennent faire leur soumission : « La terreur se mit dans la révolte. Sur le simple avis qu'on fit circuler d'une amnistie, les insurgés vinrent par milliers demander grâce; parmi eux se trouvaient des anciens libres que les blancs furieux voulaient immoler; mais qui recevaient accueil et protection des hommes de couleur placés auprès du général de Laveaux. Ce général, à l'imitation des commissaires, leur montrait une confiance illimitée »[8].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d e f g h i j k l m n o p q r s t u v et w Saint-Rémy 1850, p. 56-58.
  2. a b c d e f g h i j k l m n o p q r s t u v w x et y Madiou, t. I, 1847, p. 123-125.
  3. a et b Hazareesingh 2020, p. 92.
  4. a b c d et e Smartt Bell 2007, p. 72.
  5. Saint-Rémy 1850, p. 52.
  6. Hazareesingh 2020, p. 80-81.
  7. Descourtilz 1795, p. 259-260.
  8. a b et c Lacroix 1819, p. 230-231.
  9. a et b Smartt Bell 2007, p. 78.

Bibliographie[modifier | modifier le code]