L'Art de la guerre

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Ceci est une version archivée de cette page, en date du 21 octobre 2014 à 22:02 et modifiée en dernier par Thrain (discuter | contributions). Elle peut contenir des erreurs, des inexactitudes ou des contenus vandalisés non présents dans la version actuelle.

Modèle:Unicode chinois

L'Art de la guerre
Auteur Sun Tzu
Pays Chine
Genre Traité de stratégie militaire
Date de parution inconnu, aux alentours du VIe siècle av. J.-C.
Type de média Livre

L'Art de la guerre (en chinois : 孙子兵法, pinyin : sūn zǐ bīng fǎ, littéralement : « Stratégie militaire de maître Sun ») est le premier traité de stratégie militaire écrit au monde (VIe siècle av. J.-C.Ve siècle av. J.-C.). Son auteur, Sun Tzu (孙子, sūn zi), y développe des thèses originales qui s'inspirent de la philosophie chinoise ancienne.

C'est l'essence de la guerre psychologique illustrée notamment par la guerre d'Indochine, la guerre du Viêt Nam et la guerre sino-vietnamienne.

L'auteur

La tradition associe l'Art de la guerre, à un général nommé Sun Tzu, qui aurait vécu à la fin du VIe siècle av. J.-C., et serait entré au service du roi Helu de l'État de Wu. Selon Sima Qian, Sun Tzu aurait fait lire ses Treize chapitres au roi, avant de le conseiller lors de ses campagnes contre l'État de Chu.

Cette attribution a été contestée par des historiens chinois depuis la dynastie des Song, observant l'absence de toute mention de Sun Tzu dans les textes anciens (le Zuo zhuan notamment, qui décrit les guerres entre Wu et Chu), et le fait que les principes défendus par Sun Tzu sont plus adaptés à la période des Royaumes combattants (IVe siècle av. J.-C.), qu'à la période des Printemps et des Automnes. L'Art de la guerre fut alors attribué à un descendant supposé de Sun Tzu, Sun Bin, qui écrivit également des traités militaires.

Dans les années 1970, la découverte d'une tombe contenant plusieurs textes militaires a mis fin à cette hypothèse. Si elle ne permet pas de prouver l'existence historique de Sun Tzu, elle démontre l'existence de deux traités distincts :

  • le Sun Zi (孫子), également appelé Sun Wu Bingfa (孫武兵法), ou Wu Sun Zi Bingfa (吳孫子兵法), attribué à Sun Wu, plus ancien (fin VIe-début Ve siècle av. J.-C.) ;
  • le Sun Bin Bingfa (孫臏兵法) également appelé Qi Sun Zi (齊孫子), attribué à Sun Bin, plus tardif (IVe siècle av. J.-C.).

On pense aujourd'hui que l'Art de la guerre de Sun Tzu date du début du Ve siècle av. J.-C..

Description

L'ouvrage est fondé sur le principe suivant : gagner ou perdre une guerre ne se fait pas par hasard, ni par l'intervention des dieux ou des esprits. C'est une question de méthode et de stratégie. De bons principes stratégiques conduisent à la victoire, il est donc important de les étudier.

Il y a deux concepts de base dans ce traité :

  • d'abord, « prendre les possessions de l'adversaire en entier » (au début du chapitre 3), et les conserver – si possible – intactes, en particulier les civils, car l'ennemi d'aujourd'hui est le sujet de demain. Tout est relié, de sorte que la guerre faite à autrui a un effet (appauvrissement, morts) sur le pays où elle est faite au moment où elle est faite, mais aussi par la suite sur le monde qui l'entoure (destructions, rancunes, déstabilisation). Historiquement, cette idée se justifie par le fait qu'une guerre, du temps de Sun Tzu, opposait forcément des Chinois entre eux (les autres pays du monde étaient très mal connus). Le vainqueur récupérait les sujets du vaincu, car la notion d'ennemi héréditaire n'existait pas.
  • ensuite, le shi : ce mot renvoie au concept de l'engagement de forces anodines pour faciliter la victoire. Ce déploiement repose sur la préparation, le travail, la bonne connaissance du terrain et des forces en présence (par l'espionnage), et l'adaptation aux circonstances. Il s'agit de s'insérer dans le Tao, d'aller avec le flux.

Ce livre guide aussi le lecteur sur les cinq éléments à prendre en compte dans l'élaboration d'une stratégie :

  1. la cause morale : le « Tao » adresse la moralité et la vertu d'une bataille ;
  2. les conditions climatiques : le paradis est signifié par le « yin » et le « yang » de la pensée taoïste. Ces conditions se manifestent par le chaud et le froid ainsi que l'alternance des quatre saisons ;
  3. les conditions géographiques : la terre comprend le proche et le loin, les terrains ouverts et les passages étroits, les plaines et les montagnes. Il est ici question de topographie et de prise en compte des variations de terrain utilisables selon les types de troupes engagées ;
  4. le dirigeant : le commandant doit être sage, honnête, bienveillant, courageux et strict ;
  5. l'organisation et la discipline : la délégation de l'autorité et les zones de responsabilité au sein d'une organisation doivent être parfaitement comprises. Les châtiments doivent être exemplaires tout comme les récompenses.

Sous l'influence du Taoïsme et du Yi Jing (le Livre des Changements) l'Art de la guerre énonce que l'harmonie entre ces cinq éléments est une condition préalable au succès d'une campagne.

Il montre comment la réflexion peut mener à la victoire, comment l'analyse des faiblesses de l'ennemi peut fonder une tactique, si l'on sait les exploiter, et même les aggraver ; il met l'accent sur la psychologie du combat et sur l'importance de la ruse et de la fuite.

Un art de vivre

Ces principes stratégiques sont appliqués au domaine militaire, mais peuvent l'être aussi à celui des affaires, de la politique ou de la société. Ce vieil ouvrage apparaît ainsi étonnamment moderne par ses dimensions psychologiques et morales.

Positionnement par rapport aux stratèges européens

L'Art de la guerre, déjà introduit en Europe en 1772 par Joseph-Marie Amiot qui avait traduit le titre Les treize articles de Sun-Tse[1], est encore étudié aujourd'hui dans les écoles militaires occidentales, ce qui donne l'occasion de comparer cet enseignement à celui d'autres stratèges. Cette comparaison est difficile, car Sun Tzu reste très « théorique » et n'édicte pas de « procédures » comme dans les ouvrages occidentaux.

Citations

« Jamais guerre prolongée ne profita à aucun pays. »

« L'art de la guerre, c'est de soumettre l'ennemi sans combat. »

« Soumettre l'ennemi par la force n'est pas le summum de l'art de la guerre, le summum de cet art est de soumettre l'ennemi sans verser une seule goutte de sang. »

« Toute guerre est fondée sur la tromperie. »

« Qui connaît son ennemi comme il se connaît, en cent combats ne sera point défait. Qui se connaît mais ne connaît pas l'ennemi sera victorieux une fois sur deux. Qui ne connaît ni son ennemi ni lui-même est toujours en danger. »

« Ne laissez pas vos ennemis s'unir. »

« En tuer un pour en terrifier un millier. »

« La guerre est semblable au feu, lorsqu'elle se prolonge elle met en péril ceux qui l'ont provoquée. »

« Il n'y a pas de forteresses imprenables, il n'y a que des mauvais attaquants. »

Chapitres

Une grande partie de l'ouvrage a été perdue, comme en témoignent certains chapitres très courts[réf. nécessaire]. Il nous reste treize chapitres, mais le plan est assez lâche (certains concepts se retrouvent sous diverses formes dans plusieurs chapitres).

  1. De l'évaluation (始計, Shǐjì)
  2. De l'engagement (作戰, Zuòzhàn)
  3. Des propositions de la victoire et de la défaite (謀攻, Móugōng)
  4. De la mesure dans la disposition des moyens (軍行, Jūnxíng)
  5. De la contenance (兵勢, Bīngshì)
  6. Du plein et du vide (虛實, Xūshí)
  7. De l'affrontement direct et indirect (軍爭, Jūnzhēng)
  8. Des neuf changements (九變, Jiǔbiàn)
  9. De la distribution des moyens (行軍, Xíngjūn)
  10. De la topographie (地形, Dìxíng)
  11. Des neuf sortes de terrains (九地, Jiǔdì)
  12. De l'art d'attaquer par le feu (火攻, Huǒgōng)
  13. De la concorde et de la discorde (用間, Yòngjiàn)

Historique

C'est un jésuite, membre éminent de la Mission jésuite en Chine, le père Joseph-Marie Amiot qui a traduit et fait connaître cet écrit en Europe en 1772 (sous le nom les Treize Articles), d'où il s'est rapidement diffusé vers les cours royales et les académies militaires.

Ses idées, ignorées durant les époques de guerre totale et de conflits frontaux, ont retrouvé une actualité en inspirant les grandes guérillas anti-coloniales chinoises et vietnamiennes, notamment, et sont aujourd'hui reprises par les stratèges asiatiques et américains de la guerre économique et de la guerre psychologique.

Notes et références

  1. Concernant cette première traduction du père Amiot, on pourra se référer au site de référence sur l'étude de L'art de la guerre : Sun Tzu France.

Bibliographie

Sur les autres projets Wikimedia :

Consultez la liste des éditions de cette œuvre :
L'Art de la guerre.
  • Yann Couderc, Sun Tzu en France Éditions Nuvis, Paris, 2012.
  • Pierre Fayard, Comprendre et appliquer Sun Tzu. La pensée stratégique chinoise : une philosophie en action, Dunod, 2004, (ISBN 2100484966) (approche vulgarisée du traité à travers le choix de 19 stratagèmes classiques chinois)
  • (en) Samuel B. Griffith, Sun Tzu. The Art of War, Oxford University Press, 1963, nombreuses rééditions. Référence à l'UNESCO pour les textes classiques chinois (Trad. de l'anglais Francis Wang, Flammarion, Coll. Champs, 1978, 253p. (ISBN 9782080810588)).
  • Jean Levi, Sun tsu, L'Art de la guerre nouveau monde Éditions, 2010. Avec interview du traducteur et un article de Philippe Sollers.
  • Jean-François Phelizon, Relire l'Art de la Guerre de Sun Tzu, Economica, coll. stratèges et stratégies, Paris, 2008, édition revue et corrigée, (1re éd. 1999) (ISBN 978-2-7178-5580-7)
  • Valérie Niquet, L'Art de la guerre de Sun Zi, traduction et édition critique, Economica, Paris, 1988
  • Valérie Niquet, Les fondements de la stratégie chinoise, Economica, Paris, 2000.
  • Li Zhiqing (dessins) & Li Weimin (scénario), L'art de la guerre de SunTzu, éditions du temps 2004/2007, collection Toki (ISBN 978-2-84274-378-9)), adaptation en manhua du traité (prix international du manga 2007, décerné par le ministère japonais des Affaires étrangères)

Liens externes