Galaxie méduse

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La galaxie méduse IC 5337 (en bas à droite), caractérisée par ses rubans d'étoiles bleues trainants dans son sillage. Cette galaxie chute vers le centre de son amas galactique (Abell 2626), lui même dominé par la galaxie IC 5338 (en haut)[1].
La galaxie spirale NGC 4402, dans l'amas de la Vierge. La pression dynamique qui s'exerce sur cette galaxie commence à y détacher des filaments de gaz, orientés vers le haut de l'image (HST)[2].

Une galaxie méduse (Jellyfish galaxy en anglais) est un type de galaxie qui peut être observé au sein des amas galactiques. Il s'agit couramment de galaxies spirales qui, par effet de décapage par pression dynamique, se retrouvent dépouillées de l'essentiel de leur milieu interstellaire. Ces galaxies s'accompagnent d'une queue de gaz dans leur sillage et d'un fort taux de formation d'étoiles.

Les galaxies méduses doivent leur nom à leur morphologie particulière, la queue de gaz dans le sillage de celles-ci prenant souvent l'apparence de tentacules bleutés (car abritant de jeunes amas d'étoiles), rappelant ceux d'une méduse, et où le corps de l'animal (l'ombrelle) correspond au disque galactique[3].

Caractéristiques[modifier | modifier le code]

À l'origine, les galaxies méduses sont des galaxies relativement ordinaires, riches en gaz et situées à la périphérie d'un amas galactique. Leurs caractéristiques particulières apparaissent lorsque l'une d'entre elles plonge à grande vitesse vers le centre de son amas, entrainée dans le puits gravitationnel de ce dernier et dont le centre baigne dans un milieu chaotique et un plasma extrêmement chaud, constituant ce que l'on appelle le milieu intra-amas[4],[5].

Décapage par pression dynamique[modifier | modifier le code]

Lorsqu'une galaxie pénètre puis traverse le milieu intra-amas d'un amas galactique à une vitesse excessivement élevée, une forte pression s'exerce devant elle, agissant à la manière de l'air à l'avant d'une voiture roulant sur une autoroute. Cette pression dynamique[a] exerce peu d'influence sur la composante stellaire de la galaxie concernée, c'est-à-dire ses étoiles (même si dans certains cas, selon l'angle d'inclinaison du disque de la galaxie par rapport au sens de déplacement de celle-ci, les bras spiraux peuvent être déroulés)[6]. Le gaz froid présent dans la galaxie est cependant beaucoup plus soumis par le phénomène qui le comprime vers l'arrière de sa galaxie avant de l'expulser de cette dernière. C'est ainsi que se forme une longue queue de gaz dans le sillage de la galaxie qui se retrouve lentement dépouillée de son milieu interstellaire[4].

Le phénomène peut s'étaler sur une échelle de temps assez variable, pouvant aller de deux à huit milliards d'années. Il est aussi d'autant plus rapide au sein des amas de galaxies massifs[5].

De plus, lors de leur migration, une grande partie des nuages de gaz s'effondrent sur eux-mêmes et forment de nouvelles étoiles, épuisant d'avantage la galaxie en cette matière. Néanmoins, au passage, le taux de formation stellaire est ainsi considérablement amélioré dans le disque, mais aussi dans la queue (avec le gaz expulsé) où se forment alors des grappes d'amas d'étoiles bleues dont la répartition donne l'apparence de tentacules, toujours orientés dans le sens opposé à celui du déplacement de la galaxie hôte[7],[8].

Autres impacts[modifier | modifier le code]

Le décapage par pression dynamique élimine très rapidement l'entièreté du gaz, si bien que la galaxie peut finir par devenir anémique[9]. Aussi, la migration du gaz à travers la galaxie peut facilement amener ce dernier à rencontrer le noyau galactique. Le trou noir supermassif qui s'y trouve peut alors être considérablement alimenté et rendre la galaxie active (AGN)[10],[11].

Selon certains chercheurs, les galaxies méduses seraient en partie responsable de la présence d'amas globulaires et de galaxies naines, initialement formées dans leur queue de gaz, au sein des amas de galaxies. On ne sait cependant si les étoiles constituantes ces objets célestes formés par ces galaxies restent à long terme liées gravitationnellement. En cas contraire, ces dernières finiront tôt ou tard dispersées dans le milieu intergalactique[3].

Répartition[modifier | modifier le code]

MACSJ0138.0-2155, un lointain amas de galaxies ici photographié par le télescope spatial Hubble (HST). Plusieurs galaxies méduses (en bleu) sont visibles sur cette image, reconnaissables à leurs longues chevelures (ou tentacules) de gaz et d'étoiles qui leur offrent une apparence déchiquetée. Les arcs rougeâtres sont eux dus à un effet de lentille gravitationnelle.

La répartition des galaxies méduses dans l'Univers local reste assez hasardeuse, ces dernières pouvant être observées au sein de divers amas situés à diverses distances. Aussi, et outre que dans les amas galactiques, ces galaxies peuvent être néanmoins rencontrées au sein de structures plus petites, comme des groupes de galaxies. Cependant, l'effet de décapage par pression dynamique dans ces milieux est peu efficace et les galaxies méduses qui y sont présentes ont un taux de formation stellaire peu significatif[12].

Quelques amas galactiques proches, comme celui de la Vierge[13] ou de Persée[14], abritent des galaxies méduses.

Liste de galaxies méduses[modifier | modifier le code]

Ci-dessous est présentée une liste non exhaustive de galaxies méduses connues.

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. La pression dynamique peut être résumée en un type particulier de pression exercée sur un corps, lorsque celui-ci se déplace par rapport à un fluide.

Références[modifier | modifier le code]

  1. a et b (en) « Portrait of a galactic jellyfish », sur www.spacetelescope.org (consulté le )
  2. (en) « Spiral Galaxy NGC 4402 », sur www.noirlab.edu (consulté le )
  3. a et b « Une galaxie spirale essaime ses pouponnières d’étoiles », sur Ciel & Espace (consulté le )
  4. a b et c (en) « A jellyfish galaxy adrift », sur www.spacetelescope.org (consulté le )
  5. a et b (en) Eric Rohr, Annalisa Pillepich, Dylan Nelson et Elad Zinger, « Jellyfish galaxies with the IllustrisTNG simulations - when, where, and for how long does ram pressure stripping of cold gas occur? », Monthly Notices of the Royal Astronomical Society, vol. 524,‎ , p. 3502–3525 (ISSN 0035-8711, DOI 10.1093/mnras/stad2101, lire en ligne, consulté le )
  6. (en) Callum Bellhouse, Sean L. McGee, Rory Smith et Bianca M. Poggianti, « GASP XXIX - unwinding the arms of spiral galaxies via ram-pressure stripping », Monthly Notices of the Royal Astronomical Society, vol. 500,‎ , p. 1285–1312 (ISSN 0035-8711, DOI 10.1093/mnras/staa3298, lire en ligne, consulté le )
  7. (en) Benedetta Vulcani, Bianca M. Poggianti, Marco Gullieuszik et Alessia Moretti, « Enhanced Star Formation in Both Disks and Ram-pressure-stripped Tails of GASP Jellyfish Galaxies », The Astrophysical Journal, vol. 866,‎ , p. L25 (ISSN 0004-637X, DOI 10.3847/2041-8213/aae68b, lire en ligne, consulté le )
  8. (en) K. George, B. M. Poggianti, N. Tomičić et J. Postma, « Ultraviolet imaging observations of three jellyfish galaxies: star formation suppression in the centre and ongoing star formation in stripped tails », Monthly Notices of the Royal Astronomical Society, vol. 519,‎ , p. 2426–2437 (ISSN 0035-8711, DOI 10.1093/mnras/stac3593, lire en ligne, consulté le )
  9. (en) Alessandro Boselli et Giuseppe Gavazzi, « Environmental Effects on Late-Type Galaxies in Nearby Clusters », Publications of the Astronomical Society of the Pacific, vol. 118,‎ , p. 517–559 (ISSN 0004-6280, DOI 10.1086/500691, lire en ligne, consulté le )
  10. (en) Angelo Ricarte, Michael Tremmel, Priyamvada Natarajan et Thomas Quinn, « A Link between Ram Pressure Stripping and Active Galactic Nuclei », The Astrophysical Journal, vol. 895,‎ , p. L8 (ISSN 0004-637X, DOI 10.3847/2041-8213/ab9022, lire en ligne, consulté le )
  11. (en) Bianca M. Poggianti, Yara L. Jaffé, Alessia Moretti et Marco Gullieuszik, « Ram-pressure feeding of supermassive black holes », Nature, vol. 548,‎ , p. 304–309 (ISSN 0028-0836, DOI 10.1038/nature23462, lire en ligne, consulté le )
  12. (en) I. D. Roberts, R. J. van Weeren, S. L. McGee et A. Botteon, « LoTSS jellyfish galaxies. II. Ram pressure stripping in groups versus clusters », Astronomy and Astrophysics, vol. 652,‎ , A153 (ISSN 0004-6361, DOI 10.1051/0004-6361/202141118, lire en ligne, consulté le )
  13. a et b (en) Ananda Hota, Ashish Devaraj, Ananta C. Pradhan et C. S. Stalin, « The sharpest ultraviolet view of the star formation in an extreme environment of the nearest Jellyfish Galaxy IC 3418 », Journal of Astrophysics and Astronomy, vol. 42,‎ , p. 86 (ISSN 0250-6335, DOI 10.1007/s12036-021-09764-w, lire en ligne, consulté le )
  14. (en) I. D. Roberts, R. J. van Weeren, R. Timmerman et A. Botteon, « LoTSS jellyfish galaxies. III. The first identification of jellyfish galaxies in the Perseus cluster », Astronomy and Astrophysics, vol. 658,‎ , A44 (ISSN 0004-6361, DOI 10.1051/0004-6361/202142294, lire en ligne, consulté le )
  15. (en-US) « A “Jellyfish” Galaxy Swims Into View of NASA’s Upcoming Webb Telescope - NASA », (consulté le )

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Articles connexes[modifier | modifier le code]