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Le corridor de sécurité (anglais : « move over law ») se définit par 2 manœuvres de sécurité routière ayant pour objectif de lutter contre les nombreux accidents dont sont victimes les intervenants en bords de route et les usagers en détresse.
Elle désigne une barrière virtuelle pour libérer un espace de sécurité que tout conducteur doit respecter à l’approche des intervenants en bord de route ou d’un véhicule ayant actionné ses feux de détresse et ce, sur l’ensemble du domaine routier.
Le Code de la Route préconise ainsi de ralentir et de s’écarter du danger.
La non observation de ces manœuvres est passible d’amendes de 4ème classe.
Historiquement, l’origine de ce corridor de sécurité se trouve aux États-Unis, nommé « Move over Law » et est aussi pratiqué dans quelques provinces du Canada, et depuis septembre 2018, en France.
Historique
[modifier | modifier le code]Aux États-Unis
[modifier | modifier le code]C’est en 1996, aux États-Unis en Caroline du Sud, que fut adoptée une loi pour protéger les intervenants d’urgence suite au décès d’un ambulancier, fauché alors qu’il portait secours à une victime. Il a été tenu responsable, ce qui a conduit à un travail de réflexion visant à créer une loi pour protéger ces intervenants. Cette loi fut révisée 2002 pour insérer la notion de « Move over » obligeant les conducteurs, s’ils le peuvent et en toute sécurité, à s’écarter d’une voie de tout véhicule de police ou autre véhicule d’urgence (SC 56-5-1538)[1].
Aux États-Unis, progressivement les cinquante États adoptent cette loi du « Move Over », appliquant des sanctions différentes défini par la loi locale.
Elles peuvent aller d’une amende de 35 $ à 500 $, à 3 points en moins d’inaptitude, à des travaux communautaires de 7 jours, une suspension du permis de conduire de 90 jours à 1 an, voire à des peines d’emprisonnement si le non-respect du « Move Over » à entrainer des blessures sur un professionnel de la route [2].
A ce jour, seul le District de Columbia n’a pas encore adopté la loi sur le « Move over ».
Au Canada
[modifier | modifier le code]En 2011, le décès d’un policier québécois happé par un camion[3] et la pétition d’un ambulancier[4] ont incités le Québec à mettre en place la loi du « Move Over » renommée : Corridor de sécurité. Contrairement au « Move over » américain, le corridor de sécurité québécois a élargis le champ des bénéficiaires. En effet, en plus d’imposer aux conducteurs de ralentir à une vitesse prudente et raisonnable et d’effectuer un changement de voie s’il est possible de le faire, elle inclue les dépanneuses et les véhicules de patrouille des routes aux véhicules d’urgence déjà concernés.
En vigueur depuis le 5 août 2012, tout manquement au corridor de sécurité est passible d’un passage au Tribunal (Alberta) jusqu’à une amende pouvant s’élever à 2.000 $ (Ontario), de 6 points en moins d’inaptitude (Alberta) voire de peine d’emprisonnement de 6 mois en cas de récidive (Ontario)[5].
Au Canada, les différentes provinces valident successivement la loi sur le corridor de sécurité. A ce jour, seule la province de Terre-Neuve-et-Labrador n’a pas adopté le corridor de sécurité ainsi que les territoires fédéraux de Nunavut et Yukon.
En France
[modifier | modifier le code]En France, le décès d’un dépanneur en 2016[6] a suscité une vive émotion de la profession et c’est l'Association Fier d'être dépanneur qui a décidé de sensibiliser le législateur d'abord par une pétition[7] sur la problématique de la sécurité des intervenants en bord des routes, en proposant le principe du corridor de sécurité à l’instar du Move Over américain et du corridor de sécurité canadien.
C’est le 17 septembre 2018 que le décret d'application n°2018-795[8] de la Délégation à la sécurité routière près du Ministère de l’Intérieur instaurera en France, les manœuvres du corridor de sécurité.
En plus de bénéficier aux intervenants professionnels en bord des routes, il l’élargit aux non professionnels de la route, en le faisant bénéficier à tout véhicule ayant actionné ses feux de détresse.
Et en Europe
[modifier | modifier le code]A l'heure actuelle, seule la France dispose de cette loi sur le corridor de sécurité, mais l’association Fier d'être dépanneur a également entrepris de la faire étendre à l’ensemble des Etats membres européen. La problématique étant identique dans toute l'Europe.
Application en France
[modifier | modifier le code]Les manœuvres
[modifier | modifier le code]Au nombre de deux, elles se résument toujours à ralentir et à s’écarter pour laisser une voie libre entre le danger et son véhicule, ou si cela n’est pas possible de s’éloigner le plus possible du danger.
Un nouvel article au R.412-11-1 du Code de la Route qui prévoit une obligation pour tout conducteur de s’écarter, en changeant de voie ou en demeurant dans sa voie, à l’approche d’un véhicule immobilisé ou en intervention faisant usage de feux spéciaux ou de feux de détresse sur la route ou en bord de route.
Le non-respect de cette obligation est sanctionné d’une amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe.
Par ailleurs, l’article R.413-17 du Code de la Route du même code a été modifié pour ajouter les nouvelles catégories d’usagers à l’approche desquelles la vitesse doit être réduite.
Le non-respect de cette obligation est punissable, sans interception du véhicule d’une amende prévue pour les contraventions de quatrième classe.
Ces deux infractions sont cumulatives.
Les bénéficiaires
[modifier | modifier le code]La loi sur le corridor de sécurité a été instaurée pour renforcer la sécurité des personnels en intervention mais également l’usager en détresse.
Ainsi le corridor de sécurité définit 3 catégories :
- Selon l’article R.313-27 du Code de la Route, il s’agit des véhicules d'intérêt général prioritaire ou bénéficiant de facilités de passage définis par l’article R.311-1 (alinéa 6.5 et 6.6) du Code de la Route.
- Selon l’article R.313-28 du Code de la Route, il s’agit de tout véhicule à progression lente ou encombrant dont la liste est fixée par le ministère chargé des transports.
- Enfin, la loi française, contrairement aux lois américaines et canadiennes sur le corridor de sécurité a inclus tout autre véhicule faisant usage de ses feux de détresse.
En résumé (liste non exhaustive, se référer aux articles complets pré-cités), il s’agit des véhicules de services de police, de gendarmerie, de lutte contre l'incendie, d’intervention des unités mobiles hospitalières. Sur autoroute ou routes à deux chaussées séparées : des véhicules d’intervention des services gestionnaires de ces voies : patrouilleur autoroutier ou des agent des DIR ainsi que des véhicules équipés en atelier mobile permettant le dépannage des véhicules sur la route, et les véhicules remorqueurs ainsi que tout usager ayant fait usage de ses feux de détresse.
La verbalisation
[modifier | modifier le code]La loi prévoit deux verbalisations distinctes suivantes la ou les manœuvre(s) non respectée(s).
- S'il n'y a pas eu d'écartement face au danger :
Le code NATINF 32934 pour « Dépassement irrégulier d’un véhicule immobilisé ou circulant à faible allure sur un accotement, une bande d’arrêt d’urgence ou une voie de circulation » définie par les articles R.412-11-1, R.413-17 et R.414-4 du Code de la Route et est réprimé par l’article R.412-11-1 alinéa 5 d’une amende de quatrième classe, sans point de retrait.
- S'il n'y a pas de ralentissement face au danger :
Le code NATINF 213 pour « Conduite d’un véhicule à une vitesse excessive eu égard aux circonstances » définie par les articles R.413-17, L.121-3 et R.121-6-8° du Code de la Route et est réprimé par l’article R.413-17 §IV d’une amende de quatrième classe, sans point de retrait.
Cette infraction fait partie des infractions constatables sans interception du véhicule.
Problématique de sécurité routière
[modifier | modifier le code]En 2017, c’est 185 véhicules d’intervention des sociétés d’autoroutes qui ont été heurtés[9], c’est donc 1 accident matériel tous les 2 jours qui se produit sur le réseau autoroutier en France.
Ce chiffre est sous-estimé car il ne prend pas en compte les heurts de fourgons des voies non concédées (réseau DIR) dont les statistiques ne sont pas connues.
Les heurts corporels sont aussi à dénombrer ; en 2017, 15 agents autoroutiers ont été blessés dans ces heurts, et 1 a perdu la vie sur l’autoroute A1[9]. En 2016, c’est un dépanneur âgé de 24 ans qui a perdu la vie en intervention sur l’autoroute A1, fauché par un poids-lourd[6].
Le baromètre de la conduite responsable de la fondation Vinci publié en février 2018[10] déplore encore cette année des comportements dangereux des usagers toujours, en augmentation parmi lesquels :
- 91% des usagers avouent dépasser les limitations de vitesse,
- 75% disent ne pas toujours respecter les distances de sécurité,
- 58% avouent ne pas ralentir à l’approche d’une zone de travaux,
- 26% avouent avoir déjà empiété sur la bande d’arrêt d’urgence au le bas-côté.
Le constat est identique de l’Observatoire Sanef des comportements sur autoroutes[11] publiés en 2017 qui confirment que 75% des usagers sont en excès de vitesse dans une zone de travaux avec une voie neutralisée et donc une limitation abaissée à 110 km/h.
De nombreuses campagnes de sensibilisation et de prévention ont été organisées par ces sociétés.
Le corridor de sécurité fut instauré en France dans ce contexte, et où le nombre de personnes tuées sur les routes était en hausse pour la troisième année consécutive – ce qui n’était plus arrivé depuis 45 ans[12].
En 2018, le bilan humain fût très lourd, puisqu’une policière gardien de la paix[13] et un gendarme[14] ont été fauchés, ainsi qu’un agent de la DIR[15] et un père de famille[16]. Un pompier[17] fut blessé et 2 agents autoroutiers.
Le risque d’être happé pour les intervenants en bord des routes, ou les usagers en détresse devenus piéton -population d’usagers dites vulnérables et fragiles- n’est pas négligeable et a déjà fait des victimes[18]
Ce risque est bien souvent sous-estimé par les conducteurs, qui n’y pensent pas.
Campagne d'information et de sensibilisation
[modifier | modifier le code]En France
[modifier | modifier le code]L’Association Fier d’être Dépanneur à l’initiative du Corridor de sécurité en France diffuse l'information sur les réseaux sociaux, auprès de ses membres dépanneurs/remorqueurs.
De plus, le Ministère chargé des Transports à organiser une semaine de sensibilisation des agents des routes du 15 au 21 octobre 2018[19] sous le hashtag #EcarterLeDanger[20] sur les réseaux sociaux.
Il relate ce constat : « Entre 2014 et 2017, les accidents sur zones de chantier ou d’intervention ont augmenté de 34% sur le réseau routier national. Sur ces 4 années, on déplore 120 blessés et 3 tués parmi les agents des routes »[19].
Cette campagne avait 2 axes : « sensibiliser » et « responsabiliser » en invitant l’usager à se mettre à la place des agents des routes. C’est ainsi que des films en réalité virtuelle à 360° ont été diffusés pour faire ressentir physiquement le danger en montrant précisément à combien de centimètre les usagers frôlent les agents des routes, par exemple :
« vous êtes passé à ça de Karine << 48 cm >> ».
La responsabilisation a été portée sur l’ensemble des usagers des routes : particuliers et professionnels précisant qu’« à chaque trajet il est très probable de rencontrer des agents des routes ou son véhicule d’intervention »[19].
Durant cette semaine, des campagnes de sensibilisation ont également été organisées en région notamment dans le Pas de Calais où un agent des routes a été tué en mars 2017[21]. Un spot radio a été diffusé sur les stations autoroutes Autoroute FM ainsi que sur les stations généralistes ou musicales. Des affiches ont été présentées.
En novembre 2018, lors de la journée de la sécurité du personnel en intervention sur les voies, et en partenariat avec l’ASFA (Association des Sociétés Françaises d’Autoroutes) et une école de l’AFT (Association pour le développement de la Formation professionnelle dans les Transports et la logistique) a organisé un crash test pédagogique destiné à sensibiliser 150 élèves en filière conduite routière d’Ile de France[22].
Aux États-Unis et au Canada
[modifier | modifier le code]Aux États-Unis chaque État a individuellement adopté le Move Over, dès lors un dispositif d’information par panneaux d’affichage a été mis en place à l’entrée de certains États désireux informer les usagers. Le Canada utilise le même procédé dans la mesure où chaque provinces adoptent uns à uns le corridor de sécurité.
Par ailleurs, aux États-Unis, chaque 3ème samedi d’octobre est organisé un défilé destiné à informer ou rappeler le principe du Move Over.
Enfin, suite au décès d’un dépanneur, l’association Spirit Ride organise un cortège de villes en villes, où un cercueil de cérémonie décoré et posé sur le plateau d’une dépanneuse tend à attirer l’attention des médias locaux pour ainsi sensibiliser les téléspectateurs ou les lecteurs des journaux locaux.
La SAAQ (Société de l’Assurance Automobile au Québec) en partenariat avec le gouvernement du Québec s’investit également en proposant des vidéos pour expliquer les différentes manœuvres du corridor de sécurité, ainsi que des visuels.
Une campagne de sensibilisation est également organisée sur les réseaux sociaux où plusieurs policiers de la GRC « ont fait part de leurs réflexions au sujet des automobilistes passant trop près d'eux pendant qu'ils travaillent dans l'accotement et sur l'importance de pouvoir faire leur travail en toute sécurité »[23].
Différence avec le couloir de sécurité
[modifier | modifier le code]Lorsque le corridor de sécurité fut instauré en France, certains articles de presse ont fait l’amalgame avec le couloir de sécurité, propageant ainsi une information erronée.
Le couloir de sécurité est obligatoire en Allemagne appelé Rettungsgasse, en République tchèque, en Autriche, au Luxembourg et en Hongrie.
Il consiste à laisser une voie entre 2 files, lors des gros ralentissement ou d’arrêt de la circulation afin de permettre le passage plus aisé et surtout plus rapidement des véhicules d’interventions (secours, dépannages…).
En France, c’est la bande d’arrêt d’urgence qui est par priorité destinée à cet effet, et aucune loi pour l’heure, n’oblige les conducteurs à créer cette voie d’accès aux intervenants.
Notes et références
[modifier | modifier le code]- https://en.wikipedia.org/wiki/Move_over_law
- répertoire des différentes lois Move Over en vigueur États américains, CAA QUEBEC
- « Mort en service Un policier de Bromont happé par un camion en bordure de la route 139 », sur Le Journal de Montreal, .
- « Un Chamblyen à l'origine d'une pétition pour éviter des décès tragiques comme Vincent Roy », sur Chambly Express, .
- répertoire des différentes lois Move Over en vigueur Provinces et territoires du Canada, CAA QUEBEC
- « Phalempin : un dépanneur meurt fauché sur l'A1 », sur France 3 Nord Pas-de-Calais, .
- Pétition pour le corridor de sécurité Change.org
- Décret d'application n°2018-795, Legifrance
- Baromètre Sécurité du personnel en intervention, Bilan 2017, ASFA
- 8ème Édition Baromètre de la conduite responsable, Fondation Vinci
- Observatoire des comportements sur autoroutes 2017, Sanef
- 7ème Édition Baromètre de la conduite responsable, Fondation Vinci
- « Tarn : une policière meurt fauchée par une voiture », sur Le Parisien, .
- « Gonesse : un gendarme en service tué en sécurisant un accident », sur RTL, .
- « Calvados : un agent des routes percuté mortellement sur l'A84 », sur France3 Normandie, .
- « Bas-Rhin: un père meurt percuté par un véhicule alors qu'il changeait sa roue », sur France Soir, .
- « A13 Un pompier de Paris gravement blessé dans un sur-accident », sur Pompier Actu, .
- « Un homme décède après avoir été happé par un camion sur la bande d'arrêt d'urgence », sur DH.be, .
- Semaine de la sécurité des agents des routes du 15 au 21 octobre 2018, 15 octobre 2018, DIR EST
- Communiqué de presse - Sécurité des agents des routes : Elisabeth Borne lance la campagne « A vous aussi d’écarter le danger » 15 au 21 octobre 2018
- « RŒUX Le routier qui a fauché et tué un agent SANEF sur l’A1 invoque des quintes de toux », sur La Voix du Nord, .
- « Vidéo : spectaculaire accident camion-fourgon dans un lycée », sur France Routes, .
- « Véhicules prioritaires et corridor de sécurité », sur Infoweekend.ca, .
Annexes
[modifier | modifier le code]Liens externes
[modifier | modifier le code]- Site de l'Association Fier d'être Dépanneur
- Site de l'ASFA Association des Sociétés Françaises d'Autoroute
- Transports du Québec © Gouvernement du Québec, 2019
- {en} Move over laws
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