Utilisateur:Logret de Carlin/Opération X
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L’opération X désigne l’organisation durant la Guerre d’Indochine d’un trafic de drogues par l’armée française pour financer des opérations spéciales.
Contexte[modifier | modifier le code]
Le développement de la culture du pavot en Asie[modifier | modifier le code]
Dès le XVIIIe siècle, l'opium fait l'objet d'une utilisation importante en Chine. Le phénomène se poursuit durant la période de présence européenne et, au XIXe siècle, le trafic est à l'origine des guerres de l'opium. En 1880, l'opium assure 14 % du budget du Raj britannique en Inde. L'opium est alors un produit légal ; le marché chinois s'ouvre après la Seconde guerre de l'opium (1856-1860).
Le Triangle d’Or[modifier | modifier le code]
Le triangle d’or désigne une aire montagneuse aux frontières de la Birmanie, de la Thaïlande et du Laos. Cet espace est l’une des régions principales de la culture du pavot et de la production de ses dérivés : opium, morphine et héroïne. Il occupe une position spécifique au XXe siècle, dans un contexte de guerre entre les deux blocs, au vu de son faible développement économique et de sa faible intégration aux États et idéologies qui se disputent l’influence de la région. Elle existe principalement par son rôle dans le trafic de drogues[1].
La culture du pavot est, jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, essentiellement réalisée dans les États shan de Birmanie, où l’influence britannique est faible et ne permet pas de contrôler efficacement ce territoire. Elle se développe au Laos et dans le nord du Tonkin durant et après la guerre, favorisée par l’administration coloniale. Le monopole de l"opium est aboli en 1946,
Les terrains situés à plus de mille mètres d’altitude, organisés par l’homme en étagement, est favorable à la culture du pavot.
La guerre d’Indochine[modifier | modifier le code]
Après la Seconde Guerre mondiale, l’ancien résistant Maurice Belleux est affecté à la Direction générale des Études et Recherches (DGER) et dirige la section des études[2] du Service de documentation extérieure et de contre-espionnage (SDECE)[3]. Il est envoyé en mission en Indochine alors en guerre pour réorganiser les services. Il arrive à Saïgon en et dirige durant plus de six ans et demi de plus le SDECE sur place[4],[5],[2].
C’est dans ce contexte que le SDECE met en place le financement d’actions clandestines avec l’argent du trafic de drogue[6],[7].
Le trafic permet de soutenir les maquis anticommunistes tout en asséchant une source importante de financement des combattants communistes : un rapport des services de renseignement estime en 1948 que le Vietminh contrôle 80 % de la production d’opium[8].
C'est également une source permettant aux services secrets de financer des opérations et d'acheter des informations[8].
Développement[modifier | modifier le code]
L’opération X consiste à acheter aux Hmong leur production de pavot pour l’acheminer jusqu’au Laos. De là, grâce à plusieurs canaux de distribution, la drogue est redistribuée avec l’appui des Binh Xuyen[9],[10],[2],[2],[11]. Les Hmong sont considérés comme une population rurale agricole montagnarde hostile par nature aux habitants plus riches et d’ethnies différentes des plaines. Les Thaïs fournissent également de la drogue[8].
Le Groupement de commandos mixtes aéroportés (GCMA) est chargé d’organiser sur le terrain l’opération. Pour les Mhongs, l’opération est guidée par Touby Ly Phoung.
Selon le colonel Roger Trinquier, qui a succédé au lieutenant-colonel Grall et participe à l'organisation du trafic[8], il n’y avait pas plus de 2 à 3 livraisons par an. Le responsable des actions de guérilla affirme aussi que toute autre forme de trafic est interdite[12].
Les militaires utilisent un avion bimoteur Douglas DC-3. Le 18 janvier 1953, un avion part de la plaine des Jarres, au Laos, à destination de Cap-Saint-Jacques, dans le sud du Vietnam, avec à son bord 1,5 tonnes d’opium. La drogue est dispatchée au sein du Centre d’entrainement spécialisé (CES) : près de 500 kilos sont acheminés au « Grand Monde », une maison de jeu du quartier chinois de Saïgon tenue par les Binh Xuyen, le reste dans un entrepôt du GCMA à Saïgon[8].
Si l’opération est secrète, elle est connue des principaux cadres militaires, tels que le commandant en chef en Indochine, Raoul Salan. Le gouvernement français, via le haut-commissaire en Indochine Jean Letourneau, est informé de son existence après le refus d’un officier trésorier de valider de faux documents comptables. Cela conduit à la saisie le 1er mars de la marchandise, mais le trafic se poursuit par la suite[13].
Postérité[modifier | modifier le code]
Les militaires, abandonnés par le pouvoir civil, sont contraints à ce type d'action, parmi d'autres illégales pour agir : fausse monnaie, trafic des piastres ou encore avec l’argent des BMC[8].
Leur exemple sera imité. L’agence centrale de renseignement américains, la CIA, est accusée d’avoir organisée dès 1949 un trafic de drogues en Asie dans la lutte contre l’influence communiste durant la Guerre de Corée. La pratique se serait généralisée durant la Guerre du Vietnam puis utilisée sur d’autres théâtres d’intervention des services secrets américains[14].
Notes et références[modifier | modifier le code]
Bibliographie[modifier | modifier le code]
- Christian Bachmann et Anne Coppel, La drogue dans le monde : Hier et aujourd'hui, A. Michel, 1991, ©1989, 692 p. (ISBN 2-02-012418-1 et 978-2-02-012418-8, OCLC 25052080, lire en ligne)Paru en 1989 sous le titre Le Dragon domestique. Deux siècles de relations étranges entre l'Occident et la drogue
- Michel Bruneau, « La drogue en Asie du sud-est. Une analyse géographique du Triangle d'Or », Hérodote (revue), 2e trimestre 1981, p. 116-145 (lire en ligne)
- Jean-Marc Lepage, Les services secrets en Indochine, Nouveau monde éditions, , 520 p. (ISBN 9782369420248, lire en ligne) Jean-Marc Le Page (préf. Maurice Vaïsse), Les services secrets en Indochine, [Paris], Nouveau monde éditions, , 528 p. (ISBN 978-2-36942-003-3 et 2-36942-003-0, OCLC 893787025, lire en ligne)
- Alfred W. McCoy, Marseille sur Héroïne, les beaux jours de la French Connection (1945-1975), L’Esprit Frappeur,
- Jean-Dominique Merchet, « Quand les services français trafiquaient l’opium… », sur web.archive.org, Blog Secret Défense, (consulté le ) publié précédemment dans Guerres et Histoire
- Roger Trinquier, Les maquis d'Indochine, 1952-1954 - Les missions spéciales du Service Action, Édition Albatros, Société de production littéraire, , 288 p.
Notes[modifier | modifier le code]
- Michel Bruneau 1981, p. 116-117.
- Jean-Marc Lepage 2012.
- Iznard 2002.
- Journoud 2010.
- Catillon 2012.
- Histoire et géopolitique du trafic des opiacés en Asie du Sud-Est 2017.
- « Interview with Alfred McCoy », sur bearcave.com, (consulté le )
- Merchet 2013.
- Bachmann 1991.
- Follorou et Nouzille 2009.
- (en) 2LT Scott Bennett 11th Psychological Operations Battalion, SHELL GAME: A Military Whistleblowing Report to the U.S. Congress Exposing the Betrayal and Cover-Up by the U.S. Government of the Union Bank of Switzerland-Terrorist Threat Finance Connection to Booz Allen Hamilton and U.S. Central Command, Lulu.com (ISBN 9781312002609, lire en ligne)
- Trinquier 1976.
- Lepage 2012.
- Collins 1993.
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