Utilisateur:HARauCégepTR/L'Apothéose de Christophe Colomb

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L’Apothéose de Christophe Colomb, peinture allégorique à caractère historique réalisée par Napoléon Bourassa[1] entre 1905 et 1912, s'inscrit dans le courant de l’art académique. Elle a été peinte à l’aide d’huile sur une toile rectangulaire en orientation paysage et est présentement exposée au MNBAQ.

Description[modifier | modifier le code]

L’Apothéose de Christophe Colomb est une œuvre aux dimensions de 458,3 × 769,8 centimètres qui se caractérise par une grande linéarité autant verticalement qu’horizontalement. En effet, on distingue clairement deux lignes horizontales principales. Celles-ci séparent la création en deux registres distincts. Les lignes verticales sont présentes à travers les vêtements, la droiture des personnages et les colonnes du temple. Seul le nuage fait exception à cette règle de linéarité. Celui-ci contribue d’ailleurs au mouvement qui est principalement généré dans les coins inférieurs gauche et droit. Tandis que le monument inspire la stabilité par l’entremise de sa rigidité, sa linéarité et sa grandeur, l’ajout des personnages vient perturber cette sérénité. En ce sens, à gauche, des personnages tombent en étant chassés de la structure alors qu’à droite, des personnages montent vers le temple. Le cadrage, quant à lui, est rapproché, car tout l’espace est occupé par les personnages et le bâtiment tandis que l’arrière-plan n’est pratiquement pas visible. Les expressions des personnages sont neutres, sauf pour ceux qui tombent.

Pour continuer, une grande part de l’œuvre est terminée. Or, en bas à gauche, l’œuvre n’est qu’à la seconde étape de création. Cette étape constitue le fait d’utiliser la sanguine pour réaliser les ombrages. C’est d’ailleurs ce qui donne une teinte orangée. À l’inverse, le gris-vert est ajoutée pour donner la coloration finale monochrome. En haut à gauche, l’œuvre en est à la première étape de création. Les coups de crayons (?) initiaux sont perceptibles. Un dégradé de couleur est aussi présent. En effet, le bas de l’œuvre est plus sombre et le haut est plus clair.

Finalement, cette œuvre à caractère politique et historique présente les grands hommes de l’histoire de l’Amérique. On les reconnaît par l’exactitude et la précision de leurs traits faciaux. L’œuvre représente une cérémonie de couronnement et le premier à recevoir cet hommage est Christophe Colomb. On devine d’ailleurs, grâce au titre de l’œuvre, que cet événement est le centre d’intérêt de la création.

Analyse de l'œuvre[modifier | modifier le code]

Le travail de Bourassa s’inscrit dans le courant de l’art académique, un mouvement caractérisé par des représentations allégoriques, religieuses et historiques. Il est également possible de savoir que cette œuvre s’inscrit dans ce mouvement en raison de la grandeur de celle-ci. La toile dégage une prestance et un caractère majestueux non seulement en raison de ses dimensions, mais aussi par les grands personnages qui y sont représentés. D’ailleurs, deux grandes caractéristiques de l'œuvre, à savoir son ordre symétrique ainsi que son harmonie linéaire, procure à la toile une ambiance de froideur. D’ailleurs, celle-ci est somme toute statique. Toutefois, les détracteurs de Colomb, situés à gauche, font exception à cette règle. Ces personnages aux visages crispés tombent dans les abîmes sans fond de l’oubli. Un contraste entre le mouvement et l’immobilité, mais aussi entre le calme et la terreur est ainsi créé.

Cette peinture à caractères historique et allégorique se veut aussi être un témoignage du passé glorieux des Occidentaux. Plus précisément, en créant cette scène, Bourassa a voulu rendre hommage à certains des plus grands hommes de l’Amérique en plus de faire état des progressions scientifiques, religieuses et politiques.[2]

Colomb est accueilli par les figures allégoriques de la Gloire et de la Religion sur le Temple de l’immortalité afin que ce dernier soit élevé au rang de divinité. Le temple en question, vu en contre-plongée, est le seul élément pictural contribuant à générer un effet de profondeur. De plus, les femmes représentés symbolisent généralement des vertus. Ces figures allégoriques servent de transition entre les personnages. À ce titre, la Justice, portant une balance, la Vérité, affublée d’un miroir, la Renommée et la Vengeance, se débarrassant toutes deux des martyrs, sont illustrées sur cette œuvre. De surcroît, les trois vertus « américaines », soit la Prudence, la Force et la Patience, se trouvent au milieu du tableau. En plus des allégories qui poussent les observateurs à comprendre que le lieu et la scène présentés sont fictifs, les ailes des personnages ainsi que le nuage nourrissent aussi cette idée.

Motifs de réalisation[modifier | modifier le code]

Pour créer son œuvre, Napoléon Bourassa est influencé par la vision prônée au XVIIe siècle par L'Académie royale de peinture et de sculpture en France. Celle-ci préférait la peinture d'histoire aux autres genres artistiques. Après avoir passé trois ans à perfectionner son art en Europe, l’artiste âgé de 32 ans désire réaliser une grande œuvre à caractère historique et allégorique. Il en fait d’ailleurs mention à Louis-Joseph Papineau, son beau-père. À cette époque, Bourassa a l’espoir de décorer un mur du Cabinet de Lecture paroissiale de Montréal. Toutefois, cet espoir ne s’est jamais matérialisé. Peu de temps après, le journal Le Canadien propose au gouvernement d’Ottawa de rémunérer l’artiste afin que celui-ci produise une pièce destinée à décorer le Parlement. Bien que suggestion ravive les espoirs de Bourassa, l’histoire reste lettre morte. Joseph-Charles Taché convainc tout de même le peintre d’amorcer la réalisation de l’œuvre pour l’envoyer à Paris, à l’occasion de l’Exposition universelle de 1867. Cette première ébauche de l’œuvre actuelle est réalisée sur un carton en trop peu de temps pour être parfaitement à point, comme l’indique Bourassa :

« Je suis enfin au bout de ma besogne, et vous jugez si j'en suis aise! J'ai livré mon carton depuis 6 jours, et je vois à mon grand regret que j'aurais pu le garder encore [quelques jours]; cela m'aurait fait un grand bien de le garder tout ce temps là, j'aurais pu retoucher bien des petites choses. Vous comprenez qu'il était bien juste fini. » Lettre de Bourassa à Théophile Hamel[3]

Cette réalisation est couverte d’éloges par la presse francophone et anglophone, lui prêtant une grande chance de se démarquer à Paris. Or, il n’a pas pu profiter de cette opportunité. Son carton lui est retourné en deux morceaux et en mauvais état. Aujourd’hui, 32 fragments du carton initial sont conservés au MNBAQ. En 1877 s’amorce la construction de l’Assemblée nationale du Québec. Bourassa propose un devis pour la décoration du bâtiment. Il évalue son travail au coût de 42 000 dollars canadiens, dont 10 000 seulement pour L’Apothéose de Christophe Colomb. Le projet reçoit un accueil favorable, mais avorte, encore une fois, pour des raisons pécuniaires. En 1905, Bourassa, alors âgé de 78 ans, s’installe à Montréal et décide de peindre l’œuvre dont il a toujours rêvé. Il arrête ce travail colossal en 1911, alors inachevé, pour le proposer au gouvernement fédéral pour la somme de 10 000 dollars. Une fois de plus, la proposition est rejetée, l’œuvre étant jugée hors de son temps. Une maladie pousse l’artiste à cesser définitivement son travail en 1912 et cause son décès quatre ans plus tard. La toile se promène à gauche et à droite jusqu’en 1965 où elle est restituée au MNBAQ, mais elle sera seulement dévoilée en 1983 après sa restauration dans le cadre des célébration du cinquantenaire du Musée du Québec.

Processus de création[modifier | modifier le code]

Avant d’user de son talent de créateur, Napoléon Bourassa consulte à profusion des représentations des personnages figurants sur sa toile afin d’avoir un modèle pour bien les représenter. Il analyse aussi bon nombre d’œuvres afin de s’en inspirer. À ce titre, Bourassa étudie diverses œuvres telles que La Paix, la guerre, le commerce, de Théodore Chassériau, Les Artistes de tous les âges, de Paul Delaroche, ainsi que Triomphe de la religion dans l’art, de Johann Friedrich Overbeck. Toutefois, l’idée de base de sa toile est trouvée grâce à deux œuvres respectivement réalisées par Raphaël et Ingres, à savoir L'École d'Athènes et L'Apothéose d'Homère[4], puisque celles-ci présentent chacune un regroupement fictif de figures historiques d’époques diverses.

Par la suite, Bourassa a réalisé un nombre impressionnant de dessins préparatoires avant de s’attaquer au nerf de la guerre. Il s’est servi de ses représentations pour les calquer sur sa toile et utilisant notamment la technique du poncif[5]. Bourassa s’est également servi de la sanguine, du pastel et de l’huile.

Critiques de l'œuvre[modifier | modifier le code]

En 1912, le Musée des beaux-arts du Canada d’Ottawa refuse d’acheter la réalisation de Bourassa. Les raisons évoquées pour justifier ce refus concernent l’état inachevé, la taille et le fait que celle-ci soit davantage une décoration murale qu’un tableau de musée. Il est jugé que la valeur artistique n’est pas suffisante. On reproche d'ailleurs à l’œuvre son manque de modernité. De plus, en 1974, Roger Le Moine écrit que l’œuvre est grandiose, mais comporte tout de même certaines lacunes[6]. Selon lui, il semble y avoir un manque de cohésion entre les personnages. Il trouve que les attitudes des personnages sont exagérées et figées. Bien que le talent de Bourassa n’a pas été admiré à sa juste valeur de son vivant, il l’est de nos jours. En effet, maintenant que l’œuvre peut être admirée au MNBAQ, le public ne tarit pas d’éloge à l’égard de la création[7],[8].

Liste des personnages[modifier | modifier le code]

1. Christophe Colomb

2. Le génie de la marine (figure allégorique)

3. La gloire (figure allégorique)

4. La religion (ou l’immortalité)

5. Déesse (figure allégorique)

6. Déesse (figure allégorique)

7. Déesse (figure allégorique)

8. Déesse (figure allégorique)

9. La géographie (ou l’astronomie)

10. Plutarque

11. Galilée

12. Nicolas Copernic

13. Dante Alighieri

14. John Milton

15. Pierre Corneille

16. Jacques-Bénigne Bossuet

17. Moïse

18. Numa Pompilius

19. Père Juan Perez de Marchena

20. Isabelle 1ère, dite La Catholique

21. Phidias

22. Michel-Ange

23. Démosthène

24. Cicéron

25. Socrate

26. Platon

27. Archimède

28. Gutenberg

29. Léonard de Vinci

30. Raphaël

31. Joseph Haydn

32. Améric Vespuce

33. Génie (figure allégorique)

34. Génie (figure allégorique)

35. La constance (ou la patiente) (figure allégorique)

36. La force (figure allégorique)

37. La vigilance (ou la prudence) (figure allégorique)

38. La vérité (figure allégorique)

39. La justice (figure allégorique)

40. La vengeance (figure allégorique)

41. La renommée (figure allégorique)

42. Francisco de Bobadilla

43. Juan Aguado

44. Bernardo Buïl (ou Boïl)

45. Juan Rodriguez de Fonseca

46. Francisco Roldán

47. Mosén Pedro Margarite

48. Bartolomé de las Casas

49. Autochtone du Mexique

50. Autochtone du Mexique

51. Jacques Cartier

52. Samuel de Champlain

53. William Penn

54. M. François de Laval

55. Amérindien du Canada

56. Le Marquis de Montcalm

57. James Wolfe

58. Le Duc François-Gaston de Lévis

59. George Washington

60. Le Marquis de La Fayette

61. Samuel Morse

62. Robert Fulton

63. Benjamin Franklin

64. William-Lyon Mackenzie

65. Louis-Joseph Papineau

66. Sir Louis-Hippolyte La Fontaine

67. Robert Baldwin

68. Sir George-Étienne Cartier

69. Sir John A. MacDonald


Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. (en) Raymond Vézina, « BOURASSA, NAPOLÉON », sur Dictionary of Canadian Biography, (consulté le )
  2. Anne-Élizabeth Vallée, Mélanges sur l'art au Québec historique (XVIIe - XIXe siècles), Québec, Centre de recherche interuniversitaire sur la littérature et la culture québécoise, Cahiers du centre de recherche en civilisation canadienne-française, L'Apothéose de Christophe Colomb de Napoléon Bourassa et l'essor de l'intérêt pour l'histoire et la commémoration au Québec, pp.173-194
  3. Mario Béland, NAPOLÉON BOURASSA. LA QUÊTE DE L’IDÉAL, Québec, Musée national des beaux-arts du Québec, , p. 214
  4. MNBAQ, « MARTINET, ACHILLE-LOUIS, D'APRÈS JEAN-AUGUSTE-DOMINIQUE INGRES », sur MNBAQ.org (consulté en )
  5. MNBAQ, « BOURASSA, NAPOLÉON Tête de Michel-Ange. Fragment et poncif pour « L'Apothéose de Christophe Colomb » », sur mnbaq.org (consulté en )
  6. Roger Le Moine, Napoléon Bourassa, sa vie, son oeuvre, Québec, Université Laval, , 376 p.
  7. Paul Bennett, « Expositions - La redécouverte d'un grand seigneur de l'art québécois : Napoléon Bourassa », Le Devoir,‎ (lire en ligne)
  8. Régis Tremblay, « Napoléon Bourassa: un géant sort de l’ombre », Le Soleil,‎ ([https://www.lesoleil.com/archives/napoleon-bourassa-un-geant-sort-de-lombre-dc76397d8eb7879085 98d5c3ee40c6b5 lire en ligne])