Syndrome malin des neuroleptiques

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Le syndrome malin des neuroleptiques (SMN) est un syndrome rare faisant le plus souvent suite à la prise d'un traitement de neuroleptique. Non traité à temps, le syndrome peut causer des séquelles neurologiques permanentes et aboutit au décès du patient entre 5 % et 22 % des cas. Le syndrome malin des neuroleptiques survient généralement une à deux semaines après le début du traitement et se caractérise par une rigidité musculaire, une hyperthermie, une perturbation du système nerveux autonome, une altération de l'état mental. À cause de l'imprédictibilité du SMN, le traitement peut être très variable mais souvent, le retrait du neuroleptique incriminé et des soins symptomatiques suffisent[1].

Diagnostic[modifier | modifier le code]

Clinique[modifier | modifier le code]

Les premiers signes sont souvent l'apparition de crampes musculaires ou de tremblements, une hyperthermie (probablement expliquée par le blocage des récepteurs à la dopamine de l'hypothalamus), avec instabilité du système nerveux autonome, comme une pression artérielle instable par exemple, et des perturbations mentales : agitation, délire, coma.

Une fois que les symptômes sont apparus, ils peuvent progresser rapidement pour une période aussi courte que trois jours. Ces symptômes peuvent durer de 8 heures à 40 jours. Les symptômes musculaires ont tendance à être provoqués par le blocage du récepteur D2 à la dopamine conduisant à une fonction anormale des noyaux gris centraux similaires à ceux vus dans la maladie de Parkinson. Une augmentation des leucocytes et de la créatine phosphokinase serait liée à l'augmentation de l'activité musculaire et à la rhabdomyolyse (destruction du tissu musculaire). Le patient peut avoir une acidose métabolique à trou anionique augmenté. Un ralentissement non généralisé sur l'EEG est reporté dans 50 % des cas[1].

Le tableau clinique rassemble :

  • hyperthermie (> 38 °C) ;
  • rigidité musculaire  ;
  • trouble de la conscience avec mutisme ou stupeur ;
  • trouble du système nerveux autonome avec parfois : une pâleur, une hypersudation, une sialorrhée, une tachycardie, une hypotension artérielle, une tachypnée, une incontinence, des hallucinations, des tremblements.

Complications[modifier | modifier le code]

Les complications peuvent être sévères et le pronostic vital est engagé. L'évolution dépend de la rapidité du diagnostic et de la prise en charge. 10 % des formes peuvent être fatales :

Diagnostic différentiel[modifier | modifier le code]

Causes[modifier | modifier le code]

Le SMN est généralement causé par l'utilisation de neuroleptiques[4]. Cependant, et contrairement à ce que son nom laisse à penser, le syndrome malin des neuroleptiques peut être causé par d'autres médicaments tels que des anticonvulsants, des antidépresseurs ou la métoclopramide, qui ont en commun avec les neuroleptiques d'être des antagonistes au récepteur D2 de la dopamine[4]. L'interruption abrupte de médicaments pour traiter le maladie de Parkinson, qui sont agonistes de la dopamine, peut également déclencher un épisode de SMN[4].

Physiopathologie[modifier | modifier le code]

Les mécanismes biologiques à l'oeuvre dans le syndrome malin des neuroleptiques n'est pas encore entièrement compris[4]. Il existe plusieurs hypothèses à ce sujet. Le mécanisme suggéré serait dépendant d'une diminution de l'activité dopaminergique à cause :

  • du blocage des récepteurs de la dopamine ;
  • de la diminution de la fonction des récepteurs de la dopamine D2 par un mécanisme génétique[5].

Cependant, ces dysfonctionnements n'expliquent pas complètement les symptômes de SMN ni l'apparition de SMN avec les neuroleptiques atypiques qui ont une activité de blocage des récepteurs D2 moindre. Ceci a mené à l'hypothèse d'une hyperactivité sympathique liée à la désorganisation du système nerveux autonome. Par ailleurs, la libération du calcium est augmentée par le réticulum endoplasmique avec l'utilisation d'antipsychotiques. Ceci peut entraîner une augmentation de la contractilité musculaire qui peut jouer le rôle de défaillance musculaire avec une rigidité musculaire, une hyperthermie. Certains pensent qu'il faut considérer un qu'il existe un chevauchement entre le syndrome de catatonie retrouvé dans les schizophrénies et le SMN. Le premier étant la forme idiopathique et le second la forme induite par les traitements d'un même syndrome[6].

Prévalence[modifier | modifier le code]

La survenue du syndrome malin des neuroleptiques est rare. Elle touche entre 0,04 et 0,01 % des patients prenant des antipsychotiques[4],[7],[8].

Facteurs de risque[modifier | modifier le code]

Les facteurs de risques connus sont la déshydratation, un état de malnutrition, un état d'agitation, la dépendance aux drogues et à l'alcool[4]. Le fait de prendre du lithium en même temps qu'un traitement neuroleptique est également un facteur de risque, tout comme le fait d'avoir des lésions cérébrales préexistantes ou d'avoir déjà présenté un épisode de syndrome malin des neuroleptiques[4].

Le fait de prendre des hautes doses de neuroleptiques et le fait d'augmenter rapidement la posologie d'un traitement neuroleptique sont considérés comme étant probablement également des facteurs de risques[4].

Histoire[modifier | modifier le code]

Le syndrome malin des neuroleptiques a été décrit pour la première fois par Frank J. Ayd, sous le nom de hyperpyrexie fatale (fatal hyperpyrexia)[4]. Son nom actuel lui a été donné par une équipe de cliniciens français qui travaillaient dans les années 60 sur les effets secondaires de l'halopéridol[3].

Traitement[modifier | modifier le code]

  • Urgence médicale
  • Prise en charge en soins intensifs ou en réanimation
  • Arrêt du traitement neuroleptique en cours
  • Traitement symptomatique pour le maintien des fonctions vitales en attendant l'élimination de l'agent causal :
    • réhydratation ;
    • réfrigération (couverture refroidissante, packs de glace dans des tissus placés dans le creux axillaire ou l'aine) et antipyrétique (paracétamol) ;
    • prévention des complications de décubitus (thromboses veineuse profondes) ;
    • hémodialyse si insuffisance rénale ;
    • assistance cardio-respiratoire si nécessaire ;
    • myorelaxant (benzodiazépine) ou dantrolène ;
    • agoniste dopaminergique (bromocriptine) pour lutter contre la rigidité[9] ;
    • réintroduction prudente à faible dose du neuroleptique (pas de forme à libération prolongée). Discuter arrêt complet de la substance incriminée ou de la classe médicamenteuse.
  • Surveillance clinique.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a et b Jeffrey R. Strawn, Paul E. Keck et Stanley N. Caroff, « Neuroleptic malignant syndrome », The American Journal of Psychiatry, vol. 164, no 6,‎ , p. 870–876 (ISSN 0002-953X, PMID 17541044, DOI 10.1176/ajp.2007.164.6.870, lire en ligne, consulté le )
  2. a b c et d (en) Jambur Ananth, Kamala Aduri, Sharath Parameswaran et Sarath Gunatilake, « Neuroleptic malignant syndrome: risk factors, pathophysiology, and treatment », Acta Neuropsychiatrica, vol. 16, no 4,‎ , p. 219–228 (ISSN 0924-2708 et 1601-5215, DOI 10.1111/j.0924-2708.2004.00085.x, lire en ligne, consulté le )
  3. a b c d et e Brian D. Berman, « Neuroleptic malignant syndrome: a review for neurohospitalists », The Neurohospitalist, vol. 1, no 1,‎ , p. 41–47 (ISSN 1941-8744, PMID 23983836, PMCID PMC3726098, DOI 10.1177/1941875210386491, lire en ligne, consulté le )
  4. a b c d e f g h et i (en) L. Kuhlwilm, C. Schönfeldt‐Lecuona, M. Gahr et B. J. Connemann, « The neuroleptic malignant syndrome—a systematic case series analysis focusing on therapy regimes and outcome », Acta Psychiatrica Scandinavica, vol. 142, no 3,‎ , p. 233–241 (ISSN 0001-690X et 1600-0447, DOI 10.1111/acps.13215, lire en ligne, consulté le )
  5. Kazuo Mihara, Tsuyoshi Kondo, Akihito Suzuki et Norio Yasui-Furukori, « Relationship between functional dopamine D2 and D3 receptors gene polymorphisms and neuroleptic malignant syndrome », American Journal of Medical Genetics. Part B, Neuropsychiatric Genetics: The Official Publication of the International Society of Psychiatric Genetics, vol. 117B, no 1,‎ , p. 57–60 (ISSN 1552-4841, PMID 12555236, DOI 10.1002/ajmg.b.10025, lire en ligne, consulté le )
  6. G. Northoff, « Catatonia and neuroleptic malignant syndrome: psychopathology and pathophysiology », Journal of Neural Transmission (Vienna, Austria: 1996), vol. 109, no 12,‎ , p. 1453–1467 (ISSN 0300-9564, PMID 12486486, DOI 10.1007/s00702-002-0762-z, lire en ligne, consulté le )
  7. (en) Kim S. J. Lao, Jiaxi Zhao, Joseph Edgar Blais et Lam Lam, « Antipsychotics and Risk of Neuroleptic Malignant Syndrome: A Population-Based Cohort and Case-Crossover Study », CNS Drugs, vol. 34, no 11,‎ , p. 1165–1175 (ISSN 1179-1934, DOI 10.1007/s40263-020-00767-9, lire en ligne, consulté le )
  8. (en) Michael Schneider, Johannes Regente, Timo Greiner et Stephanie Lensky, « Neuroleptic malignant syndrome: evaluation of drug safety data from the AMSP program during 1993–2015 », European Archives of Psychiatry and Clinical Neuroscience, vol. 270, no 1,‎ , p. 23–33 (ISSN 1433-8491, DOI 10.1007/s00406-018-0959-2, lire en ligne, consulté le )
  9. S. Dhib-Jalbut, R. Hesselbrock, M. M. Mouradian et E. D. Means, « Bromocriptine treatment of neuroleptic malignant syndrome », The Journal of Clinical Psychiatry, vol. 48, no 2,‎ , p. 69–73 (ISSN 0160-6689, PMID 3804991, lire en ligne, consulté le )

Voir aussi[modifier | modifier le code]