Histoire de Laval au XVIe siècle

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L'histoire de Laval au XVIe siècle

Commerce et richesse[modifier | modifier le code]

Développement après la Guerre de Cent Ans[modifier | modifier le code]

Le comté de Laval, si souvent le théâtre des guerres que la France avait soutenues contre les Anglais, jouissait de la paix. Peu à peu, les gentilshommes, qui avaient pendant les guerres habité l'intérieur de la ville, le quittent pour retourner à leurs châteaux. Les bourgeois abandonnent leurs anciennes demeures du Bourg-Hersent et du Marchis et viennent bâtir au-dedans des murs.

Les habitants de Laval mettent ce temps à profit. Le commerce devient pour eux une source de richesses[a 1].

Fief du Pont-de-Mayenne[modifier | modifier le code]

Le quartier situé au-delà du Pont-de-Mayenne s'accroit d'un grand nombre de constructions. Une nouvelle église fut bâtie au Cimetière-Dieu, grâce à l'un des chanoines de ce chapitre, nommé André Le Gay[1]. Par ses soins, les rues qui conduisent du Puits-Rocher au Cimetière-Dieu se bordèrent d'un plus grand nombre de maisons. Ailleurs encore, en divers lieux, plusieurs édifices s'élevèrent aux dépens d'une carrière vaste et abondante, que le chanoine Le Gay possédait près de la Brochardière et qui fournissait à toutes ses entreprises.

Expansion démographique et familles[modifier | modifier le code]

René Pichot de la Graverie a effectué une étude sur les noms des familles qui habitaient Laval à l'époque : Il résulte de l'examen et dépouillement que j'ay faits des anciens registres et remembrances du Trésor de Laval et autres titres qui m'ont été mis entre les mains, que les plus anciennes familles roturières et bourgeoises de la ville de Laval et qui subsistent encore en 1755 — un siècle de plus en a fait disparaître un grand nombre[2]. Elles étaient établies et connues à Laval il y a deux cent cinquante ans[3] et quelques-unes il y a trois cents ou trois cent cinquante ans[4]. D'autres s'y sont établies depuis deux cents ans[5] et entr'autres[6]. Au surplus il est difficile de trouver de plus anciens titres et contracts de famille au-delà de 1450, si ce n'est dans les grandes maisons et dans la noblesse, et encore de celles qui subsistent aujourd'hui peu ont cet avantage.. Mais il n'est pas moins intéressant de remarquer qu'il y avait en 1400 et en 1500 une infinité d'autres familles considérables à Laval qui ont disparu, soit qu'elles soient entièrement éteintes, ou qu'elles se soient transportées et établies dans les villes voisines ou à Paris, et que plusieurs se sont aussi fondues par les filles en d'autres familles qui subsistent pour la plupart.. Ces familles qui ne subsistent plus à Laval[7] dans le même nom qu'elles portaient sont entr'autres[8].

Navigation de la Mayenne[modifier | modifier le code]

Le quartier d'Avesnières

La Mayenne était navigable d'Angers à Château-Gontier; mais pas jusqu'à Laval[9]. Désireux de fournir au commerce un nouveau débouché et de procurer à Laval un moyen d'approvisionnement plus facile, Guy XV entreprit de faire ouvrir des écluses entre les deux villes à partir de 1492 mais son projet ne fut entièrement réalisé que plus tard, en vertu de lettres patentes de François Ier[10]

Architecture[modifier | modifier le code]

Les constructions : « Quant aux édifices de la ville, Chascun s'y monstroit fort habile., Guillaume Le Doyen. ».

Cette époque de tranquillité, donnée ainsi à la fin du XVe siècle et au commencement du XVIe siècle est bien caractérisée dans la ville de Laval par toutes les anciennes constructions que le temps et les démolitions ont respectées.

Ce sont des hôtels, composés d'un corps de logis, ayant un escalier renfermé dans une tourelle ronde ou octogonale, à toit aigu, surmonté d'un riche épi, faisant saillie en avant du bâtiment principal.

On retrouve encore dans la ville un grand nombre de ces hôtels, isolés, ou enfermés dans des constructions du XIXe siècle :

Maison du Grand-Veneur

Plus tard, des décorations extérieures manifestent le goût des arts introduit dans les constructions de cette époque :

La maison au numéro 9 de la Grande rue

Des maisons aux pignons décorés, avec étage supérieur, s'avancent et forment un avant-corps, telles que l'on en voit dans le bas de la Grande rue.

Coutume du Maine[modifier | modifier le code]

Le comte de Laval Guy XVI de Laval envoie en 1508, pour le représenter à l'assemblée liée à la réforme de la Coutume du Maine, deux commissaires : François de la Pommeraie[13], et Jean Hennier, juge ou sénéchal du comté. C'est pour la première fois que l'on voit deux hommes de loi de Laval prendre part aux assemblées de la province. On reprocha à ces commissaires de n'avoir pas soutenu avec assez de force les droits de leur seigneur ; surtout de ne pas s'être opposés à ce que le comté de Laval fût regardé comme susceptible d'être divisé, malgré les privilèges dont il jouissait de toute ancienneté.

Guy XVI de Laval[modifier | modifier le code]

Grand seigneur féru d'italianisme, Guy XVI de Laval entreprend la rénovation du Vieux Château de Laval et l'édification du Château-neuf, qui fut le siège du Palais de Justice du début du XIXe siècle jusqu'au début du XXIe (il fut remplacé en 2006 par un bâtiment neuf construit entre la place Saint-Tugal et la rue des Déportés). Il y mène grand train si l'on en croit un état de la maison de Laval qui signale dans son entourage toutes sortes d'officiers que l'on voit chez les princes [...] jusques aux trompettes, hautbois, saquebutes, luths, organistes et musiciens (Jehan Daniel).

Laval se ressentait de la présence de son seigneur ; il animait et répandait autour de lui l'activité et le mouvement. Chaque jour nouveaux tournois et nouvelles joutes se succédaient. Guy XVI était grand amateur de ces exercices dans lesquels il excellait et avait toujours brillé.

Dès l'année 1499, il avait fait commencer des lices dans la vallée de Panlivard, où il prenait le plaisir des joutes. Des seigneurs étrangers venaient à Laval s'ébattre et courir la lance[a 2]. En 1501, les lices sont achevées, au moment où de la comtesse revient de Vitré[a 3]. Cet emplacement fut, au commencement du XVIIe siècle, aliéné par la maison de Laval. On y voit au XIXe siècle l'hôpital Saint-Julien, construit en 1648. La rue a conservé le nom de rue des Lices.

Guy XVI veut faire du château de Laval sa résidence ordinaire, et effectue des travaux pour l'embellir. Il en fut néanmoins chassé par les habitants. Il s'était mêlé des affaires de l'Église[14] à Laval :

  • de sa propre autorité, il avait changé tout dans l'ordre jusqu'alors observé aux processions de la Fête-Dieu[15].
  • plusieurs donateurs de l'église de la Trinité de Laval lui refusaient le titre de fondateur. Un procès eut lieu, au cours duquel une insurrection s'étant soulevée se porta contre le château et contraignit le comte à s'esquiver par une porte de la grosse tour en 1516. Plusieurs habitants durent quitter la ville et aller se fixer à Nantes et à Angers. Guillaume de Montmorency, beau-père de Guy XVI, ménagea enfin un accommodement en 1517. Trente notables lavallois furent obligés de se rendre à Vitré, pour implorer humblement le pardon de la ville coupable. Il leur fallut reconnaître et consacrer de nouveau tous les droits du seigneur, comme fondateur de la Trinité. Guy XVI, à cette condition, renonça à se venger.

Dès lors, Guy XVI se tint longtemps éloigné de Laval, suivit la cour ou résida en Bretagne.

Guillaume le Doyen indique qu'il ne fut plus question de bien vivre, car en même temps que Laval perdait l'éclat et le mouvement qui environnaient son riche et important seigneur, marchands et bourgeois se retirèrent à la campagne et on ne les vit plus en ville que le samedi pour leur commerce.

Navigation de la Mayenne[modifier | modifier le code]

C'est au XVIe siècle aussi que sont entrepris les travaux qui doivent rendre navigable la rivière de la Mayenne depuis Château-Gontier jusqu'à Laval. Deux ordonnances de François Ier, 1536 et 1537, prescrivent les opérations nécessaires à ce travail. Par cette voie nouvelle, doivent arriver à Laval les vins des bords de la Loire, qui, avec ceux de Saint-Denis, de Houssay et Fromentières.

Ces travaux se prolongeront jusqu'à la fin du XIXe siècle. La construction de retenues d'eau pour donner à la rivière un niveau constant sera assortie de la mise en place de turbines hydroélectriques qui ne fournissent plus aujourd'hui qu'une part minime de la consommation d'électricité de la région.

Guerres de Religion[modifier | modifier le code]

Henri IV, par ses déclarations de 1594 et 1595, avait voulu que, pour obvier aux fraudes que l'on commettait contre les droits, il y eût un bureau dans la ville de Laval pour donner des décharges, des acquits à caution. Ces déclarations sont à l'origine de la Traite foraine d'Anjou qui sera de fait un droit de douane pour l'exportation des marchandises en dehors du Comté de Laval.

Calamités et épidémies[modifier | modifier le code]

  • En 1501, une plus grande contagion qu'en 1484 liée à une épidémie de peste[16] En 1501 la peste à Laval fait plus de 3000 victimes.
  • En 1510, une épidémie de coqueluche[a 4] touche Laval et l'ensemble de la France[17].

Vers les mois de septembre et , la dysenterie atteint un tel degré d’intensité que des familles entières, composées de cinq et six individus, disparurent. Elle dure jusqu'en [18]. Dans le courant du mois d’, il mourut 80 personnes. 109 dans le mois de septembre. Au mois d’octobre le chiffre des décès atteigt 131.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  • Citations de Guillaume Le Doyen, (° ~ 1460 Laval - † ~ 1540 Laval), notaire, chroniqueur, poète mayennais du XVe siècle :
  1. Et quand Angloys furent dehors,
    Chascun se mit en ses efforts
    De bastir et marchander
    Et en biens super abunder.
    Plus n'estoit nouvelle de guerre.
    Puys, peu à peu, bourgeoys et marchants,
    Gentilzhommes, qui, tous tenoient les champs,
    Firent, en Laval, maintes maisons construire
    En plusieurs plans que chasçun fist eslire.

    Guillaume Le Doyen.
  2. : (1499) Et désirait le jeu de lance
    Autant que grand seigneur de France;
    Tellement qu'il fîst eslire,
    Edifier, bastir et construire
    Liesses pour soy solacier
    Et pour soy esbattre et jouer :
    Où chacun jour, pour son déduyt,
    passait temps et en nuyt (Jour et nuit).
    Et luy et des seigneurs de France
    Tous armés y couraient la lance
    0 moult grands, chevaux et puissants,
    Et o leurs bardes d'or luysants.
  3. : (1501) Et firent bâtir leur grand maison des lices
    Où chaque jour se frottent leurs pelices.
  4. :
    Mais durant le jeu, sans que huche,
    Descendit une Coqueluche

Références[modifier | modifier le code]

  1. Le chœur fut le premier construit; la nef ne s'éleva que plus tard; mais le prêtre parvenu à l'âge de 100 ans, put voir l'église achevée, pourvue d'un orgue et de stalles, ornée de tableaux et de statues.
  2. « sont celles des Beudins, des Merciers, des Pichots Poitevinières qui étaient connues en 1400; des Touschard, des Courtes, des deux familles Le Clerc de la Manourière, et Le Clerc de Crannes distinctes et séparées, des Hardys, des Moraines, des Le Tourneur, des Martins en 1460; des Gaudins, des Enjubaul, des Guays, des de Launay, des Garniers, des Fourreaux, des Prud'hommes, des Renussons, en 1550, des La Porte en 1560.
  3. Vers 1500.
  4. Entre 1400 et 1450.
  5. Vers 1550.
  6. celles des Duchemins, des Hoisnard, des Frins, des Rufins, des Gaultiers, des Lasniers, des Perriers, des Le Long; les Le Jeay, les Le Breton, les Couanniers, les Salmons, les Bidaults, les Gomberts, les Balleurs, les Ducs, Devernays, Fleuris, les Tauvrys, les Lilavois, les Seigneurs, les Beaumesnils.
  7. En 1755.
  8. Celles des Henniers, des Audouins, des Pélissons, des Brial, des Le Bret, des Pinçonnaux, des Thibaults, des Davost, des Bigots, des Cornuaux, des Montauts, des Arnouls, des Alligots, des Saisbouez, des de la Cour, des Lechat, des Trois, des Pommerays, des Raliiez, des Rapins, des Loriots, des Guillols, des Berault, des Essards, des Demontils, des Bignons, des Lefebvre, des Charbonnet, des Fréards, des Champhuons, des Chassebœuf, des Marchais, des Tartroux, des Boulains, des Niots-Desloges, des Boulains, des Le Blanc, des Eumond, des Duchemins-Bargé et Courgé, des Marest, des Bordiers, des Houillères, des Boutiers, des Puissants, des Moreaux, des Paris, des Merciers, des Pyrart, des Rivault.
  9. La rivière n'offrait qu'un tirant d'eau trop faible pour des bateaux d'un certain tonnage, ou plutôt, dans la construction des nombreux barrages élevés pour l'établissement des moulins qui la bordaient, on avait négligé de ménager des écluses pour la navigation.
  10. Julien Leclerc du Flécheray. Ménage, IIe partie. Le Paige, 1, 482.
  11. Dans la rue des Chevaux, on pouvait voir l'hôtel des seigneurs de la Chapelle-Rainsouin. Il avait alors son entrée par la rue de Chapelle, au sommet d'une petite rue aujourd'hui une impasse (Portant le nom de Roquet-aux-Ânes.).
  12. Située dans la rue du Jeu-de-Paume, no 20, cette maison possédait une ornementation d'une grande richesse. Le Censif du comté de l'année 1680 désigne cette maison sous le nom de Maison du Poirier.
  13. Seigneur du Verger, dans l'actuelle commune de Montigné.
  14. Les seigneurs de Laval, avaient tendance sans cesse à augmenter en dignité et prééminence leur chapitre de Saint-Tugal, aux dépens du clergé de la Trinité.
  15. Par une ordonnance du comte, les chanoines seuls devaient prendre à la Trinité le Saint-Sacrement et le porter pendant la cérémonie. Il mettait ainsi à néant et les concordats existants et la possession des curés appuyée sur le droit commun.
  16. Couanier de Launay indique dans Étienne-Louis Couanier de Launay, Histoire de Laval (818-1855), Imp. Godbert, , 608 p. [détail des éditions] (lire en ligne) : On trouvait dans des maisons abandonnées, des agonisants ou des cadavres que leurs parents avaient laissés sans soins et sans sépulture. Mais ceux qui croyaient échapper au mal en quittant leurs demeures et en délaissant leurs proches, semblaient poursuivis par la mort, en quelque endroit qu'ils se retirassent. A. Rennes, à Vitré, au Mans, ils la rencontraient en la fuyant. La peste en même temps sévissait autour de la ville. Nulle paroisse n'en était épargnée. En beaucoup de lieux des maisons demeuraient vides; maîtres, enfants, serviteurs avaient été emportés à la fois. Il y eut des alternatives d'apaisement et de recrudescence; mais la durée du mal fut longue..
  17. Dans les premiers jours de l’année 1510, court presque par toute la France certaine maladie épidémique, à laquelle peu de gens échappèrent, et dont beaucoup furent victimes. On la nomma Coqueluche, dit Mézeray, par ce qu’elle affublit la teste d’une douleur fort pesante, et que les premiers qui en furent atteints, parurent avec des coqueluchons..... Elle causait aussi une grande douleur à l'estomac, aux reins et aux jambes, avec une fièvre chaude accompagnée de fâcheux délires, et d'un dégoût de toutes les viandes ainsi que du vin.
  18. Pendant ces temps de désolation, la population a recours à Notre-Dame d’Evron. Antoine Berset parle en ces termes de ce pèlerinage auquel assista une grande partie de la population. NOTA que nous allâmes en procession à Notre Dame d'Evron le jour et fête de MM. St Cervais et St Protais le 19e jour du mois de juin, et fûmes refusés d’entrer en l’église de Brée pour la contagion qui était dans ce pays. Me Maître Jean Rebuflé, alors prieur curé de cette paroisse (St-Vénérand), célébra la grande messe en l’église d'Evron, je fis diacre.