Hakimullah Mehsud

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Hakimullah Mehsud
Jamshed Mehsud
Surnom Zulfiqar
Naissance
Jandola, Waziristan du Sud
Décès (à 34 ans)
Dande Darpa Khel, Waziristan du Nord
Origine Drapeau du Pakistan Pakistan
Allégeance Tehrik-e-Taliban Pakistan
Conflits Insurrection islamiste au Pakistan
Famille Baitullah Mehsud (cousin)

Hakimullah Mehsud, né en 1979 et tué le par un tir de drone américain au Pakistan[1], aussi connu sous le nom de Zulfiqar (né Jamshed Mehsud), fut un chef militaire taliban pakistanais opérant au Waziristan du Sud[2].

Il dirigeait le groupe Tehrik-e-Taliban Pakistan depuis le décès de son prédécesseur et cousin Baitullah Mehsud, tué également lors d'une attaque de drone américaine en . Bien connu des services de renseignements d'Islamabad, il est considéré comme l'un des plus violents lieutenants de Baitullah et comme l'un des plus dangereux talibans pakistanais[3]. Avant sa mort, le gouvernement pakistanais offrait une prime de 10 millions de roupies (120 000 dollars) pour sa capture[4]. Inculpé pour son implication dans l'assassinat de sept ressortissants américains à la base d’opérations avancée Chapman de Khost en Afghanistan le , son nom figure sur la liste des terroristes les plus recherchés par le FBI (Most Wanted Terrorists) et Washington offre une prime de cinq millions de dollars pour sa capture[5].

Il est ciblé à cinq reprises par des drones américains. Frappes qui ont provoqué la mort de 68 civils[6]

Biographie[modifier | modifier le code]

Enfance et famille[modifier | modifier le code]

Hakimullah Mehsud naît vers 1979 dans la région de Kotkai, près de la ville de Jandola, au Sud-Waziristan[7].

Son vrai nom est Jamshed Mehsud[8], mais il adopte successivement les noms de Zulfiqar, puis de Hakimullah pour vanter ses connaissances religieuses.

Fils d'une famille proche de la tribu Mehsud, connue pour avoir infligé une défaite aux britanniques en 1850, Hakimullah Mehsud est nommé à la tête des districts tribaux d'Arakzai, Khyber et Kurram et impose la charia dans les territoires sous sa domination. Cousin de Baitullah, il est considéré comme son plus puissant lieutenant.

Attaques contre l'OTAN et repli au Nord (2008 - 2009)[modifier | modifier le code]

Réputé pour sa cruauté et son caractère impitoyable[9] Hakimullah Mehsud est responsable de nombreuses attaques contre les forces de l'OTAN dans les districts de Khyber et de Peshawar à partir de 2008, attaques ayant conduit à la destruction de près de six cents véhicules[10].

L'augmentation des attaques de drones américains et la reprise par l'armée pakistanaise de certains districts au Waziristan du Sud dès le printemps 2009, poussent les chefs du TTP à se replier au Waziristan du Nord, zone tribale connue pour abriter le clan des Haqqani, talibans afghans.

Il revendique la responsabilité de l'attentat du Pearl Continental de Peshawar du 9 juin 2009, ayant entraîné la mort de dix-sept personnes et fait une soixantaine de blessés[11].

Mort de l'émir du TTP et première rumeur de décès (août 2009)[modifier | modifier le code]

Le , une frappe aérienne américaine lancée au Waziristan du Sud sur la maison d'Ikramuddin, beau-père de Baitullah Mehsud, entraîne la mort de l'émir du Tehrik-e-Taliban Pakistan (TTP). Selon plusieurs responsables talibans, il serait mort des suites de ses blessures dans la nuit du , mais les propos recueillis auprès de Maulvi Omar, ex-porte-parole du groupe, capturé le au nord-ouest du Pakistan, suggèrent qu'il est réellement décédé au cours de l'attaque[12].

Peu de temps après l'annonce de la disparition de Baitullah, les renseignements pakistanais soupçonnent Hakimullah Mehsud et Wali ur-Rehman de s'être entretués pour sa succession, mais la rumeur est démentie[13].

Ascension à la tête du TTP (août 2009 - septembre 2010)[modifier | modifier le code]

Le , Maulvi Faqir Mohammed (en) annonce avoir provisoirement pris la tête du groupe, mais trois jours plus tard, Hakimullah Mehsud est officiellement désigné comme le successeur de Baitullah sur décision d'un conseil (shura) de 42 membres. Le nouvel émir confirme le décès de l'ancien leader, mettant fin aux rumeurs selon lesquelles il serait encore en vie. Faqir Mohammed conserve son statut de no 2 du groupe[14].

À l'instar de son prédécesseur, Hakimullah réitère le même discours menaçant à l'encontre des États-Unis, promettant de venger la mort de son supérieur. « Nous nous vengerons, et vite. Nous répliquerons à l'Amérique après cette attaque de drone. Les effets de notre attaque se feront ressentir jusqu'à Washington »[15].

Le , Kalimullah Mehsud, son frère et commandant taliban, est tué au nord-ouest du Waziristan lors d'un accrochage avec les forces de sécurité. Son décès est confirmé par les chefs tribaux de la région.

Le , il est inculpé pour complot terroriste par la justice fédérale américaine en raison de son implication dans l'Attentat-suicide de la base de Chapman en [16].

Attentats liés au TTP (octobre 2009 - octobre 2010)[modifier | modifier le code]

Le , l'un des porte-paroles du TTP, Azam Tariq, promet une intensification des attaques suicides contre ceux soupçonnés de travailler avec les intérêts américains.

Le , un attentat-suicide à la voiture piégée frappe Peshawar au nord-est du pays, causant la mort d'une cinquantaine de personnes, majoritairement civiles[17].

Le , un groupe d'assaillants attaque le quartier général de l'armée à Rawalpindi et prend en otage une quarantaine de personnes, militaires et civiles. Le au matin, des commandos pakistanais prennent d'assaut le bâtiment, libérant les otages et mettant en fuite les agresseurs. L'attaque cause la mort de dix-neuf personnes, dont huit militaires pakistanais, huit terroristes et trois otages. Les renseignements pakistanais attribuent la responsabilité de l'attaque au TTP d'Hakimullah Mehsud[18]. Pourtant, une branche des Talibans Pakistanais, Amjad Farooqi, revendique l'assaut[19]

Le , un attentat-suicide contre un commissariat de police de Kohat cause la mort de 10 personnes. Le même jour, trois attaques simultanées sont perpétrées contre des bâtiments de l'ordre public de Lahore, dont un commissariat, un centre d'entraînement et une école de police. À Peshawar, un attentat-suicide à la voiture piégée cause la mort d'un enfant. Le bilan de ces attaques se chiffre à environ 40 morts.

Le , est lancée l'Opération Rah-e-Nijat (chemin du salut) contre le principal fief des Talibans pakistanais au Waziristan du Sud à la suite des violentes attaques perpétrées au début du mois. Hakimullah Mehsud est supposé avoir environ 10 000 combattants sous ses ordres ainsi qu'environ 1 500 combattants étrangers, présumés liés au Mouvement islamique d'Ouzbékistan (IMU), présenté comme proche d'Al-Qaïda[20].

Le , un attentat-suicide commis par deux kamikazes frappe l'université islamique d'Islamabad, tuant sept personnes.

Le , une voiture piégée explose sur un marché de Peshawar, causant la mort de 118 personnes[21].

Le , le gouvernement pakistanais promet cinquante millions de roupies (600 000 $)[22] pour la capture ou la mort d'Hakimullah Mehsud et de ses deux lieutenants, Waliur Rehman Mehsud et Qari Hussein Mehsud.

Le , un kamikaze fait exploser sa camionnette piégée sur un terrain de volley-ball au nord-ouest du pays, tuant près d'une centaine de personnes[23].

Le , trois kamikazes visent une procession chiite à Lahore, tuant 35 personnes et blessant 280 autres. L'attaque est revendiquée par le TPP par l'intermédiaire de Qari Hussein Mehsud.

Le , un kamikaze fait exploser sa ceinture d'explosifs au milieu d'une procession chiite à Quetta, tuant une cinquantaine de personnes et faisant 197 blessés. Le même jour une attaque-suicide est perpétrée contre une mosquée à Marda fréquentée par des fidèles du culte ahmadi. Blessé par la police, le suspect se suicide en actionnant une ceinture d'explosifs, tuant une personne et blessant quatre autres[24].

Le , un attentat-suicide à la voiture piégée frappe un poste de police à Lakki Marwat au Nord-ouest du pays, tuant 19 personnes et blessant 34 autres[25]. Le TTP revendique l'attaque.

Le , un double-attentat suicide frappe Karachi. Les deux kamikazes à pied actionnent leurs ceintures d'explosifs à l'entrée d'un mausolée soufi, causant la mort de dix personnes, dont deux enfants et faisant plus d'une soixantaine de blessés.

Attentat de Khost (décembre 2009)[modifier | modifier le code]

Hakimullah Mehsud apparaît le dans une vidéo annonçant la mort de l'agent-double responsable de l'attentat-suicide de la base de Chapman (décembre 2009), ayant tué plusieurs agents de la CIA, confirmant ses liens avec les talibans pakistanais et sa sympathie à l'encontre de l'ancien chef du TTP, Baitullah Mehsud[26]. L'attentat aurait toutefois plutôt bénéficié de l'organisation du réseau de Djalâlouddine Haqqani, présent dans le Waziristan du Nord.

Secondes rumeurs de décès (janvier 2010 - janvier 2012)[modifier | modifier le code]

Le , Hakimullah Mehsud aurait échappé à une attaque de drone américain lancée contre un camp d'entraînement taliban près du village de Sakhtoi, au Sud-Waziristan. Dix islamistes trouvent la mort, mais Mehsud aurait réussi à s'enfuir. Azam Tariq, porte-parole du TTP, confirme que Mehsud se trouvait bien sur les lieux, mais qu'il avait quitté la zone peu de temps avant l'explosion[27]. Des responsables américains affirmaient toutefois qu'il faisait peut-être partie des dix personnes tuées[28].

Trois jours plus tard, un autre drone, visant deux véhicules, l'aurait blessé, et des responsables américains pensaient fin janvier qu'il serait mort de ses blessures[29]. La télévision pakistanaise affirme qu'il a été enterré dans l'agence d'Orakzai[29]. Les talibans confirment la mort d'Hakimullah le 9 février[2]. Ils précisent que ce dernier a bien été fatalement blessé par l'attaque de drone du à Sakhtoi, au Waziristan du Sud, et qu'il serait décédé des suites de blessures au cou sur la route de Karachi où ses hommes tentaient de l'emmener se faire soigner[30].

Après que des doutes ont été émis sur sa mort, une vidéo diffusée sur internet montre Hakimullah Mehsud revendiquant la tentative d'attentat du à New York[31]. Quelque temps après, les services de renseignements pakistanais annoncèrent que l'« émir » du TTP avait échappé à l'attaque. « Initialement, nos renseignements sur le terrain laissaient penser qu’il avait succombé aux blessures reçues de l’attaque mais nous avons fait des vérifications et nos renseignements en arrivent maintenant à la conclusion qu’il a été blessé et non pas tué », selon les propos d'un responsable de l'ISI (Inter Services Intelligence).

Sa mort est à nouveau annoncée par des responsables des services pakistanais de renseignement le . La conclusion des services de renseignement pakistanais est tirée de l'interception d'une conversation radio entre des membres du TTP discutant de sa mort survenue le [32] dans les zones tribales du Nord-Waziristan[33]. L'information a été toutefois démentie par Asimullah Mehsud, porte-parole du TTP, qui affirme que l'« émir » des Talibans Pakistanais ne se trouvait pas dans la zone ciblée[34]. Par ailleurs, un responsable militaire pakistanais a déclaré à l'agence Reuters que sa mort n'était pas confirmée officiellement[35].


Décès (novembre 2013)[modifier | modifier le code]

Il est tué par les tirs d'un drone de l'armée américaine, le dans la région pakistanaise du Waziristan du Nord[1]. Son décès survient près de cinq mois après la disparition de son lieutenant, Wali ur-Rehman, lui aussi victime d'un drone américain. Rapidement, les talibans pakistanais confirment la disparition d'Hakimullah[36]. L'attaque de drone a également entraîné la mort de son chauffeur, d'un garde du corps, d'un oncle et d'un combattant taliban qui ont été finalement inhumés avec la dépouille du chef du TTP[37]. Le , les talibans pakistanais adoubent temporairement Khan Saïd, aussi connu sous le nom de Sajna Mehsud, comme leur nouvel émir[38]. De son côté, le gouvernement pakistanais dénonce une attaque qui met à mal les négociations de paix avec les insurgés[37]. Finalement, le , les talibans pakistanais annoncent avoir officiellement nommé Maulana Fazlullah nouvel émir du TTP, en remplacement d'Hakimullah Mehsud[39]. Sa nomination paraît sonner la fin du processus de négociation amorcé par le gouvernement pakistanais, puisque le nouvel émir, réputé imperméable aux pourparlers, a confirmé ne pas souhaiter engager de nouvelles négociations avec Islamabad[40].

Références[modifier | modifier le code]

  1. a et b LeHuffPost et AFP,, « Le chef des talibans pakistanais Hakimullah Mehsud tué dans un tir de drone américain », Le Huffington Post,
  2. a et b « Les talibans confirment la mort de leur chef », Courrier international,
  3. (en) « Baitullah Mehsud dead; Hakeemullah new leader of Pakistani Taliban », The Long War Journal,
  4. « Les talibans du Pakistan se choisissent un nouveau chef »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), La Presse Canadienne,
  5. Yannick Vely, Reuters, « Hakimullah Mehsud, mort ou vif? », article archivé sur Archive.is [archive], Paris Match, .
  6. (en-GB) Spencer Ackerman, « 41 men targeted but 1,147 people killed: US drone strikes – the facts on the ground », The Guardian,‎ (ISSN 0261-3077, lire en ligne, consulté le ).
  7. (en) « Profile: Hakimullah Mehsud », BBC News,
  8. « Hakimullah Mehsud, un chef taliban qui doit gagner ses galons »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), La Voix du Nord,
  9. « Un chef controversé à la tête du Mouvement des talibans », RFI,
  10. « Baitullah Mehsud dead; Hakeemullah new leader of Pakistani Taliban », The Long War Journal,
  11. (en) « Suicide attack on Pakistani hotel », BBC News,
  12. AFP/AP, « Le principal porte-parole des talibans pakistanais capturé », Le Monde,
  13. « Enjeu stratégique pour Washington et Islamabad »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), El Watan,
  14. « Le numéro 2 des taliban pakistanais dit avoir pris les commandes »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), Reuters,
  15. « Le chef des talibans pakistanais est mort dimanche, selon un commandant taliban »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), RTL info,
  16. AFP, « Pakistan: Hakimullah Mehsud, jeune chef taliban et nouvelle bête noire de Washington », Le Point, (consulté le )
  17. AFP, « Près de 50 morts dans un nouvel attentat au Pakistan », La Dépêche du Midi, (consulté le )
  18. AFP, « Pakistan: fin de l'attaque du QG de l'armée, 19 morts dont trois otages », La Dépêche du Midi, (consulté le )
  19. (en) « Taliban claim responsibility for attack on Pakistan Army Headquarters », The Long War Journal,
  20. Frédéric Bobin, « Pourquoi le Pakistan passe à l'attaque au Sud-Waziristan », Le Monde,
  21. (en) « Peshawar blast search continues », BBC News,
  22. (en) « Pakistan offers Taliban bounties », BBC News,
  23. « Pakistan : L'attentat suicide a fait plus de 100 morts »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), Les Échos, .
  24. « Pakistan : attentats-suicides contre des minorités religieuses », Le Parisien,
  25. « Un attentat suicide au Pakistan fait 19 morts »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), Megados,
  26. Marie-France Calle, « Le kamikaze anti-CIA a agi pour les talibans pakistanais », Le Figaro,
  27. « Un chef taliban échappe à un missile »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), TF1 News,
  28. (en) Pamela Constable et Haq Nawaz Khan, « U.S. drone attack may have killed Pakistani Taliban chief », Washington Post, .
  29. a et b Pamela Constable et Haq Nawaz Khan, « Leader of Pakistani Taliban thought to be dead after U.S. strikes », Washington Post,
  30. (en) Alex Rodriguez, « Pakistani Taliban confirm leader's death », The Los Angeles Times
  31. Kalsoom, « Pakistan • Incertitudes au sujet de la mort du chef des talibans », Courrier international,
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  34. « Le chef des Talibans pakistanais aurait été tué », RIA Novosti,
  35. Reuters, « Le chef des talibans pakistanais aurait été assassiné », Le Devoir,
  36. « Les Taliban pakistanais confirment la mort de leur chef Hakimullah Mehsud », France 24,
  37. a et b AFP/Reuters, « Hakimullah Mehsud enterré, les talibans choisissent un successeur », Le Monde,
  38. (en) Bill Roggio, « Pakistani Taliban names new emir after Hakeemullah killed in drone strike », The Long War Journal,
  39. (en) Bill Roggio, « Pakistani Taliban name Mullah Fazlullah as new emir », The Long War Journal,
  40. Frédéric Bobin, « La nomination du mollah Fazlullah à la tête des talibans pakistanais affaiblit les chances de paix avec Islamabad », Le Monde,

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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