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« Lille-Saint-Sauveur » : différence entre les versions

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Lille-Saint-Sauveur est un ancien quartier populaire, insalubre mais vivant, rénové autour de 1960 qui fait partie de Lille-Centre.

Cette opération d’urbanisme n’a préservé qu’un petit nombre de bâtiments historiques et s’est accompagnée d’un renouvellement de sa population qui lui a fait perdre son identité.

Situation géographique

Porte de Paris vers 1850.
Porte de Tournai vers 1900


Le quartier est l'extrémité sud-est de l'ancienne ville à l’intérieur de l’enceinte dont la partie sud a été démantelée en 1858.

Il s’étend approximativement dans un périmètre entre la porte de Paris, l’Hôtel de Ville, la Noble Tour, la rue de Tournai le long de la gare de Lille-Flandres, la rue du Molinel puis, parallèlement à l’actuel boulevard de la Liberté tracé dans les années 1860 à l’emplacement des anciennes fortifications, les rues du Barbier de Maes, rue Ovigneur, la caserne Vandamme. à la limite intérieure de l’enceinte détruite après 1858 jusqu’à la porte de Paris.

La caserne Vandamme bâtie en 1736 était la caserne de la Porte de Paris.

Son entrée actuelle est rue Lydéric qui n'était pas ouverte avant l'agrandissement car son emplacement est à la limite de l'ancien rempart.

Jusqu’en 1858 , Saint-Sauveur était l’une des 6 paroisses de la ville avec Saint-André, Sainte Madeleine, Sainte Catherine à l’ouest, Saint-Etienne au centre, Saint-Maurice à l’est.

C'était également l'arrondissement Sud-Est, 3ème des 5 arrondissements de police constitués sous la Restauration.

Son territoire exigu était très densément peuplé.

Ses axes principaux formés dès le Moyen-Âge la rue des Malades actuelle rue de Paris conduisant à la route de Paris par la porte de Paris, la rue Saint-Sauveur la plus large, la rue de Fives (dont le tracé correspond approximativement à celui de l’actuelle rue Gustave Delory) et la rue de Tournai ont été élargis et en partie déplacés dans l’opération d’urbanisme des années 1960.

Les autres voies très étroites et sinueuses formaient un lacis de ruelles, cours, impasses, ont pour la plupart disparu lors de cette grande rénovation.

Sur les 7 portes de la ville, 2 donnaient accès à Saint-Sauveur.

• la porte de Paris dont les abords ont été dégagés lors du démantèlement d’une partie des fortifications consécutif à l’agrandissement de 1858.

Cette a ensuite été restaurée en 1889.

• la porte de Tournai également dite porte de Fives restée dans l’enceinte de Lille jusqu’à son déclassement en 1919.


Histoire

Superposition des cartes de Lille actuelle et de Lille au Moyen Âge, avec le positionnement de la Deûle.
Superposition d'une carte de Lille actuelle et d'une carte supposée de Lille au Moyen Âge : le quartier Saint-Sauveur est situé sur un territoire non inondable au sud de la zone d'alluvion de la Deûle sur un axe de communication Nord-Ouest-Sud-Est .

De l'origine à la Révolution industrielle

S’il ne constitue pas le noyau originel de Lille situé autour de l’actuelle cathédrale Notre-Dame de la Treille, le quartier Saint-Sauveur est l’un des plus anciens.

La « paroisse Saint-Sauveur » qui donna son nom au quartier apparaît en 1144 dans les sources.

Les paroisses de Saint-Maurice et de Saint-Sauveur constituent les troisième et quatrième paroisses les plus anciennes de Lille.

Intégrées dans la nouvelle enceinte vers 1273, ces paroisses tirent leur origine de l’antique village de Fins.

Ce village, constitué d’une église paroissiale (future église Saint-Maurice) connaît un développement important, ce qui entraîne l'érection d'une seconde église plus à l’est, qui devient la paroisse Saint-Sauveur.

La commune de Fins agrandie est ensuite administrativement rattachée à la cité lilloise au tout début du XIIIe siècle, puis intégrée dans la nouvelle enceinte issue du IIe agrandissement. La superficie de la capitale des Flandres est ainsi portée à 80 Ha.

Le territoire de Saint-Sauveur était situé à l’écart de zones marécageuses proches et également dans l’axe principal d’une traversée par voie terrestre en parcours non inondable entre le pays de Weppes au nord et le Mélantois au sud en passant par la motte castrale et l’île dans les bras de la Deûle.

Cet axe de circulation est celui de la future rue de Paris par un pont dont la rue des Ponts de Comines dans le quartier Saint-Maurice conserve le souvenir. Il se prolonge par les rues de Douai et d’Arras dans l’actuel quartier de Moulins en direction de l’Artois et des régions sud.

Cette situation va favoriser une urbanisation rapide.

La partie méridionale de l’enceinte de Lille construite à la fin du XIIè et au début du XIIIè siècle englobait à cette époque des surfaces non encore loties ou en cours de lotissement

Cependant ce territoire peuplé par des habitants venus des campagnes environnantes fut rapidement bâti au milieu du XIIIème siècle. La peste noire qui ravagea l’Europe ne ralentit pas la croissance démographique de Lille.

Dès cette époque, la plupart des constructions du quartier étaient des demeures exiguës où s’entassait une population pauvre de travailleurs de la draperie.

Cette pauvreté est attestée par la faiblesse des redevances et impositions contrastant avec l’aisance des quartiers autour de la Grand Place et de la rue Grande Chaussée [1].

La paroisse connaît des modifications et quelques extensions lors des quatrième et cinquième agrandissements.

La draperie était l’activité principale d’un quartier remuant, pittoresque et populaire selon les mots de l'historien Alain Lottin auteur d’une étude sur le milieu des sayetteurs lillois sous Louis XIV d’après la chronique d’un artisan de Saint-Sauveur contemporain du rattachement de la ville au royaume de France en 1666.

Les sayetteurs étaient des artisans tisserands fabriquant des tissus légers, corporation laborieuse typiquement lilloise.

La corporation concurrente des bourgetteurs tissait des étoffes mélangeant laine et lin.

La sayetterie et la bourgetterie se sont beaucoup développées à la suite de la réunion de la Flandre à l’Espagne et grâce aux privilèges accordés par Maximilien de Habsbourg et Marie de Bourgogne. Ces activités souffrirent de l’annexion de Lille au Royaume de France en 1666. [2].

Du début du XIXè sièle à 1960

Au XIXè siècle l’artisanat est remplacé par le travail manufacturier. Les filtiers, ouvriers des filatures de coton et de lin dont beaucoup sont des descendants des artisans des anciennes corporations s’entassent dans logis minuscules sans air ni lumière dans un lacis de ruelles et de courées sans égouts ni distribution d’eau. Pour une densité de population équivalente à celle du centre de Paris à la même époque, la suroccupation des logements est accentuée par la faible élévation des maisons. Le tableau établi par l'historien Pierre Pierrard dans la vie ouvrière à Lille sous le Second Empire page 106 indique que, seules 1371 maisons sur 6574 de l’ancien Lille (21 %) avaient plus de 2 étages en 1861.

Les rues des Etaques, des Robleds, du Curé-Saint-Sauveur réunissent une misère indescriptible que l'on rencontre dans des caves ou des cours qui datent parfois de l'époque médiévale [3].

Ces conditions sont décrites par Victor Hugo après sa visite du quartier le 10 février 1851 avec Adolphe Blanqui dans un texte rédigé pour un discours à l’Assemblée Nationale qu’il n’aura pas l’occasion de prononcer [4][5]. Cette visite lui a inspiré un célèbre poème :

Caves de Lille ! on meurt sous vos plafonds de pierre !

J'ai vu, vu de ces yeux pleurant sous ma paupière,

Râler l'aïeul flétri,

La fille aux yeux hagards de ses cheveux vêtue,

Et l'enfant spectre au sein de la mère statue !

O Dante Alghieri''

Adolphe Blanqui a décrit Saint-Sauveur dans son rapport Des classes ouvrières en France pendant l'été 1848 comme "Une suite d'ilots séparés par des ruelles sombres et étroites aboutissant à des petites cours connues sous le nom de courettes, servant à la fois d'égouts et de dépôts d'immondices, où règne une humidité constante".

Pourtant Saint-Sauveur n’était pas un ghetto.

Ainsi Pierre Pierrard estime dans La Vie ouvrière à Lille sous le second Empire page 44, qu'en dépit de la misère de la majorité, le quartier avait conservé une certaine diversité sociale avec un petit commerce vivant et quelques familles bourgeoises résidentes telle la famille des industriels Wallaert rue Saint-Sauveur.

Pierre Pierrard dans son étude Les Chansons en patois à Lille sous le second Empire citée par le même auteur dans La Vie ouvrière à Lille sous le second Empire page 47 décrit ainsi Saint-Sauveur :

« C’était le quartier le plus typiquement lillois, celui que les chansonniers célèbrent dix fois plus que les autres. Là gîtaient beaucoup de petites gens, des ouvriers de souche comme les filtiers ; c’est dans ses rues que résonnaient, avec le plus de spontanéité réelle le patois. Là étaient les cabarets les plus célèbres, sièges des plus vivantes sociétés »

Pierre Pierrard dans la Vie ouvrière à Lille sous le Second Empire page 45 :

« On peut dire sans exagérer que Saint-Sauveur était plus que l’exutoire de la vielle industrielle, l’âme vivante de l’ancien Lille. »

Saint-Sauveur en chansons

Parmi les nombreux chansonniers de Saint-Sauveur, Alexandre Desrousseaux auteur de L'Canchon Dormoire le P’tit Quinquin qui habitait la maison du 120 rue Saint-Sauveur emportée dans la rénovation des années 1960 est le plus célèbre.

Ce court extrait d’une de ses nombreuses chansons tiré de l’édition Toutes les œuvres en patois du chansonnier Desrousseaux Edition du Syndicat d’initiative « les amis de Lille » condense l'esprit des habitants de Saint-Sauveur : misère, gaîté et une certaine résignation. Original en patois (typographie de l'édition respectée) et traduction en français.

Chés brav’s gins n’sont point riches

Mai’ i’ ont l’cœur joyeux,

Ch’ti qui n’a qu’eun’ quemiche,

S’di : « on n’en met point deux ! »

Il’ ont raison

L’argint n’fait point l’bonheur

I’sont gais dins l’misère

Les infants d’Saint-Sauveur

Dins les pus sal’s courettes,

Dins les cav’s, les guerniers,

Sans air, faut’ de ferniêtres,

Hélas ! i’ sont logés.

Eun’ cambre, souvint p’tite

Log’ pèr, mèr’, frère et sœur

Et v’là l’tableau d’un gîte

Des infants d’Saint-Sauveur

Ces braves gens ne sont pas riches

Mais ils ont le coeur joyeux

Celui qui n’a qu’une tartine

Se dit : on n’en met pas deux

Ils ont raison

L’argent ne fait pas le bonheur

Ils sont gais dans la misère

Les enfants de Saint-Sauveur

Dans les plus sales courettes

Dans les caves, les greniers

Sans air faute de fenêtre

Hélas ! ils sont logés

Une chambre souvent petite

Loge père, mère, frère et sœur

Et voilà le tableau d’un gîte

Des enfants de Saint-Sauveur

La rénovation Table rase

Malgré les bombardements du siège de 1792 qui ont détruit de nombreuses maisons et ceux de 1914 relativement peu dévastateurs pour le centre de Saint-Sauveur, touchant principalement les alentours de la gare et de Saint-Maurice, les constructions très anciennes sont restées jusqu’au milieu du XXème siècle dans leur trame médiévale resserrée.

Les modestes opérations d’urbanisme , percement de la rue Wicar et dégagement de la petite place Wicar de 1835 à 1838 qui ont fait disparaître quatre courettes et création en 1862 du square du Réduit futur square Ruault n’avaient pas modifié la physionomie d’ensemble de Saint-Sauveur

L’assainissement envisagé avant la première guerre mondiale a été programmé dans le prolongement de la construction du nouvel Hôtel de Ville de 1924 à 1932.

Le percement de larges avenues de type haussmannien était prévu à travers le quartier au départ d’une grande place devant la Mairie. Ce projet était également destiné à étendre le centre-ville vers le sud [6].

Les difficultés économiques des années 1930 et la guerre mondiale ont différé cette opération d’urbanisme réalisée sous une forme différente autour de 1960.

Les habitants ont été relogés, pour la majorité dans d’autres quartiers, au cours des années 1950 et beaucoup de logements dégradés ont été transitoirement occupés en attendant leur démolition par des travailleurs émigrés principalement algériens au cours de la guerre d’Algérie.

L’ancien quartier a été rasé à l’exception de monuments historiques isolés.

A sa place des taudis, des blocs d’habitation salubres et confortables mais d’une triste monotonie et quelques immeubles de bureaux et administratifs ont été édifiés dans le style sans attrait des années 1960 le long de voies considérablement élargies.

Les rues de Paris, Saint-Sauveur et de Tournai qui ont conservé leur nom et l’ancienne rue de Fives actuelle rue Gustave Delory sont devenues méconnaissables. Cette opération de table rare a fait disparaître en quelques années 83 % des anciennes rues [7].

Saint-Sauveur au XXIème siècle

Saint-Sauveur vu du beffroi.
Saint-Sauveur vu du beffroi. Au premier plan l'Hôtel de ville, de droite à gauche l'hôpital St-Sauveur, l’église Saint-Sauveur, la tour de la Trésorerie, le hall de la gare au second plan, à gauche derrière les immeubles on devine la Cour des Brigitines

La disparition des vielles maisons très dégradées mais qui auraient pu être restaurées et mises en valeur comme dans le Vieux Lille en a fait un quartier froid et sans âme. Le projet de 1920 d’étendre le centre dans cette direction a été oublié. Les monuments préservés isolées touristique et l’unique ensemble de la Cour des Brigitinnes ne suffisent pas en faire un pôle d’attraction touristique. Le quartier peu commerçant est principalement un lieu de passage entre le centre vivant autour de la Grand’ Place et les quartiers de Moulins et de Wazemmes plus animés au sud [8].

Monuments du quartier

Hospice Gantois

Cour des Brigittines

Hôtel particulier du 50 rue Gustave Delory

Eglise Saint-Sauveur

Hôpital Saint-Sauveur

Hôtel de Marchiennes

Noble Tour

Hôtel de ville

Parte de Paris

Références

Bibliographie

• Gérard Sivéry Du triangle d’or lillois de 1325 aux caves de Saint-Sauveur Revue du Nord n° 365 2006/2

• Maurice Vanhaeck, Histoire de la sayéterie à Lille, Lille, Imprimerie Lefebvre-Ducrocq, 1910

• Paule Danies-Fauchille Sayetterie et bourgetterie lilloises: ou, L'industrie drapière à Lille Académie européenne du livre, 1991

• Pierre Pierrard La Vie ouvrière à Lille sous le second Empire, Bloud et Gay, 1965

• Pierre Pierrard Les Chansons en patois à Lille sous le second Empire, Arras, 1966

• Alain Lottin, Chavatte, ouvrier lillois, un contemporain de Louis XIV, Paris, Flammarion, 1979 (1re publication 1968).

• Adolphe Blanqui Des classes ouvrières en France pendant l’année 1848 Paris 1849 BN R 29271

• Toutes les œuvres en patois du chansonnier Desrousseaux en 5 volumes Edition du Syndicat d’initiative « les amis de Lille » Nouvelles éditions Ch. Gras 36 rue Faidherbe Lille 1938

liens externes

http://lillesaintsauveur.blogspot.fr/ Les secrets de Saint-Sauveur en Lille Hervé Lépée

http://www.lilledantan.com/saint_sauveur.htm

http://www.horizon-nomade.com/lille-promenades-quartier-saint-sauveur/