Solidarité (droit français)

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La solidarité est un lien social d'engagement et de dépendance réciproques entre des personnes ainsi tenues à l'endroit des autres, généralement des membres d’un même groupe liés par une communauté de destin (famille, village, profession, entreprise, nation, etc.).

En droit, la solidarité (in solidum signifie pour le tout) des débiteurs signifie que le créancier peut demander le paiement pour l'intégralité de la dette à n'importe lequel des débiteurs.

Étymologie

Le terme dérive du latin solidus (massif) et de l'expression latine in solidum qui signifie « pour le tout ».

Notion juridique

Dans le cadre juridique, on parle de solidarité chaque fois que plusieurs personnes ont une obligation en commun, qu'il s'agisse d'une dette contractuelle, délictuelle, quasi-délictuelle ou liée à la possession commune d'une chose ou d'un droit (par exemple pour les membres d'une indivision). La notion de solidarité est donc liée à celle de société, qu'elle soit de droit ou de fait.

Selon le Code civil français, il y a solidarité entre débiteurs s’ils ont engagé ensemble un emprunt et sont tous responsables pour son remboursement : « il y a solidarité de la part des débiteurs, lorsqu'ils sont obligés à une même chose, de manière que chacun puisse être contraint pour la totalité, et que le paiement fait par un seul libère les autres envers le créancier[1]. » Le Code civil dispose également que « la solidarité ne se présume point ; il faut qu'elle soit expressément stipulée[2] », c’est-à-dire qu'elle doit résulter d'une mention explicite de la loi ou d'un contrat.

Sens général

Dans son acception générale, la solidarité caractérise des personnes qui choisissent ou ressentent une moralité d'assister une autre personne et réciproquement. La solidarité se distingue de l'altruisme : l'altruiste peut souhaiter aider autrui sans pour autant se sentir concerné par ce qui lui arrive, et inversement on peut se rendre solidaire d'autrui simplement par intérêt bien compris (attente d'une réciprocité) et non par altruisme.

Très souvent, on présente sous cette forme positive des formes de solidarité plus ambiguë :

  • une forme d'échange mutuel, où chaque membre se rend solidaire des autres parce que les autres se rendent solidaire de lui. C'est donc un calcul (économique) et non une démarche généreuse (voir coopération) ;
  • une forme de solidarité imposée, où chaque membre se trouve obligé d'adhérer au groupe sous peine de perdre certains bénéfices (frais de copropriété,...), voire sous la menace de sanctions (partie socialisée du salaire, impôts, conscription).

Historique de l'analyse sociologique du terme

La notion a été étudiée par Charles Gide à la fin du XIXe siècle ; théoricien de l'École de Nîmes, mouvement coopératif français, il a développé les idées de coopération émancipatrice à partir de 1886[3].

Puis Émile Durkheim, dans De la division du travail social (1893), reprend et développe la notion de solidarité sociale en tant que lien moral entre individus d'un groupe ou d'une communauté. Selon Durkheim, pour qu'une société existe, il faut que ses membres éprouvent de la solidarité les uns envers les autres. Elle est liée également à la conscience collective qui fait que tout manquement et crime vis-à-vis de la communauté suscite l'indignation et la réaction de ses membres. Il développe les concepts de « solidarité mécanique » et de « solidarité organique »[4]. Une société donnant lieu à de la solidarité mécanique tient sa cohésion de l'homogénéité de ses membres, qui se sentent connectés par un travail, une éducation, une religion, un mode de vie similaires. La solidarité mécanique se produit normalement dans les sociétés traditionnelles de petite taille[5]. La solidarité organique provient quant à elle de l'interdépendance qui vient de la spécialisation du travail et des complémentarités entre personnes, que provoquent les sociétés modernes, industrielles[5], [6].

Groupes dans lesquels la solidarité est fortement présente

L'armée provoque généralement une grande solidarité et de l'entraide entre les soldats, qui sont liés par un destin commun (gagner ou mourir ensemble).

La solidarité se manifeste particulièrement lorsqu'une partie d'une population est victime d'un problème inattendu frappant aléatoirement : une catastrophe naturelle, un acte terroriste, etc.

Formes de solidarité

La solidarité au sein d'une société s'exprime en particulier envers les plus pauvres ou des groupes ou personnes vulnérables, à court, moyen ou long terme, à échelle locale ou plus large (coopération décentralisée, solidarité internationale). Elle peut prendre la forme d'une aide pécuniaire, d'un soutien moral, ou d'une aide en nature (nourriture, etc.), de l'accueil de réfugiés, etc.

Depuis la fin du XXe siècle, et en particulier depuis le Sommet de la Terre de Rio, on parle aussi de solidarité transgénérationnelle (ou envers les générations futures, et de solidarité écologique, thèmes retrouvés dans le projet de "Pacte de solidarité écologique" sur le site du ministère de l'Ecologie[7],[8].

Utilisation politique du terme

L’État pratique une redistribution des revenus et des richesses que les hommes politiques élus justifient, selon leur tendance politique, par un « devoir de solidarité » entre membres d'une même société, par une augmentation des inégalités sociales menaçant la cohésion sociale, ou par une confiscation des richesses produites par le travail au profit du capital, nécessitant une redistribution des richesses. Selon les plus libéraux, économiquement parlant, cette pratique tend vers l'assistanat et la spoliation étatique.

Divers types d'organisations se réclament de la valeur positive de solidarité, voire se considèrent comme un fragment de l'incarnation de la solidarité :

Il est à noter que, dans le vocabulaire administratif, législatif et gouvernemental, le mot solidarité est presque toujours employé dans un sens restreint, très éloigné du sens propre puisqu'il exclut précisément toute notion de mutualité ou de réciprocité. Il est plutôt utilisé pour désigner des prélèvements obligatoires sans contrepartie, ne permettant pas aux assujettis de bénéficier d'un mécanisme de solidarité. Le mot "solidarité", dans ce cas, est utilisé pour sa connotation sociale positive, sans signification particulière[9]. Plus généralement, le mot solidarité est souvent utilisé comme un substitut de notions idéologiquement connotées, désuètes ou susceptibles d'interprétations négatives telles que charité, aumône ou assistance, et sans référence au sens initial. Il fait partie, à cet égard, du vocabulaire français politiquement correct.

Notes et références

  1. Article 1200 du Code civil français.
  2. Article 1202 du Code civil français.
  3. « Charles Gide (1847-1932) », Musée virtuel du protestantisme français
  4. article "Solidarité sociale", Encyclopédia Universalis. Consulté le 11 août 2008.
  5. a et b (en) Collins Dictionary of Sociology, p. 405-6.
  6. « Éléments pour une généalogie du concept de solidarité », Bruno Karsenti, in Futur Antérieur, n°41/42, 1997 ; La solidarité. Histoire d'une idée, Marie-Claude Blais, 2007, Gallimard
  7. projet de "Pacte de solidarité écologique" sur le site du ministère de l’Écologie.
  8. Synthèse et rapport de mission Transformation des modes de vie, des comportements et de la consommation (PDF - 760 Ko)
  9. Par exemple, en France, certains exploitants sont redevables d'un prélèvement obligatoire dit "cotisation de solidarité", qui contribue au financement de la Mutualité Sociale Agricole sans leur donner droit aux prestations sociales correspondantes; de même, l'Impôt de solidarité sur la fortune, n'est ni plus ni moins "solidaire" que n'importe quel autre impôt.

Voir aussi

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Articles connexes

Liens externes

Bibliographie