Raid de Yakla

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Raid de Yakla

Informations générales
Date
Lieu Yakla, gouvernorat d'Al-Bayda
Issue
  • Échec de la mission
    Cible introuvable[1]
  • Le Pentagone affirme qu'un téraoctet d'informations sur AQPA a été capturé[2]
  • Plusieurs hauts responsables américains affirmeront plus tard que le raid n'a produit aucun renseignement significatif[1]
  • De nombreux civils ont été tués[3]
Belligérants
Drapeau des États-Unis États-Unis
Émirats arabes unis
Al-Qaïda dans la péninsule arabique
- Membres de la tribu al-Dhahab
Forces en présence
Drapeau des États-Unis États-Unis
Emirats Arabes Unis
Plusieurs forces spéciales[4]
Pertes
1 mort
3 blessés
V-22 Osprey détruit
14 tués (revendication américaine)

Notes

Entre 10 et 31 civils tués[5],[6]

Guerre civile yéménite

Coordonnées 13° 43′ 04″ nord, 44° 44′ 01″ est
Géolocalisation sur la carte : Yémen
(Voir situation sur carte : Yémen)
Raid de Yakla

Le raid de Yakla est une opération conjointe des États-Unis et des Émirats arabes unis menée dans le village de Ghayil, dans le gouvernorat d'Al-Bayda au Yémen.

L'opération, décidée par le président américain Donald Trump avait initialement pour but de cibler le chef d'AQPA Qasim al-Raymi.

Entre 10 et 30 civils (dont Nawar al-Awlaki) ont été abattus lors du raid, ainsi qu'un Navy SEAL. Un Bell Boeing MV-22B Osprey a été détruit pendant l'opération à la suite d'un dysfonctionnement. 

Ce raid a été décrit comme très "risqué dès le début et coûteux à la fin" et que l'opération a été "bâclée".

Contexte[modifier | modifier le code]

Les États-Unis soutiennent l'intervention de l'Arabie saoudite au Yémen dans leur lutte contre les terroristes houthis par des armes, des renseignements, des conseils militaires, des opérations maritimes et terrestre et le ravitaillement en carburant des avions de la coalition[7].

Les États-Unis mènent également une campagne militaire contre Al-Qaïda dans la péninsule arabique et l'État islamique[8].

Approbation de l'opération[modifier | modifier le code]

L'opération de Yakla n'a pas suivi la procédure rigoureuse utilisée sous les administrations de George W. Bush et Barack Obama, qui implique une réunion détaillant le plan opérationnel, les objectifs de l'opération, une évaluation des risques humains et d'une évaluation juridique de l'opération[9],[10].

Au lieu de cela, le raid a été approuvé lors d'un dîner entre Trump, son gendre Jared Kushner, son conseiller Steve Bannon et le secrétaire à la Défense Jim Mattis[10].

Le général Joseph Dunford et le chef d'état-major interarmées a présenté le plan. Le conseiller à la sécurité nationale Michael Flynn était également au dîner. Aucun représentant du département d'État n'était présent, contrairement aux normes des administrations précédentes[10].

Déroulement[modifier | modifier le code]

Le , une équipe d'opérateurs DEVGRU a été envoyée de Djibouti au groupe de préparation USS Makin Islan[11].

À l'aube du , plusieurs dizaines de commandos du Naval Special Warfare Development Group (DEVGRU), ainsi que des opérateurs des Émirats arabes unis, ont débarqués par tiltrotor MV-22 Osprey près du supposé domicile d'Abdul Rauf al-Dhahab, un chef de tribu, dans la région montagneuse de Yakla à Al-Bayda[11].

En approchant, les opérateurs ont été informés via une interception de communications qu'ils avaient été repérés. L'équipe du DEVGRU "s'est retrouvée à tomber sur une base renforcée d'Al-Qaïda défendue par des mines terrestres, des tireurs d'élite et un contingent plus important que prévu d'extrémistes islamistes lourdement armés" selon une déclaration américaine[12].

Un villageois qui a survécu à l'attaque, Cheikh Abdelilah Ahmed al-Dhahab, a rapporté que son fils de onze ans, Ahmed Abdelilah Ahmed al Dahab, avait été le premier à s'adresser aux soldats, demandant "Qui êtes-vous?" Il a été mortellement abattu par les commandos américains[13].

Au village, l'équipe américano-émirienne s'est engagée dans une violente fusillade avec les forces d'al-Qaïda et la tribu al-Dahab. Des hélicoptères et des avions de combat américains ont également tiré sans discernement sur le village[11].

L'un des opérateurs américains, William Owens, a été mortellement touché par des coups de feu. Lors de l'extraction du blessé, un MV-22B Osprey américain a été endommagé lors d'un atterrissage brutal après avoir perdu de la puissance, blessant trois opérateurs américains[14].

L'Osprey a ensuite été détruit par une frappe aérienne menée par un avion Harrier pour éviter que des éléments électroniques sensibles ne soient capturés par l'ennemi. Les agents du DEVGRU ont réussi à s'extraire et à quitter la zone après avoir terminé leur raid[14].

MV-22 Ospreys

Victime[modifier | modifier le code]

Al-Qaïda[modifier | modifier le code]

Selon le Pentagone, l'opération a résulté sur la mort de trois membres éminents d'Al-Qaïda : Abdel Raouf al-Dhahab, Sultan al-Dhahab et Seif al-Nims[15].

L'armée américaine a rapporté que quatorze combattants d'Al-Qaïda et de la tribu al-Dahab avaient été tués, dont Arwa Baghdadi, une Saoudienne de 35 ans[16]. le 3 février, le CENTCOM a publié des extraits de vidéos du raid et a affirmé que deux des dirigeants d'Al-Qaïda qui ont été tués, Sultan al-Dhahab et Abdulraouf al-Dhahab. Le CENTCOM a également affirmé après avoir diffusé les clips que plusieurs des 14 militants tués étaient également des chefs intermédiaires et des facilitateurs[17].

Après le raid, plusieurs rapports et articles ont contesté l'affiliation à Al-Qaïda de certaines cibles du raid, déclarant par exemple que la mort d'Abdelraouf al-Dhahab attisera le sentiment anti-américain dans la région, non pas parce qu'il appartenait à AQPA, mais parce qu'il n'en faisait absolument pas partie[18],[19].

Peu avant le raid, Abdelraouf al-Dhahab a participé à une réunion de cinq jours avec des responsables militaires du gouvernement d'Abdrabbuh Mansur Hadi, gouvernement soutenue par les États-Unis[20]. L'armée lui a donné environ 15 millions de riyals (60 000 dollars) pour lutter contre les rebelles houthis. En 2013 déjà, Abdelraouf à promis de chasser AQPA de la région d'al-Bayda[20].

Le porte-parole militaire du gouvernement Hadi, Mohsen Khasrouf, a déclaré qu'al-Dhahab travaillait conjointement avec le gouvernement pour reprendre la ville de Rada'a aux Houthis[20].

Pertes civiles[modifier | modifier le code]

L'armée américaine a initialement nié qu'il y ait eu des victimes civiles lors du raid, mais a déclaré plus tard qu'elle menait une enquête si les accusations s'avéraient véridiques ou non[21].

Le Pentagone a confirmé plus tard que des civils, y compris de nombreuses femmes et enfants, avaient probablement été tués lors de l'attaque[22]. Un responsable du gouvernement yéménite en charge du gouvernorat d'Al Bayda a déclaré qu'au moins huit femmes et sept enfants (âgés entre 3 et 13 ans) avaient été tués[23].

Human Rights Watch a rapporté qu'au moins 14 civils, dont neuf enfants, avaient été tués dans l'opération[24]. Le Bureau of Investigative Journalism (BIJ), à quant à lui constaté que l'opération à "terriblement mal tourné" et que, "selon des villageois locaux, 25 civils, qui n'étaient pas membres d'AQPA, avaient été tués" ; dont neuf enfants de moins de 13 ans, le plus jeune étant un bébé de trois mois. Le BIJ a répertorié les noms et âges des enfants décédés. Outre les neuf enfants tués, le BIJ rapporte qu'une femme enceinte a également été tuée[13].

La CENTCOM a déclarée plus tard que les morts civiles semblent avoir été le résultat de tirs aériens américains[25].

Nawar al-Awlaki[modifier | modifier le code]

Parmi les personnes tuées lors du raid sur Yakla se trouvait une citoyenne américaine de 8 ans, Nawar al-Awlaki, également connu sous le nom de Nora. Le grand-père de Nora, Nasser al-Awlaki, a déclaré qu'elle avait été touchée d'une balle au cou et qu'elle a agonisé pendant plus de deux heures avant de mourir.

Destruction des bâtiments et mise à mort du bétail[modifier | modifier le code]

Plus d'une douzaine de bâtiments ont été détruits et plus de 120 bestiaux, essentiel aux villageois, ont été abattus, en majorité a cause des bombardements aériens[26].

L'opération à également gravement endommagés la clinique médicale du village ainsi que la mosquée et l'école[27].

Américain[modifier | modifier le code]

Au cours du raid, un commando du DEVGRU (communément appelé SEAL Team Six), William Owens, a été tué. Trois autres opérateurs DEVGRU ont été blessés, et un avion militaire détruit[28].

Renseignement[modifier | modifier le code]

D'après le Pentagone un téraoctet d'informations sur AQPA a été capturé lors du raid.

David Sanger (en), un journaliste du New York Times, qui a couvert le raid a déclaré : « Il est difficile d'appeler cela un succès, car nous ne savons pas quelle était la valeur des informations qu'ils essayaient d'exploiter, qui proviennent principalement d'ordinateurs et de téléphones portables. Et d'après tout ce que nous avons entendu, ils n'ont pas encore eu l'occasion d'évaluer cela[29]. »

Le général Spicer a affirmé que le raid a rassemblé une quantité incroyable de renseignements qui empêcheront des morts ou des attaques sur le sol américain. Cependant, le seul exemple que les responsables du Pentagone ont réussi à citer est une vidéo pédagogique obsolète sur la fabrication d'une bombe qui n'a aucune valeur factuelle[29].

Plusieurs hauts fonctionnaires américains ont déclaré à NBC News que le raid n'a fourni aucun renseignement significatif, et qu'il n'y a aucune preuve que les renseignements sauveraient des vies ou empêcheraient de futures attaques[29].

Finalement, le sur Fox & Friends, le président Trump a imputé l'échec de la mission à l'armée américaine[30].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a et b (en) Mark Hensch, « Yemen SEAL raid yielded no significant intel : report », sur thehill.com, (consulté le ).
  2. (en) Nicholas Fandos, « With Nation Watching, Widow of Fallen SEAL Becomes a Face of Bravery », The New York Times,‎ (lire en ligne Accès payant, consulté le ).
  3. (en) Barbara Starr et Ryan Browne, « US tries to ID hundreds of al Qaeda contacts thanks to Yemen raid », sur cnn.com, (consulté le ).
  4. a b c et d « nbcnews.com/news/us-news/yemen… »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?).
  5. « Yemeni civilians killed in first US raid under Trump », sur archive.org, Al Jazeera, (consulté le ).
  6. (en) Samuel Osborne, « Yemen raid that killed 30 civilians and US Navy SEAL uncovered 'no actionable intelligence', officials say », sur archive.org, The Independent, (consulté le ).
  7. (en) « US Troops Staying in Yemen for Now, Pentagon Official Says », sur Military.com, (consulté le ).
  8. (en) « Yemen’s al-Qaeda : Expanding the Base », sur crisisgroup.org, (consulté le ).
  9. (en) « What went wrong in the deadly raid on al-Qaida in Yemen? », sur pbs.org, PBS NewsHour, (consulté le ).
  10. a b et c (en) « Inside the Yemen raid: What went wrong? SEAL's father demands answers. », sur NBC News (consulté le ).
  11. a b et c https://www.nytimes.com/2017/02/01/world/middleeast/donald-trump-yemen-commando-raid-questions.html%3e.
  12. (en) « US raid on al-Qaeda in Yemen : What we know so far », sur bbc.com, BBC News, (consulté le ).
  13. a et b https://www.thebureauinvestigates.com/2017/02/08/nine-young-children-killed-full-details-botched-us-raid-yemen/
  14. a et b « bbc.com/news/world-middle-east… »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?).
  15. Deutsche Welle, « US raid in Yemen kills civilians, al Qaeda militants », sur dw.com, Deutsche Welle, (consulté le ).
  16. (ar) « Arwa Baghdadi : Saudi woman who joined al-Qaeda killed in Yemen », sur Al Arabiya English, (consulté le ).
  17. (en) « U.S. Central Command releases video retrieved during weekend raid in Y », sur centcom.mil via Wikiwix (consulté le ).
  18. (en) W.J. Hennigan, « What happened the night a U.S. commando was killed in combat, the first such death of Trump's presidency », Los Angeles Times,‎ (lire en ligne Accès payant, consulté le ).
  19. (ar) « US forces in Yemen have targeted the al-Dhahab family, but who are they? », sur Al Arabiya English, (consulté le ).
  20. a b et c (en) « Pro-government tribal leader among dead in US raid in Yemen », sur The Big Story (consulté le ).
  21. (en) Eric Schmitt, « U.S. Commando Killed in Yemen in Trump’s First Counterterrorism Operation », The New York Times,‎ (lire en ligne Accès payant, consulté le ).
  22. https://www.npr.org/2017/02/02/513104949/u-s-acknowledges-death-of-civilians-in-yemen-raid
  23. (ar) « US raid in Yemen kills American 8-year-old daughter of al-Awlaki », sur Al Arabiya English, (consulté le ).
  24. (en) « Yemen : US Should Investigate Civilian Deaths in Raid », sur Human Rights Watch, (consulté le ).
  25. « US admits civilians 'likely' killed in Yemen raid », sur archive.org, Al Jazeera, (consulté le ).
  26. (en) The Intercept, « Women And Children In A Yemeni Village Recall The Horror Of Trump’s ‘Highly Successful’ SEAL Raid », sur uproxx.com, (consulté le ).
  27. (en) Alex Emmons, « Trump Intends to Follow Up Botched Yemen Military Raid By Helping Saudis Target Civilians » Accès payant, sur theintercept.com, (consulté le ).
  28. (en) Eric Schmitt et David E. Sanger, « Raid in Yemen: Risky From the Start and Costly in the End », The New York Times,‎ (lire en ligne Accès payant, consulté le ).
  29. a b et c « nbcnews.com/news/investigation… »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?).
  30. (en) Igor Bobic, « Donald Trump Blames SEAL's Death On Military: 'They Lost Ryan' », sur huffingtonpost.com, HuffPost, (consulté le ).