Neuropathie auditive

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La neuropathie auditive est une atteinte de l'audition dans laquelle les cellules ciliées externes de la cochlée sont présentes et fonctionnelles, mais avec une mauvaise transmission de l'information auditive par le nerf auditif[1]. La perception de la parole est donc détériorée, malgré des seuils auditifs relativement préservés sur l'audiogramme. L'audition périphérique peut être normale ou présenter une surdité allant jusqu'à un degré profond. L'intelligibilité de la parole est pire que ce à quoi on aurait pu s'attendre si la perte était d'origine cochléaire seulement.

Une neuropathie réfère généralement à un dysfonctionnement d'un ou plusieurs nerfs périphériques, mais le nerf auditif n'est pas toujours affecté dans le spectre de la neuropathie auditive[2]. La perte auditive augmente le risque de présenter une neuropathie auditive. La prévalence dans la population est relativement inconnue. Les nouveau-nés présentant des facteurs de risque élevés de surdité ont une prévalence allant jusqu'à 40%[3]. Les facteurs à haut risque sont: hypoxie, faible poids à la naissance, hyperbilirubinémie, jaunisse, naissance prématurée et traitements aux antibiotiques aminosides[4].

Sites de lésion possibles[modifier | modifier le code]

 Selon les études cliniques avec des sujets atteints de la neuropathie auditive, l'atteinte responsable des difficultés d'écoute a été localisée à un ou plusieurs de ces emplacements: cellules ciliées internes de la cochlée, synapse entre les cellules ciliées internes et le nerf auditif, ou lésion du nerf auditif[5].

Diagnostic de la neuropathie auditive[modifier | modifier le code]

La neuropathie auditive peut être diagnostiquée par une batterie de tests incluant les émissions oto-acoustiques (EOA), les potentiels évoqués auditifs du tronc cérébral (PÉATC) et les réflexes stapédiens acoustiques (RSA). Les potentiels évoqués auditifs devraient être testés en polarité de condensation et de raréfaction pour aider à l'identification du microphonique cochléaire[6]. Typiquement, les résultats observés incluent des EOA présentes, indiquant une bonne fonction des cellules ciliées externes, des PÉATC absents ou anormaux mais avec la présence du microphonique cochléaire, ainsi que des RSA absents[7]. À ce jour, il a été démontré que ces patients n'ont jamais de réflexes acoustiques dans la normale à 95 dB HL ou moins malgré la présence d'émissions oto-acoustiques[8].

Les autres tests possibles incluent l'audiométrie tonale et vocale. Les patients souffrant de neuropathie auditive peuvent souvent avoir des seuils auditifs dans la normale mais avoir des difficultés de compréhension de la parole, surtout dans le bruit[9]. Ainsi, la présentation clinique typique chez un adulte est celle d'un patient qui entend les sons de la parole, mais qui n'est pas capable de leur donner un sens et de comprendre ce qui est dit ou de suivre la conversation, ce qui est empiré dans les environnements plus bruyants[10]. Cela peut grandement diminuer la qualité de vie de certains patients.

La neuropathie auditive peut survenir spontanément ou en association avec des maladies telles que la maladie de Charcot-Marie-Tooth ou encore l'ataxie de Friedreich . Elle peut être de cause congénitale ou acquise. La neuropathie auditive peut être due à des facteurs génétiques dans des schémas syndromiques, non syndromiques et mitochondriaux. Il est estimé qu’environ 40 % des cas de neuropathie auditive ont une cause génétique[11].

Il semble que quel que soit le profil audiométrique (seuils d'audition) ou leur fonction sur les tests de parole traditionnels dans le silence, la grande majorité des personnes affectées ont une très mauvaise perception auditive dans des situations avec du bruit de fond, plus marquée que ce qui serait observé chez la population générale[12].

Fonction auditive résiduelle[modifier | modifier le code]

Lors d’une évaluation audiologique standard, il n’y a pas d’indices qui indiquent la présence d’une neuropathie auditive.

Lorsqu'on diagnostique une neuropathie auditive chez un patient, il n'y a pas non plus de niveau de fonctionnement caractéristique. Les patients peuvent présenter relativement peu de dysfonctionnements, hormis des problèmes d'audition de la parole dans le bruit, ou être complètement sourds et ne tirer aucune information utile des signaux auditifs.

Des prothèses auditives sont parfois prescrites, avec un succès mitigé[13]. Les systèmes FM combinés à des prothèses auditives ou à des implants cochléaires pourraient accroître le succès de ces dispositifs d'amplification. Certaines personnes atteintes de neuropathie auditive obtiennent des implants cochléaires, également avec un succès mitigé[14]. Les chercheurs ont notamment conclu qu’une perte auditive liée à la neuropathie auditive aurait de nombreuses comorbidités, et serait une catégorie de perte trop hétérogène pour que l'on puisse faire des déclarations définitives sur le pronostic[15],[16]. Les patients présentent donc des caractéristiques et des besoins de prise en charge très variés.

Dépistage auditif et dépistage par potentiels évoqués auditifs[modifier | modifier le code]

Le dépistage universel des troubles auditifs chez le nouveau-né est obligatoire dans la majorité des États-Unis. Ces dépistages comprennent le test EOA - émissions otoacoustiques, qui sont des sons générés par la cochlée et transmis par l'oreille moyenne au conduit auditif externe, où ils peuvent être enregistrés[17]. Ce test permet d'évaluer la fonctionnalité de la cochlée, mais pas celle du nerf auditif. Un Potentiel évoqué auditif du tronc cérébral (PÉATC) est nécessaire pour vérifier que le son est bien transmis par le nerf au cerveau[18]. Dans la plupart des régions d'Australie, le dépistage auditif par le test PÉATC est obligatoire, ce qui signifie que pratiquement tous les cas de neuropathie auditive congénitale (c'est-à-dire de naissance) devraient être diagnostiqués à la naissance.

Au Canada, le dépistage auditif (seulement les émissions oto-acoustiques) n'est pas obligatoire dans toutes ces provinces. Dans la province du Québec, le Programme québécois de dépistage de la surdité chez les nouveau-nés (PQDSN) est instaurer. Cependant, ce n'est pas tous les hôpitaux qui offre ce programme. Ce faisant, ce n'est pas tous les bébés qui passent automatiquement un dépistage auditif par émission oto-acoustiques (EOA)[19]. Le dépistage auditif, ne permet que de tester le fonctionnement de la cochlée et de ses cellules[20]. Le dépistage auditif en lui seul, ne peut donc pas permettre le diagnostic d'une neuropathie auditive, mais est un test nécessaire parmi plusieurs au diagnostic de la neuropathie auditive.

La neuropathie auditive est parfois difficile à détecter immédiatement, même avec ces précautions. La suspicion parentale d'une neuropathie auditive est également un outil de dépistage si elle est suspectée, c'est une raison suffisante pour demander une évaluation de l'audition auprès d'un audiologiste[21].

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Références[modifier | modifier le code]

  1. Romolo Daniele De Siati, Flora Rosenzweig, Guillaume Gersdorff et Anaïs Gregoire, « Auditory Neuropathy Spectrum Disorders: From Diagnosis to Treatment: Literature Review and Case Reports », Journal of Clinical Medicine, vol. 9, no 4,‎ , p. 1074 (ISSN 2077-0383, PMID 32290039, PMCID 7230308, DOI 10.3390/jcm9041074, lire en ligne, consulté le )
  2. Monica Amatuzzi, M. Charles Liberman et Clarinda Northrop, « Selective Inner Hair Cell Loss in Prematurity: A Temporal Bone Study of Infants from a Neonatal Intensive Care Unit », JARO: Journal of the Association for Research in Otolaryngology, vol. 12, no 5,‎ , p. 595–604 (ISSN 1525-3961, PMID 21674215, PMCID 3173554, DOI 10.1007/s10162-011-0273-4, lire en ligne, consulté le )
  3. S. S. Vignesh, V. Jaya et A. Muraleedharan, « Prevalence and Audiological Characteristics of Auditory Neuropathy Spectrum Disorder in Pediatric Population: A Retrospective Study », Indian Journal of Otolaryngology and Head and Neck Surgery: Official Publication of the Association of Otolaryngologists of India, vol. 68, no 2,‎ , p. 196–201 (ISSN 2231-3796, PMID 27340636, PMCID 4899353, DOI 10.1007/s12070-014-0759-6, lire en ligne, consulté le )
  4. Anna M. H. Korver, Richard J. H. Smith, Guy Van Camp et Mark R. Schleiss, « Congenital hearing loss », Nature Reviews. Disease Primers, vol. 3,‎ , p. 16094 (ISSN 2056-676X, PMID 28079113, PMCID 5675031, DOI 10.1038/nrdp.2016.94, lire en ligne, consulté le )
  5. (en) Arnold Starr, Terence W. Picton, Yvonnc Sininger et Linda J. Hood, « Auditory neuropathy », Brain, vol. 119, no 3,‎ , p. 741–753 (ISSN 0006-8950 et 1460-2156, DOI 10.1093/brain/119.3.741, lire en ligne, consulté le )
  6. Roush, « Auditory Neuropathy Spectrum Disorder, Evaluation and Management. », The Hearing Journal, vol. 61, no 11,‎ , p. 36–41 (DOI 10.1097/01.HJ.0000342437.78354.f7, S2CID 147587370)
  7. Guilherme Machado Carvalho, Beatriz Prista Leão, Priscila Zonzini Ramos et Alexandre Caixeta Guimarães, « Neuropatia Auditiva: Avaliação Clínica e Abordagem Diagnóstica », Acta Médica Portuguesa, vol. 29, no 6,‎ , p. 353–359 (ISSN 1646-0758 et 0870-399X, DOI 10.20344/amp.6942, lire en ligne, consulté le )
  8. Charles I. Berlin, Linda J. Hood, Thierry Morlet, Diane Wilensky, Patti St. John, Elizabeth Montgomery et Melanie Thibodaux, « Absent or Elevated Middle Ear Muscle Reflexes in the Presence of Normal Otoacoustic Emissions: A Universal Finding in 136 Cases of Auditory Neuropathy/Dys-synchrony », Journal of the American Academy of Audiology, vol. 16, no 8,‎ , p. 546–553 (PMID 16295241, DOI 10.3766/jaaa.16.8.3)
  9. (en) A A Emara et T A Gabr, « Auditory steady state response in auditory neuropathy », The Journal of Laryngology & Otology, vol. 124, no 9,‎ , p. 950–956 (ISSN 0022-2151 et 1748-5460, DOI 10.1017/S0022215110000630, lire en ligne, consulté le )
  10. (en) Heather Lindsey, « Making Sense of Auditory Neuropathy Spectrum Disorder: », The Hearing Journal, vol. 67, no 6,‎ , p. 8 (ISSN 0745-7472, DOI 10.1097/01.HJ.0000451359.32725.3f, lire en ligne, consulté le )
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  12. Zeng et Liu, « Speech Perception in Individuals With Auditory Neuropathy », Journal of Speech, Language, and Hearing Research, vol. 49, no 2,‎ , p. 367–380 (PMID 16671850, DOI 10.1044/1092-4388(2006/029), S2CID 8531043, lire en ligne)
  13. (en) Patricia Roush, Tobi Frymark, Rebecca Venediktov et Beverly Wang, « Audiologic Management of Auditory Neuropathy Spectrum Disorder in Children: A Systematic Review of the Literature », American Journal of Audiology, vol. 20, no 2,‎ , p. 159–170 (ISSN 1059-0889 et 1558-9137, DOI 10.1044/1059-0889(2011/10-0032), lire en ligne, consulté le )
  14. (en) Ana Claudia Martinho de Carvalho, Maria Cecilia Bevilacqua, Koichi Sameshima et Orozimbo Alves Costa Filho, « Auditory neuropathy/auditory dyssynchrony in children with cochlear implants », Brazilian Journal of Otorhinolaryngology, vol. 77, no 4,‎ , p. 481–487 (ISSN 1808-8686, PMID 21860975, PMCID PMC9450761, DOI 10.1590/S1808-86942011000400012, lire en ligne, consulté le )
  15. (en) Robert V. Harrison, Karen A. Gordon, Blake C. Papsin et Jaina Negandhi, « Auditory neuropathy spectrum disorder (ANSD) and cochlear implantation », International Journal of Pediatric Otorhinolaryngology, vol. 79, no 12,‎ , p. 1980–1987 (DOI 10.1016/j.ijporl.2015.10.006, lire en ligne, consulté le )
  16. (en) Linda J. Hood, « Auditory Neuropathy/Auditory Synaptopathy », Otolaryngologic Clinics of North America, vol. 54, no 6,‎ , p. 1093–1100 (DOI 10.1016/j.otc.2021.07.004, lire en ligne, consulté le )
  17. (en) David S. Velenovsky, « Suppression of Otoacoustic Emissions: An Overview » (DOI https://doi.org/10.1044/hhd12.1.4)
  18. (en) American Speech-Language-Hearing Association, « Auditory Brainstem Response (ABR) » (consulté le )
  19. Centre hospitalier universitaire-Université Laval, « Dépistage de la surdité chez les nouveau-nés » Accès libre (consulté le )
  20. (en) David S. Velenovsky, « Suppression of Otoacoustic Emissions: An Overview » Accès payant (consulté le )
  21. (en) Elizabeth Cohen CNN health, « Don't let a doctor destroy your baby's hearing » Accès libre, sur CNN health, (consulté le )

Lectures complémentaires[modifier | modifier le code]