Harry Pieper

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Harry Pieper
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Biographie
Naissance
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Voir et modifier les données sur Wikidata (à 71 ans)
BerlinVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Activité

Karl Erdmann Harry Pieper (en religion Shaku Shôgon hôshi (« le maître de la Loi Shaku Shôgon ») né le à Berlin et mort le dans la même ville, est un interprète et auteur et un pratiquant bouddhiste.

Vers l'âge de dix-ans, il se convertit au bouddhisme, d'abord dans la forme du bouddhisme hīnayāna. Il se tourne ensuite vers le bouddhisme mahāyāna, d'abord sous sa forme tibétaine. Au milieu des années 1950, il découvre le Jōdo shinshū, un important courant du bouddhisme au Japon. Il devient le premier pratiquant de cette école en Europe. Bientôt ordonné bonze, il crée, en 1956, la première communauté en Europe du Jōdo-Shinshū, à Berlin, et par la suite fonde ou inspire plusieurs communautés et centres dans différentes villes européennes.

Biographie et activité[modifier | modifier le code]

La Maison Bouddhique de Berlin.

Harry Pieper travaille comme comptable, puis comme spécialiste en brevets chez Telefunken[1]. Vers 1925, il découvre le bouddhisme theravâda[2]. À partir de 1930, il est responsable de Das Buddhistische Haus à Berlin-Frohnau, fondée par Paul Dahlke (de) . Il s'agit du premier temple bouddhiste theravâda d'Europe. Harry Pieper est à sa tête jusqu'en 1934, date à laquelle les nazis ferment la maison[1] et interdirent les activités bouddhistes.

Cependant, Pieper dirige un groupe bouddhiste clandestin, et ce jusqu'à son incorporation dans la Wehrmacht, dans les derniers mois de la guerre[1]. À la fin du conflit, il est interné par les Soviétiques, un épisode qui le marquera fortement dans sa santé[1]. Lorsqu'il revient de captivité en 1946, il fonde et dirige la « Mission bouddhiste de Berlin » (Buddhistische Mission).

L'Arya Maitreya Mandala[modifier | modifier le code]

Lama Govinda vers 1940-1945.

Après une vingtaine d'années passées dans le bouddhisme theravâda, Harry Pieper découvre le courant mahāyāna[2]. En effet, en 1951, il devient disciple de Lama Anagarika Govinda, un Allemand qui avait fondé en 1933 le mouvement Arya Maitreya Mandala, d'inspiration tibétaine. Avec Hans-Ulrich Rieker (1920-1979) et Lionel Stützer (1901-1991), Harry Pieper fonde la branche occidentale du mouvement[3]. Il en devient secrétaire-général.

Le Jôdo-Shinshû en Europe[modifier | modifier le code]

Bien qu'il ait une longue histoire en Asie et qu'il y soit très répandu, le courant du Jōdo-Shinshū est resté très longtemps inconnu en Europe. Harry Pieper est le pionnier de son introduction, étant le premier Européen à devenir bouddhiste shin[2].

Kôshô Ôtani (à droite) en 1937.

C'est en 1954 qu'il a l'occasion de découvrir l'enseignement du Bouddha Amitâbha (jap. Amida) et la pratique du nembutsu (récitation du nom d'Amithâba)[2]. Le 16 mai de cette année-là, à l'occasion de la fête du Vesakh, il fait la connaissance du professeur de physique Osamu Yamada, un laïc membre de la Jôdo-Shinshu. Ce dernier lui fait découvrir un texte célèbre de Shinran, le Tannishô (« Notes déplorant les divergences ») qui deviendra pour Pieper le fondement de sa foi. Le , Yamada le présente au 23e patriarche du Jōdo-Shinshū, Ōtani Kōshō lors de son passage à Berlin. La rencontre bouleverse Pieper : en 1955, il quitte l'Arya Maitreya Mandala, devient le disciple d'Ōtani Kōshō [1] et décide de propager le bouddhisme shin[4].

Le , jour du 695e anniversaire du décès de Shinran, il fonde la première communauté Jôdo-Shinsu en Europe, à Berlin. Elle prend le nom de Buddhistische Gemeinschaft Jôdo-Shinshû (Société bouddhique du Jôdo-Shnshû). En 1961, un petit temple ouvre à Berlin[1],[2]. Toutefois, cette communauté reste relativement petite et méconnue. Ses membres mènent une vie de bouddhistes laïcs, suivant en cela une caractéristique des bouddhistes shin, engagés dans une profession et absorbés par les responsabilités de la vie quotidienne[2].

Harry Pieper représente en Europe le Hongan-ji, grand temple de l'école à Kyōto et il est bientôt autorisé à conférer l'ordination sur le continent[4]. Cela répond à son désir de constituer une espèce de clergé européen et de permettre ainsi à la Jôdo-Jinshû en Europe de « marcher sur ses propres pieds[4]. »

Plusieurs centres et institutions bouddhistes européens sont ainsi dus à son inspiration et à ses efforts. Par exemple, la fondation, en 1970, du Shingyo-ji (temple de la Foi sereine) à Genève avec Jean Eracle, à qui il transmit l'ordination, et la communauté bouddhiste de Salzbourg fondée par Friedrich Fenzl (1932-2014). Il a aussi contribué à la fondation des Associations bouddhiques en Hongrie (1964), à Munich (1965), en Grande-Bretagne (1976), en Belgique[1].

Vie privée[modifier | modifier le code]

Sur le plan privé, Harry Pieper est marié, père de deux enfants, et il mène une vie très simple. Après la Seconde Guerre mondiale, il travaille essentiellement comme traducteur, en particulier pour les autorités militaires britanniques et américaines à Berlin[5].

Publications[modifier | modifier le code]

« Namu Amida Butsu »: nembutsu calligraphié par Hônen.

Harry Pieper édite dans les années 1950 la revue Light of Dharma (1951-1954), à partir de laquelle se développe la revue Der Kreis (« Le Cercle »), fondée en 1956 par Hans-Ulrich Rieker et Wilhelm A. Rink, et consacrée à l'Arya Maitreya Mandala.

À partir de 1965 et durant dix ans, il dirige la revue Mahâyâna. Il traduit plusieurs textes bouddhiques de l'anglais vers l'allemand, notamment The True Meaning of Buddhism (1957) de Ryuchi Fujii, ainsi que La foi du Jôdo Shinshû de Kôshô Ôtani (1957)[5].

Conception du bouddhisme[modifier | modifier le code]

Harry Pieper met constamment l'accent sur une pratique incarnée du bouddhisme, ancrée dans l'expérience[2]. Pour lui, le bouddhisme est une affaire du quotidien, pas de grandes paroles et résolutions[5]. Il souligne la nécessité d'une « progression inébranlable » sur le chemin, et met en garde contre une approche purement intellectuelle du bouddhisme, qui en reste à des disputes purement cérébrales, voire académiques[2].

Si l'on s'établit dans la lumière d'Amida comme un « être humain ordinaire », que l'on a la ferme intention de se libérer de la souffrance, et que l'on a l'intuition que cela peut être réalisé avec l'aide du Nembutsu, alors le Shin est une voie facile qui peut être suivie par tout le monde. Elle ne demande pas de pratiques extraordinaires et mène à la paix intérieure dans la vie présente et là la réalisation de l'état de Bouddha après la mort[2].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d e f et g « Le Rd Harry Pieper (1907-1978) Pionnier du Jôdo-Shinshû en Europe », sur pitaka.ch (consulté le )
  2. a b c d e f g h et i (de) Alexander Schrott, « Vorwort zu den Texten Harry Piepers », sur pitaka.ch (consulté le )
  3. (de) Birgit Zotz, « Achtzig Jahre Ārya Maitreya Maṇḍala - Eine Chronologie », Der Kreis Nr. 270, Oktober 2013, S. 6–21. (V. p. 11) [lire en ligne (page consultée le 21 avril 2021)]
  4. a b et c Jean Eracle, « De la Croix au Lotus. Le cheminement intérieur d'un chanoine devenu bonze », dans Bernard Crettaz et Jérôme Ducor (Dir.), De la Croix au Lotus. L'itinéraire spirituel de Jean Eracle, prêtre et bonze, Genève, Musée d'ethnographie, , 229 p., p. 15-140; v. p. 126-128
  5. a b et c (de) « Shin-Buddhismus in Deutschland », sur bgjd.de (consulté le )

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (en) Jack Austin, « Harry Pieper - Pioneer of Shin Buddhism in Europe. A Personal Tribute. », The Pure Land 2, n° 1,‎ , p. 32-36
  • Jean Eracle, Le Révérend Harry Pieper et la propagation du bouddhisme Shin en Europe, Granges-Marnand (CH), ARCBS, , 52 p. (présentation en ligne)
  • (de) Volker Zotz (contient un chapitre détaillé sur la vie et l’œuvre de Harry Pieper), Die Suche nach einem sozialen Buddhismus. Friedrich Fenzl und Jodo Shinshu, Luxemburg, Kairos Edition, , 92 p. (ISBN 2-959-98296-7)

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

  • (de) « Gesammelte Texte von Rev. Harry Pieper 1965–1969 », publiés dans la revue Mahâyâna, sur pitaka.ch/deutsch. [lire en ligne (page consultée le 22 avril 2021)]