Gutta-percha

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Palaquium gutta.
Structure isoprénique 1,4-trans d'une chaîne polymère de gutta-percha.

La gutta-percha est une gomme issue du latex naturel obtenu à partir de la sève d'arbres de l'espèce Palaquium gutta et de plusieurs espèces voisines de la famille des Sapotaceae (par exemple le karité[1],[2],[3]).

Structure moléculaire[modifier | modifier le code]

Comme le caoutchouc naturel (de sigle NR) issu de l'hévéa, la gutta-percha est un polyisoprénoïde. À la différence du NR (composé de plus de 99 % de cis-1,4-polyisoprène) qui est un solide élastique amorphe, la gutta-percha et la (gutta-)balata, qui renferment principalement du trans-1,4-polyisoprène, sont rigides et en partie cristallisés à température ambiante, ce qui les rend beaucoup moins élastiques.

Applications[modifier | modifier le code]

« Diable pour le pétrissage de la gutta-percha ».

Le matériau montre des propriétés adhésives, est un bon isolant électrique et est bio-inerte. Du fait que ce matériau ne se dégrade pas lorsqu'il est immergé dans l'eau de mer et de plus qu'il conserve des propriétés électriques isolantes étonnantes[4], il a été le matériau « miracle » qui a rendu possible l'exploitation des câbles sous-marins ou souterrains, jusqu'à la découverte du polyéthylène en 1933. En revanche, il ne résiste pas à une exposition prolongée aux UV.

Il trouve des utilisations dans le domaine des adhésifs, en chirurgie, notamment dentaire, et plus spécifiquement en endodontie où on l’utilise pour obturer les canaux pulpaires une fois la dent dépulpée.

Il entrait aussi dans la composition des balles de golf (maintenant en matière synthétique).

La gutta-percha a été très utilisée dans le monde du voyage, grâce à la Maison Moynat qui employait, dès 1854, ce matériau isolant dans la fabrication et au doublage de ses malles. D'autres malletiers ont ensuite commencé à utiliser la sève pour imperméabiliser leurs produits.

Elle a été utilisée pour la fabrication d'objets de tous les jours comme des médaillons, cadres photo, boîtes à ambrotype ou daguerréotype, disques de gramophone.

Elle servait pour fabriquer des bouteilles afin de conserver l’acide fluorhydrique (HF), acide qui est utilisé pour graver le verre par attaque chimique.

Elle était aussi utilisée en armurerie pour fabriquer des crosses de revolvers fin XIXe et début XXe siècle.

Elle est également utilisée pour la peinture sur soie. En effet, les peintures utilisées sont très liquides. La gomme permet donc de cerner les motifs à peindre afin d'éviter que la peinture ne se répande sur toute la surface par capilarité. Dans ce contexte, la gomme est souvent simplement appelée « gutta »[5].

Historique[modifier | modifier le code]

Bien avant l’introduction de la gutta-percha en Occident, les indigènes d'Insulinde (anciennement archipel malais) savaient en faire des couteaux, des anses, des bâtons de marche et divers ustensiles. En 1656, voyageant en Extrême-Orient, le Britannique John Tradescant fut le premier européen à en collecter. Dans les années 1840, William Montgomerie, médecin dans l’Armée des Indes, en développa des applications pratiques dans le domaine de l’instrumentalisation médicale. En 1843, Werner von Siemens conçut une machine pour en enrober les câbles en cuivre, avant d’avoir l’idée d'utiliser la gutta-percha pour l’isolation des câbles télégraphiques sous-marins. En 1845, en Écosse, fut moulée la première balle de golf en gutta-percha[6].

En 1852, un modèle de chaussure en gutta-percha est breveté par Napoléon Gaillard[7],[8].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. [Heckel 1885] Édouard Heckel, « Nouvelle source de Gutta-Percha le Bassia Parkii et ses produits (Beurre de Karité et Gutta percha) », La Nature,‎ , p. 325-327, 370-371, 405-407 (présentation en ligne, lire en ligne), sur cnum.cnam.fr.
  2. [Heckel et Chareyre 1885] Édouard Heckel et Jules Chareyre, « Sur la gutta-percha de Bassia (Butyrospermum) Parkii, G. Don, et sur sa composition chimique », Comptes-rendus l'Académie des sciences, t. 101,‎ , p. 1069-1071 (lire en ligne), sur Gallica.
  3. [Heckel & Schlagdenhauffen 1888] Édouard Heckel et Frédéric Charles Schlagdenhauffen, « Sur un latex du Bassia latifolia Roxb. » (séance du 10 décembre 1888. Republié dans le Journal de pharmacie et de chimie, t. 19, 5e série, 1889, p. 227-232), Comptes-rendus de l'Académie des sciences, t. 107,‎ , p. 949-953 (lire en ligne), sur Gallica.
  4. Frédéric Aitken et Jean-Numa Foulc, Des profondeurs océaniques au laboratoire. 1, Les premières explorations de l’océan profond par le H.M.S. Challenger (1872-1876), Londres, ISTE, , 250 p. (ISBN 9781784054649, présentation en ligne, lire en ligne), chap. 1, p. 24-46.
  5. « La technique de la peinture sur soie », sur afairesoimeme.com, 2011.
  6. Prakash et al., « Gutta-Percha - An untold story » [PDF], ~2001, Endodontology, … Harvey Wickes Felter, and John Uri Lloyd.
  7. Jacques Rougerie, Paris insurgé : la Commune de 1871, Paris, Gallimard, , 160 p. (ISBN 978-2-07-044677-3), p. 48.
  8. « Napoléon Gaillard (1815-1900) Le cordonnier qui chaussa Paris de barricades (14) », sur L'Humanité, (consulté le ).

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Georges Beauvisage, Contribution à l'étude des origines botaniques de la gutta-percha, Paris, G. Carpentier, 1881.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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