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Sou

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Solidus de Constantin
Gros de Saint Louis valant 1 sou tournois
Sol de Louis XV
Le dernier "sou" : cinq centimes français de 1939 (Ø réel : 19 mm)
Cinq centimes suisses actuel.

Sou est le nom porté par différentes monnaies, de compte ou de règlement, de l'antiquité à nos jours. Le nom trouve son origine dans le solidus. La longévité de son utilisation l'a ancré dans de nombreuses expressions courantes de la langue française.

Antiquité romaine

Le solidus est une monnaie de 4,5 g d'or créée par l'empereur Constantin en remplacement de l'aureus.

Haut moyen âge

Faisant honneur à son nom, la nouvelle monnaie allait gagner sa réputation d'inaltérabilité en traversant presque inchangée le déclin et la chute de l'Empire romain d'Occident, les grandes invasions et la création de royaumes germaniques dans toute l'Europe : non seulement frappé à Byzance jusqu'au XIe siècle sous le nom de Nomisma, le solidus sera imité par les rois barbares, en particulier les Mérovingiens[1], quoique le plus souvent sous forme de « tiers de sou » (tremissis)[2].

Face à la pénurie d'or, une nouvelle « stabilisation » (c'est ainsi que l'on appelle souvent les dévaluations) va venir de Charlemagne : le solidus ne désignera désormais plus un 1/72e de livre romaine d'or, mais 1/20e de livre carolingienne d'argent. Il est lui-même divisé en 12 deniers, qui, sauf rares exceptions (le gros de Saint Louis), seront dans la pratique les seuls à circuler.

Le principe général de douze deniers valant un sou et de vingt sous valant une livre va se retrouver avec de nombreuses variantes en fonction de l'alliage utilisé et du bimétallisme or/argent parfois utilisé pour certaines frappes. De fait, ce sont principalement les membres de la corporation des changeurs qui étaient capables de s'y retrouver dans les équivalences et les nombreuses monnaies en cours en Europe à chaque époque et qui étaient donc incontournables pour de nombreuses opérations commerciales [3].

Bas moyen âge

Le nom évolue comme le restant de la langue, du latin au français. Solidus va devenir soldus, puis solt dès le XIe siècle, puis sol au XIIe siècle.
Au XVIIIe siècle, on adapte l'orthographe du mot : “sol” devient “sou” pour mieux correspondre à la prononciation qui s'était imposée depuis plusieurs siècles.

Un sou en francs français : un mot qui perdure

Mille ans après la réforme monétaire carolingienne, quand la livre tournois cède la place au franc en 1795, sols/sous et deniers disparaissent des bourses. Toutefois, les Français continuent d'appeler sou le vingtième du franc. Ainsi, la grosse pièce en bronze de 5 centimes était qualifiée de sou (sous la plume d'un Balzac ou d'un Victor Hugo, par exemple), la « pièce de cent sous » voulait dire cinq francs et que l'on appelait aussi « écu » (dans Germinal de Zola). La dernière pièce de 5 centimes, lointain souvenir hérité du franc germinal, est démonétisée dans les années 1940, mais le mot sou perdure (sauf pour la pièce de 5 centimes de nouveau franc de 1960 qui équivalait en fait à 5 anciens francs).

De rognage en dévaluation[4], l'antique sou d'or, puis d'argent, sera devenu une pièce de billon, de cuivre, de bronze avant de finir, frappé une dernière fois entre les dates de 1914 et 1939, sous forme d'une pièce percée de 5 centimes en cupronickel puis en maillechort : au début du XXIe siècle, les Français parmi les plus âgés parlent encore de tel article à six sous de leur jeunesse et, pour eux, cinq anciens francs sont toujours une pièce de cent sous.

Les sous hors de France

Canada

Au Canada, le mot « sou » est utilisé dans le langage courant pour dénommer la division du dollar canadien, dont le terme officiel est cent. Les pièces d'un cent ont le nom vernaculaire de « sou noir », et les pièces de vingt-cinq cents, celui de « trente sous ».

  • « Échanger quatre trente sous pour une piastre » veut donc dire, changer pour quelque chose d'exactement identique, la « piastre » étant le nom commun du dollar canadien.

Suisse

En Suisse, une pièce de cent-sous désigne une pièce de cinq francs suisses et une pièce de quatre-sous désigne une pièce de vingt centimes suisses. Le mot sou reste également dans le langage familier dans les termes « dix, vingt, ... sous ».

Le sou dans les expressions en langue française

Utilisé pendant plus de 1000 ans, le terme sou s'est ancré dans le langage et les expressions françaises. Les sous, au pluriel, sont devenus synonyme d'argent.

  • « une affaire de gros sous » pour parler d’une affaire dans laquelle sont manipulées d’importante sommes d’argent.
  • « Être sans le sou », « ne pas avoir sou vaillant » signifie ne pas avoir d'argent.
  • « N'avoir ni sou ni maille », la maille étant un demi-denier, le denier étant 1/12 de sou.
  • On dit de celui qui est toujours à court d'argent qu'« il lui manque toujours dix-neuf sous pour faire un franc » (un franc valant vingt sous).[réf. nécessaire]
  • "Je te parie cent sous contre un franc", ce qui veut dire que je suis sûr de mon coup.
  • « Un sou est un sou » veut dire qu'il ne faut pas négliger les petits profits.
  • « Être près de ses sous », c'est être pingre.
  • « Sou par sou » ou « sou à sou » signifie petit à petit.
  • « Propre comme un sou neuf » signifie très propre, comme une pièce qui n'a pas encore été salie et abimée par la circulation.
  • « On lui donnerait cent sous à le voir » se dit de quelqu'un d'apparence pitoyable.[réf. nécessaire]
  • S'ennuyer « à cent sous l'heure » (« à cent sous de l'heure ») signifie être désœuvré.
  • Quand quelque chose vaut « trois francs six sous », cela n'est pas bien cher.
  • « Un objet de quatre sous » est d'encore moins de valeur, ainsi « l'Opéra à 3 groschen » de Brecht est devenu L'Opéra de quat'sous.
  • Lorsqu'on n'a « pas deux sous de jugeote », on n’est pas très malin.
  • On parle de machine à sous quelle que soit la monnaie.
  • « Le sou du franc », bakchich consenti à qui achète[5].
  • « Se faire des sous », c'est percevoir un salaire ou plus largement gagner de l'argent.
  • Quand on n'a « pas un sou en poche », on est désargenté.
  • « Pas ambigu pour un sou » : pas ambigu du tout, sans aucun doute.
  • « Pas fier pour un sou » signifie être abordable, ne pas être vaniteux.
  • « Pas modeste pour un sou » signifie être prétentieux.
  • « Pas courageux pour un sou » signifie être pleutre.
  • « Pas vaillant pour un sou » selon le contexte signifie être peureux ou être fainéant.
  • Ne pas avoir « un sou vaillant », c'est ne pas avoir d'argent sur soi.
  • « Pour un sou valant de tabac » signifie acheter du tabac au détail pour la valeur d'un sou.

Articles connexes

Notes et références

  1. Un sou d'or mérovingien, à la tête de Magnence, datant du VIIe siècle sur Gallica.
  2. Les monnaies des rois Mérovingiens
  3. "De L'or Et Des Épices - Naissance De L'homme D'affaires Au Moyen Age" Jean Favier Hachette - 01/11/1995
  4. La permanence du sou permet de mesurer l'érosion monétaire sur une longue période : la richissime famille gallo-romaine qui se serait transmis 1 million d'aureus de la conquête de la Gaule à nos jours sans jamais les placer mais en modernisant l'apparence à chacune de ces quelque 65 générations se serait retrouvée avec 50 000 anciens francs français, puis 500 nouveaux francs français, puis 76,22 euros. Elle ne possèderait plus 8 tonnes d'or comme au temps de César mais pourrait à peine en acheter 8 grammes, bref son million de sous serait devenu un sou. Toutefois, l'érosion constatée n'est que de 0,68 % l'an en moyenne, il aurait suffi de placer la somme à ce taux pour ne rien perdre.
  5. Q Q P E F par Yves Leroy : le sou du Franc, page 21 [1]