Aliénor de Bretagne (morte en 1241)

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Aliénor de Bretagne
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Portrait d'Aliénor de Bretagne dans un arbre généalogique du XIVe siècle consacré aux rois d'Angleterre.
Biographie
Dynastie Plantagenêt
Naissance 1182 ou 1184
Drapeau du duché de Bretagne Duché de Bretagne
Décès
Bristol
Drapeau de l'Angleterre Royaume d'Angleterre
Sépulture Abbaye d'Amesbury
Drapeau de l'Angleterre Royaume d'Angleterre
Père Geoffroy II de Bretagne
Mère Constance de Bretagne

Aliénor (ou Éléonore) de Bretagne, surnommée « la Brette[1] », née entre 1182 et 1184[2], est la fille de Geoffroy II de Bretagne et de Constance de Bretagne. Son oncle Jean sans Terre, puis son cousin Henri III la retiennent captive jusqu’à sa mort, en 1241.

Biographie[modifier | modifier le code]

Le père d'Aliénor est le quatrième des fils d'Henri II d'Angleterre. Il vient après Richard Cœur de Lion et précède Jean, dans l'ordre de succession pour tout l’empire Plantagenêt (Anjou, Maine, Touraine, Normandie, Poitou, Aquitaine, Angleterre). Aliénor n’a qu’un an ou deux lorsque ce père meurt, le [3], faisant d’elle l’héritière de Richard selon la coutume angevine[4]. Par sa mère, elle est héritière de la Bretagne et du comté de Richemont (au nord de l’Angleterre). Elle sera précédée dans tous ces droits par son frère, du vivant de celui-ci[5]. En ce qui concerne l’héritage Plantagenêt, les droits des deux enfants de Geoffroy vont donc primer ceux de leur oncle Jean[6]. Ce qui va faire leur malheur. Arthur, le frère d’Aliénor, naît dans la nuit du 29 au [7], huit mois après la mort de leur père.

En 1192, la fillette part en Autriche, son oncle Richard Cœur de Lion, prisonnier, ayant été contraint de la fiancer au fils du duc Léopold. À la mort du duc (), Aliénor revient en Bretagne. Un mariage est envisagé avec Louis, fils de Philippe Auguste. Mais le projet reste sans suite.

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Henri II
1133-1189
 
 
 
Aliénor d'Aquitaine
1122-1204
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Guillaume
1153-1156
 
Henri
1155-1183
 
Mathilde
1156-1189
 
Richard
1157- 1199
 
Geoffroy
1158-1186
 
Constance de Bretagne
1161-1201
 
Aliénor
1161-1214
 
Jeanne
1165-1199
 
Jean
1166-1216
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Aliénor
1182/84-1241
 
Arthur
1187-1203
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Henri III
1207-1272

Captivité[modifier | modifier le code]

Sous Jean sans Terre[modifier | modifier le code]

Aliénor est enlevée par son oncle Jean. On ignore à quelle date, où, et dans quelles circonstances[6]. Jean se proclame son tuteur. Elle restera prisonnière toute sa vie. Richard Cœur de Lion meurt en 1199. La duchesse Constance meurt en 1201. Arthur, prisonnier de Jean, est probablement assassiné, sur ordre de son oncle, en [8]. Mais on n'apprendra sa mort que cinq ans plus tard.

Le , fuyant la Normandie, Jean débarque en Angleterre avec sa captive. Au printemps 1204, Philippe Auguste réclame la libération d’Aliénor. En 1208, les évêques bretons font de même. Ce n’est qu’en cette année 1208 que la mort d’Arthur est connue. La prisonnière est contrainte, faisant valoir ses droits sur la Bretagne et sur le comté de Richemont, de préciser qu’elle confie le pouvoir à Jean. En 1214, Aliénor est détenue en France (campagne malheureuse de Jean, de février à juillet, qui se solde par la défaite de La Roche-aux-Moines), puis elle revient en Angleterre.

Sous Henri III[modifier | modifier le code]

Quand Jean sans Terre meurt en 1216, Henri III lui succède, et Aliénor reste encore prisonnière vingt-cinq ans. Parmi ses lieux de captivité, on connaît le château de Gloucester (1222–1223, puis 1237–1238), Marlborough et enfin Bristol. Bien qu'elle soit toujours vénérée comme princesse, recevant toujours des cadeaux généreux et pouvant monter à cheval. Où elle meurt, le , est enterrée au couvent d’Ambresburg[9] (Amesbury).

En 1268, Henri III ordonne à d’Ambresburg de rendre hommage à Arthur et Aliénor, ainsi qu'à tous les rois et reines.

Légende[modifier | modifier le code]

La Chronique de Lanercost[10] prétend que, peu avant la mort d’Aliénor, Henri III, pris de remords, ou soucieux de légitimer le pouvoir de sa descendance, aurait donné sa couronne à la captive. Elle ne l’aurait gardée que trois jours, et en aurait fait don au tout jeune prince Édouard (le futur Édouard Ier, né deux ans avant la mort d’Aliénor).

Représentation dans la culture[modifier | modifier le code]

Dans la littérature[modifier | modifier le code]

Aliénor de Bretagne apparaît dans quelques œuvres de fiction, parmi lesquelles Angelina (1796) de Mary Robinson. Dans Below the Salt, roman de Thomas Costain, Aliénor s’évade, épouse un chevalier qui possède des terres en Irlande et y fonde une famille. La trilogie Through a Dark Mist, In the Shadow of Midnight et The Last Arrow de Marsha Canham, parle aussi de l’évasion de la princesse. Les deux auteurs suggèrent que Guillaume le Maréchal voulait lui aussi qu’Aliénor soit libérée.

Aliénor apparaît aussi dans les romans Here Be Dragons de Sharon Kay Penman (en), Sirocco Wind from the East de Virginia Ann Work, et est l’héroïne de The Shimmering Sky de Rik Denton. L’histoire de la vie d’Aliénor est aussi racontée à la première personne dans The Captive Princess de J. P. Reedman. La captivité d'Aliénor est aussi évoquée dans le roman Le Poids d’une couronne (légende bretonne) (1867-1868) de Gabrielle d’Étampes.

Dans son poème The Lament of Eleanor of Bretagne, l’écrivaine et poétesse anglaise victorienne Menella Bute Smedley imagine la mélancolie d’Aliénor alors qu’elle vieillit, toujours emprisonnée.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. La Bretonne. Dom Lobineau, Histoire de Bretagne, I, p. 171, CLIX.
  2. Michael Jones, « Eleanor, suo jure duchess of Brittany (1182x4–1241) », Oxford Dictionary of National Biography, Oxford University Press, 2004 ; édition en ligne, janvier 2008.
  3. Dom Morice, Histoire ecclésiastique et civile de Bretagne, III, p. 118 ; Arthur Le Moyne de la Borderie, Histoire de Bretagne, III, ERO, Coop Breizh, 1998, p. 285 ; Auguste Dupouy, Histoire de Bretagne, Calligrammes, Ar Morenn, 1983, p. 87 ; Yann Brekilien, Histoire de la Bretagne, France-Empire, 1993, p. 134 ; Alison Weir (« le 18 ou le 19 août 1186 »), Aliénor d’Aquitaine : reine de cœur et de colère, Siloë, 2005, p. 310 : les historiens s’accordent généralement sur cette date. Georges Minois (Nouvelle Histoire de la Bretagne, Fayard, 1992, p. 231) dit « en août 1186 », de même que Jean Flori, Aliénor d’Aquitaine : la reine insoumise, Payot & Rivages, 2004, p. 184. Régine Pernoud, Aliénor d’Aquitaine, Albin Michel, 1965, p. 165, dit « en 1186 ».
  4. « Les coutumes angevines, à la différence de celles d'Angleterre, admettaient la représentation, c'est-à-dire qu'elles permettaient à un héritier en ligne directe de recevoir la part de son père disparu. » Gérard Sivéry, Philippe Auguste, Plon, 2003, p. 170.
  5. Concernant l'héritage Plantagenêt, Richard Cœur de Lion, par le traité de Messine, en mars 1191, va désigner Arthur pour son successeur.
  6. a et b J. Balteau (dir.), M. Barroux et M. Prévost, ibid.
  7. Dom Lobineau, op. cit, I, p. 172, CLXII. Dom Morice, op. cit, III, p. 119.
  8. Yann Brekilien, op. cit., p. 138. On n'est sûr de rien : ni de la date, ni du lieu, ni des circonstances, ni de l'implication de Jean.
  9. J. Balteau (dir.), M. Barroux et M. Prévost, op. cit., p. 7. Fondé en 1177 pour remplacer un monastère bénédictin, ce prieuré double fontevriste se trouvait non loin de Stonehenge. Une autre Aliénor de Bretagne y sera religieuse, de 1281 à 1290. Le couvent sera détruit en 1540.
  10. The Lanercost Chronicle, ed. and trans. H. Maxwell, 1913.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Matthieu Paris, Chronica Majora, dans Rerum britannicarum Medii Aevi scriptores, Longmans, Londres, 1872-1883, t. II, p. 325, 660, 661 ; t. III, p. 270 ; t. IV, p. 153, 175.
  • Dom Lobineau, Histoire de Bretagne, Palais Royal, 1973, t. I, p. 171, 175-176, 192-194.
  • Dom Martin Bouquet, Recueil des historiens des Gaules et de la France, V. Palmé, Paris, 1840, t. XVII et XVIII, passim, ebook de l’édition Palmé.
  • Dom Morice, Histoire ecclésiastique et civile de Bretagne, Gregg, 1968, t. I, p. 119-123.
  • Léopold Delisle, Catalogue des actes de Philippe Auguste, A. Durand, 1856, n. 752.
  • Charles Edmond Petit-Dutaillis, Étude sur la vie et le règne de Louis  VIII (1187-1226), Bouillon, Paris, 1894, p. 5, 84. Rééd. Slatkine, Genève, 1975.
  • Dom Léon Guilloreau, Aliénor de Bretagne : quelques détails relatifs à sa captivité : 1203-1241, Champion, 1907 (extrait de la Revue de Bretagne).
  • J. Balteau (dir.), M. Barroux et M. Prévost, Dictionnaire de biographie française, Paris-VI, Librairie Letouzey et Ané, 1936, vol. II.
  • Yannick Hillion, La Bretagne et la rivalité Capétiens-Plantagenêts. Un exemple : La duchesse Constance (1186-1202), in Annales de Bretagne et des Pays de l'Ouest t. 92, année 1985.
  • Gwen Seabourne, « Eleanor of Brittany and Her Treatment by King John and Henry III », Nottingham Medieval Studies, vol. 51,‎ , p. 73-110.