Pilule rouge et pilule bleue
La « pilule rouge » et la « pilule bleue » sont des concepts issus d'une scène du film Matrix. Ils font référence à un choix entre la volonté d'apprendre une vérité potentiellement dérangeante ou qui peut changer la vie, en prenant la pilule rouge, et celle de rester dans une ignorance satisfaisante, en prenant la pilule bleue.
Description
Contexte
Dans Matrix, le chef rebelle Morpheus propose au personnage principal Neo de choisir entre une pilule rouge et une pilule bleue. La pilule rouge représente un avenir incertain - elle le libérerait du contrôle asservissant du monde onirique généré par la machine et lui permettrait de s'échapper dans le monde réel, mais vivre la "vérité de la réalité" est plus dur et plus difficile. D'autre part, la pilule bleue représente une belle prison - elle le ramènerait à l'ignorance, vivant dans un confort confiné, sans besoin ni peur, dans la réalité simulée de la Matrice. Comme décrit par Morpheus : "Choisis la pilule bleue et tout s’arrête, après tu pourras faire de beaux rêves et penser ce que tu veux. Choisis la pilule rouge : tu restes au Pays des Merveilles et on descend avec le lapin blanc au fond du gouffre"[1]. Neo choisit la pilule rouge et rejoint la rébellion.
La pilule bleue permet à la personne de rester dans la réalité fabriquée de la Matrice ; la rouge sert de « balise » à la personne dans le monde réel et la prépare à être "déconnectée" de la Matrice. Une fois que l'on choisit la pilule rouge ou bleue, le choix est irrévocable. Neo prend la pilule rouge et se réveille dans le monde réel, où il est expulsé d'une chambre pleine de liquide dans laquelle il a été inconscient. Sauvé et récupéré à bord du navire de son mentor, Morpheus, qui lui montre la vraie nature de la Matrice: une simulation informatique détaillée de la Terre à la fin du XXe siècle. Elle a été créée pour maintenir dociles les esprits des humains tandis que leurs corps sont stockés dans d'énormes centrales électriques, où leur chaleur corporelle et leur bioélectricité sont consommées comme énergie par les machines qui les ont asservis[2].
Inspirations philosophiques et religieuses
Le film Matrix (1999), réalisé par les Wachowski, fait référence à des mythes historiques et à la philosophie, notamment le gnosticisme, l'existentialisme et le nihilisme[3],[4]. La prémisse du film ressemble à l'allégorie de la caverne de Platon[5],[6], au "Zhuangzi rêva qu'il était un papillon" de Zhuangzi, au doute cartésien et au malin génie de René Descartes[7],[8], aux réflexions de Kant sur le phénomène par rapport au Ding an sich, à la "machine à expériences" de Robert Nozick[9], au concept de réalité simulée et à l'expérience du cerveau dans une cuve[10],[11]. Matrix fait très clairement référence à Alice au pays des merveilles avec les expressions "le lapin blanc" et "le terrier du lapin", et fait également référence au chemin de découverte de Néo comme étant le "pays des merveilles".
Autres utilisations
Métaphore populaire pour les idéologues
Certains groupes d'idéologies reposant sur l'opposition à un ordre établi ou supposé comme tel reprennent à leur compte la métaphore du choix de la pilule pour se différencier de ceux qui choisissent de rester dans l'ignorance et "faire de beaux rêves"[12],[13],[14],[15],[16],[17].
Le thème est notamment populaire, en 2022, auprès de la fachosphère française[18]et des complotistes[19].
Articles connexes
Notes et références
- Céline Biourge, « "Matrix" : auriez-vous pris la pilule bleue ou la rouge ? » [archive du ], sur RTBF TV,
- (es) José. Cantillo Carmona, Dilemas morales : un aprendizaje de valores mediante el diálogo, Nau Llibres, (ISBN 84-7642-706-9, 978-84-7642-706-4 et 84-7642-702-6, OCLC 433689632, lire en ligne)
- (en-US) Edward Rothstein, « Philosophers Draw On a Film Drawing On Philosophers », The New York Times, (ISSN 0362-4331, lire en ligne, consulté le )
- (en) « Journal of Religion & Film: Wake Up! Gnosticism and Buddhism in The Matrix by Frances Flannery-Daily and Rachel Wagner » [archive du ], sur unomaha.edu (consulté le )
- (en) Glenn Yeffeth, Taking the Red Pill: Science, Philosophy and the Religion in the Matrix, BenBella Books, Inc., (ISBN 978-1-932100-02-0, lire en ligne)
- (en) Robin Beck, « You Won’t Know the Difference So You Can’t Make the Choice | Issue 30 | Philosophy Now », sur philosophynow.org
- (en) Dan O'Brien, An Introduction to the Theory of Knowledge, Polity, (ISBN 978-0-7456-3316-9, lire en ligne), p. 115
- (en) Juan Comesaña et Peter Klein, Skepticism, Metaphysics Research Lab, Stanford University, (lire en ligne), « Skepticism »
- (en) Associate Professor of Philosophy Christopher Grau et Christopher Grau, Philosophers Explore The Matrix, Oxford University Press, (ISBN 978-0-19-518107-4, lire en ligne)
- (en-US) Lance P. Hickey, « Brain in a Vat Argument, The | Internet Encyclopedia of Philosophy » (consulté le )
- (en) Allan Hazlett, « Philosophers Explore The Matrix » [« Des philosophes explorent Matrix »], sur Notre Dame Philosophical Reviews, (consulté le )
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- (en-US) Jeff Sharlet, « What Kind of Man Joins the Men's Rights Movement? », sur GQ,
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- Maxime Macé et Pierre Plottu, « Fachosphère: la «pilule rouge» est droite dure à avaler », sur Libération (consulté le )
- https://www.20minutes.fr/arts-stars/cinema/3200011-20211221-matrix-pourquoi-plus-20-ans-apres-sortie-scene-pilule-devenue-culte-chez-complotistes