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Mode éthique

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La mode dite « éthique », aussi appelée mode « durable » est inspirée du modèle du commerce équitable et des principes de l'éthique, avec deux types de préoccupations : sociales et environnementales. Elle est ancrée dans une philosophie de la durabilité, et a pour objectif de créer une mode alternative à la fast fashion : plus respectueuse de l'humain et de l'environnement dans son processus de production.

Origine du mouvement

La naissance du concept de mode éthique a lieu au début des années 1990, avec l'engagement des marques Esprit et Patagonia, qui introduisent la notion de durabilité au cœur de la mode, et qui choisissent leurs matières premières en prenant en compte ces préoccupations.

À la suite de l'effondrement du Rana Plaza, une usine textile au Bangladesh le qui a entrainé la mort de 1 135 personnes, et plus de 2 500 blessés, un regain de conscience autour de l'importance de rendre la mode éthique apparait auprès du grand public. Ce jour-là au Royaume-Uni, Carrie Sommers et Orsola de Castro, deux créatrices de mode éthique, lancent le hashtag - désormais célèbre - #whomademyclothes sur les réseaux sociaux, demandant aux citoyennes et citoyens d’apostropher les marques sur la traçabilité et la transparence de leur chaine d’approvisionnement.

Définitions

Jean Stéphane, professeur de mode éthique à l’École supérieure de mode de Montréal, détaille 5 grandes tendances autour de la mode engagée[1] :

  • la mode éthique au sens strict, qui s’inspire du commerce équitable. Elle montre une conscience sociale de la fabrication du vêtement et a pour objectif d'améliorer les conditions de travail et de vie des travailleurs et travailleuses de l'industrie textile. Cependant, dans le langage courant, le terme « mode éthique » évolue vers une définition beaucoup plus large qui englobe aussi la mode écologique, la mode recyclée et parfois même la mode durable et locale. Elle devient donc synonyme du concept global de mode responsable.
  • la mode écologique, qui se soucie de son impact sur l’environnement. Il s'agit d'un enjeu essentiel puisque l'industrie de la mode est la deuxième plus polluante au monde[2]. La mode écologique utilise des textiles relativement peu polluants, peu consommateurs d'eau et réduit au maximum les transports et l'impact carbone de ses collections[3].
  • la mode recyclée se construit à partir de vêtements et autres matériaux ayant déjà eu une première vie, voire deux ou trois.
  • la mode durable, enfin, se confond avec ce que les experts appellent la slow fashion. « On fait des vêtements durables et indémodables. Ainsi, on pousse le consommateur à acheter de la meilleure qualité afin qu’il consomme moins. »[4] Dans le langage courant, le terme de « mode durable » s’utilise souvent - tout comme « mode éthique » - pour désigner le concept global de « mode responsable ».
  • la mode locale, qui s’appuie sur des circuits de production très courts.

La mode écoresponsable

Un constat

En 2018, l'agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie fait un constat: avec 100 milliards de vêtements vendus annuellement, la production entre 2000 et 2014 à doublé[5]. Or en 2012, 84 % des vêtements dont les consommateurs américains ne voulaient plus ont été jeté dans des décharges ou des incinérateurs, ce qui aggrave l'émission de gaz à effets de serre et la pollution des eaux et des sols[6]. En France, on estime qu'environ 240 000 tonnes de vêtements seraient jetés chaque année[7].

L'industrie de la mode, à l'heure de la fast fashion, émet environ 2 % de l'émission de gaz à effet de serre mondiale (soit 1.2 Milliard de tonnes de CO2)[8],[9] et utilise 4 % de l'eau potable disponible sur la planète[10] sans que celle-ci soit à 100 % purifiée avant d'être jetée dans les océans.

Sensibiliser le public

En 2018, la chaine YouTube Et tout le monde s'en fout, publie une vidéo intitulée « Les Vêtements » et qui fait plus de 500 000 vues en 2021. Deux ans auparavant, la mannequin Amma Aburam décrit pour Brut. son combat contre la fast fashion, exposant au public l'impact du « vêtement jetable » sur l'environnement[11]. Avec plus de seize mille vues sur Youtube, le sujet fait son chemin dans l'esprit des consommateurs.[12]

Cependant, c'est lors de pandémie de Covid-19 que la population occidentale prend conscience du trop-plein de vêtements. D'un côté, les consommateurs se trouvent enfermés dans de petits logements encombrés[13]. D'un autre, l'industrie de la mode découvre la précarité de son système avec l'interruption des transports aux longues et courtes distances ; ainsi que la diminution du chiffre d'affaires car les consommateurs ne peuvent plus suivre le rythme effréné de la mode[14]. C'est à la suite de ce constat que la journaliste Magali Moulinet-Govoroff, Mode Manifeste: S’habiller Autrement, aborde de manière approfondie le sujet. L'écrivaine fait l'état des lieux de l'industrie du textile et de son impact sur l'environnement. Son document devient une référence de la mode écoresponsable, notamment auprès des sections Tendance de la presse[15],[16].

Des solutions concrètes

L'industrie de la mode étant l'une des plus polluantes de la planète, les acteurs de la mode écoresponsable proposent de nombreuses manières de remédier à cela. Le premier conseil est de simplement user ses vêtements jusqu'à l'épuisement de ceux-ci. Mais pour les personnes attachées au changement régulier de style, la mannequin Amma Aburam propose quelques lignes directrices[11] :

  • Acheter des vêtements d'occasion. Les magasins de seconde main proposent des articles vestimentaires en très bon état. Le vêtement le plus éco-responsable est en effet celui qui existe déjà.
  • Acheter local. Les produits fabriqués et vendus près de chez soi, ou à défaut, dans son pays, émettent moins de CO2 et garantissent de bonnes conditions de travail des personnes impliquées dans la chaîne de production. Le neuf éthique représente une bonne alternative pour les personnes ne souhaitant pas porter des habits ayant déjà été portés.
  • Prendre soin de ses vêtements. Qu'un vêtement soit de bonne qualité ou non, il durera toujours plus longtemps si son entretien est adapté. Le fait de les réparer, les recoudre ou simplement de les ajuster à la taille contribue aussi à augmenter leur durée de vie.
  • Échanger, louer. Le phénomène est déjà connu pour les tenues de mariage, mais pourquoi ne pas élargir le principe à d'autres types de vêtements? Une tenue de soirée ou un costume pour un entretien peuvent être coûteux à l'achat, surtout s'ils ne sont remis que quelques fois au cours de la vie.

À cela, la journaliste Magali Moulinet-Govoroff, autrice de Mode Manifeste: s'habiller autrement, ajoute d'autres idées :

  • Donner, vendre, partager. Si nous sommes las d'un vêtement encore en bon état, pourquoi le jeter ? Les méthodes pour lui donner une seconde vie sont nombreuses et nettement moins polluantes que de mettre de bons vêtements à la poubelle.
  • S'éduquer. Connaître les origines d'une matière première, décrypter les étiquettes, connaître les méthodes de production et de fabrication est le seul et unique moyen de ne pas tomber dans les pièges marketings qui vantent les mérites "bio" de collections qui ne le sont pas vraiment[8].

Contenu

Dans le domaine environnemental, la mode éthique associe des créateurs qui cherchent à diminuer l'empreinte écologique de leur production, en utilisant des matières dites « écologiques », biologiques ou recyclées, et des processus de fabrication moins consommateurs d'eau, d'énergie et de transports, toujours dans l'optique de réduire l'impact environnemental du produit, tout au long de son cycle de vie.

Les aspects sociaux respectent les principes du commerce équitable tels qu'un salaire décent, le respect des droits des travailleurs et l'interdiction du travail des enfants, le respect des conventions internationales de l'OIT et l'application d'une charte minimum de droit social. Il peut s'agir de commerce équitable labellisé (dans le cas du coton), de filières vérifiées par des organismes de commerce équitable, ou encore de marques respectant les critères, moins contraignants, de la responsabilité sociale des entreprises.

La mode éthique est aussi parfois « ethnique », s'inspirant de modèles traditionnels pour des raisons esthétiques et/ou fonctionnelles (pagne, paréo, vêtements péruviens, etc.), en faisant produire les étoffes ou leurs décors dans les pays d'origine.

Exemples de matières dites « écologiques »

  • la fibre de bambou, la poudre de bambou utilisée sous forme visqueuse - la culture du bambou étant sobre en consommation d’eau ;
  • le chanvre ;
  • le coton issu de l'agriculture biologique, cultivé sans engrais chimiques (le coton conventionnel a un impact sur l’environnement désastreux, de par sa consommation en eau, mais surtout à cause de l'usage massif de pesticides) ;
  • le cuir de liège, champignon, algue, ananas sont des alternatives écoresponsables au cuir animal[17] ;
  • certaines matières recyclées, par exemple à partir des plastiques telles que le PVC ou polyéthylène ;
  • les fibres d'origine végétale, une filière où certains produits peuvent être écocertifiées, écosociocertifiées et/ou avoir fait l'objet d'un écobilan ou d'une analyse du cycle de vie (ACV). (par exemple le tencel, lyocell)

Une matière est considérée comme écologique dans la mesure où les cultures - dans leurs pays d'origine - n'ont pas contribué à dégrader les sols, détruire la forêt, drainer des zones humidesetc. Les Labels GOTS et Oeko-Tex sont considérés comme labels de référence pour s'assurer de l'aspect responsable des textiles.

Exemple de créateurs écoresponsables

Plusieurs créateurs de mode créent aujourd'hui leur marque de façon éthique et écoresponsable. Plusieurs mouvements les regroupent afin de faire connaître leurs actions et faire entendre leur voix.

Stella McCartney est une styliste anglaise. Fille de Paul McCartney, le bassiste des Beatles, elle commence sa carrière en 2004 et refuse l'usage de toute matière d'origine animale dans ses créations[18].

Dries Van Noten, né à Anvers, est un amateur de fausse fourrure. De son origine belge, il crée des manteaux pour l'hiver : par exemple, pendant la collection de l'hiver 2018, il fabriqua un manteau oversized, porté par des mannequins lors d'un défilé automne-hiver 2017-2018[19].

Julie Laurent est une femme qui produit une marque de vêtement à son nom. Elle aimerait rendre accessible des vêtements et des matières de qualité, tout en valorisant l’emploi en France. Elle utilise des fins de stocks de grandes marques comme des tissus Vuitton, Hermès, Chanel ou Dior. Ces derniers se retrouvent entre les mains de couturières, dans un petit atelier de Nantes, qui fabriquent uniquement en petites séries[20].

Pinatex, une marque de sac vegan qui utilise exclusivement du cuir d'ananas afin d'avoir un faible impact sur la planète.

La jeune blogueuse Glacier Girl utilise le bleu comme nouveau code écolo et redonne un nouveau souffle au mouvement. Elle utilise les réseaux pour parler écologie via son projet « Remember the Glaciers »[21].

La styliste Marine Serre a, elle aussi une démarche écoresponsable. Elle donne une seconde vie à des vêtements comme avec son projet « Regenerated », où elle réutilise différents types de jeans destinés à être jeté[22]. Elle utilise le processus de l'upcycling pour transformer de vieux vêtements en prêt-à-porter de luxe.[23]

Bibliographie

Références

  1. « Mode éthique ? », sur www.les-pieds-dans-la-toile.fr (consulté le )
  2. (en) « Fast Fashion Is the Second Dirtiest Industry in the World, Next to Big Oil », EcoWatch,‎ (lire en ligne, consulté le )
  3. Jeanne Pouget, « Docu : l'empreinte écologique dévastatrice de l'industrie de la mode », Konbini France,‎ (lire en ligne, consulté le )
  4. « Mode éthique ? | Les pieds dans la toile » (consulté le )
  5. Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie, « La mode sans dessus-dessous », sur multimedia.ademe.fr (consulté le )
  6. « Enquête. H&M, Zara, Topshop : la “fast fashion”, un fléau écologique », sur Courrier international, (consulté le )
  7. Par Emilie Torgemen Le 24 janvier 2020 à 06h02 et Modifié Le 24 Janvier 2020 À 17h08, « Pollution : le grand gâchis des vêtements usagés », sur leparisien.fr, (consulté le )
  8. a et b Magali Moulinet-Govoroff, Mode manifeste : s'habiller autrement, Éditions de La Martinière, (ISBN 978-2-7324-9386-2)
  9. « Mode éthique ou fast-fashion ? », sur Greenpeace France (consulté le )
  10. (en) Ellen McArthur Foundation, « A new textiles econom : redesigning fashion's future » [PDF], sur ellenmcarthurfoundation.org, (consulté le )
  11. a et b « Le combat d'Amma Aburam contre la fast fashion », sur Brut. (consulté le )
  12. (en) « UN launches drive to highlight environmental cost of staying fashionable », sur UN News, (consulté le )
  13. « Chroniques vertes - Quand ma polaire pollue », sur parismatch.com (consulté le )
  14. Magali Moulinet-Govoroff, Mode manifeste : s'habiller autrement, Editions de La Martinière, (ISBN 978-2-7324-9386-2)
  15. « « S’habiller autrement », une urgence écologique », sur L'Obs (consulté le )
  16. « Magali Moulinet-Govoroff : " 10.000 litres d'eau consommés pour un jean, c'est aberrant ! " », sur RTBF Tendance, (consulté le )
  17. « Mode éthique : 11 marques pour un shopping responsable - GoudronBlanc », sur Blog GoudronBlanc, (consulté le )
  18. « Mode éthique : zoom sur 10 créateurs eco-responsables », sur Vogue Paris (consulté le )
  19. « Mode éthique : zoom sur 10 créateurs eco-responsables », sur Vogue Paris (consulté le )
  20. « Changer nos looks, pour changer la planète ! », sur linfodurable.fr (consulté le )
  21. « Mode durable : une nouvelle génération innovante », sur Modelab, (consulté le )
  22. fashionunited, « marine serre donne une leçon d'upcycling », sur fashionunited.fr,
  23. Condé Nast, « Comment Marine Serre redonne vie aux vieux vêtements pour en faire du prêt-à-porter de luxe ? », sur Vogue France, (consulté le )

Articles connexes

Liens externes