Mennonites de Bolivie

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Mennonitisme en Bolivie
Une ancienne colonie dans la "Colonia Del Norte", Bolivie
Cadre
Type
Pays
Langues de travail

Les Mennonites de Bolivie sont regroupés dans diverses dénominations mennonites en Bolivie, avec 26 699 membres en 2018.

Pour la plupart, ce sont des descendants de mennonites originaires d'Allemagne et des Pays-Bas, qu'on nomme mennonites russes (en) car ils ont vécu au sein de l'Empire russe dès 1789. Ces mennonites parlent un dialecte allemand, le Plautdietsch. En plus des "mennonites historiques", cette communauté comprend un certain nombre de Boliviens qui se sont convertis au mennonitisme.

Les mennonites qui vivent en Bolivie sont parmi les plus traditionnels et conservateurs des mennonites d'Amérique du Sud.

Histoire[modifier | modifier le code]

Origines[modifier | modifier le code]

Le mennonisme est un mouvement anabaptiste fondé par Menno Simons, religieux néerlandais qui a quitté le catholicisme en 1536. Les premiers mennonites étaient principalement installés dans les régions de Frise et de Flandre, mais aussi dans les régions allemandes d'Holstein et de Frise orientale.

À partir du milieu du XVIe siècle, les mennonites quittent les Pays-Bas pour s'installer dans la région du delta de la Vistule afin de fuir les persécutions religieuses et de s'exempter du service militaire (les mennonites sont hostiles à toutes les formes de violence). Au niveau linguistique, ils adoptent peu à peu le bas-prussien tout en gardant certains mots de leurs langues maternelles néerlandaises et frisonnes. Progressivement, ces mennonites sont rejoints par d'autres venus de diverses régions allemandes.

En 1772, la plupart des terres où sont installés ces mennonites deviennent la propriété du royaume de Prusse. Frédéric-Guillaume II de Prusse monte sur le trône en 1786 et demande aux mennonites des frais importants pour les exempter de l'armée. Cela encourage les mennonites à quitter la région.

Russie[modifier | modifier le code]

Dans les années 1760, la reine Catherine II de Russie invite les mennonites de Prusse à s'installer au nord de la mer Noire en leur assurant une tolérance religieuse et une exemption militaire. Les mennonites acceptent et émigrent au sein de l'Empire russe, principalement entre 1789 et 1804. Quand la Russie introduit la conscription générale en 1874, de nombreux mennonites décident d'émigrer au Canada et aux États-Unis.

Canada[modifier | modifier le code]

Dès 1873, plus de 7 000 mennonites quittent l'Empire russe pour s'installer dans la province canadienne de Manitoba. En 1917, quand un enseignement obligatoire, laïc et universel est mis en place, certains mennonites quittent le pays. L'enseignement devait se faire en anglais, une langue que les plus conservateurs des mennonites considèrent comme une menace pour leur communauté et leur religion.

Mexique, Paraguay et Belize[modifier | modifier le code]

Environ 6 000 mennonites, principalement les plus conservateurs, quittent le Canada entre 1922 et 1925 pour s'installer au Mexique. En 1927, 1 800 autres s'installent au Paraguay dans la région de Chaco (en). Ces derniers sont rejoints en 1930 et 1947 par des mennonites en provenance directe de Russie. Peu après 1958, 1 700 mennonites installés au Mexique sont déplacés vers ce qui était le Honduras britannique, c'est-à-dire le Belize actuel.

Bolivie[modifier | modifier le code]

À partir des années 1930, le gouvernement bolivien accorde aux futurs immigrés mennonites plusieurs privilèges dont en premier lieu la liberté religieuse, des écoles privées et une exemption du service militaire. Toutefois, il faut attendre les années 1950 pour voir ces dispositifs s'appliquer réellement.

Entre 1954 et 1957, un premier groupe de 37 familles de diverses colonies mennonites du Paraguay s'installe en Bolivie et créé la colonie Tres Palmas à 25 kilomètres au Nord-est de Santa Cruz de la Sierra[1]. Une deuxième colonie se forme à 5 kilomètres par un groupe de 25 familles mennonites conservatrices venues du Paraguay. En 1959, la population totale mennonite en Bolivie est de 189 membres.

En 1963, les mennonites du Paraguay et du Canada fondent ensemble de nouvelles colonies. Les mennonites du Mexique et du Belize font de même dès 1967. En 1968, la colonie de Las Piedras devient la première fondée exclusivement de mennonites venus directement du Canada.

Population[modifier | modifier le code]

Les mennonites sont reconnaissables à leurs cheveux blonds et leurs vêtements sombres. Ils portent aussi généralement des prénoms bibliques. Ils continuent de s'exprimer en Plautdietsch et rares sont ceux qui maîtrisent l'espagnol. La plupart des mennonites installés en Bolivie sont conservateurs et traditionalistes. Ils rejettent toute forme de modernité, la violence et la paresse. Ils vivent sans électricité, voitures, téléphones, télévisions et autres technologies modernes. Ils cherchent avant tout à faire preuve d'une grande sobriété et d'une grande ardeur au travail au quotidien.

Les mennonites vivent majoritairement de l'agriculture intensive, principalement de blé et de soja, et constituent un moteur important de l'économie et du développement de la région de Santa Cruz de la Sierra[2]. Leurs relations avec le monde extérieur se limitent à l'achat de matières premières et à la vente de leurs productions agricoles.

Les communautés mennonites connaissent une croissance démographique rapide. En 1986, il y avait environ 17 500 mennonites vivant dans 16 colonies. Moins de dix ans plus tard, en 1995, on estimait leur nombre à 28 567, répartis au sein de 25 colonies. En 2002, le nombre de colonies était de 40 avec une population estimée à environ 38 000 membres. En 2012 enfin, ils étaient approximativement 70 000 répartis dans 57 colonies.

Selon un recensement publié en 2018 par la Conférence mennonite mondiale, le pays aurait 27 églises mennonites et 26,699 membres baptisés dans diverses dénominations [3].

Abus sexuels[modifier | modifier le code]

En 2011, huit hommes de la communauté mennonite bolivienne de Manitoba ont été reconnus coupables d'une série d'agressions sexuelles commises entre 2005 et 2009 sur des victimes âgées de 3 à 65 ans. Des substances narcotiques ont été utilisés pour endormir les victimes[4]. Avant cette découverte, les viols étaient attribués au sein de la communauté à un fantôme ou à un démon. Une enquête de 2013 a révélé une continuité de cas similaires d'agressions sexuelles, bien que les hommes condamnés en 2011 soient en prison[5],[6].

Références[modifier | modifier le code]

  1. William Schroeder, Mennonite Historical Atlas, Kindred Productions, Canada, 1996, p. 144
  2. « Histoire des mennonites en Bolivie », sur bolivia-excepcion.com (consulté le ).
  3. Mennonite World Conference, Carte mondiale, mwc-cmm.org, Canada, consulté le 5 décembre 2020
  4. (en-US) Condé Nast, « A Beloved Canadian Novelist Reckons with Her Mennonite Past », sur The New Yorker, (consulté le ).
  5. « Les viols fantômes de Bolivie », sur vice.com, (consulté le ).
  6. (en-GB) « The rapes haunting a community that shuns the 21st Century », BBC News,‎ (lire en ligne, consulté le )

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Pasco, Gwenaëlle: La Colonisation Mennonite en Bolivie : Culture et agriculture dans l'Oriente. Paris 1999.
  • Hedberg, Anna Sofia: Outside the world : Cohesion and Deviation among Old Colony Mennonites in Bolivia. Uppsala 2007.
  • Cañás Bottos, Lorenzo: Old Colony Mennonites in Argentina and Bolivia : Nation Making, Religious Conflict and Imagination of the Future. Leiden et. al. 2008.
  • Schartner, Sieghard and Schartner, Sylvia: Bolivien : Zufluchtsort der konservativen Mennoniten. Asunción 2009.
  • Huttner, Jakob: Zwischen Eigen-art und Wirk-lichkeit : Die Altkolonie-Mennoniten im bolivianischen Chaco. Berlin 2012.
  • Ce qu’elles disent de Miriam Toews, traduit de l’anglais par Lori Saint-Martin et Paul Gagné, éd. Buchet-Chastel, 2018.
  • (en) Yann le Polain de Waroux, Data for "Pious Pioneers: The expansion of Mennonite colonies in Latin America", Scholars Portal Dataverse, (DOI 10.5683/sp2/i4feqz, lire en ligne)

Liens externes[modifier | modifier le code]