« Migration assistée » : différence entre les versions

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Contenu supprimé Contenu ajouté
Didier-CTP (discuter | contributions)
ajour paragraphe et référence migration forestière
Résultat de la fusion avec Colonisation assistée
Ligne 1 : Ligne 1 :
{{à fusionner |Colonisation assistée |Migration assistée}}
{{À fusionner|Colonisation assistée|Migration assistée|}}
{{À wikifier|date=décembre 2018}}
{{typo|date=décembre 2018}}
{{typo|date=décembre 2018}}
{{orphelin|date=décembre 2018}}


La '''colonisation assistée''', ou '''migration assistée''', est une stratégie utilisée en [[biologie de la conservation]] qui consiste en l’introduction intentionnelle d’espèces animales et végétales dans un milieu se trouvant en dehors de leurs [[Aire de répartition|aires de répartition]] originelles<ref>{{Article|prénom1=Anthony|nom1=Ricciardi|prénom2=Daniel|nom2=Simberloff|titre=Assisted colonization is not a viable conservation strategy|périodique=Trends in Ecology & Evolution|volume=24|numéro=5|date=2009-5|issn=0169-5347|pmid=19324453|doi=10.1016/j.tree.2008.12.006|lire en ligne=https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/19324453|consulté le=2018-12-08|pages=248–253}}</ref>.
La '''migration assistée''' est une stratégie de conservation des espèces pendant laquelle l’homme déplace des animaux ou des plantes d’un habitat à un autre. Ce déplacement est une mesure préventive face au changement climatique, qui apporte des perturbations qui altèrent les communautés et les conditions environnementales en dehors cadre dans lequel les forêts ont évolué, et qui se font à une vitesse trop rapide pour que l’adaptation naturelle garde le rythme<ref>{{Article|langue=en|prénom1=S.|nom1=Trumbore|prénom2=P.|nom2=Brando|prénom3=H.|nom3=Hartmann|titre=Forest health and global change|périodique=Science|volume=349|numéro=6250|date=2015-08-21|issn=0036-8075|issn2=1095-9203|pmid=26293952|doi=10.1126/science.aac6759|lire en ligne=http://science.sciencemag.org/content/349/6250/814|consulté le=2018-12-03|pages=814–818}}</ref>. Les entités sont exportées vers un habitat offrant un avenir climatique plus propice à la survie de l’espèce<ref name=":0">{{Article|langue=French|auteur1=|prénom1=J. H.|nom1=Pedlar|prénom2=D. W.|nom2=McKenney|prénom3=I.|nom3=Aubin|titre=Comment la migration assisté pourrait-elle faciliter l'adaptation des forêts aux changements climatiques? Nouvelles Express 63.|périodique=Nouvelles Express|date=2012|issn=|lire en ligne=https://www.cfs.nrcan.gc.ca/publications?id=34182|consulté le=2018-12-03|pages=}}</ref>; ou inversement, des espèces sont importées pour leur diversité génétique déjà adapté à un climat plus chaud, afin de maintenir la productivité forestière locale<ref name=":1">{{Article|langue=Français|auteur1=Lamhamedi, M. S|titre=L'écophysiologie, un Atout Pour Réussir la Migration Assistée de Sources Génétiques D'épinette Blanche|périodique=Avis de Recherche forestière|date=2017|issn=|lire en ligne=|pages=}}</ref>. Ces habitats cibles peuvent être une expansion de leur habitat originel, un habitat duquel ils ont connu une baisse d’effectif ou une extinction locale, ou un nouvel habitat qui n’a jamais soutenu cette espèce<ref name=":2">{{Article|langue=en|prénom1=Bridget S.|nom1=Green|prénom2=Caleb|nom2=Gardner|prénom3=Adrian|nom3=Linnane|prénom4=Peter J.|nom4=Hawthorne|titre=The Good, the Bad and the Recovery in an Assisted Migration|périodique=PLoS ONE|volume=5|numéro=11|date=2010-11-30|issn=1932-6203|pmid=21151965|pmcid=PMC2996890|doi=10.1371/journal.pone.0014160|lire en ligne=http://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0014160|consulté le=2018-12-03|pages=e14160}}</ref>. Dans tous les cas, l’habitat cible est caractérisé par des conditions propices à la survie de l’espèce. La migration assistée reste majoritairement théorique, à part pour quelques exemples d’applications<ref name=":3">{{Article|langue=en|titre=Quantifying the need and potential of assisted migration|périodique=Biological Conservation|volume=205|date=2017-01-01|issn=0006-3207|doi=10.1016/j.biocon.2016.11.023|lire en ligne=https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S000632071630862X|consulté le=2018-12-03|pages=34–41}}</ref>. Ceci est dû au fait que cette stratégie de conservation est un sujet de débat dans le domaine de l’environnement et de la conservation. Un consensus sur son acceptabilité n’a pas encore été atteint.

Ce processus de conservation s’intègre dans un contexte de perte de [[biodiversité]] et de [[changement climatique]]. La colonisation assistée a pour but de littéralement venir en aide à ces espèces en les déplaçant volontairement dans un nouveau milieu qui correspondra sur le long terme à la [[niche écologique]] de l'[[espèce]].

Contrairement à d’autres méthodes de conservation qui ont pour but la réintroduction des espèces au sein de leurs [[Aire de répartition|aires de répartition]] naturelle (comme les [[renforcements écologiques]] et les [[Réintroduction|réintroductions]]), la colonisation assistée présente des risques conséquents liés au fait que les espèces déplacées n’étaient pas primitivement présentes dans le milieu colonisé. Certaines mesures visent à réduire ces risques, qui peuvent par exemple engendrer des proliférations indésirables (problématiques d’[[Espèce envahissante|espèces invasives]]) ou de la [[compétition (biologie)|compétition]] due au recouvrement de [[Niche écologique|niches écologiques]] d’espèces déjà présentes sur le site d’introduction par l’espèce colonisatrice.

La colonisation assistée est aussi parfois utilisée à des fins économiques<ref name=":2" /> (cf. exemple sur les [[Palinuridae|langoustes]] de [[Tasmanie]]).

La migration assistée reste majoritairement théorique, à part pour quelques exemples d’applications<ref name=":3m">{{Article|langue=en|titre=Quantifying the need and potential of assisted migration|périodique=Biological Conservation|volume=205|date=2017-01-01|issn=0006-3207|doi=10.1016/j.biocon.2016.11.023|lire en ligne=https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S000632071630862X|consulté le=2018-12-03|pages=34–41}}</ref>. Ceci est dû au fait que cette stratégie de conservation est un sujet de débat dans le domaine de l’environnement et de la conservation. Un consensus sur son acceptabilité n’a pas encore été atteint.

== Contexte ==
En raison de l’urbanisation, de la [[Fragmentation (écologie)|fragmentation des habitats]], de l’expansion de l’[[agriculture]], ou encore de [[Pollution|pollutions]], la capacité des espèces à survivre dans leurs habitats naturels peut être menacée. On observe déjà aujourd'hui de nombreuses modifications dans l'aire de répartition de certaines espèces, cependant toutes ne sont pas capables de disperser ou de s'adapter suffisamment vite pour faire face au [[changement climatique]] et aux [[Anthropisation|pressions anthropiques]]<ref>{{Lien web|langue=|titre=Assisted Colonization and Rapid Climate Change|url=http://online.nwf.org/site/DocServer/NRNRC-GW-FWP-Hoegh-Guldberg-Paper.pdf?docID=6181|site=online.nwf.org|date=|consulté le=2018-12-09}}</ref>.


== Contexte. ==
[[Fichier:Global Warming Predictions.png|vignette|Predictions de l'évolution globale des températures suite au changement climatique.]]
[[Fichier:Global Warming Predictions.png|vignette|Predictions de l'évolution globale des températures suite au changement climatique.]]


=== Le changement climatique ===
=== Le changement climatique ===
La migration assistée est poussée par le changement climatique. En effet, le changement climatique entraîne des modifications de conditions variant selon les zones. Ces modifications affectent souvent les températures, ainsi que les cycles hydrologiques locaux. Ce qui, ensuite, créait des stresses environnementaux pour lesquelles certaines espèces végétales et animales ne sont pas adaptées<ref name=":0" />. Par exemple, « au Canada, les limites climatiques de nombreuses essences forestières devraient se déplacer d’environ 300 km vers le nord au cours des 50 prochaines années »<ref name=":0" />. Le changement climatique est donc en train de déplacer et de réduire la taille des enveloppes climatiques de plusieurs espèces.
La migration assistée est poussée par le changement climatique. En effet, le changement climatique entraîne des modifications de conditions variant selon les zones. Ces modifications affectent souvent les températures, ainsi que les cycles hydrologiques locaux. Ce qui, ensuite, créait des stresses environnementaux pour lesquelles certaines espèces végétales et animales ne sont pas adaptées<ref name=":0m" />. Par exemple, « au Canada, les limites climatiques de nombreuses essences forestières devraient se déplacer d’environ 300 km vers le nord au cours des 50 prochaines années »<ref name=":0m" />. Le changement climatique est donc en train de déplacer et de réduire la taille des enveloppes climatiques de plusieurs espèces.

Ce déplacement est une mesure préventive face au changement climatique, qui apporte des perturbations qui altèrent les communautés et les conditions environnementales en dehors cadre dans lequel les forêts ont évolué, et qui se font à une vitesse trop rapide pour que l’adaptation naturelle garde le rythme<ref>{{Article|langue=en|prénom1=S.|nom1=Trumbore|prénom2=P.|nom2=Brando|prénom3=H.|nom3=Hartmann|titre=Forest health and global change|périodique=Science|volume=349|numéro=6250|date=2015-08-21|issn=0036-8075|issn2=1095-9203|pmid=26293952|doi=10.1126/science.aac6759|lire en ligne=http://science.sciencemag.org/content/349/6250/814|consulté le=2018-12-03|pages=814–818}}</ref>. Les entités sont exportées vers un habitat offrant un avenir climatique plus propice à la survie de l’espèce<ref name=":0m">{{Article|langue=French|auteur1=|prénom1=J. H.|nom1=Pedlar|prénom2=D. W.|nom2=McKenney|prénom3=I.|nom3=Aubin|titre=Comment la migration assisté pourrait-elle faciliter l'adaptation des forêts aux changements climatiques? Nouvelles Express 63.|périodique=Nouvelles Express|date=2012|issn=|lire en ligne=https://www.cfs.nrcan.gc.ca/publications?id=34182|consulté le=2018-12-03|pages=}}</ref>; ou inversement, des espèces sont importées pour leur diversité génétique déjà adapté à un climat plus chaud, afin de maintenir la productivité forestière locale<ref name=":1m">{{Article|langue=Français|auteur1=Lamhamedi, M. S|titre=L'écophysiologie, un Atout Pour Réussir la Migration Assistée de Sources Génétiques D'épinette Blanche|périodique=Avis de Recherche forestière|date=2017|issn=|lire en ligne=|pages=}}</ref>.

Le moteur de la conceptualisation de la colonisation assistée a d’abord été la prise en compte du changement climatique par les [[Conservation de la nature|conservationnistes]], et l’anticipation des menaces pouvant entraîner certains taxons vers un [[Vortex d'extinction|vortex d’extinction]]. Le débat persiste sur les capacités de certaines espèces à s’adapter au réchauffement global, notamment en raison des barrières naturelles et anthropiques à la migration. La question se pose aussi pour les espèces suivant la montée en altitude des gradients de température, qui se retrouvent en quelque sorte bloquées par les reliefs.


=== Les impacts du changement climatique ===
=== Les impacts du changement climatique ===
Le potentiel d’impact se situe de l’ordre du gène et des organismes, à celui des populations, des communautés, et des écosystèmes<ref name=":4">{{Article|prénom1=I.|nom1=Aubin|prénom2=C.M.|nom2=Garbe|prénom3=S.|nom3=Colombo|prénom4=C.R.|nom4=Drever|titre=Why we disagree about assisted migration: Ethical implications of a key debate regarding the future of Canada's forests|périodique=The Forestry Chronicle|volume=87|numéro=06|date=2011-12|issn=0015-7546|issn2=1499-9315|doi=10.5558/tfc2011-092|lire en ligne=http://pubs.cif-ifc.org/doi/abs/10.5558/tfc2011-092|consulté le=2018-12-03|pages=755–765}}</ref>. Ce phénomène rend les individus, les espèces, et les communautés plus vulnérables aux espèces envahissantes, aux épidémies, et au parasitisme<ref name=":0" />. De plus, si les stresses perdurent, les espèces vulnérables risqueraient de ne plus être en mesure de se régénérer<ref name=":0" />.
Le potentiel d’impact se situe de l’ordre du gène et des organismes, à celui des populations, des communautés, et des écosystèmes<ref name=":4m">{{Article|prénom1=I.|nom1=Aubin|prénom2=C.M.|nom2=Garbe|prénom3=S.|nom3=Colombo|prénom4=C.R.|nom4=Drever|titre=Why we disagree about assisted migration: Ethical implications of a key debate regarding the future of Canada's forests|périodique=The Forestry Chronicle|volume=87|numéro=06|date=2011-12|issn=0015-7546|issn2=1499-9315|doi=10.5558/tfc2011-092|lire en ligne=http://pubs.cif-ifc.org/doi/abs/10.5558/tfc2011-092|consulté le=2018-12-03|pages=755–765}}</ref>. Ce phénomène rend les individus, les espèces, et les communautés plus vulnérables aux espèces envahissantes, aux épidémies, et au parasitisme<ref name=":0m" />. De plus, si les stresses perdurent, les espèces vulnérables risqueraient de ne plus être en mesure de se régénérer<ref name=":0m" />.


À force de [[stress]], les espèces les plus vulnérables risquent d’atteindre des extinctions locales, qui ont le potentiel de devenir globale, privant d’autres espèces de ressources ou de niches, et entraînant des dérèglements dans les dynamiques écologiques de leur écosystème. Ces dérèglements pourraient engendrer une perte de fonctions écologiques, qui affecterait la santé et la productivité des forêts, ainsi que la biodiversité locale<ref name=":0" />. Ces dérèglements mèneraient ainsi à une modification du paysage. Des forets pourraient devenir des savanes<ref>{{Article|langue=en|titre=‘Tipping points’ for the Amazon forest|périodique=Current Opinion in Environmental Sustainability|volume=1|numéro=1|date=2009-10-01|issn=1877-3435|doi=10.1016/j.cosust.2009.07.003|lire en ligne=https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1877343509000062|consulté le=2018-12-03|pages=28–36}}</ref>, qui pourraient finalement devenir des déserts (voir désertification).
À force de [[stress]], les espèces les plus vulnérables risquent d’atteindre des extinctions locales, qui ont le potentiel de devenir globale, privant d’autres espèces de ressources ou de niches, et entraînant des dérèglements dans les dynamiques écologiques de leur écosystème. Ces dérèglements pourraient engendrer une perte de fonctions écologiques, qui affecterait la santé et la productivité des forêts, ainsi que la biodiversité locale<ref name=":0m" />. Ces dérèglements mèneraient ainsi à une modification du paysage. Des forets pourraient devenir des savanes<ref>{{Article|langue=en|titre=‘Tipping points’ for the Amazon forest|périodique=Current Opinion in Environmental Sustainability|volume=1|numéro=1|date=2009-10-01|issn=1877-3435|doi=10.1016/j.cosust.2009.07.003|lire en ligne=https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1877343509000062|consulté le=2018-12-03|pages=28–36}}</ref>, qui pourraient finalement devenir des déserts (voir désertification).
[[Fichier:Biodiversity Hotspots.svg|vignette|Les hotspots de la biodiversity. Ce sont les zones comportant la biodiversité la plus riche. De ce fait, ce sont les zones les plus à risques face au changement climatique, et nécessitant le plus d'étude pour des stratégies de conservation.]]
[[Fichier:Biodiversity Hotspots.svg|vignette|Les hotspots de la biodiversity. Ce sont les zones comportant la biodiversité la plus riche. De ce fait, ce sont les zones les plus à risques face au changement climatique, et nécessitant le plus d'étude pour des stratégies de conservation.]]
Cependant, en parallèle, le changement climatique créait des espaces propices à la survie de ces espèces ailleurs. Ces nouveaux espaces peuvent se situer en bordure de leur espace de distribution habituel, tout comme ils peuvent se trouver à plusieurs kilomètres ou sur d’autres continents, hors de portée pour une dispersion naturelle<ref name=":4" />.
Cependant, en parallèle, le changement climatique créait des espaces propices à la survie de ces espèces ailleurs. Ces nouveaux espaces peuvent se situer en bordure de leur espace de distribution habituel, tout comme ils peuvent se trouver à plusieurs kilomètres ou sur d’autres continents, hors de portée pour une dispersion naturelle<ref name=":4m" />.


Le changement climatique suggère que les espèces et les populations d'arbres forestiers devront migrer plus rapidement que leur capacité naturelle. Par conséquent, les stratégies d'adaptation au changement climatique, telles que la migration assistée, ont retenu l'attention depuis 2007<ref>{{Article |langue=en |auteur1=Mary I. Williams |auteur2=R. Kasten Dumroese |titre=Preparing for Climate Change: Forestry and Assisted Migration |périodique=Journal of Forestry |volume=111 |numéro=4 |date=juillet 2013 |issn= |lire en ligne=https://academic.oup.com/jof/article/111/4/287/4599572 |consulté le=02/01/2020 |pages=287–297 }}</ref>.
Le changement climatique suggère que les espèces et les populations d'arbres forestiers devront migrer plus rapidement que leur capacité naturelle. Par conséquent, les stratégies d'adaptation au changement climatique, telles que la migration assistée, ont retenu l'attention depuis 2007<ref>{{Article |langue=en |auteur1=Mary I. Williams |auteur2=R. Kasten Dumroese |titre=Preparing for Climate Change: Forestry and Assisted Migration |périodique=Journal of Forestry |volume=111 |numéro=4 |date=juillet 2013 |issn= |lire en ligne=https://academic.oup.com/jof/article/111/4/287/4599572 |consulté le=02/01/2020 |pages=287–297 }}</ref>.


=== Solutions naturelles ===
=== Solutions naturelles ===
Face à ces nouvelles conditions, les espèces impliquées devraient assurer leur survie en migrant et colonisant de nouveaux espaces. Mais ce stratagème n’est pas nécessaire pour tous. Les pressions environnementales ont toujours su être le vecteur de l’évolution naturelle, et certaines espèces possèdent le potentiel de s’adapter aux nouvelles conditions climatiques sans avoir à quitter leur écosystème actuel. Ce potentiel varie d’une espèce à une autre. Entre autres, une étude a déterminé que l’évolution de la tolérance à de plus hautes température parmi certaines espèces d’amphibiens et de reptiles permettrait probablement à ces espèces de survivre à une augmentation en température de 3 °C sur 100 années<ref name=":5">{{Article|langue=en|prénom1=DAVID K.|nom1=SKELLY|prénom2=LIANA N.|nom2=JOSEPH|prénom3=HUGH P.|nom3=POSSINGHAM|prénom4=L. KEALOHA|nom4=FREIDENBURG|titre=Evolutionary Responses to Climate Change|périodique=Conservation Biology|volume=21|numéro=5|date=2007-10|issn=0888-8892|issn2=1523-1739|doi=10.1111/j.1523-1739.2007.00764.x|lire en ligne=https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/j.1523-1739.2007.00764.x|consulté le=2018-12-03|pages=1353–1355}}</ref>.  Cependant, le rythme d’évolution du changement climatique dépasse celui de l’évolution naturelle de la majorité des espèces et des communautés, notamment les espèces végétales<ref name=":0" />. Par exemple, au Québec, le rythme de migration des espèces arborescentes est évalué à 100 à 200 m/an, tandis que la vitesse de déplacement du climat est estimée à 2000 à 10 000 m/an<ref name=":1" />.
Face à ces nouvelles conditions, les espèces impliquées devraient assurer leur survie en migrant et colonisant de nouveaux espaces. Mais ce stratagème n’est pas nécessaire pour tous. Les pressions environnementales ont toujours su être le vecteur de l’évolution naturelle, et certaines espèces possèdent le potentiel de s’adapter aux nouvelles conditions climatiques sans avoir à quitter leur écosystème actuel. Ce potentiel varie d’une espèce à une autre. Entre autres, une étude a déterminé que l’évolution de la tolérance à de plus hautes température parmi certaines espèces d’amphibiens et de reptiles permettrait probablement à ces espèces de survivre à une augmentation en température de 3 °C sur 100 années<ref name=":5m">{{Article|langue=en|prénom1=DAVID K.|nom1=SKELLY|prénom2=LIANA N.|nom2=JOSEPH|prénom3=HUGH P.|nom3=POSSINGHAM|prénom4=L. KEALOHA|nom4=FREIDENBURG|titre=Evolutionary Responses to Climate Change|périodique=Conservation Biology|volume=21|numéro=5|date=2007-10|issn=0888-8892|issn2=1523-1739|doi=10.1111/j.1523-1739.2007.00764.x|lire en ligne=https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/j.1523-1739.2007.00764.x|consulté le=2018-12-03|pages=1353–1355}}</ref>. Cependant, le rythme d’évolution du changement climatique dépasse celui de l’évolution naturelle de la majorité des espèces et des communautés, notamment les espèces végétales<ref name=":0m" />. Par exemple, au Québec, le rythme de migration des espèces arborescentes est évalué à 100 à 200 m/an, tandis que la vitesse de déplacement du climat est estimée à 2000 à 10 000 m/an<ref name=":1m" />.


Afin de contrer cet effet, des biologistes peuvent implémenter des espèces exotiques adaptées aux nouvelles conditions abiotiques, et capable de remplacer les fonctions écologiques des espèces locales stressées<ref name=":1" />. De cette manière les dynamiques de l'écosystème restent relativement stables, et l’écosystème peut conserver sa « valeur ». De la même manière, ils peuvent exporter les espèces stressées vers de nouveaux sites, qui pourraient permettre la survie de ces espèces<ref name=":0" />.
Afin de contrer cet effet, des biologistes peuvent implémenter des espèces exotiques adaptées aux nouvelles conditions abiotiques, et capable de remplacer les fonctions écologiques des espèces locales stressées<ref name=":1m" />. De cette manière les dynamiques de l'écosystème restent relativement stables, et l’écosystème peut conserver sa « valeur ». De la même manière, ils peuvent exporter les espèces stressées vers de nouveaux sites, qui pourraient permettre la survie de ces espèces<ref name=":0m" />.

== Terminologie ==

Brian J. Keel est le premier à utiliser le terme de « migration assistée » dans sa thèse en 2007. Il plaide en faveur de l'utilisation de la migration assistée comme stratégie de [[Conservation de la nature|conservation]] contre le [[changement climatique]] rapide :

{{citation étrangère bloc|référence=<ref>Keel, Brian J. “Assisted Migration as a Conservation Strategy for Rapid Climate Change: Investigating Extended Photoperiod and Mycobiont Distributions for Habenaria Repens Nuttall (Orchidaceae) as a Case Study.” ''Antioch University New England'', 2007.</ref>|In these situations where plants are prevented from migration, human intervention will be necessary to prevent extinction. I call this intervention “assisted migration”, which is the employment of techniques to ensure the maintenance of plant populations in a changing global environment through the intentional creation of populations beyond the boundary of a plant’s present range.”'' }}

Cependant, la terminologie du terme employé par Keel est débattue car il peut prêter à confusion. En effet, en écologie le terme « migration » fait référence à un phénomène de déplacement périodique d’une espèce d’un endroit à un autre. Cette définition est en contradiction avec celle point de la colonisation assistée dans laquelle le déplacement d’une espèce cle en dehors de son [[aire de répartition]] originelle afin de fonder une nouvelle population est initié par l’Homme.


== Types d'application ==
== Types d'application ==
La migration assistée a le potentiel d’être appliqué aux espèces végétales et animales. Cependant, elle est plus souvent appliquée aux espèces végétales qu’animales. Les animaux ont la capacité de se déplacer pour atteindre des espaces plus propices à leur survie, afin de trouver plus de nourriture, et de meilleure niche écologique<ref name=":5" />. Ils peuvent aussi se reproduire plus rapidement, en exprimant des mutations sélectionnant les plus adaptées<ref name=":5" />. Les espaces végétales, cependant, ne possèdent ces capacités, et leur rythme d’évolution ne peut entrer en compétition avec le rythme de modification des caractéristiques abiotiques et biotiques de leur environnement, entraînées principalement par le changement climatique<ref name=":5" />. Elles ont donc plus de besoins d’assistances. La migration assistée offre trois types de procédés. La réintroduction, l’introduction, et l’augmentation<ref name=":6">{{Article|langue=en|prénom1=Andrew R.|nom1=Weeks|prénom2=Carla M.|nom2=Sgro|prénom3=Andrew G.|nom3=Young|prénom4=Richard|nom4=Frankham|titre=Assessing the benefits and risks of translocations in changing environments: a genetic perspective|périodique=Evolutionary Applications|volume=4|numéro=6|date=2011-06-18|issn=1752-4571|pmid=22287981|pmcid=PMC3265713|doi=10.1111/j.1752-4571.2011.00192.x|lire en ligne=https://besjournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/j.1752-4571.2011.00192.x|consulté le=2018-12-03|pages=709–725}}</ref>.
La migration assistée a le potentiel d’être appliqué aux espèces végétales et animales. Cependant, elle est plus souvent appliquée aux espèces végétales qu’animales. Les animaux ont la capacité de se déplacer pour atteindre des espaces plus propices à leur survie, afin de trouver plus de nourriture, et de meilleure niche écologique<ref name=":5m" />. Ils peuvent aussi se reproduire plus rapidement, en exprimant des mutations sélectionnant les plus adaptées<ref name=":5m" />. Les espaces végétales, cependant, ne possèdent ces capacités, et leur rythme d’évolution ne peut entrer en compétition avec le rythme de modification des caractéristiques abiotiques et biotiques de leur environnement, entraînées principalement par le changement climatique<ref name=":5m" />. Elles ont donc plus de besoins d’assistances. La migration assistée offre trois types de procédés. La réintroduction, l’introduction, et l’augmentation<ref name=":6">{{Article|langue=en|prénom1=Andrew R.|nom1=Weeks|prénom2=Carla M.|nom2=Sgro|prénom3=Andrew G.|nom3=Young|prénom4=Richard|nom4=Frankham|titre=Assessing the benefits and risks of translocations in changing environments: a genetic perspective|périodique=Evolutionary Applications|volume=4|numéro=6|date=2011-06-18|issn=1752-4571|pmid=22287981|pmcid=PMC3265713|doi=10.1111/j.1752-4571.2011.00192.x|lire en ligne=https://besjournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/j.1752-4571.2011.00192.x|consulté le=2018-12-03|pages=709–725}}</ref>.

Les habitats cibles peuvent être une expansion de leur habitat originel, un habitat duquel ils ont connu une baisse d’effectif ou une extinction locale, ou un nouvel habitat qui n’a jamais soutenu cette espèce<ref name=":2m">{{Article|langue=en|prénom1=Bridget S.|nom1=Green|prénom2=Caleb|nom2=Gardner|prénom3=Adrian|nom3=Linnane|prénom4=Peter J.|nom4=Hawthorne|titre=The Good, the Bad and the Recovery in an Assisted Migration|périodique=PLoS ONE|volume=5|numéro=11|date=2010-11-30|issn=1932-6203|pmid=21151965|pmcid=PMC2996890|doi=10.1371/journal.pone.0014160|lire en ligne=http://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0014160|consulté le=2018-12-03|pages=e14160}}</ref>. Dans tous les cas, l’habitat cible est caractérisé par des conditions propices à la survie de l’espèce.


=== L’augmentation ===
=== L’augmentation ===
Ligne 37 : Ligne 63 :


== Enjeux ==
== Enjeux ==
Malgré le fait que concept offre des bénéfices intéressants, tels que la prévention de l’extinction d’espèces ou de génotypes, la préservation de services écosystémiques, ou la préservation de certaines industries (e.g. la foresterie)<ref name=":4" />, l’autre partie du débat contient des arguments tout aussi importants. Parmi ceux-là : « l’invasion d’essences déplacées dans un nouvel écosystème, l’introduction de nouveaux organismes nuisibles et maladies, l’échec de la translocation et la collecte excessive de semences ou de boutures provenant de populations sources »<ref name=":0" />. D’autres négateurs soutiennent qu’il devrait y avoir une limite à l’implication humaine, qui a causé des catastrophes dans le passé<ref name=":2" />.
Malgré le fait que concept offre des bénéfices intéressants, tels que la prévention de l’extinction d’espèces ou de génotypes, la préservation de services écosystémiques, ou la préservation de certaines industries (e.g. la foresterie)<ref name=":4m" />, l’autre partie du débat contient des arguments tout aussi importants. Parmi ceux-là : « l’invasion d’essences déplacées dans un nouvel écosystème, l’introduction de nouveaux organismes nuisibles et maladies, l’échec de la translocation et la collecte excessive de semences ou de boutures provenant de populations sources »<ref name=":0m" />. D’autres négateurs soutiennent qu’il devrait y avoir une limite à l’implication humaine, qui a causé des catastrophes dans le passé<ref name=":2m" />.


=== Échec de projet ===
=== Échec de projet ===
La stratégie serait considérée comme un échec dans le cas d’un projet, si l’espèce introduite ne parvient pas à survivre dans le nouvel écosystème. Cela pourrait être dû à une mauvaise planification, ou à un stresse non-considéré<ref name=":2" />. Il n’est pas facile d’acquérir toutes les connaissances concernant une espèce et ses interactions avec son habitat, ce qui rend l’étude des stresse d’une translocation difficile à estimer. Le stresse pourrait être causé par le transport des individus, une désorientation durant la mise en liberté, ou un délai entre la mise en liberté et les premières périodes de reproductions<ref name=":2" />.
La stratégie serait considérée comme un échec dans le cas d’un projet, si l’espèce introduite ne parvient pas à survivre dans le nouvel écosystème. Cela pourrait être dû à une mauvaise planification, ou à un stresse non-considéré<ref name=":2m" />. Il n’est pas facile d’acquérir toutes les connaissances concernant une espèce et ses interactions avec son habitat, ce qui rend l’étude des stresse d’une translocation difficile à estimer. Le stresse pourrait être causé par le transport des individus, une désorientation durant la mise en liberté, ou un délai entre la mise en liberté et les premières périodes de reproductions<ref name=":2m" />.


Une autre cause d'échec consisterait en un effort effectué inutilement suite à une mauvaise interprétation des prévisions d'évolutions des niches climatiques. En effet, le fait qu’une espèce soit considéré comme étant vulnérable au changement climatique à cause d’une perte de surface de distribution ne signifie pas que la migration assistée est la stratégie propice à son cas. Les conditions géographiques doivent d’abord être prises en considérations pour évaluer la combinaison des pertes et des gains en surface<ref name=":3" />. Une espèce qui ne perd pas d’habitat adéquats ne nécessite pas d’implication humaine. Une espèce qui ne possédera pas de nouveaux espaces adéquats hors de son champ de distribution actuelle ne nécessitera pas d’aide migratoire. Seule une espèce qui gagnerait, par le changement climatique, une quantité non négligeable de territoires adéquats, tout en perdant une quantité importante de territoires actuel, et en ayant des difficultés de dispersions est éligible à une stratégie de migration assistée<ref name=":3" />.
Une autre cause d'échec consisterait en un effort effectué inutilement suite à une mauvaise interprétation des prévisions d'évolutions des niches climatiques. En effet, le fait qu’une espèce soit considéré comme étant vulnérable au changement climatique à cause d’une perte de surface de distribution ne signifie pas que la migration assistée est la stratégie propice à son cas. Les conditions géographiques doivent d’abord être prises en considérations pour évaluer la combinaison des pertes et des gains en surface<ref name=":3m" />. Une espèce qui ne perd pas d’habitat adéquats ne nécessite pas d’implication humaine. Une espèce qui ne possédera pas de nouveaux espaces adéquats hors de son champ de distribution actuelle ne nécessitera pas d’aide migratoire. Seule une espèce qui gagnerait, par le changement climatique, une quantité non négligeable de territoires adéquats, tout en perdant une quantité importante de territoires actuel, et en ayant des difficultés de dispersions est éligible à une stratégie de migration assistée<ref name=":3m" />.


=== Espèces envahissantes ===
=== Espèces envahissantes ===
Un des contre-arguments les plus fréquemment associés à la migration assistée, est le fait que les espèces implémentées ont le potentiel de se comporter comme des espèces envahissantes. Une espèce envahissante est une espèce exotique venant d’un écosystème, et s’implémentant dans un nouveau. Les espèces envahissantes ont la caractéristique de « trop bien s’adapté », et de devenir dominantes dans le nouvel écosystème au détriment des espèces natives<ref name=":2" />.
Un des contre-arguments les plus fréquemment associés à la migration assistée, est le fait que les espèces implémentées ont le potentiel de se comporter comme des espèces envahissantes. Une espèce envahissante est une espèce exotique venant d’un écosystème, et s’implémentant dans un nouveau. Les espèces envahissantes ont la caractéristique de « trop bien s’adapté », et de devenir dominantes dans le nouvel écosystème au détriment des espèces natives<ref name=":2m" />.


Cependant, les espèces envahissantes ont souvent été la cause d’une introduction accidentelle. Un plan de stratégie incluant la migration assistée devrait faire l’objet d’une étude exhaustive, et prendre en compte ce risque en particulier. De ce fait, ce risque devrait présenter un potentiel minime avant d’entreprendre un tel projet<ref name=":2" />. De plus, une étude a mentionné que moins de 1 % des espèces ayant été introduites dans un nouvel environnement sont devenues envahissantes<ref name=":8">{{Article|langue=en|titre=Assisted migration of plants: Changes in latitudes, changes in attitudes|périodique=Biological Conservation|volume=143|numéro=1|date=2010-01-01|issn=0006-3207|doi=10.1016/j.biocon.2009.08.015|lire en ligne=https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0006320709003917|consulté le=2018-12-03|pages=18–27}}</ref>.
Cependant, les espèces envahissantes ont souvent été la cause d’une introduction accidentelle. Un plan de stratégie incluant la migration assistée devrait faire l’objet d’une étude exhaustive, et prendre en compte ce risque en particulier. De ce fait, ce risque devrait présenter un potentiel minime avant d’entreprendre un tel projet<ref name=":2m" />. De plus, une étude a mentionné que moins de 1 % des espèces ayant été introduites dans un nouvel environnement sont devenues envahissantes<ref name=":8">{{Article|langue=en|titre=Assisted migration of plants: Changes in latitudes, changes in attitudes|périodique=Biological Conservation|volume=143|numéro=1|date=2010-01-01|issn=0006-3207|doi=10.1016/j.biocon.2009.08.015|lire en ligne=https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0006320709003917|consulté le=2018-12-03|pages=18–27}}</ref>.


=== Hybridation ===
=== Hybridation ===
Ligne 53 : Ligne 79 :


=== Le poids des risques et des bénéfices ===
=== Le poids des risques et des bénéfices ===
Il est évident que le changement climatique a le potentiel de causer la perte de plusieurs espèces, et que les méthodes habituelles de conservation pourraient ne pas protéger les espèces d'un déclin éventuel<ref name=":3" />. Les environnementalistes craignant les risques de la migration assistée proposent des méthodes alternatives, tels que les trames vertes, ou les couloirs écologiques, afin de connecter différents habitats<ref>{{Article|langue=en|prénom1=MEADE|nom1=KROSBY|prénom2=JOSHUA|nom2=TEWKSBURY|prénom3=NICK M.|nom3=HADDAD|prénom4=JONATHAN|nom4=HOEKSTRA|titre=Ecological Connectivity for a Changing Climate|périodique=Conservation Biology|volume=24|numéro=6|date=2010-10-21|issn=0888-8892|doi=10.1111/j.1523-1739.2010.01585.x|lire en ligne=https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/j.1523-1739.2010.01585.x|consulté le=2018-12-03|pages=1686–1689}}</ref>. Cependant, le rythme d’évolution du changement climatique étant grandissant, des habitats connectés pourraient ne pas être suffisants face à cette menace. Le principe de précaution est aussi appelé face à la stratégie de la migration assistée<ref name=":2" />. Cependant, la situation est trop délicate pour se baser sur les stratégies actuelles. Il est donc nécessaire de considérer la migration assistée, mais uniquement sous des conditions bien étudiées, et avec un plan de suivi sur plusieurs années.
Il est évident que le changement climatique a le potentiel de causer la perte de plusieurs espèces, et que les méthodes habituelles de conservation pourraient ne pas protéger les espèces d'un déclin éventuel<ref name=":3m" />. Les environnementalistes craignant les risques de la migration assistée proposent des méthodes alternatives, tels que les trames vertes, ou les couloirs écologiques, afin de connecter différents habitats<ref>{{Article|langue=en|prénom1=MEADE|nom1=KROSBY|prénom2=JOSHUA|nom2=TEWKSBURY|prénom3=NICK M.|nom3=HADDAD|prénom4=JONATHAN|nom4=HOEKSTRA|titre=Ecological Connectivity for a Changing Climate|périodique=Conservation Biology|volume=24|numéro=6|date=2010-10-21|issn=0888-8892|doi=10.1111/j.1523-1739.2010.01585.x|lire en ligne=https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/j.1523-1739.2010.01585.x|consulté le=2018-12-03|pages=1686–1689}}</ref>. Cependant, le rythme d’évolution du changement climatique étant grandissant, des habitats connectés pourraient ne pas être suffisants face à cette menace. Le principe de précaution est aussi appelé face à la stratégie de la migration assistée<ref name=":2m" />. Cependant, la situation est trop délicate pour se baser sur les stratégies actuelles. Il est donc nécessaire de considérer la migration assistée, mais uniquement sous des conditions bien étudiées, et avec un plan de suivi sur plusieurs années.


Trois points de vue principaux sur l’utilisation de la colonisation assistée existent au sein de la communauté scientifique:
== Détermination des conditions d’application de la migration assistée ==

Plusieurs protocoles ont été mis au point lors d’étude portant sur l’application responsable de le migration assistée, afin de guider des décisions à propos des situations et des périodes adéquates pour la migration assistée, ainsi que pour la planification du projet s’il est décrété faisable<ref name=":3" />.
* La colonisation assistée est nécessaire et doit inclure une translocation extensive d'espèces au-delà de leurs distributions actuelles. Les partisans de cette approche soutiennent que la colonisation assistée est une action nécessaire pour lutter contre le [[changement climatique]] et les perturbations dues à l'activité humaine.

* La méthode précédente est trop agressive. Les partisans prônent une approche permettant d’équilibrer risques et avantages de la colonisation assistée.

* La colonisation assistée doit être évitée. Les défenseurs de cette approche considèrent que les connaissances scientifiques actuelles et la limitation des technologies disponibles ne permettent pas de prédire correctement l’impact et les effets à moyen terme de l'assistance à la colonisation. Les défenseurs de cette thèse estiment que les risques de mise en place de la colonisation assistée sont trop élevés compte tenu des difficultés à prévoir les régions cibles, du manque de données disponibles qui permettraient de modéliser les enveloppes climatiques de la plupart des espèces, et des incertitudes dans les prévisions climatiques.

== Conditions et méthodes d’application ==

Selon les directives [[Union internationale pour la conservation de la nature|IUCN]]<ref>{{Lien web|langue=|titre=Guidelines for Reintroductions and Other Conservation Translocations|url=https://portals.iucn.org/library/efiles/documents/2013-009.pdf|site=portals.iucn.org|date=|consulté le=2018-12-08}}</ref>{{,}}<ref>{{Lien web|langue=anglais|titre=IUCN Guidelines For Re-introduction|url=https://portals.iucn.org/library/efiles/documents/PP-005.pdf|site=portals.iucn.org|date=|consulté le=2018-12-08}}</ref>, la colonisation assistée ne doit être utilisée qu’en dernier recours, par exemple dans des cas extrêmes afin d’éviter l’[[Extinction des espèces|extinction]] d’une espèce ou lorsqu’il ne reste plus aucune zone habitable dans l'[[aire de répartition]] naturelle de l’espèce. En conséquence, seules les espèces dont la probabilité d’[[Extinction des espèces|extinction]] est importante ou les espèces clés de voûtes (celles ayant un rôle écologique essentiel) ainsi que les espèces peu résilientes sont concernées par cette méthode.

Aujourd’hui, une approche relevant du champ de l’[[écologie fonctionnelle]] tend à s’imposer. En effet la colonisation assistée peut recevoir une priorité plus élevée dans les [[Adaptation au changement climatique|stratégies d'adaptation]] au changement climatique si les taxons déplacés remplissent des fonctions écologiques essentielles, plutôt que d'avoir peu d'avantages collatéraux, ou même des effets néfastes. (Cf exemples)

La gestion des populations déplacées après la colonisation nécessitera un suivi régulier, mais l’intervention humaine est la première étape pour aider les espèces à se déplacer à mesure que le climat change.

Outre les effets physiologiques directs sur les organismes et les modifications de la condition physique, le changement climatique affectera de nombreuses espèces par le biais d'impacts indirects sur la structure, les fonctions et les processus de l'écosystème. Les changements dans l'abondance des espèces dominantes, des espèces de base et des espèces clés modifieront ces processus, ce qui impactera de nombreux organismes associés.

L'examen des stratégies d’adaptation aux changements climatiques fournit un large éventail d’approches pour le maintien de processus écologiques, telles que le cycle des éléments nutritifs, l’hydrologie, les interactions entre espèces, la fourniture d’habitat, la dispersion et les perturbations. Des écologistes du paysage et de la [[Gestion restauratoire|restauration]] ont ainsi proposé que la végétation soit rétablie et restaurée aux niveaux locaux et régionaux pour améliorer les processus et les fonctions écologiques susceptibles de maintenir la biodiversité. Mais le réchauffement global altère aussi les communautés végétales. La relocalisation des taxons peut alors être entreprise pour assurer des fonctions écologiques directement affectées par le changement climatique ou lorsque le changement climatique exacerbe d'autres causes de déclin, telles que la [[Fragmentation (écologie)|fragmentation]] ou la [[salinisation]].Par exemple, considérons une espèce d'arbre qui est en déclin (directement ou indirectement) en raison du changement climatique et qui fournit des nids à une communauté d'oiseaux. L'approche fonctionnelle vise à trouver quelles espèces d'arbres pourraient persister dans la région à l'avenir pour fournir un habitat de [[Nid|nidification]] aux oiseaux, et pourrait inclure l'option d'introduire plusieurs espèces, si plusieurs espèces sont capables de remplir la fonction souhaitée.

Néanmoins, il est nécessaire de comprendre les stratégies adaptatives pour les espèces confrontées à des changements de climat, par des expériences de transplantation à grande échelle. Ces expériences prennent du temps et sont coûteuses, mais elles seront essentielles à la mise en place d’un programme efficace de migration assistée.

L'[[idiosyncrasie]] de la biologie des espèces empêche l'élaboration de plans de migration assistée adaptés à chacune des nombreuses espèces susceptibles d'être menacées par le changement climatique. Par conséquent, les gestionnaires seront obligés de généraliser les stratégies prévues en fonction de grandes catégories de caractéristiques du cycle vital. On peut imaginer que les futurs "biologistes de la migration assistée" se retrouvent dans une position similaire à celle des biologistes des [[Espèce envahissante|espèces envahissantes]] actuels: rechercher des généralisations théoriques et lutter avec des idiosyncrasies imprévues dans la pratique<ref>{{Lien web|titre=Canadian Institute of Forestry|url=https://pubs.cif-ifc.org/action/captchaChallenge?redirectUrl=http%3A%2F%2Fpubs.cif-ifc.org%2Fdoi%2F10.5558%2Ftfc2011-092&|site=pubs.cif-ifc.org|doi=10.5558/tfc2011-092|consulté le=2018-12-09}}</ref>{{,}}<ref>{{Article|langue=en|titre=Using assisted colonisation to conserve biodiversity and restore ecosystem function under climate change|périodique=Biological Conservation|volume=157|date=2013-01-01|issn=0006-3207|doi=10.1016/j.biocon.2012.08.034|lire en ligne=https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0006320712003898|consulté le=2018-12-09|pages=172–177}}</ref>{{,}}<ref>{{Article|langue=en|prénom1=C. D.|nom1=Thomas|prénom2=H. P.|nom2=Possingham|prénom3=C.|nom3=Parmesan|prénom4=D. B.|nom4=Lindenmayer|titre=Assisted Colonization and Rapid Climate Change|périodique=Science|volume=321|numéro=5887|date=2008-07-18|issn=1095-9203|issn2=0036-8075|pmid=18635780|doi=10.1126/science.1157897|lire en ligne=http://science.sciencemag.org/content/321/5887/345|consulté le=2018-12-09|pages=345–346}}</ref>{{,}}<ref>{{Article|langue=en|prénom1=Jason S.|nom1=McLACHLAN|prénom2=Jessica J.|nom2=Hellmann|prénom3=Mark W.|nom3=Schwartz|titre=A Framework for Debate of Assisted Migration in an Era of Climate Change|périodique=Conservation Biology|volume=21|numéro=2|date=2007-04-01|issn=1523-1739|doi=10.1111/j.1523-1739.2007.00676.x|lire en ligne=https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/j.1523-1739.2007.00676.x|consulté le=2018-12-09|pages=297–302}}</ref>.

Plusieurs protocoles ont été mis au point lors d’étude portant sur l’application responsable de le migration assistée, afin de guider des décisions à propos des situations et des périodes adéquates pour la migration assistée, ainsi que pour la planification du projet s’il est décrété faisable<ref name=":3m" />.


=== Conditions géographiques ===
=== Conditions géographiques ===
Selon la répartition des espaces d’origines, et des espaces potentiels, le potentiel d’action de la migration assistée peut varier. En effet, si les changements climatiques induisent une faible ou forte perte d’espace aux conditions adéquates dans l’espace d’origine, ainsi qu’un faible gain d’espace potentiel, les espèces ne gagneraient pas à être transporter ailleurs<ref name=":3" />. De même, si les changements climatiques causes une grosse faible perte d’espace aux conditions adéquates dans l’espace d’origine, ainsi qu’un fort gain d’espace potentiel, la migration assistée ne devrait pas être appliquée<ref name=":3" />.
Selon la répartition des espaces d’origines, et des espaces potentiels, le potentiel d’action de la migration assistée peut varier. En effet, si les changements climatiques induisent une faible ou forte perte d’espace aux conditions adéquates dans l’espace d’origine, ainsi qu’un faible gain d’espace potentiel, les espèces ne gagneraient pas à être transporter ailleurs<ref name=":3m" />. De même, si les changements climatiques causes une grosse faible perte d’espace aux conditions adéquates dans l’espace d’origine, ainsi qu’un fort gain d’espace potentiel, la migration assistée ne devrait pas être appliquée<ref name=":3m" />.


Cependant, si une perte importante d’espace aux conditions adéquates dans l’espace d’origine et d’espaces propices est estimée, la migration assistée devient un candidat de stratégie de conservation d’espèce<ref name=":3" />. L’étude d’Hällfors (2017)<ref name=":3" /> présente une figure représentant bien ces conditions.
Cependant, si une perte importante d’espace aux conditions adéquates dans l’espace d’origine et d’espaces propices est estimée, la migration assistée devient un candidat de stratégie de conservation d’espèce<ref name=":3m" />. L’étude d’Hällfors (2017)<ref name=":3m" /> présente une figure représentant bien ces conditions.


=== Modèle de détermination. ===
=== Modèle de détermination. ===
Ligne 73 : Ligne 122 :
La compilation nécessite un protocole de collection de graine assez minutieux et précis qui comprend :
La compilation nécessite un protocole de collection de graine assez minutieux et précis qui comprend :
* La capture de 95 % de la diversité génétique de chaque espèce,
* La capture de 95 % de la diversité génétique de chaque espèce,
* Une collection restreinte qui permet de laisser des graines sur le terrain qui pourront germer et produire les générations futures,
* Une collection restreinte qui permet de laisser des graines sur le terrain qui pourront germer et produire les générations futures,
* Collectionner les graines sur plusieurs années afin d’avoir un minimum de 3000 graines, en gardant un but optimal de 30000,
* Collectionner les graines sur plusieurs années afin d’avoir un minimum de 3000 graines, en gardant un but optimal de 30000,
* Ne collectionner que des graines matures,
* Ne collectionner que des graines matures,
* Collectionner de manière à représenter les gradients de densité du site,
* Collectionner de manière à représenter les gradients de densité du site,
* Inclure les coordonnées GPS associées à chaque collection.
* Inclure les coordonnées GPS associées à chaque collection.


==== Le raffinement de la liste : les espèces importantes à la restauration ====
==== Le raffinement de la liste : les espèces importantes à la restauration ====
Ligne 96 : Ligne 145 :
==== Implémentation de la stratégie de migration assistée ====
==== Implémentation de la stratégie de migration assistée ====
Au cours de cette etape, on peut entreprendre un protocole de correspondance d’habitat à l’aide du système d’information géographique. Finalement, il est possible de déterminer une stratégie de migration.
Au cours de cette etape, on peut entreprendre un protocole de correspondance d’habitat à l’aide du système d’information géographique. Finalement, il est possible de déterminer une stratégie de migration.

== Exemples ==

=== Exemples de succès écologiques ===

En tant que méthode de conservation controversée, la colonisation assistée n'est encore qu'à ses débuts, de nombreuses études sont menées par la communauté scientifique, dont voici quelques exemples. Cette liste non exhaustive reprend des études menées chez différents [[Taxon|taxons]] et pour différentes motivations (écologiques et/ou économiques).

==== Les Pins du Mexique ====
[[Fichier:Pinus pseudostrobus range map.jpg|vignette|Carte de répartition de ''Pinus pseudostrobus'', en vert<ref>{{Ouvrage|prénom1=Elbert L.|nom1=Little|titre=Atlas of United States trees.|éditeur=U.S. Dept. of Agriculture, Forest Service,|date=1977|lire en ligne=https://dx.doi.org/10.5962/bhl.title.65458|consulté le=2018-12-04}}</ref>.]]

Les [[Changement climatique|changements climatiques globaux]] vont perturber l'équilibre établi entre les populations forestières et le climat pour lequel ils sont adaptés, pouvant induire une détérioration progressive des forêts engendrant ainsi des conséquences écologiques et économiques.

Afin d'anticiper ce phénomène, en 2015, une équipe de recherche a expérimenté la colonisation assistée sur trois espèces de Pins ''([[Pinus pseudostrobus]], [[Pinus leiophylla|P. leiophylla]], [[Pinus devoniana|P. devoniana]])'' dans les montagnes du Mexique<ref name=":0">{{Article|langue=en|prénom1=D.|nom1=Castellanos-Acuña|prénom2=R.|nom2=Lindig-Cisneros|prénom3=C.|nom3=Sáenz-Romero|titre=Altitudinal assisted migration of Mexican pines as an adaptation to climate change|périodique=Ecosphere|volume=6|numéro=1|date=2015-01-01|issn=2150-8925|doi=10.1890/ES14-00375.1|lire en ligne=https://esajournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1890/ES14-00375.1|consulté le=2018-12-04T16:08:14Z|pages=art2}}</ref>.

Naturellement, ces trois espèces sont réparties le long d'un gradient d'altitude entre {{unité|2900|m}} et {{unité|1650|m}}, avec la dominance, de haut en bas, de ''P. pseudostrobus,'' puis de ''P. leiophylla'' et enfin de ''P. devoniana''<ref name=":0" />. Suite à une colonisation assistée ascendante de {{unité|300|mètres}} d'altitude (plantation de pins entre {{unité|3200 et 1950|m}}), la survie moyenne chez les trois espèces est de 79,6 %, avec une différenciation génétique notable, majoritairement due à la pression sélective exercée par les variations de températures. Cette [[diversité génétique]] traduit l'adaptation des pins à leur nouvel environnement, par [[sélection naturelle]].

Ces résultats encourageants montrent ainsi le potentiel de la colonisation assistée pour les forêts, afin d'anticiper les changements climatiques et l'augmentation globale de la température, en assistant la migration des pins en altitude.

==== Les Papillons d'Angleterre ====
[[Fichier:Melanargia galathea 15.jpg|gauche|vignette|157x157px|''Melanargia galathea'']]

Entre 2000 et 2008, une étude a été menée sur la colonisation assistée de deux espèces de papillons britanniques : ''[[Melanargia galathea]]'' et ''[[Hespérie de la houque|Thymelicus sylvestris]]'' au nord de l'Angleterre<ref name=":1">{{Article|langue=en|prénom1=Stephen G.|nom1=Willis|prénom2=Jane K.|nom2=Hill|prénom3=Chris D.|nom3=Thomas|prénom4=David B.|nom4=Roy|titre=Assisted colonization in a changing climate: a test-study using two U.K. butterflies|périodique=Conservation Letters|volume=2|numéro=1|date=2009-02-01|issn=1755-263X|doi=10.1111/j.1755-263X.2008.00043.x|lire en ligne=https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/j.1755-263X.2008.00043.x|consulté le=2018-12-04T16:10:48Z|pages=46–52}}</ref>.
[[Fichier:Thymelicus sylvestris m1.JPG|vignette|177x177px|''Thymelicus sylvestris'']]
Les deux espèces ont été introduites, respectivement, à {{unité|65|km}} et {{unité|35|km}} au nord de leur aire de répartition naturelle, dans des zones respectant leur [[niche écologique]] respective. Le suivi des populations au sein des sites d'introduction a permis de montrer que, chez les deux espèces, le taux de croissance de la population assistée était équivalent à celui d'une population naturelle. De plus, entre 2000 et 2006, les individus se sont [[Dispersion (biologie)|dispersés]], augmentant l'aire de distribution de ''M. galathea'' de {{unité|7,2 à 17,8|ha}} et celle de ''T. sylvestris'' de {{unité|0,17 à 3,64|ha}}''.''<ref name=":1" />

Ainsi, dans ce cas d'étude, la colonisation assistée semble être un succès, avec le maintien des populations après huit générations (2000-2008) et l'élargissement de leur [[aire de répartition]].

==== Les Langoustes de Tasmanie ====

Entre 2005 et 2007, une expérience a été menée dans le sud de la Tasmanie, visant à augmenter la production issue de la pêcherie de la langouste australe : ''[[Jasus edwardsii]]'', tout en augmentant la résilience de ces populations face aux changements climatiques<ref name=":2">{{Article|langue=en|prénom1=Peter J.|nom1=Hawthorne|prénom2=Adrian|nom2=Linnane|prénom3=Caleb|nom3=Gardner|prénom4=Bridget S.|nom4=Green|titre=The Good, the Bad and the Recovery in an Assisted Migration|périodique=PLOS ONE|volume=5|numéro=11|date=2010-11-30|issn=1932-6203|pmid=21151965|pmcid=PMC2996890|doi=10.1371/journal.pone.0014160|lire en ligne=https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0014160|consulté le=2018-12-05|pages=e14160}}</ref>.[[Fichier:Jasus edwardsii.jpg|vignette|174x174px|Langouste australe'', Jasus edwardsii'']]Ainsi, {{nombre|5747|langoustes}} femelles matures ont été déplacées depuis [[:en:Maatsuyker_Islands|Maatsuyker Islands]] vers deux sites à des latitudes supérieures : Riedle Bay et [[:en:Taroona|Taroona Reserve]], respectivement à {{unité|185|km}} et {{unité|120|km}} de Maatsuyker Island. Ce changement d'environnement (température, salinité de l'eau), mais également le type, l'abondance et la qualité des proies ainsi que la disponibilité et le type de refuges ont impacté le [[Cycle de vie (biologie)|cycle de vie]] des langoustes.

Ainsi, en réponse au stress environnemental, les langoustes ont optimisé l'allocation d'énergie à la croissance au détriment de la reproduction (notion de [[:en:Trade-off|trade-off]]). En effet, la première année, la croissance de ''J. edwardsii'' est passée de {{unité|3 à 6|mm}} par an tandis que 50 % ne se sont pas reproduit cette année<ref name=":2" />. À partir de la deuxième année, 93 % des femelles qui ne se sont pas reproduites la première année, ont recommencé à se reproduire, tandis que leur taux de croissance a régressé jusqu'à revenir identique à celui des langoustes de Maatsuyker Islands. Ces femelles ont augmenté leur production d'œufs de {{nombre|65000|œufs}} par an.

Cette expérience montre le potentiel de la colonisation assistée comme outil pour améliorer la production, la durabilité et la [[Résilience (écologie)|résilience]] de la pêche. En effet, malgré une [[maturité sexuelle]] tardive, en réponse à un stress environnemental, la croissance plus importante (production) des langoustes permet une production d'œufs plus importante (durabilité et résilience).

=== Exemples d'effets indésirables ===

Malgré une initiative ayant pour objectif la conservation de la biodiversité, la connaissance partielle d'un écosystème et l'insuffisante prise en compte de toutes les interactions écologiques au sein de l'écosystème peut entraîner de nombreux effets indésirables sur la biodiversité. Ainsi, la colonisation comporte de nombreux risques comme apporter de nouveaux agents pathogènes, créer une nouvelle compétition pour les ressources, bouleverser les interactions écologiques ou encore diminuer la diversité locale en favorisant l'hybridation<ref name=":3">{{Article|langue=English|prénom1=Daniel|nom1=Simberloff|prénom2=Anthony|nom2=Ricciardi|titre=Assisted colonization is not a viable conservation strategy|périodique=Trends in Ecology & Evolution|volume=24|numéro=5|date=2009-05-01|issn=0169-5347|pmid=19324453|doi=10.1016/j.tree.2008.12.006|lire en ligne=https://www.cell.com/trends/ecology-evolution/abstract/S0169-5347(09)00076-7|consulté le=2018-12-05|pages=248–253}}</ref>.

Par précaution, lorsque l'écosystème n'est pas compris dans sa globalité et que tous les potentiels effets d'une colonisation assistée ne sont pas connus, il est aujourd'hui conseillé d'utiliser les mesures de conservation existantes et d'atténuer l'impact de l'activité humaine sur l'écosystème<ref name=":3" />, afin d'éviter tout effet indésirable pouvant amener à des catastrophes écologiques.

==== Les Crevettes d'Amérique du Nord ====
[[Fichier:Oncorhynchus nerka 2.jpg|vignette|187x187px|Saumon rouge, ''Oncorhynchus nerka''|alt=|gauche]]

[[:en:Mysis_relicta|''Mysis relicta'']] est une crevette d'eau douce, d'une taille comprise entre {{unité|1 et 2|centimètres}} de long, originaire d'un nombre limité de lacs d'Amérique du nord et de Suède. En 1949, ''M.relicta'' été introduite dans un lac du Canada ([[:en:Kootenay_Lake|Kootenay Lake]]) afin d'augmenter les populations de truites arc-en-ciel (''[[Truite arc-en-ciel|Oncorhynchus mykiss]])'', en déclin<ref name=":4">{{Article|prénom1=Craig N.|nom1=Spencer|prénom2=B. Riley|nom2=McClelland|prénom3=Jack A.|nom3=Stanford|titre=Shrimp Stocking, Salmon Collapse, and Eagle Displacement|périodique=BioScience|volume=41|numéro=1|date=1991-01|issn=0006-3568|issn2=1525-3244|doi=10.2307/1311536|lire en ligne=https://dx.doi.org/10.2307/1311536|consulté le=2018-12-05|pages=14–21}}</ref>. L'expérience fut un succès, entraînant une importante augmentation de la taille et du nombre de truites.
Ces résultats ont encouragé, entre 1968 et 1975, les gestionnaires de la faune du [[:en:Flathead_Lake|Flathead Lake]] (Montana, USA) à introduire ''M. relicta'' afin d'augmenter les populations d'une autre espèce de saumon (''[[Oncorhynchus nerka]])'' en améliorant leur régime alimentaire. Malheureusement, la crevette vit la journée au fond du lac et remonte la nuit dans les eaux de surface, tandis que le saumon se nourrit la journée dans les eaux peuprofondes de surface<ref name=":4" />. Contrairement au lac du Canada (Kootenay Lake), l'absence de courants verticaux ([[Remontée d'eau|upwelling]]) rend les crevettes inaccessibles pour le saumon.

[[Fichier:View of Flathead Lake (14540687703).jpg|vignette|204x204px|Vue de Flathead Lake|alt=]]

À défaut de devenir des proies, les crevettes sont devenues des [[Compétition (biologie)|concurrentes]] pour les ressources alimentaires du lac, entraînant l'effondrement de la population de saumon rouge. La disparition du saumon rouge a eu nombreuses répercussions sur tout le [[réseau trophique]].

Ainsi, les populations d'aigles (''[[Pygargue à tête blanche|Haliaeetus leucocephalus]]''), de coyotes (''[[Coyote|Canis latrans]]''), de visons (''[[Vison d'Amérique|Neovison vison]]''), de loutre de rivière (''[[Loutre de rivière|Lutra canadensis]]''), de grizzly (''[[Ours brun|Ursus arctos]]'') et même de cerf de Virginie (''[[Cerf de Virginie|docoileus virginianus]]'') ont été impactées par cette perte de ressource alimentaire.

Il est également notable que la dégradation de la biodiversité a eu un impact économique, puisque le nombre de visiteurs annuel est passé de {{nombre|46500}} en 1983, à moins de {{nombre|1000}} en 1989<ref name=":4" />. Cette étude démontre bien, avec du recul (colonisation assistée dans les années 1970), que chaque écosystème est unique et doit être considéré comme tel. Dans ce cas d'étude, un succès de restauration (Kootenay Lake) s'est transformé en désastre écologique (Flathead Lake) à cause d'un seul facteur non considéré (absence de courants verticaux).

==== Les Écureuils de Terre-Neuve ====
[[Fichier:Loxia curvirostra -Karwendel mountains, Austria.jpg|alt=|vignette|187x187px|Bec-croisé des sapins'', Loxia curvirostra''|gauche]]
[[Fichier:Newfoundland Pine Marten.jpg|alt=|vignette|189x189px|Martre d'Amérique, ''Martes americana'']]

Afin de sauver la population de martre d'Amérique (''[[Martes americana]]'') en déclin sur l'île de [[Terre-Neuve]], l'écureuil roux d’Amérique (''[[Écureuil roux (Amérique du Nord)|Tamiasciurus hudsonicus]]'') a été introduit en 1963. L'objectif de cette colonisation assistée étant de favoriser la survie et la reproduction du martre en enrichissant son [[régime alimentaire]]<ref name=":3" />.

Malheureusement, les effets ne furent pas ceux escomptés, puisque la martre est toujours menacée sur l'île de Terre-Neuve<ref>{{Lien web|langue=|titre=Rapport COSEPAC : Martre d'Amérique - Population de Terre-Neuve|url=https://faune-especes.canada.ca/registre-especes-peril/species/speciesDetails_f.cfm?sid=134|date=Avril 2007|consulté le=5 décembre 2018}}</ref>.

En revanche, la population d'écureuils roux a grandement proliféré au sein des forêts de conifères. La densité d'écureuils sur l'île est deux fois supérieure à la densité d'écureuils continentaux, imposant une forte compétition à la faune locale pour les ressources alimentaires.

Ainsi, en dévorant les cônes de sapin baumier (''[[Sapin baumier|Abies balsamea]])'', l'écureuil a provoqué la disparition, en 1988, du bec-croisé des sapins ''([[Bec-croisé des sapins|Loxia curvirostra]])'' qui se nourrissait également de ces cônes<ref name=":3" />.




== Voir Aussi ==
== Voir Aussi ==
Ligne 102 : Ligne 219 :
https://www.rncan.gc.ca/forets/changements-climatiques/adaptation/13122
https://www.rncan.gc.ca/forets/changements-climatiques/adaptation/13122


== Notes et références ==
== Notes et références==
{{Références}}
{{Références}}



{{Portail|conservation de la nature}}
{{Portail|écologie|conservation de la nature}}
[[Catégorie:Écologie]]
[[Catégorie:Conservation de la nature]]

Version du 7 janvier 2020 à 20:30

La colonisation assistée, ou migration assistée, est une stratégie utilisée en biologie de la conservation qui consiste en l’introduction intentionnelle d’espèces animales et végétales dans un milieu se trouvant en dehors de leurs aires de répartition originelles[1].

Ce processus de conservation s’intègre dans un contexte de perte de biodiversité et de changement climatique. La colonisation assistée a pour but de littéralement venir en aide à ces espèces en les déplaçant volontairement dans un nouveau milieu qui correspondra sur le long terme à la niche écologique de l'espèce.

Contrairement à d’autres méthodes de conservation qui ont pour but la réintroduction des espèces au sein de leurs aires de répartition naturelle (comme les renforcements écologiques et les réintroductions), la colonisation assistée présente des risques conséquents liés au fait que les espèces déplacées n’étaient pas primitivement présentes dans le milieu colonisé. Certaines mesures visent à réduire ces risques, qui peuvent par exemple engendrer des proliférations indésirables (problématiques d’espèces invasives) ou de la compétition due au recouvrement de niches écologiques d’espèces déjà présentes sur le site d’introduction par l’espèce colonisatrice.

La colonisation assistée est aussi parfois utilisée à des fins économiques[2] (cf. exemple sur les langoustes de Tasmanie).

La migration assistée reste majoritairement théorique, à part pour quelques exemples d’applications[3]. Ceci est dû au fait que cette stratégie de conservation est un sujet de débat dans le domaine de l’environnement et de la conservation. Un consensus sur son acceptabilité n’a pas encore été atteint.

Contexte

En raison de l’urbanisation, de la fragmentation des habitats, de l’expansion de l’agriculture, ou encore de pollutions, la capacité des espèces à survivre dans leurs habitats naturels peut être menacée. On observe déjà aujourd'hui de nombreuses modifications dans l'aire de répartition de certaines espèces, cependant toutes ne sont pas capables de disperser ou de s'adapter suffisamment vite pour faire face au changement climatique et aux pressions anthropiques[4].

Predictions de l'évolution globale des températures suite au changement climatique.

Le changement climatique

La migration assistée est poussée par le changement climatique. En effet, le changement climatique entraîne des modifications de conditions variant selon les zones. Ces modifications affectent souvent les températures, ainsi que les cycles hydrologiques locaux. Ce qui, ensuite, créait des stresses environnementaux pour lesquelles certaines espèces végétales et animales ne sont pas adaptées[5]. Par exemple, « au Canada, les limites climatiques de nombreuses essences forestières devraient se déplacer d’environ 300 km vers le nord au cours des 50 prochaines années »[5]. Le changement climatique est donc en train de déplacer et de réduire la taille des enveloppes climatiques de plusieurs espèces.

Ce déplacement est une mesure préventive face au changement climatique, qui apporte des perturbations qui altèrent les communautés et les conditions environnementales en dehors cadre dans lequel les forêts ont évolué, et qui se font à une vitesse trop rapide pour que l’adaptation naturelle garde le rythme[6]. Les entités sont exportées vers un habitat offrant un avenir climatique plus propice à la survie de l’espèce[5]; ou inversement, des espèces sont importées pour leur diversité génétique déjà adapté à un climat plus chaud, afin de maintenir la productivité forestière locale[7].

Le moteur de la conceptualisation de la colonisation assistée a d’abord été la prise en compte du changement climatique par les conservationnistes, et l’anticipation des menaces pouvant entraîner certains taxons vers un vortex d’extinction. Le débat persiste sur les capacités de certaines espèces à s’adapter au réchauffement global, notamment en raison des barrières naturelles et anthropiques à la migration. La question se pose aussi pour les espèces suivant la montée en altitude des gradients de température, qui se retrouvent en quelque sorte bloquées par les reliefs.

Les impacts du changement climatique

Le potentiel d’impact se situe de l’ordre du gène et des organismes, à celui des populations, des communautés, et des écosystèmes[8]. Ce phénomène rend les individus, les espèces, et les communautés plus vulnérables aux espèces envahissantes, aux épidémies, et au parasitisme[5]. De plus, si les stresses perdurent, les espèces vulnérables risqueraient de ne plus être en mesure de se régénérer[5].

À force de stress, les espèces les plus vulnérables risquent d’atteindre des extinctions locales, qui ont le potentiel de devenir globale, privant d’autres espèces de ressources ou de niches, et entraînant des dérèglements dans les dynamiques écologiques de leur écosystème. Ces dérèglements pourraient engendrer une perte de fonctions écologiques, qui affecterait la santé et la productivité des forêts, ainsi que la biodiversité locale[5]. Ces dérèglements mèneraient ainsi à une modification du paysage. Des forets pourraient devenir des savanes[9], qui pourraient finalement devenir des déserts (voir désertification).

Les hotspots de la biodiversity. Ce sont les zones comportant la biodiversité la plus riche. De ce fait, ce sont les zones les plus à risques face au changement climatique, et nécessitant le plus d'étude pour des stratégies de conservation.

Cependant, en parallèle, le changement climatique créait des espaces propices à la survie de ces espèces ailleurs. Ces nouveaux espaces peuvent se situer en bordure de leur espace de distribution habituel, tout comme ils peuvent se trouver à plusieurs kilomètres ou sur d’autres continents, hors de portée pour une dispersion naturelle[8].

Le changement climatique suggère que les espèces et les populations d'arbres forestiers devront migrer plus rapidement que leur capacité naturelle. Par conséquent, les stratégies d'adaptation au changement climatique, telles que la migration assistée, ont retenu l'attention depuis 2007[10].

Solutions naturelles

Face à ces nouvelles conditions, les espèces impliquées devraient assurer leur survie en migrant et colonisant de nouveaux espaces. Mais ce stratagème n’est pas nécessaire pour tous. Les pressions environnementales ont toujours su être le vecteur de l’évolution naturelle, et certaines espèces possèdent le potentiel de s’adapter aux nouvelles conditions climatiques sans avoir à quitter leur écosystème actuel. Ce potentiel varie d’une espèce à une autre. Entre autres, une étude a déterminé que l’évolution de la tolérance à de plus hautes température parmi certaines espèces d’amphibiens et de reptiles permettrait probablement à ces espèces de survivre à une augmentation en température de 3 °C sur 100 années[11]. Cependant, le rythme d’évolution du changement climatique dépasse celui de l’évolution naturelle de la majorité des espèces et des communautés, notamment les espèces végétales[5]. Par exemple, au Québec, le rythme de migration des espèces arborescentes est évalué à 100 à 200 m/an, tandis que la vitesse de déplacement du climat est estimée à 2000 à 10 000 m/an[7].

Afin de contrer cet effet, des biologistes peuvent implémenter des espèces exotiques adaptées aux nouvelles conditions abiotiques, et capable de remplacer les fonctions écologiques des espèces locales stressées[7]. De cette manière les dynamiques de l'écosystème restent relativement stables, et l’écosystème peut conserver sa « valeur ». De la même manière, ils peuvent exporter les espèces stressées vers de nouveaux sites, qui pourraient permettre la survie de ces espèces[5].

Terminologie

Brian J. Keel est le premier à utiliser le terme de « migration assistée » dans sa thèse en 2007. Il plaide en faveur de l'utilisation de la migration assistée comme stratégie de conservation contre le changement climatique rapide :

« In these situations where plants are prevented from migration, human intervention will be necessary to prevent extinction. I call this intervention “assisted migration”, which is the employment of techniques to ensure the maintenance of plant populations in a changing global environment through the intentional creation of populations beyond the boundary of a plant’s present range.” »[12]

Cependant, la terminologie du terme employé par Keel est débattue car il peut prêter à confusion. En effet, en écologie le terme « migration » fait référence à un phénomène de déplacement périodique d’une espèce d’un endroit à un autre. Cette définition est en contradiction avec celle point de la colonisation assistée dans laquelle le déplacement d’une espèce cle en dehors de son aire de répartition originelle afin de fonder une nouvelle population est initié par l’Homme.

Types d'application

La migration assistée a le potentiel d’être appliqué aux espèces végétales et animales. Cependant, elle est plus souvent appliquée aux espèces végétales qu’animales. Les animaux ont la capacité de se déplacer pour atteindre des espaces plus propices à leur survie, afin de trouver plus de nourriture, et de meilleure niche écologique[11]. Ils peuvent aussi se reproduire plus rapidement, en exprimant des mutations sélectionnant les plus adaptées[11]. Les espaces végétales, cependant, ne possèdent ces capacités, et leur rythme d’évolution ne peut entrer en compétition avec le rythme de modification des caractéristiques abiotiques et biotiques de leur environnement, entraînées principalement par le changement climatique[11]. Elles ont donc plus de besoins d’assistances. La migration assistée offre trois types de procédés. La réintroduction, l’introduction, et l’augmentation[13].

Les habitats cibles peuvent être une expansion de leur habitat originel, un habitat duquel ils ont connu une baisse d’effectif ou une extinction locale, ou un nouvel habitat qui n’a jamais soutenu cette espèce[14]. Dans tous les cas, l’habitat cible est caractérisé par des conditions propices à la survie de l’espèce.

L’augmentation

L’augmentation a lieu lorsque la population atteint une densité trop basse pour assurer la survie de l’espèce via la reproduction, tout en risquant divers aléas génétiques tels que la consanguinité et l’homozygotie[13]. De nouveaux individus de la même espèce sont introduits afin d’accélérer la diversité génétique et l’accumulation d’individus. Cependant, il existe des risques que l’implémentation soit un échec, car la présence de membres de la même espèce ne garantit pas que le nouvel habitat va convenir aux individus introduits. De plus, ce facteur est encore plus pertinent si le manque d’effectif était causé par une baisse de qualité de l’environnement. Dans ce cas-là, le nouvel habitat empêcherait l’établissement efficaces des nouveaux individus, et l’augmentation aurait de fortes chances d’être contre productive[15].

La réintroduction

La réintroduction consiste en l’importation d’une espèce dans un écosystème auquel il en fut parti, mais en fut extirpé[15]. Dans ce cas-ci, on peut émettre l’hypothèse que l’environnement serait propice à l’établissement de l’espèce, puisque cet environnement l’a supporté dans le passé. Cependant, comme précédemment, des facteurs sont à considérer[15]. Avant de pratiquer ce stratagème il est important de s’assurer que la cause de l’extinction locale a été traitée. Il est aussi important de s’assurer de l’authenticité des documents décrivant l’espèce comme ayant appartenu autrefois au site de réintroduction. Finalement, il faut aussi s’assurer que l’habitat n’a pas subi de modification depuis le déclin de l’espèce[15].

L’introduction

Dans le cas de l’introduction, une espèce est introduite dans un écosystème dans lequel il n’a jamais existé. Ce procédé peut être exercé pour plusieurs raison, tels que le biocontrôle d’un prédateur envahissant[13], la perpétuité de l’espèce, ou le remplacement d’une espèce disparue localement[15]. Ce procédé est plus sensible, car l’impact de l’implémentation est beaucoup plus difficile à prévoir. Si le sujet est mal étudié, il peut entraîner des désastres écologiques pour l’écosystème hôte[15].

Enjeux

Malgré le fait que concept offre des bénéfices intéressants, tels que la prévention de l’extinction d’espèces ou de génotypes, la préservation de services écosystémiques, ou la préservation de certaines industries (e.g. la foresterie)[8], l’autre partie du débat contient des arguments tout aussi importants. Parmi ceux-là : « l’invasion d’essences déplacées dans un nouvel écosystème, l’introduction de nouveaux organismes nuisibles et maladies, l’échec de la translocation et la collecte excessive de semences ou de boutures provenant de populations sources »[5]. D’autres négateurs soutiennent qu’il devrait y avoir une limite à l’implication humaine, qui a causé des catastrophes dans le passé[14].

Échec de projet

La stratégie serait considérée comme un échec dans le cas d’un projet, si l’espèce introduite ne parvient pas à survivre dans le nouvel écosystème. Cela pourrait être dû à une mauvaise planification, ou à un stresse non-considéré[14]. Il n’est pas facile d’acquérir toutes les connaissances concernant une espèce et ses interactions avec son habitat, ce qui rend l’étude des stresse d’une translocation difficile à estimer. Le stresse pourrait être causé par le transport des individus, une désorientation durant la mise en liberté, ou un délai entre la mise en liberté et les premières périodes de reproductions[14].

Une autre cause d'échec consisterait en un effort effectué inutilement suite à une mauvaise interprétation des prévisions d'évolutions des niches climatiques. En effet, le fait qu’une espèce soit considéré comme étant vulnérable au changement climatique à cause d’une perte de surface de distribution ne signifie pas que la migration assistée est la stratégie propice à son cas. Les conditions géographiques doivent d’abord être prises en considérations pour évaluer la combinaison des pertes et des gains en surface[3]. Une espèce qui ne perd pas d’habitat adéquats ne nécessite pas d’implication humaine. Une espèce qui ne possédera pas de nouveaux espaces adéquats hors de son champ de distribution actuelle ne nécessitera pas d’aide migratoire. Seule une espèce qui gagnerait, par le changement climatique, une quantité non négligeable de territoires adéquats, tout en perdant une quantité importante de territoires actuel, et en ayant des difficultés de dispersions est éligible à une stratégie de migration assistée[3].

Espèces envahissantes

Un des contre-arguments les plus fréquemment associés à la migration assistée, est le fait que les espèces implémentées ont le potentiel de se comporter comme des espèces envahissantes. Une espèce envahissante est une espèce exotique venant d’un écosystème, et s’implémentant dans un nouveau. Les espèces envahissantes ont la caractéristique de « trop bien s’adapté », et de devenir dominantes dans le nouvel écosystème au détriment des espèces natives[14].

Cependant, les espèces envahissantes ont souvent été la cause d’une introduction accidentelle. Un plan de stratégie incluant la migration assistée devrait faire l’objet d’une étude exhaustive, et prendre en compte ce risque en particulier. De ce fait, ce risque devrait présenter un potentiel minime avant d’entreprendre un tel projet[14]. De plus, une étude a mentionné que moins de 1 % des espèces ayant été introduites dans un nouvel environnement sont devenues envahissantes[16].

Hybridation

L’hybridation représente un autre contre-argument. L’hybridation a lieu lorsque l’espèce introduite est assez proche d’au moins d’une des espèces locales pour former des hybrides[17]. Une répercussion de cette hybridation est la dilution génétique et l’assimilation, qui causerait l’extinction de certaines espèces. Il est estimé que l’hybridation serait responsable d’au moins 31 % des extinction d’espèces de poissons d’eau douce en Amérique du Nord[17].

Le poids des risques et des bénéfices

Il est évident que le changement climatique a le potentiel de causer la perte de plusieurs espèces, et que les méthodes habituelles de conservation pourraient ne pas protéger les espèces d'un déclin éventuel[3]. Les environnementalistes craignant les risques de la migration assistée proposent des méthodes alternatives, tels que les trames vertes, ou les couloirs écologiques, afin de connecter différents habitats[18]. Cependant, le rythme d’évolution du changement climatique étant grandissant, des habitats connectés pourraient ne pas être suffisants face à cette menace. Le principe de précaution est aussi appelé face à la stratégie de la migration assistée[14]. Cependant, la situation est trop délicate pour se baser sur les stratégies actuelles. Il est donc nécessaire de considérer la migration assistée, mais uniquement sous des conditions bien étudiées, et avec un plan de suivi sur plusieurs années.

Trois points de vue principaux sur l’utilisation de la colonisation assistée existent au sein de la communauté scientifique:

  • La colonisation assistée est nécessaire et doit inclure une translocation extensive d'espèces au-delà de leurs distributions actuelles. Les partisans de cette approche soutiennent que la colonisation assistée est une action nécessaire pour lutter contre le changement climatique et les perturbations dues à l'activité humaine.
  • La méthode précédente est trop agressive. Les partisans prônent une approche permettant d’équilibrer risques et avantages de la colonisation assistée.
  • La colonisation assistée doit être évitée. Les défenseurs de cette approche considèrent que les connaissances scientifiques actuelles et la limitation des technologies disponibles ne permettent pas de prédire correctement l’impact et les effets à moyen terme de l'assistance à la colonisation. Les défenseurs de cette thèse estiment que les risques de mise en place de la colonisation assistée sont trop élevés compte tenu des difficultés à prévoir les régions cibles, du manque de données disponibles qui permettraient de modéliser les enveloppes climatiques de la plupart des espèces, et des incertitudes dans les prévisions climatiques.

Conditions et méthodes d’application

Selon les directives IUCN[19],[20], la colonisation assistée ne doit être utilisée qu’en dernier recours, par exemple dans des cas extrêmes afin d’éviter l’extinction d’une espèce ou lorsqu’il ne reste plus aucune zone habitable dans l'aire de répartition naturelle de l’espèce. En conséquence, seules les espèces dont la probabilité d’extinction est importante ou les espèces clés de voûtes (celles ayant un rôle écologique essentiel) ainsi que les espèces peu résilientes sont concernées par cette méthode.

Aujourd’hui, une approche relevant du champ de l’écologie fonctionnelle tend à s’imposer. En effet la colonisation assistée peut recevoir une priorité plus élevée dans les stratégies d'adaptation au changement climatique si les taxons déplacés remplissent des fonctions écologiques essentielles, plutôt que d'avoir peu d'avantages collatéraux, ou même des effets néfastes. (Cf exemples)

La gestion des populations déplacées après la colonisation nécessitera un suivi régulier, mais l’intervention humaine est la première étape pour aider les espèces à se déplacer à mesure que le climat change.

Outre les effets physiologiques directs sur les organismes et les modifications de la condition physique, le changement climatique affectera de nombreuses espèces par le biais d'impacts indirects sur la structure, les fonctions et les processus de l'écosystème. Les changements dans l'abondance des espèces dominantes, des espèces de base et des espèces clés modifieront ces processus, ce qui impactera de nombreux organismes associés.

L'examen des stratégies d’adaptation aux changements climatiques fournit un large éventail d’approches pour le maintien de processus écologiques, telles que le cycle des éléments nutritifs, l’hydrologie, les interactions entre espèces, la fourniture d’habitat, la dispersion et les perturbations. Des écologistes du paysage et de la restauration ont ainsi proposé que la végétation soit rétablie et restaurée aux niveaux locaux et régionaux pour améliorer les processus et les fonctions écologiques susceptibles de maintenir la biodiversité. Mais le réchauffement global altère aussi les communautés végétales. La relocalisation des taxons peut alors être entreprise pour assurer des fonctions écologiques directement affectées par le changement climatique ou lorsque le changement climatique exacerbe d'autres causes de déclin, telles que la fragmentation ou la salinisation.Par exemple, considérons une espèce d'arbre qui est en déclin (directement ou indirectement) en raison du changement climatique et qui fournit des nids à une communauté d'oiseaux. L'approche fonctionnelle vise à trouver quelles espèces d'arbres pourraient persister dans la région à l'avenir pour fournir un habitat de nidification aux oiseaux, et pourrait inclure l'option d'introduire plusieurs espèces, si plusieurs espèces sont capables de remplir la fonction souhaitée.

Néanmoins, il est nécessaire de comprendre les stratégies adaptatives pour les espèces confrontées à des changements de climat, par des expériences de transplantation à grande échelle. Ces expériences prennent du temps et sont coûteuses, mais elles seront essentielles à la mise en place d’un programme efficace de migration assistée.

L'idiosyncrasie de la biologie des espèces empêche l'élaboration de plans de migration assistée adaptés à chacune des nombreuses espèces susceptibles d'être menacées par le changement climatique. Par conséquent, les gestionnaires seront obligés de généraliser les stratégies prévues en fonction de grandes catégories de caractéristiques du cycle vital. On peut imaginer que les futurs "biologistes de la migration assistée" se retrouvent dans une position similaire à celle des biologistes des espèces envahissantes actuels: rechercher des généralisations théoriques et lutter avec des idiosyncrasies imprévues dans la pratique[21],[22],[23],[24].

Plusieurs protocoles ont été mis au point lors d’étude portant sur l’application responsable de le migration assistée, afin de guider des décisions à propos des situations et des périodes adéquates pour la migration assistée, ainsi que pour la planification du projet s’il est décrété faisable[3].

Conditions géographiques

Selon la répartition des espaces d’origines, et des espaces potentiels, le potentiel d’action de la migration assistée peut varier. En effet, si les changements climatiques induisent une faible ou forte perte d’espace aux conditions adéquates dans l’espace d’origine, ainsi qu’un faible gain d’espace potentiel, les espèces ne gagneraient pas à être transporter ailleurs[3]. De même, si les changements climatiques causes une grosse faible perte d’espace aux conditions adéquates dans l’espace d’origine, ainsi qu’un fort gain d’espace potentiel, la migration assistée ne devrait pas être appliquée[3].

Cependant, si une perte importante d’espace aux conditions adéquates dans l’espace d’origine et d’espaces propices est estimée, la migration assistée devient un candidat de stratégie de conservation d’espèce[3]. L’étude d’Hällfors (2017)[3] présente une figure représentant bien ces conditions.

Modèle de détermination.

Une étude[16] sur la propagation d’espèces végétales à graines à élaborer un protocole à suivre avant de déterminer la possibilité d’appliquer la migration assistée à un projet de conservation. Le protocole est le suivant.

Développement d’une liste d’espèces de base

Lors de cette étape, l’importance est portée sur la collecte d’une banque de donnée sur les graines présentes sur le site, ainsi que leur localisation. Plusieurs banques de données ont déjà été établies. Le Millenium Seed Bank Poject des Jardins Botaniques Royaux a pour but de collectionner et mettre en banque les graines de 35 % des plantes mondiales[16].

Cela commence par la compilation d’une liste des espèces porteuses de graines sur le lieu investit, suivi de l’élimination d’espèces hybrides ou non-native, l’élimination d’espèce à graines récalcitrantes, et la hiérarchisation des espèces selon leur importance dans la communauté.

La compilation nécessite un protocole de collection de graine assez minutieux et précis qui comprend :

  • La capture de 95 % de la diversité génétique de chaque espèce,
  • Une collection restreinte qui permet de laisser des graines sur le terrain qui pourront germer et produire les générations futures,
  • Collectionner les graines sur plusieurs années afin d’avoir un minimum de 3000 graines, en gardant un but optimal de 30000,
  • Ne collectionner que des graines matures,
  • Collectionner de manière à représenter les gradients de densité du site,
  • Inclure les coordonnées GPS associées à chaque collection.

Le raffinement de la liste : les espèces importantes à la restauration

Au cours de cette étape, on détermine quelles espèces sont importantes pour la restauration du site. En utilisant la liste résultant de la première étape, on identifie les espèces pionnières non-agressive qui sont utilisées en restauration, les espèces les plus conservatives qui sont souvent utilisées dans des projets de restauration, et les espèces non-agressives qui sont aux lisières de l’espace.

Le raffinement de la liste : Les espèces avec un bénéfice potentiel pour la migration assistée

Après la deuxième étape, on priorise la liste selon les espèces qui ont :

  • des risques géographiques,
  • des contraintes dans leur histoire de vie,
  • des limites de dispersion,
  • un taxon très conservateur,
  • des distributions très fragmentées,
  • une abondance restreinte à l’emplacement étudié.

Détermination des priorités de collection au niveau de la population.

Au cours de cette étape, on créait un modèle de distribution à l’aide d’un système d’information géographique pour espèces dans les lisières du site, dans les zones en dehors des futures estimations climatiques, et dans les zones non-protégées.

Implémentation de la stratégie de migration assistée

Au cours de cette etape, on peut entreprendre un protocole de correspondance d’habitat à l’aide du système d’information géographique. Finalement, il est possible de déterminer une stratégie de migration.

Exemples

Exemples de succès écologiques

En tant que méthode de conservation controversée, la colonisation assistée n'est encore qu'à ses débuts, de nombreuses études sont menées par la communauté scientifique, dont voici quelques exemples. Cette liste non exhaustive reprend des études menées chez différents taxons et pour différentes motivations (écologiques et/ou économiques).

Les Pins du Mexique

Carte de répartition de Pinus pseudostrobus, en vert[25].

Les changements climatiques globaux vont perturber l'équilibre établi entre les populations forestières et le climat pour lequel ils sont adaptés, pouvant induire une détérioration progressive des forêts engendrant ainsi des conséquences écologiques et économiques.

Afin d'anticiper ce phénomène, en 2015, une équipe de recherche a expérimenté la colonisation assistée sur trois espèces de Pins (Pinus pseudostrobus, P. leiophylla, P. devoniana) dans les montagnes du Mexique[26].

Naturellement, ces trois espèces sont réparties le long d'un gradient d'altitude entre 2 900 m et 1 650 m, avec la dominance, de haut en bas, de P. pseudostrobus, puis de P. leiophylla et enfin de P. devoniana[26]. Suite à une colonisation assistée ascendante de 300 mètres d'altitude (plantation de pins entre 3 200 et 1 950 m), la survie moyenne chez les trois espèces est de 79,6 %, avec une différenciation génétique notable, majoritairement due à la pression sélective exercée par les variations de températures. Cette diversité génétique traduit l'adaptation des pins à leur nouvel environnement, par sélection naturelle.

Ces résultats encourageants montrent ainsi le potentiel de la colonisation assistée pour les forêts, afin d'anticiper les changements climatiques et l'augmentation globale de la température, en assistant la migration des pins en altitude.

Les Papillons d'Angleterre

Melanargia galathea

Entre 2000 et 2008, une étude a été menée sur la colonisation assistée de deux espèces de papillons britanniques : Melanargia galathea et Thymelicus sylvestris au nord de l'Angleterre[27].

Thymelicus sylvestris

Les deux espèces ont été introduites, respectivement, à 65 km et 35 km au nord de leur aire de répartition naturelle, dans des zones respectant leur niche écologique respective. Le suivi des populations au sein des sites d'introduction a permis de montrer que, chez les deux espèces, le taux de croissance de la population assistée était équivalent à celui d'une population naturelle. De plus, entre 2000 et 2006, les individus se sont dispersés, augmentant l'aire de distribution de M. galathea de 7,2 à 17,8 ha et celle de T. sylvestris de 0,17 à 3,64 ha.[27]

Ainsi, dans ce cas d'étude, la colonisation assistée semble être un succès, avec le maintien des populations après huit générations (2000-2008) et l'élargissement de leur aire de répartition.

Les Langoustes de Tasmanie

Entre 2005 et 2007, une expérience a été menée dans le sud de la Tasmanie, visant à augmenter la production issue de la pêcherie de la langouste australe : Jasus edwardsii, tout en augmentant la résilience de ces populations face aux changements climatiques[2].

Langouste australe, Jasus edwardsii

Ainsi, 5 747 langoustes femelles matures ont été déplacées depuis Maatsuyker Islands vers deux sites à des latitudes supérieures : Riedle Bay et Taroona Reserve, respectivement à 185 km et 120 km de Maatsuyker Island. Ce changement d'environnement (température, salinité de l'eau), mais également le type, l'abondance et la qualité des proies ainsi que la disponibilité et le type de refuges ont impacté le cycle de vie des langoustes.

Ainsi, en réponse au stress environnemental, les langoustes ont optimisé l'allocation d'énergie à la croissance au détriment de la reproduction (notion de trade-off). En effet, la première année, la croissance de J. edwardsii est passée de 3 à 6 mm par an tandis que 50 % ne se sont pas reproduit cette année[2]. À partir de la deuxième année, 93 % des femelles qui ne se sont pas reproduites la première année, ont recommencé à se reproduire, tandis que leur taux de croissance a régressé jusqu'à revenir identique à celui des langoustes de Maatsuyker Islands. Ces femelles ont augmenté leur production d'œufs de 65 000 œufs par an.

Cette expérience montre le potentiel de la colonisation assistée comme outil pour améliorer la production, la durabilité et la résilience de la pêche. En effet, malgré une maturité sexuelle tardive, en réponse à un stress environnemental, la croissance plus importante (production) des langoustes permet une production d'œufs plus importante (durabilité et résilience).

Exemples d'effets indésirables

Malgré une initiative ayant pour objectif la conservation de la biodiversité, la connaissance partielle d'un écosystème et l'insuffisante prise en compte de toutes les interactions écologiques au sein de l'écosystème peut entraîner de nombreux effets indésirables sur la biodiversité. Ainsi, la colonisation comporte de nombreux risques comme apporter de nouveaux agents pathogènes, créer une nouvelle compétition pour les ressources, bouleverser les interactions écologiques ou encore diminuer la diversité locale en favorisant l'hybridation[28].

Par précaution, lorsque l'écosystème n'est pas compris dans sa globalité et que tous les potentiels effets d'une colonisation assistée ne sont pas connus, il est aujourd'hui conseillé d'utiliser les mesures de conservation existantes et d'atténuer l'impact de l'activité humaine sur l'écosystème[28], afin d'éviter tout effet indésirable pouvant amener à des catastrophes écologiques.

Les Crevettes d'Amérique du Nord

Saumon rouge, Oncorhynchus nerka

Mysis relicta est une crevette d'eau douce, d'une taille comprise entre 1 et 2 centimètres de long, originaire d'un nombre limité de lacs d'Amérique du nord et de Suède. En 1949, M.relicta été introduite dans un lac du Canada (Kootenay Lake) afin d'augmenter les populations de truites arc-en-ciel (Oncorhynchus mykiss), en déclin[29]. L'expérience fut un succès, entraînant une importante augmentation de la taille et du nombre de truites. Ces résultats ont encouragé, entre 1968 et 1975, les gestionnaires de la faune du Flathead Lake (Montana, USA) à introduire M. relicta afin d'augmenter les populations d'une autre espèce de saumon (Oncorhynchus nerka) en améliorant leur régime alimentaire. Malheureusement, la crevette vit la journée au fond du lac et remonte la nuit dans les eaux de surface, tandis que le saumon se nourrit la journée dans les eaux peuprofondes de surface[29]. Contrairement au lac du Canada (Kootenay Lake), l'absence de courants verticaux (upwelling) rend les crevettes inaccessibles pour le saumon.

Vue de Flathead Lake

À défaut de devenir des proies, les crevettes sont devenues des concurrentes pour les ressources alimentaires du lac, entraînant l'effondrement de la population de saumon rouge. La disparition du saumon rouge a eu nombreuses répercussions sur tout le réseau trophique.

Ainsi, les populations d'aigles (Haliaeetus leucocephalus), de coyotes (Canis latrans), de visons (Neovison vison), de loutre de rivière (Lutra canadensis), de grizzly (Ursus arctos) et même de cerf de Virginie (docoileus virginianus) ont été impactées par cette perte de ressource alimentaire.

Il est également notable que la dégradation de la biodiversité a eu un impact économique, puisque le nombre de visiteurs annuel est passé de 46 500 en 1983, à moins de 1 000 en 1989[29]. Cette étude démontre bien, avec du recul (colonisation assistée dans les années 1970), que chaque écosystème est unique et doit être considéré comme tel. Dans ce cas d'étude, un succès de restauration (Kootenay Lake) s'est transformé en désastre écologique (Flathead Lake) à cause d'un seul facteur non considéré (absence de courants verticaux).

Les Écureuils de Terre-Neuve

Bec-croisé des sapins, Loxia curvirostra
Martre d'Amérique, Martes americana

Afin de sauver la population de martre d'Amérique (Martes americana) en déclin sur l'île de Terre-Neuve, l'écureuil roux d’Amérique (Tamiasciurus hudsonicus) a été introduit en 1963. L'objectif de cette colonisation assistée étant de favoriser la survie et la reproduction du martre en enrichissant son régime alimentaire[28].

Malheureusement, les effets ne furent pas ceux escomptés, puisque la martre est toujours menacée sur l'île de Terre-Neuve[30].

En revanche, la population d'écureuils roux a grandement proliféré au sein des forêts de conifères. La densité d'écureuils sur l'île est deux fois supérieure à la densité d'écureuils continentaux, imposant une forte compétition à la faune locale pour les ressources alimentaires.

Ainsi, en dévorant les cônes de sapin baumier (Abies balsamea), l'écureuil a provoqué la disparition, en 1988, du bec-croisé des sapins (Loxia curvirostra) qui se nourrissait également de ces cônes[28].


Voir Aussi

https://www.rncan.gc.ca/forets/changements-climatiques/13084

https://www.rncan.gc.ca/forets/changements-climatiques/adaptation/13122

Notes et références

  1. Anthony Ricciardi et Daniel Simberloff, « Assisted colonization is not a viable conservation strategy », Trends in Ecology & Evolution, vol. 24, no 5,‎ , p. 248–253 (ISSN 0169-5347, PMID 19324453, DOI 10.1016/j.tree.2008.12.006, lire en ligne, consulté le )
  2. a b et c (en) Peter J. Hawthorne, Adrian Linnane, Caleb Gardner et Bridget S. Green, « The Good, the Bad and the Recovery in an Assisted Migration », PLOS ONE, vol. 5, no 11,‎ , e14160 (ISSN 1932-6203, PMID 21151965, PMCID PMC2996890, DOI 10.1371/journal.pone.0014160, lire en ligne, consulté le )
  3. a b c d e f g h et i (en) « Quantifying the need and potential of assisted migration », Biological Conservation, vol. 205,‎ , p. 34–41 (ISSN 0006-3207, DOI 10.1016/j.biocon.2016.11.023, lire en ligne, consulté le )
  4. « Assisted Colonization and Rapid Climate Change », sur online.nwf.org (consulté le )
  5. a b c d e f g h et i J. H. Pedlar, D. W. McKenney et I. Aubin, « Comment la migration assisté pourrait-elle faciliter l'adaptation des forêts aux changements climatiques? Nouvelles Express 63. », Nouvelles Express,‎ (lire en ligne, consulté le )
  6. (en) S. Trumbore, P. Brando et H. Hartmann, « Forest health and global change », Science, vol. 349, no 6250,‎ , p. 814–818 (ISSN 0036-8075 et 1095-9203, PMID 26293952, DOI 10.1126/science.aac6759, lire en ligne, consulté le )
  7. a b et c Lamhamedi, M. S, « L'écophysiologie, un Atout Pour Réussir la Migration Assistée de Sources Génétiques D'épinette Blanche », Avis de Recherche forestière,‎
  8. a b et c I. Aubin, C.M. Garbe, S. Colombo et C.R. Drever, « Why we disagree about assisted migration: Ethical implications of a key debate regarding the future of Canada's forests », The Forestry Chronicle, vol. 87, no 06,‎ , p. 755–765 (ISSN 0015-7546 et 1499-9315, DOI 10.5558/tfc2011-092, lire en ligne, consulté le )
  9. (en) « ‘Tipping points’ for the Amazon forest », Current Opinion in Environmental Sustainability, vol. 1, no 1,‎ , p. 28–36 (ISSN 1877-3435, DOI 10.1016/j.cosust.2009.07.003, lire en ligne, consulté le )
  10. (en) Mary I. Williams et R. Kasten Dumroese, « Preparing for Climate Change: Forestry and Assisted Migration », Journal of Forestry, vol. 111, no 4,‎ , p. 287–297 (lire en ligne, consulté le )
  11. a b c et d (en) DAVID K. SKELLY, LIANA N. JOSEPH, HUGH P. POSSINGHAM et L. KEALOHA FREIDENBURG, « Evolutionary Responses to Climate Change », Conservation Biology, vol. 21, no 5,‎ , p. 1353–1355 (ISSN 0888-8892 et 1523-1739, DOI 10.1111/j.1523-1739.2007.00764.x, lire en ligne, consulté le )
  12. Keel, Brian J. “Assisted Migration as a Conservation Strategy for Rapid Climate Change: Investigating Extended Photoperiod and Mycobiont Distributions for Habenaria Repens Nuttall (Orchidaceae) as a Case Study.” Antioch University New England, 2007.
  13. a b et c (en) Andrew R. Weeks, Carla M. Sgro, Andrew G. Young et Richard Frankham, « Assessing the benefits and risks of translocations in changing environments: a genetic perspective », Evolutionary Applications, vol. 4, no 6,‎ , p. 709–725 (ISSN 1752-4571, PMID 22287981, PMCID PMC3265713, DOI 10.1111/j.1752-4571.2011.00192.x, lire en ligne, consulté le )
  14. a b c d e f et g (en) Bridget S. Green, Caleb Gardner, Adrian Linnane et Peter J. Hawthorne, « The Good, the Bad and the Recovery in an Assisted Migration », PLoS ONE, vol. 5, no 11,‎ , e14160 (ISSN 1932-6203, PMID 21151965, PMCID PMC2996890, DOI 10.1371/journal.pone.0014160, lire en ligne, consulté le )
  15. a b c d e et f (en) Philip J. Seddon, « From Reintroduction to Assisted Colonization: Moving along the Conservation Translocation Spectrum », Restoration Ecology, vol. 18, no 6,‎ (ISSN 1526-100X, DOI 10.1111/j.1526-100x.2010.00724.x@10.1111/(issn)1526-100x.2525thanniversaryvi, lire en ligne, consulté le )
  16. a b et c (en) « Assisted migration of plants: Changes in latitudes, changes in attitudes », Biological Conservation, vol. 143, no 1,‎ , p. 18–27 (ISSN 0006-3207, DOI 10.1016/j.biocon.2009.08.015, lire en ligne, consulté le )
  17. a et b Anthony Ricciardi et Daniel Simberloff, « Assisted colonization is not a viable conservation strategy », Trends in Ecology & Evolution, vol. 24, no 5,‎ , p. 248–253 (ISSN 0169-5347, PMID 19324453, DOI 10.1016/j.tree.2008.12.006, lire en ligne, consulté le )
  18. (en) MEADE KROSBY, JOSHUA TEWKSBURY, NICK M. HADDAD et JONATHAN HOEKSTRA, « Ecological Connectivity for a Changing Climate », Conservation Biology, vol. 24, no 6,‎ , p. 1686–1689 (ISSN 0888-8892, DOI 10.1111/j.1523-1739.2010.01585.x, lire en ligne, consulté le )
  19. « Guidelines for Reintroductions and Other Conservation Translocations », sur portals.iucn.org (consulté le )
  20. (en) « IUCN Guidelines For Re-introduction », sur portals.iucn.org (consulté le )
  21. « Canadian Institute of Forestry », sur pubs.cif-ifc.org (DOI 10.5558/tfc2011-092, consulté le )
  22. (en) « Using assisted colonisation to conserve biodiversity and restore ecosystem function under climate change », Biological Conservation, vol. 157,‎ , p. 172–177 (ISSN 0006-3207, DOI 10.1016/j.biocon.2012.08.034, lire en ligne, consulté le )
  23. (en) C. D. Thomas, H. P. Possingham, C. Parmesan et D. B. Lindenmayer, « Assisted Colonization and Rapid Climate Change », Science, vol. 321, no 5887,‎ , p. 345–346 (ISSN 1095-9203 et 0036-8075, PMID 18635780, DOI 10.1126/science.1157897, lire en ligne, consulté le )
  24. (en) Jason S. McLACHLAN, Jessica J. Hellmann et Mark W. Schwartz, « A Framework for Debate of Assisted Migration in an Era of Climate Change », Conservation Biology, vol. 21, no 2,‎ , p. 297–302 (ISSN 1523-1739, DOI 10.1111/j.1523-1739.2007.00676.x, lire en ligne, consulté le )
  25. Elbert L. Little, Atlas of United States trees., U.S. Dept. of Agriculture, Forest Service,, (lire en ligne)
  26. a et b (en) D. Castellanos-Acuña, R. Lindig-Cisneros et C. Sáenz-Romero, « Altitudinal assisted migration of Mexican pines as an adaptation to climate change », Ecosphere, vol. 6, no 1,‎ , art2 (ISSN 2150-8925, DOI 10.1890/ES14-00375.1, lire en ligne, consulté le Date invalide (2018-12-04t16:08:14z))
  27. a et b (en) Stephen G. Willis, Jane K. Hill, Chris D. Thomas et David B. Roy, « Assisted colonization in a changing climate: a test-study using two U.K. butterflies », Conservation Letters, vol. 2, no 1,‎ , p. 46–52 (ISSN 1755-263X, DOI 10.1111/j.1755-263X.2008.00043.x, lire en ligne, consulté le Date invalide (2018-12-04t16:10:48z))
  28. a b c et d (en) Daniel Simberloff et Anthony Ricciardi, « Assisted colonization is not a viable conservation strategy », Trends in Ecology & Evolution, vol. 24, no 5,‎ , p. 248–253 (ISSN 0169-5347, PMID 19324453, DOI 10.1016/j.tree.2008.12.006, lire en ligne, consulté le )
  29. a b et c Craig N. Spencer, B. Riley McClelland et Jack A. Stanford, « Shrimp Stocking, Salmon Collapse, and Eagle Displacement », BioScience, vol. 41, no 1,‎ , p. 14–21 (ISSN 0006-3568 et 1525-3244, DOI 10.2307/1311536, lire en ligne, consulté le )
  30. « Rapport COSEPAC : Martre d'Amérique - Population de Terre-Neuve », (consulté le )