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Exégèse du Cantique

Le Cantique des cantiques –le chant des chants- est un texte qui a un bon nombre d’interprétation : les unes le tirent du coté de la mystique ; les autres, du coté de l’érotisme. Ce livre, texte biblique classé parmi les cinq livres attribués à Salomon, aurait été composé sous forme d’un poème dont le sens littéral très érotique ferait de lui le plus profane des livres bibliques. On a diverses interprétations du Cantiques des cantiques : l’amour charnel, plein d’image sensuelles et érotiques, qui semble unir deux être humains et, l’amour mystique qui a pour vocation la recherche de l’Eternel. Aussi, on a la place de la femme dans les deux formes d’amours : le spirituel et le charnel.


Interprétation théologique du Cantique[modifier | modifier le code]

Le Cantique est reconnu comme un chant d’amour dont la forme est originale avec une portée infinie de sens. L’exégèse allégorique a souvent été associé au nom d’Origène, théologien alexandrin, qui considérait que les textes bibliques possèdent deux méthodes d’interprétation : « le littéral et le spirituel ». Quand le sens littéral fait problème, s’y tenir devient un obstacle à la compréhension ; le sens spirituel devient alors nécessaire pour lever la difficulté de la surface »[1].

La canonicité du Cantique[modifier | modifier le code]

Il est difficile de savoir à partir de quand le Cantique a été accepté au sein des Ecritures. Mais nous savons que pour faire admettre sa canonicité on a fait appel à la tradition. En effet, à partir de vives « discutions quant au caractère inspiré d’un autre livre des groupes des Ecrits – le livre de Qohélet- ont rejaillis sur le Cantique à la fin du premier siècle de notre ère. Ces discussions eurent lieu dans l’académie de Yabné entre 75 et 117 lorsque les maitres pharisiens eurent à réorganiser le judaïsme après la destruction du Temple »[2]. Au début, les rabbins avaient tendance à cacher ce livre, non pas pour son caractère profane mais, en le déclarant « secret, interdit à la lecture courante ». C’est l’interprétation allégorique de Rabbi Aqiba, « grande figure du judaïsme pharisien mort en 135 », qui a permet à ce livre de trouver sa place parmi les écrits inspirés.  : «  le monde entier ne vaut pas le jour où le Cantique des cantiques a été donné à Israël, car tous les ketoubim sont chose sainte, mais le Cantique des cantique est chose très sainte »[3]. L’interprétation spirituelle et allégorique était celle de la tradition juive et chrétienne.

L’exégèse allégorique et spirituelle[modifier | modifier le code]

Pour reconnaitre la sacralité du poème, une démarche se basant sur une exégèse spirituelle était favorable pour ceux qui considèrent le langage du Cantique est allégorique. C’est qu’avec cette interprétation allégorique que ce livre, de contenu douteux, devient un livre saint.

L’alliance de Yahvé avec son peuple[modifier | modifier le code]

La tradition juive est en faveur d’une lecture allégorique du cantique. Selon les exégètes juifs, le Cantique était un poème exprimant l’amour de l’Eternel pour Israël et« y découvraient une esquisse allégorique de l’histoire d’Israël depuis l’exode jusqu’à l’arrivé du Messie. C’est en raison de ces prétendues allusions à l’exode, que le Cantique est lu dans la synagogue au huitième jour de la fête du pain sans levain »[4].

L’union entre le Christ et l’Église[modifier | modifier le code]

Pour la tradition chrétienne, les exégètes chrétiens témoignent en faveur d’un sens spirituel qui comprend deux orientations différentes « ou complémentaires » : celle d’une lecture ecclésiale qui apparait dès le IIIème siècle où l’allégorie substitue l’amant au Christ et l’amante à l’Église ; et celle d’une union mystique prônée par Grégoire de Nysse. Pour lui l’âme, pour découvrir la beauté divine, doit se livrer à un effort ininterrompu[5]. « L’équation femme –âme se trouve aussi bien dans la mystique chrétienne que musulmane. Les qualités de la réceptivité, d’intériorité, l’aspiration à l’amour, à la communion sont associées à l’âme considérée comme la dimension féminine de l’être humain ». Ainsi, le Cantique a été souvent lu dans les célébrations du mariage où l’épouse s’adresse à l’époux. Les mystiques prônaient, grâce à ces vers, « l’expression personnelle de leur amour et de leur expérience de Dieu »[6].

En islam[modifier | modifier le code]

Si l’union de l’époux et de l’épouse signifie « les noces mystique » dans le Christianisme, en Islam, ce sera « en terme d’amant, d’amour et d’aimé comme le cantique des cantiques » où la femme avec ses manifestations et son désir pour son aimé s’identifie à l’âme. « Le langage métaphoriques de cette mystique est formé à partir du modèle poétique de l’amour. ». Cette inspiration féminine, « cette rencontre de l’âme avec le divin représente le seuil du dévoilement ». Le but ultime des divers récits et poésies des soufis est la quête que le mystique entreprend pour s’approcher à Dieu[7]. Dans cette quête, l’âme se met à la recherche de Dieu, son amour est une voie vers le sacré. « La métaphore de l’union charnelle et de la réclusion sert à représenter l’union de l’âme avec Dieu et évoque l’idée d’âme fiancée dont Dieu est l’unique amant »[8].

A côté de cette interprétation allégorique, on trouve une autre interprétation dite érotique. Cette interprétation, pour la plupart des théologiens, rend ce livre indigne d’occuper une place dans le canon.

Interprétation littérale et érotique du cantique[modifier | modifier le code]

Dans le sens littéral, le Cantique est le tableau d’un amour profane et sensuel. Il est vu comme le recueil de chants d’amour. L’homme et la femme sont les acteurs d’une histoire d’amour dans laquelle, Dieu ne joue pas le rôle de censeur mais il est plutôt du côté des amants, il n’apparait qu’une fois quand le poète, en décrivant l’amour, dit : « ses ardeurs dévorantes émanent de l’Eternel ». Or, si Dieu est absent dans ce poème, l’honneur féminin et les relations sexuelles n’échappent pas à l’étendu du pouvoir d’intervention des autorités juridiques et religieuses dans leur définition et réglementations. En effet, «  la notion d’honneur[9] de la famille attachée au contrôle de la sexualité féminine peut se révéler très importante dans certains pays musulmans, représentation qui est au cœur des crimes dits d’honneur ». Ces crimes sont une forme particulière de violence masculine contre les femmes, et sont la plupart du temps perpétré par un ou plusieurs de ses proches : père, frère ou mari. Ces crimes, on les trouve aussi bien dans les sociétés musulmanes, que « chez des chrétiens et des druzes de Syrie, du Liban, de Palestine ou d’Israël, chez des hindouistes en Inde ». En plus, dans des pays musulmans, l’incrimination de l’adultère constitue l’exemple d’un traitement inégalitaire, car l’adultère féminin fait l’objet d’une condamnation plus importante que l’adultère masculin, « alors même que le Coran (XXIV, 2) a prévu des punitions égales pour les femmes que pour les hommes mis en cause »[10].

Amour charnel[modifier | modifier le code]

L’homme et la femme sont liés par un amour charnel. Cette relation d’amour nous dévoile qu’elle n’a pas pour but final « la conception et l’enfantement ». Les deux amoureux du Cantique voient le corps comme l’expression et le sentiment d’un désir qui les incite à « se donner l’un à l’autre pour leur plaisir et dans un amour partagé »[11]. Dans le Cantique, la base de l’amour chez ces amoureux ne se limite pas seulement à une satisfaction sexuelle mais tend aussi à une admiration pour le vis-à-vis aimé. « Les amoureux se voient mutuellement si beaux, si rayonnants, si magnifiques que chaque rencontre, chaque accès et chaque possession sont éprouvés non pas comme allant de soi mais comme un cadeau gratuit ».C’est un amour qui exclut tout favoritisme. Aussi, l’amour spontané offert par le Cantique des cantiques échappe fortement aux exigences de la société qui, sous l’impact des traditions religieuses, « sont en premier lieu concrétisé dans le rôle de pater familias, du mariage et de la descendance ». Le rapport entre homme et femme échappe au schéma patriarcal traditionnel : l’homme n’exerce pas un contrôle possessif sur la femme ; «  dans le Cantique des cantiques il n’y a pas de domination masculine, ni de subordination féminine ni de stéréotype sur l’un ou l’autre sexe »[12]. Ainsi, l’égalité de sexe est une réalité naturelle dans le Cantique. La lecture du Cantique des cantiques avec sa thématique amoureuse n’affecte en rien la valeur esthétique et morale du texte. Au contraire, elle modifie la vision radicale de la société sur les rapports entre la religion et l’amour.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. André WENIN, Interpréter ?, un exégète face au Cantique dans Regards croisés sur le Cantique des cantiques, Bruxelles, LESSIUS, 2005, p. 64.
  2. Jean Pierre SONNET, Du chant érotique au chant mystique, le ressort poétique du Cantique des cantiques, dans Regards croisés sur le Cantique des cantiques, Bruxelles, Lessius, 2005, p. 80.
  3. Adolphe LODS, Histoire de la littérature hébraïque et juive depuis les origines jusqu'a la ruine de l'état juif (135 après J.-C.), Paris, Payot, 1950, p. 745.
  4. ibid, p. 745
  5. Jean-Marie AUWERS et William GALLAS, Les pères devant le cantique des cantiques, dans Regards croisés sur le Cantique des cantiques, Bruxelles, Lessius, 2005, p. 13-16.
  6. Marie-Claude Lutrand et Behdjat Yazdekhasti, Au delà du voile : femmes musulmanes en Iran, l’Harmattan, 2002, p.58.
  7. Ibid, p.58.
  8. Ibid, p.58.
  9. Il faut noter que le droit islamique ne prescrit pas ces peines, car dans certains pays musulmans comme la Jordanie, l’approche juridique vis-à-vis des crimes basés sur le genre comme le crime d’honneur montre que le code pénal Jordanien s’inspire en partie du code pénal français, en particulier napoléonien, et du code pénal ottoman qui prévoient une répression inégale des comportements masculins et féminins subversifs.
  10. Jacqueline LAHMANI, Actualités du droit musulman : genre, filiation et bioéthique, dans Droit et culture, Paris, l’Harmattan, 59, 2010/1, p.23.
  11. Gabriel LEFEBVRE et Amin MAALOUF, Le Cantique des Cantiques, Paris, Complexe, 2006, p.11.
  12. - Othmar KEEL,SUSANNE et Müller-TRUFAUT, Le Cantique des Cantiques: introduction et commentaire, Fribourg, Cerf, 1997, p. 47.