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Serge Venturini

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Serge Venturini est un poète français, né le 12 octobre 1955 à Paris[1]. C'est un poète du devenir. Il écrit dans le devenir de la poésie. Sa poétique est traversée par de nombreuses métamorphoses. De la poétique du devenir humain, en passant par la poétique du posthumain, il est passé, via la poétique du transhumain, au journal du transvisible. Sa poésie philosophique n'éclaire que par renversements.

Parcours

Serge Venturini est poète et professeur de Lettres dans le Val-d'Oise depuis 1996, date de son retour en France après quelques séjours à l'étranger, commençant avec le Liban (1979-1981) et le Maroc (1981-1984). Après un bref retour en France (1984-1987), il séjourne en Arménie (1987-1990) et en Pologne (1990-1996), détaché par le Ministère des Affaires étrangères[2].

Sa mère (née à Figline di Prato) est tantôt couturière, tantôt femme de ménage et son père (né à Rutali) est dessinateur-cartographe à l'Institut géographique national pendant la semaine et guitariste-chanteur, avec son frère Jean, les jours de fête dans les galas corses du Paris des années 1950. Son enfance se déroule non loin du Musée Rodin dans le 7e arrondissement de Paris. De 1955 à 1979, il vit au n°3 rue Rousselet. Il découvre Héraclite d’Éphèse, Empédocle d’Agrigente, Arthur Rimbaud et Friedrich Nietzsche. Il commence à écrire à l'âge de quinze ans.

Sa poésie du devenir, fulgurante et cristalline selon Geneviève Clancy qui le révéla[3], influencée par les œuvres de Pierre Reverdy et surtout René Char, est au carrefour de la poésie et de la prose, du politique et du philosophique. Elle fut saluée comme telle par Yves Bonnefoy, André du Bouchet, Abdellatif Laâbi et Laurent Terzieff.

Ses livres sont des livres du combat de l'Être. L'air, la terre, l'eau et surtout le feu, tiennent dans cette œuvre une place considérable. La Résistance de la poésie demeure au cœur de ses combats quotidiens pour une parole rebelle toujours plus libre et désenclavée. Il développe sa Poétique du devenir dans un premier livre d'Éclats (1976-1999) avec un questionnement sur le devenir humain.

Le livre II d'Éclats (2000-2007) poursuit ce travail de réflexion avec un questionnement sur le devenir posthumain. Le livre III de sa poétique d'Éclats est en préparation sur le thème du devenir transhumain. Fin 2007, il est le créateur d'une théorie selon laquelle il existerait, entre le visible et l'invisible, un passage, le temps d'un éclair, l'instant d'une vision : le transvisible. Il a écrit :

« Le noir feu souterrain brûle des os blancs des morts.
Derrière mon nom se cache une vraie machine de guerre.
Mon Verbe n’est pas de plume. ― C’est une lame tranchante. »

— Fulguriances, n° 79, p. 28.

Le transvisible

Le transvisible est une théorie selon laquelle il existerait, entre le visible et l'invisible, un passage, le temps d'un éclair, l'instant d'une vision[4].

Pour bien comprendre cette théorie qui demeure à forger, il faut revenir à d'autres notions fondatrices du transvisible, car nous ne sommes toujours pas sortis de la caverne de Platon, puisque nous prenons encore l'apparence de la réalité pour la réalité elle-même, dans un monde aux prises avec le piège de l'image, où l'absence d'image est une preuve de non-réalité, de non-vérité et donc de mensonge, où la réalité même devient fiction, et inversement, et où enfin, « dans un monde réellement renversé, le vrai est un moment du faux », selon Guy Debord[5], dans un monde où le virtuel est devenu une réalité.

La première de ces notions est le posthumain[6], où l'on voit mourir le vieil humanisme né avec la Renaissance italienne[7]. Au-delà de cette notion, comme en une deuxième étape, on se réfère au transhumain[8], comme une nécessité de dépasser la précédente notion. Le trasumanar du Dante demeure une référence capitale à cette problématique. « Transhumaner », aller au-delà de l'humain, « par delà le bien et le mal » selon la parole de Nietzsche.

Le transvisible pourrait, sur le plan symbolique, être matérialisé par une flèche qui partirait du visible pour se perdre dans l'invisible. Figure de la philosophie du devenir et donc de la transformation de l'être, le transvisible est un moment de bascule entre le déjà plus et le pas encore, moment proche de ce qui est onirique, où l'esprit chavire du subconscient de l'état de veille dans le rêve nocturne, et parfois devient rêve prémonitoire. Selon Henri Bergson, retenir ce qui n'est déjà plus, anticiper sur ce qui n'est pas encore, voilà donc la première fonction de la conscience[9].

L'eau aussi semble être une excellente métaphorisation entre le monde liquide (le visible) et la vapeur d'eau (l'invisible). Le vent également, capable d'agiter le feuillage des arbres sans être visible, ou inversement, quand rien ne semble bouger et qu'un souffle vient balayer le visage, à la semblance de la lumière. Autrement encore, quand faute de règles bancaires strictes, l'argent, en tant que valeur monétaire, est devenu de plus en plus immatériel, voire virtuel, transvisible.

D'où la difficulté à clarifier cette fulgurance du passage entre ce qui est visible pour l'œil et l'esprit et ce qui ne l'est plus, comme le dévoile par exemple le fameux procédé du fondu enchaîné au cinéma ; ce passage de transition d'une image à une autre, l'une disparaissant progressivement et l'autre s'intensifiant à son tour. Il en est de même en musique entre un thème et un autre thème.

Entre science et art, un exemple est donné avec l'ingénieur florentin Maurizio Seracini, spécialiste de la réflectographie grâce aux infrarouges, pionnier de la restauration des oeuvres de Léonard de Vinci qui a su utiliser les techniques de pointe, afin de retrouver La Bataille d'Anghiari et de visualiser sous l'inachevée peinture actuelle de L'Adoration des mages, un des premiers dessins sous-jacent du maître. Voir, sous l'apparence d'une représentation, une autre réalité. Nous sommes dans le transvisible. Regarder au-delà du voir. Pour Pablo Picasso qui pointait cette difficulté, sous un autre angle, « il faudrait pouvoir montrer les tableaux qui sont sous le tableau. »

Entre l'« étant » et le « non-étant » donc, dans un monde où les échanges entre les personnes se dématérialisent toujours plus, plus on avance dans le temps. Certains cartésiens n'y voient qu'une forme de l'indéterminé, de l'improbable, de l'« anommable », et rejettent ainsi cette problématique. Tout ce qui n'est pas formulé, n'ayant aucun statut propre, ne mérite donc guère de considération.

Pourtant, quelques-uns comme Merleau-Ponty furent en leur temps passionnés par les rapports du visible et de l'invisible. Ce philosophe y voyait même une profondeur charnelle[10]. Quelques poètes ont tenté par la parole de toucher la chair de l'invisible. Le vide, le rien, l'impensé dans la matière est riche de potentialités. Il s'agit bien de voir, de passer de l'opaque au translucide, avant d'atteindre la transparence de l'invisible[11]. Insistons sur la perméabilité de ces mondes, car certains esprits trop cartésiens sont étrangers à ce dialogue. Les poètes, vecteurs de transvisibilité, passeurs de lumière, porteurs du feu de la parole, sont des êtres à mi-chemin entre ces deux mondes[12]. Dans le passage du visible à l'invisible, le transvisible transfigure le temps.

Œuvres

  • D'aurorales clartés : Choix de poèmes réunis par l'auteur, 1971-1995 ; Paris : Gutenberg XXIe siècle, 2000 (livre dédié à Ossip Mandelstam) (OCLC 47692464)
  • Éclats : d'une poétique du devenir humain, 1976-1999 ; Paris : L'Harmattan, 2000 (livre dédié à Paul Celan) (OCLC 44448871)
    • Article sur le livre : Paul Van Melle, « J'ai trouvé une autre Bible », dans Bulletin, n° 44 (2000), La Hulpe
  • Le sens de la terre, suivi de L’Effeuillée, Aphrodite en trente variations, 1999-2003, Éditions Didro, Paris, 2004 (livre dédié à Yves Battistini) (ISBN 2-910726-64-9)[13]
    • Article sur le livre : Paul Van Melle, « Prose... sans ateliers », Bulletin, n° 84, La Hulpe
  • Sayat-Nova, Odes arméniennes (traduction des 47 odes), avec Élisabeth Mouradian, Éditions L’Harmattan, 2000-2006, Paris, 2006 (livre dédié à Sergueï Paradjanov) (ISBN 2-296-01398-8)[3]
    • Articles sur ce livre labellisé pour l'année de l'Arménie, septembre 2006-juillet 2007 : « Arménie, mon amie ! »
    • Livre retenu pour la sélection du Prix Charles Aznavour, le 19 novembre 2006, au Festival du Livre arménien de Marseille[14]
    • Annie Pilibossian, dans Bulletin de l'ACAM, n°66 (janvier-mars 2007), Val-de-Marne
    • Paul Van Melle, « Ressusciter les auteurs méconnus », dans Bulletin, n°208 (septembre 2006), La Hulpe
    • (hy) Article en langue arménienne, « Les œuvres de Sayat-Nova en français ! », dans La République d'Arménie (Hayastani Hanrapetoutyoun), 16 février 2007, Erevan[15]
    • Article : Jean-Baptiste Para, « Historiens de l'Antiquité », dans Europe, n° 945-946 (janvier-février 2008), p. 345-346
  • Éclats d’une poétique du devenir posthumain, 2000-2007 (Livre II), Éditions L’Harmattan, Paris, 2007 (livre dédié à Lucie Aubrac) (ISBN 978-2-296-03301-6)
    • Paul Van Melle, « Pour une poétique de la pensée », dans Bulletin, n° 214, La Hulpe
  • Fulguriances et autres figures, (1980-2007), postface de Philippe Tancelin, L'Harmattan, mai 2008, (livre dédié à Alexandre Blok) (ISBN 978-2-296-05656-5)
    • Lecture de Fulguriances au Théâtre Noir du Lucernaire de Paris, lundi 16 juin 2008, montage et dramaturgie : Philippe Tancelin, Dan Vimard, mise en espace : Dan Vimard et la compagnie Kaléidoscope Bleu avec la collaboration du CICEP (Centre International de Création d'Espaces Poétiques, créé en 1981 par Jean-Pierre Faye, Geneviève Clancy, Stéphanette Vendeville et Philippe Tancelin)
    • Article sur le livre : Paul Van Melle, « Penser... en silence ou non » , dans Bulletin n°224, La Hulpe
  • (hy) Serge Venturini / Սերժ Վենտուրինի, Et gravir / Եւ լեռն ի վեր, traduction d'un choix de textes par Benjamin Tchavouchian, Élisabeth Mouradian, maître d'œuvre de la version arménienne bilingue (français-arménien) Hovik Vardoumian, Éditions « Fêtes », Erevan, 2008, 113 p. (ISBN 978-99941-59-42-0)[3]

Notes et références

  1. « Serge Venturini », Éditions L'Harmattan (consulté le )
  2. Voir Archives du MAE, DRH, 1970-2000.
  3. a b et c « Livres arméniens - Serge Venturini », Association culturelle arménienne de Marne-la-Vallée (consulté le )
  4. Serge Venturini, « Le pont franchi du transvisible » [lire en ligne (page consultée le 30 avril 2008)].
  5. Guy Debord, La Société du spectacle, Éditions Champ libre, Paris, 1977, p. 11.
  6. Serge Venturini, Éclats d'une poétique du devenir posthumain, résumé disponible sur « Chapitre.com » (consulté le ).
  7. Serge Venturini, « Réfléchir le passage entre visible et invisible », janvier 2008, [lire en ligne (page consultée le 30 avril 2008)].
  8. Christophe Barbier, « Comment éviter l'apocalypse? », entrevue avec Jacques Attali, L'Express, [lire en ligne (page consultée le 30 avril 2008)].
  9. Henri Bergson, L'énergie spirituelle, éd. Alcan, p. 5-6.
  10. Voir le chapitre « Philosophie » de l'article Maurice Merleau-Ponty.
  11. Serge Venturini, « Le tigre de l'œil », 22 décembre 2007, [lire en ligne (page consultée le 30 avril 2008)].
  12. Serge Venturini, « La sandale d'Empédocle, autre signe », 23 janvier 2008, [lire en ligne (page consultée le 30 avril 2008)].
  13. « Cumulatif 2004 », Bibliographie nationale française (consulté le )
  14. Prix Charles Aznavour 2006
  15. « Faut-il ressusciter Sayat-Nova en Europe ? », Éditions L'Harmattan (consulté le )

Voir aussi

Liens externes