Rhinocéros d'or de Mapungubwe

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Rhinocéros d'or de Mapungubwe
Image illustrative de l’article Rhinocéros d'or de Mapungubwe
Dimensions 14 cm x 5,5 cm
Matériau or
Méthode de fabrication feuille d'or martelée clouée sur une structure en bois
Période
Culture
Date de découverte décembre 1932
Lieu de découverte Mapungubwe
Conservation Mapungubwe Museum, Pretoria

Le rhinocéros d'or de Mapungubwe est un petit artéfact archéologique trouvé en 1932 à Mapungubwe en Afrique du Sud. Dans le contexte archéologique dans lequel il a été trouvé, il est un témoin de l'existence d'un « royaume » puissant, qui s'est développé du IXe siècle au XIIIe siècle. Il est devenu l'emblème de l'ordre de Mapungubwe, la plus haute distinction d'Afrique du Sud.

Description[modifier | modifier le code]

Le rhinocéros d'or de Mapungubwe est un petit objet reconstitué puis restauré, de 14 cm de long et 5,5 cm de haut. Il est composé d'une feuille d'or martelée, qui était clouée sur un support sculpté de bois. La queue est un cylindre d'or, les oreilles sont des coupes ovales, les yeux sont des hémisphères, le tout en or[1],[2].

Le rhinocéros d'or est plus robuste à l'encolure qu'un rhinocéros. Son allure compacte dégage une impression de puissance. Il n'a jamais eu qu'une seule corne, alors que les rhinocéros vivant en Afrique (rhinocéros blanc et rhinocéros noir) en ont deux[2]. Il a été restauré en 1999[1].

Découverte et interprétation[modifier | modifier le code]

Sur la colline de Mapungubwe[modifier | modifier le code]

Le rhinocéros d'or est découvert par la famille Van Graan, des exploitants agricoles, lors de leur première exploration du site de la colline de Mapungubwe en décembre 1932[3],[4],[5],[6]. Plus précisément, c'est le que les fouilleurs découvrent des objets d'or, dont le rhinocéros, dans une tombe, la première fouillée, dénommée ensuite Original Gold Grave M1, A 620. Au total, trois tombes du site contenaient des objets d'or[7],[8].

Jerry Van Graan écrit à son ancien professeur, Leo Fouché, professeur d'histoire à l'université de Pretoria[9], pour lui signaler sa découverte. Celui-ci organise des fouilles archéologiques à partir de 1933[10],[4],[8]. Elles révèlent un site comportant de nombreuses structures et objets[11]. Avec d'autres sites voisins, il témoigne d'une culture qui s'est développée du IXe siècle au XIIIe siècle, période pendant laquelle apparaît une différenciation sociale croissante[12].

D'autres objets en or sont découverts dans la même tombe que le rhinocéros d'or. Il s'agit d'un bol[13], d'un bovin et d'un félin, qui ont la même taille que le rhinocéros, ainsi que d'autres feuilles d'or[8]. Aucun d'entre eux n'a pu être daté. En effet, si des tests ont démontré que des artefacts trouvés dans une autre tombe datent du XIIIe siècle[14], ce résultat ne peut être extrapolé aux objets en or de la tombe Original Gold Grave M1, A 620[15].

Ces objets sont la première attestation de l'utilisation de l'or comme signe de prestige en Afrique australe. On peut en déduire que c'est à cette époque que l'or y acquiert de la valeur[16].

Provenance[modifier | modifier le code]

Le fait que le rhinocéros d'or n'ait une seule corne, comme certains rhinocéros d'Asie (rhinocéros indien et rhinocéros de Java), a pu faire croire à un objet importé, mais l'analyse chimique de l'or montre qu'il provient de la région de Mapungubwe[17].

Il est par contre possible que la structure en bois qui le soutenait et qui a disparu au fil du temps ait pu être importée et plaquée d'or dans le « royaume » de Mapungubwe, en guise d'appropriation[17]. De nombreux artéfacts archéologiques retrouvés à Mapungubwe témoignent en effet d'échanges intenses avec le monde indien ou chinois[18].

Un fragment de bol divinatoire ?[modifier | modifier le code]

Selon Alex Duffey, Le rhinocéros d'or, le bovin et le félin, qui font sensiblement la même taille, pourraient avoir été cloués sur un bol divinatoire en bois, qui se serait désagrégé avec le temps[19], sur le modèle des bols divinatoires Vendas ou découverts à Grand Zimbabwe[20].

Symbole contemporain[modifier | modifier le code]

Emblème[modifier | modifier le code]

Le rhinocéros d'or est devenu l'emblème de Mapungubwe[21]. Son existence démontre la richesse du passé de l'Afrique australe avant l'arrivée des Européens[22]. Laissé de côté de ce fait pendant l'apartheid, il est un élément symbolique important de la réappropriation de son histoire longue menée par l'Afrique du Sud depuis[23].

Du au , le rhinocéros d'or de Mapungubwe est présenté au British Museum, dans le cadre d'une exposition intitulée South Africa the art of a nation. Il est reproduit dans la communication officielle de l'exposition[24],[25].

Distinction[modifier | modifier le code]

Depuis 2002, la plus haute distinction d'Afrique du Sud est l'ordre de Mapungubwe, dont l'insigne reprend le profil du rhinocéros d'or[21],[26].

Références[modifier | modifier le code]

  1. a et b Duffey 2012, p. 182-183.
  2. a et b Fauvelle 2014, p. 197.
  3. Fouché 1937, p. 1-2.
  4. a et b Carruthers 2006.
  5. Fauvelle 2014, p. 192.
  6. (en) Justine Wintjes et Sian Tiley-Nel, « The Lottering Connection: Revisiting the ‘Discovery’ of Mapungubwe », The South African Archaeological Bulletin, vol. 74, no 210,‎ , p. 101–110 (ISSN 0038-1969, lire en ligne, consulté le ).
  7. Steyn 2007, p. 140.
  8. a b et c Duffey 2012, p. 180.
  9. (en) F. A. Mouton, « Professor Leo Fouche, The history department and the Afrikanerisation of the University of Pretoria », Collected Seminar Papers. Institute of Commonwealth Studies, vol. 48,‎ , p. 92–101 (ISSN 0076-0773, lire en ligne, consulté le ).
  10. Fouché 1937, p. 5-8.
  11. Fouché 1937, p. 9-29.
  12. Fauvelle 2014, p. 193-195.
  13. Steyn 2007, p. 141.
  14. Stephan Woodborne, Marc Pienaar et Sian Tiley-Nel, « Dating the Mapungubwe Hill Gold », Journal of African Archaeology, vol. 7, no 1,‎ , p. 99–105 (ISSN 1612-1651, lire en ligne, consulté le ).
  15. Duffey 2012, p. 181-182.
  16. Comité scientifique international pour la rédaction d'une Histoire générale de l'Afrique (UNESCO), Histoire générale de l'Afrique, vol. 3 : L'Afrique du VIIe au XIe siècle, Paris, Présence africaine / Edicef / UNESCO, , 2e éd. (1re éd. 1990), 559 p. (ISBN 9782841292387), p. 468.
  17. a et b Fauvelle 2014, p. 198.
  18. Fauvelle 2014, p. 195-196.
  19. Duffey 2012, p. 184-185.
  20. Duffey 2012, p. 176-179.
  21. a et b Fauvelle 2014, p. 199.
  22. Jacqueline Derens, « Un rhinocéros qui fait toujours parler de lui », sur Mediapart, (consulté le ).
  23. Stephanie Findlay, « Avec le "rhinocéros en or", l'Afrique du Sud redécouvre son histoire », Le Point,‎ (lire en ligne).
  24. (en-GB) David Smith, « British Museum may seek loan of the golden rhinoceros of Mapungubwe », The Guardian,‎ (ISSN 0261-3077, lire en ligne, consulté le ).
  25. (en) « Past exhibitions », sur British Museum (consulté le ).
  26. (en) « The Order of Mapungubwe », sur South African History Online (consulté le ).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (en) Jane Carruthers, « Mapungubwe: an historical and contemporary analysis of a World Heritage cultural landscape », Koedoe, vol. 49, no 1,‎ (ISSN 2071-0771 et 0075-6458, DOI 10.4102/koedoe.v49i1.89, lire en ligne, consulté le ).
  • (en) Alex Duffey, « Mapungubwe: Interpretation of the Gold Content of the "Original Gold Burial M1, A620" », Journal of African Archaeology, vol. 10, no 2,‎ , p. 175–187 (ISSN 1612-1651, lire en ligne, consulté le ).
  • François-Xavier Fauvelle, Le rhinocéros d'or : histoires du Moyen Âge africain, Paris, Gallimard, coll. « Folio Histoire », , 2e éd. (1re éd. 2013), 382 p. (ISBN 9782070454556).
  • (en) Leo Fouché, Mapungubwe, Ancient Bantu Civilization on the Limpopo: Reports on excavations at Mapungubwe (Northern Transvaal) from February 1933 to June 1935, edited on behalf of the Archaeological Committee of the University of Pretoria, Cambridge, Cambridge University Press, , 221 p. (lire en ligne).
  • (en) Maryna Steyn, « The Mapungubwe Gold Graves Revisited », The South African Archaeological Bulletin, vol. 62, no 186,‎ , p. 140–146 (ISSN 0038-1969, lire en ligne, consulté le ).