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Projet de métro à Bordeaux

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Entre 1986 et 1995, la communauté urbaine de Bordeaux envisage la construction d'un réseau de métro utilisant la technologie du véhicule automatique léger (VAL).

Lancé à l'initiative du maire de Bordeaux Jacques Chaban-Delmas, le projet prévoit deux lignes se croisant à la place des Quinconces. Un premier projet est proposé en 1986, puis un second, moins ambitieux, est approuvé en 1991. L'ouverture de la première phase est alors prévue en 2000.

Le projet est cependant loin de faire l'unanimité. Des voix s'élèvent parmi les élus et le citoyens pour critiquer le coût élevé du projet qui ne doit desservir que l'hypercentre de la métropole. Après le rejet du contrat de concession en 1994, le projet apparaît compromis. L'élection d'Alain Juppé à la mairie de Bordeaux en 1995 porte finalement un coup fatal au métro qui est abandonné au profit du tramway.

Histoire

Premières études

Durant les années 1970, les déplacements dans l'agglomération de Bordeaux se font de plus en plus difficiles avec l'augmentation du trafic automobile. Depuis la suppression des tramways en 1958, le réseau de transport en commun repose sur les lignes d'autobus qui peinent à répondre à la demande.

Ainsi, dès 1971, une première étude est menée en vue d'établir un transport en commun en site-propre à Bordeaux. Plusieurs options sont soulevées dont le tramway et le métro. En 1975, la ville est contactée par le secrétaire d'État aux transports Marcel Cavaillé dans le cadre d'un concours qui lui demande d'étudier l'établissement d'un tramway moderne. Mais le maire de l'époque, Jacques Chaban-Delmas, ne veut pas entendre parler du tramway qu'il avait fait supprimer deux décennies plus tôt[1].

Jacques Chaban-Delmas, maire de Bordeaux de 1947 à 1995 et fervent défenseur du métro.

En revanche, le maire est séduit pas le métro automatique VAL de la société Matra, dont la première ligne est inaugurée à Lille en 1983. De premières études sont engagées et l'avant-projet soumis à la Communauté urbaine de Bordeaux (CUB) est approuvé à l'unanimité le 27 juin 1986[1]. La ligne prévue suit un axe nord-sud entre les Aubiers et la gare Saint-Jean. Une branche ou une seconde ligne s'en détache à la place des Quinconces pour se diriger vers le CHR[2].

Évolution du projet de métro

Il apparaît toutefois rapidement que la réalisation de cet ambitieux projet n'est pas financièrement réaliste pour la CUB. Le sous-sol gorgé d'eau de Bordeaux rend en effet compliqués — mais pas impossibles — les travaux souterrain et faire augmenter la facture totale du métro. Chaban-Delmas se heurte aussi à la contestation des élus socialistes qui souhaitent que le VAL desserve les quartiers populaires de la rive droite de la Garonne.

En 1989 une étude menée par la SOFRETU, filiale d'ingénierie de la Régie autonome des transports parisiens (RATP), conforte le choix du VAL mais juge que le tracé ne correspond pas aux besoins de l'agglomération. Le projet a notamment le défaut d'ignorer le domaine universitaire de Talence-Pessace, pourtant prioritaire en termes de déplacements[2]. L'étude préconise donc de revoir entièrement le tracé ou bien d'étendre les lignes rapidement après leur ouverture.

Pour tenir compte de ces critiques, un second projet est présenté en 1991. La ligne A nord-sud abandonne la desserte des Aubiers pour se limiter dans une première phase au trajet entre les Quinconces et la gare Saint-Jean. En revanche, la ligne B est-ouest traverse désormais la Garonne et relie le CHR à la Bastide. Une ligne C doit être construite ultérieurement entre la place de la Victoire et le domaine universitaire.

Le 6 novembre 1992, la CUB modifie encore le projet : c'est finalement la ligne A qui desservira le domaine universitaire et le court tronçon entre Victoire et Saint-Jean, auparavant intégré à la ligne A, qui formera une ligne C indépendante[3]. L'inauguration du VAL est alors envisagée en 2000. La première phase doit avoir une longueur de 11 km pour un réseau de 45 km à terme.

Le VAL de Lille, premier métro automatique au monde, vu en 1984

Montée de la contestation

Cependant, alors que le projet semblait faire consensus en 1986, le doute s'installe dans le débat public bordelais. Le coût total du VAL a explosé, passant de 3,8 MM de francs en 1990 à 6,4 MM en 1994[3]. Les élus d'opposition ainsi que l'association Trans'CUB militent donc plutôt en faveur d'un tramway, moins coûteux et permettant de desservir un bassin de population plus large. Le principal défaut du VAL est en effet qu'il ne doit desservir que le cœur de la l'agglomération, les communes périphériques restant à l'écart[2]. Pour le prix d'un seul kilomètre de métro, dix kilomètres de tramway pourraient être construits. La densité moyenne de l'agglomération et la mauvaise qualité du sous-sol militent également en faveur du tramway[1]. Enfin, les opposants souhaitent réduire la place de la voiture en centre-ville et accusent le VAL de préserver le status quo en ne gênant pas la circulation en surface.

En janvier 1994, suite à la validation par le Conseil d'État du recours des opposants au VAL, la déclaration d'utilité publique est annulée. Par un vote très serré la CUB confirme tout de même le projet qui est encore revu à la baisse : une courte ligne A n'effectuant plus que le trajet entre Quinconces et la place de la Victoire et une ligne B reliant le CHR à la rive droite[3]. La date de mise en service de la première phase est repoussée à 2001, l'extension de la ligne A vers le domaine universitaire et la création de la ligne C vers Saint-Jean ne devant aboutir qu'en 2004[2]. Le 10 janvier 1994, le Premier ministre Édouard Balladur annonce que l'État contribuera au projet à hauteur de 400 M de francs[1].

Abandon du projet

Alors que l'avenir du projet de métro bordelais est de plus en plus incertain, le traité de concession du VAL est finalement repoussé le 22 juillet 1994 par les élus de la CUB de 64 voix contre 54 pour et 2 abstentions. Le projet de métro semble au point mort[3]. Jacques Chaban-Delmas, ardent promoteur du métro depuis les débuts, renonce à se présenter aux élections municipales de 1995 après 47 ans passés au Palais Rohan. Il fait néanmoins promettre au candidat qu'il adoube, le Premier ministre Alain Juppé, de mener le projet à son terme.

Mais, une fois élu, Alain Juppé confirme l'abandon du projet de VAL après une décennie de débat et 250 millions de francs dépensés en études[1]. Le maire de Bordeaux oriente alors son choix vers un réseau de tramway, plus économique et jugé plus adapté aux besoins de la métropole. Grâce au budget constitué pour le métro, la première phase d'un réseau de trois lignes est mise en chantier et inaugurée en 2003.

Postérité

L'échec du projet de métro a pour beaucoup symbolisé la fin du "système Chaban". Alors que le maire avait longtemps été une figure incontestée dans la vie politique bordelaise, le VAL a semé la discorde jusque dans les rangs des élus RPR et a mis à mal son autorité. L'obstination de Chaban-Delmas a fini par lui coûter des soutiens politiques de premier plan dont son adjoint historique, Jacques Valade, lequel se verra finalement retirer son soutien au profit d'Alain Juppé en vue des élections municipales de 1995.

Après l'abandon du VAL, la CUB s'oriente vers la construction d'un réseau de tramway moderne. La première phase, comprenant trois lignes, ouvre entre 2003 et 2007.

Le tracé des lignes de tramway correspond en partie à celui du métro. Ainsi la ligne A desserte le CHR, Mériadeck et la Bastide mais traverse la Garonne plus au sud en passant sur le pont de pierre. La ligne B relie la place de la Victoire au domaine universitaire. Quant à la ligne C, sont tracé entre la gare Saint-Jean et Les Aubiers est presque identique à celui de la ligne nord-sud, si ce n'est que le tramway passe par les quais et non par le centre-ville.

Après avoir été mise de côté pendant deux décennies, la question du métro revient sur le devant de la scène en 2017 quand Alain Juppé et plusieurs élus métropolitains déclarent que cette option peut de nouveau être envisagée à Bordeaux. Le tramway, victime de son succès, est en effet saturé et un réseau de métro permettrait de le compléter tout en réduisant la congestion des transports en commun de surface. En 2019, une étude d'opportunité commandée par la Métropole de Bordeaux (ex-CUB) conclut à la pertinence d'un réseau de métro à l'horizon 2030. La ligne proposée relirait Bouliac sur la rive droite au parc des expositions, en passant par la gard Saint-Jean, Mériadeck et les boulevards. L'étude envisage également une seconde ligne entre Pessac et Cenon passant par le centre-ville. Suite aux élections municipales de 2020 et à l'arrivée d'une majorité de gauche à la Métropole, le projet de métro est ajourné. Des élus et des collectifs citoyens continuent néanmoins à porter l'idée d'un métro à Bordeaux, seule solution selon eux afin de répondre à terme aux besoins de l'agglomération.

Réseau projeté

Projet de 1986

Le projet de réseau de métro soumis à la CUB en 1986 prend la forme d'un « Y ». Il se compose d'une ligne partant de la gare Saint-Jean puis se séparant en deux branches aux Quinconces. L'une se dirige vers Mériadeck et le CHR, l'autre vers Grand Parc et le Lac. À l'exception de la station Les Aubiers, établie en viaduc, l'ensemble du réseau doit être souterrain. L'ouverture de la première phase est espérée pour 1994.

Des extensions ultérieures sont prévues : à l'ouest vers Mérignac et l'aéroport, au nord vers le Parc des Expositions, à l'est jusqu'à Lormont sur la rive droite. Une ligne se détachant à la place de la Victoire vers le domaine universitaire est aussi prévue à long terme. La longueur totale de cet ambitieux projet atteint 45 km.

Projet de 1991 à 1994

La ligne A

La ligne B

La ligne C

Extensions possibles

Détails techniques

Construction

Le métro devait être souterrain dans le centre-ville. Les stations auraient été en moyenne à 15m sous la surface. Des sections en viaduc étaient ensuite prévues en périphérie, notamment aux Aubiers, vers le domaine universitaire et à Lormont sur la rive droite. Quelques tronçons devaient être établis en tranchée couverte comme au niveau de Grand Parc.

Le creusement du tunnel devait s'effectuer grâce à des tunneliers. La ligne A devait avoir recours à un tunnel bitube afin de limiter les risques de tassement du sol dans le centre ancien. La ligne B devait en revanche avoir recours à un tunnel unique à deux voies.

Matériel roulant

Il était prévu que les deux lignes aient recours à la technologie du véhicule automatique léger (VAL). Celle-ci implique un métro entièrement automatique à roulement sur pneumatiques et à gabarit réduit. Le matériel roulant employé devait être le VAL 206, déjà en circulation à Lille, Toulouse et sur la ligne Orlyval. Les rames devaient être composées de deux voitures soit 26 m. Les stations devaient néanmoins disposer de réserves pour permettre de doubler la longueur des rames à terme.

Ateliers

L'atelier de maintenance de la ligne A devait se situer à proximité de la station Place Ravezies, tandis que celui de la ligne B aurait été construit dans le quartier de la Bastide, sur la rive droite. Dans un premier temps c'est celui-ci qui aurait assuré l'entretien des rames des deux lignes. Un raccordement à voie unique à la station Quinconces aurait permis aux trains de passer de l'une à l'autre. La ligne C aurait aussi disposé d'un raccordement avec la ligne A à la station Victoire.

Références

  1. a b c d et e Olivier Pech, Cathy Lafon, « Bordeaux : la guerre métro/tram dans les années 1980 », sur sudouest.fr, (consulté le )
  2. a b c et d « Aquitaine - La voie étroite du métro de Bordeaux », sur lemonde.fr, (consulté le )
  3. a b c et d Jean-Marie Vasquez, « Bordeaux rejette le traité de concession du métro VAL », sur lesechos.fr, (consulté le )

Annexes

Bibliographie

Articles connexes

Liens externes