Prieuré de la Sainte-Trinité

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Prieuré de la Sainte-Trinité
Les vestiges de l'église priorale.
Les vestiges de l'église priorale.
Présentation
Culte Catholique romain
Type Collégiale
puis prieuré
Début de la construction XIe siècle
Fin des travaux XVe siècle
Protection Logo monument historique Classé MH (1916)
Logo monument historique Inscrit MH (2022)
Géographie
Pays Drapeau de la France France
Région Normandie
Département Eure
Ville Beaumont-le-Roger
Coordonnées 49° 04′ 59″ nord, 0° 46′ 32″ est
Géolocalisation sur la carte : France
(Voir situation sur carte : France)
Prieuré de la Sainte-Trinité
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Prieuré de la Sainte-Trinité

Le prieuré de la Sainte-Trinité est un ancien monastère qui se dressait à Beaumont-le-Roger aujourd'hui dans le département de l'Eure en région Normandie.

Construit à la fin du XIe siècle, l'édifice est d'abord une collégiale confiée à des chanoines anglais de Sainte-Frideswide d’Oxford. Au milieu du XIIe siècle, il devient la propriété de l'abbaye du Bec qui en fait un prieuré.

Les vestiges du prieuré, après avoir été classés par liste de 1862, puis déclassés par arrêté du , sont aujourd'hui en partie classé et inscrit au titre des monuments historiques.

Localisation[modifier | modifier le code]

Les restes du prieuré sont situés sur le territoire de la commune de Beaumont-le-Roger, dans l'ouest du département de l'Eure, au sein de la région naturelle du pays d'Ouche et très proche de celle de la campagne du Neubourg[1]. Il se dresse à mi-hauteur de l'un des coteaux de la vallée de la Risle, bénéficiant ainsi de larges perspectives sur la vallée et sur la ville.

Historique[modifier | modifier le code]

La collégiale (XIe et XIIe siècles)[modifier | modifier le code]

La vallée de la Risle vue de l'ancien prieuré.

La construction de la collégiale de la Sainte-Trinité débute en 1070 sous l'impulsion de Roger de Beaumont[2], puissant seigneur et conseiller de Guillaume le Conquérant[3],[4].

Sa consécration a lieu en 1087[5], en présence de Guillaume Bonne-Âme, l'archevêque de Rouen, Gilbert II, l'évêque d’Évreux[6], Robert Courteheuse, fils de Guillaume le Conquérant, Robert d'Harcourt, Roger de Thibouville, Thierry de Launay, Ranulphe de Bigars et d'autres seigneurs de la contrée[3]. Par une charte rédigée le jour même, Roger de Beaumont dote généreusement la collégiale[6]. Celle-ci est alors confiée à des chanoines anglais de Sainte-Frideswide d’Oxford[3],[4]. Le premier supérieur de la collégiale, qui prend le titre de doyen, est Wazon[6].

Avant de se retirer à l'abbaye de Préaux afin d'y finir ses jours, Roger de Beaumont confie certaines de ses églises aux chanoines. C'est le cas notamment des églises Saint-Nicolas et Saint-Léonard à Beaumont-le-Roger, de l'église Saint-Crespin à Barc, etc. auxquelles s'ajoutent leurs dépendances et leurs dotations particulières, deux maisons pour le logement des chanoines ainsi que deux autres maisons au Neubourg[6].

En 1131[7], Philippe d'Harcourt, fils probable de Robert Ier d'Harcourt et de Colette d'Argouges[8], devient le doyen de la collégiale. À cette époque, celle-ci acquiert l'église de Beaumontel notamment grâce à Richard de Beaumontel. Cette donation ainsi que l'ensemble de leurs possessions sont confirmés la même année par Henri Ier[6].

Malgré la générosité dont a fait preuve Galeran de Meulan et, avant lui, son père Robert, et malgré les sacrifices de leurs seigneurs, l'établissement des chanoines finit par péricliter.

Le prieuré (XIIe au XVIIIe siècle)[modifier | modifier le code]

En 1142, les chanoines sont remplacés par douze moines et la collégiale devient un prieuré dépendant de l'abbaye du Bec[4]. Robert, alors moine du Bec, est désigné comme premier prieur de la Trinité[3].

Toutefois, ce changement ne s'opère pas sans difficultés. En effet, les chanoines de Sainte-Frideswide d’Oxford réclament les dîmes des églises de Beaumont-le-Roger qui revenaient auparavant aux chanoines de la collégiale[6]. L'affaire, qui est déférée au pape Eugène III, nécessite la tenue, en 1147, d'une Assemblée Générale, afin de déboucher sur un compromis[5]. Ainsi, satisfaction est donnée aux chanoines d'Oxford puisque le domaine d'Edenetown, propriété du prieuré, leur est donné[6].

Le prieuré vit de nombreuses donations (église de Saint-Pierre et ses dîmes données par Osbern, seigneur de Bourneville et vassal de Galeran, la terre d'Épinay donnée par Raoul de Groslay, etc.)[6], et de la rente de ses terres[5].

En 1156, Guillaume d'Acquigny succède à Robert comme prieur et reste jusqu'en 1162, année durant laquelle il est remplacé par Hervé. Succèdent à ce dernier Eustache en 1165, Ouen en 1171, puis Osbern. En 1175, celui-ci obtient du comte Robert de Meulan une charte très étendue concédant au prieuré des privilèges importants. Parmi ceux-ci, Robert accorde aux religieux le privilège de pressurer leur récolte au pressoir de Vaux et de transporter librement le vin à travers son domaine[9]. En 1179, Osbern devient abbé du Bec et est remplacé comme prieur à Beaumont par Robert d'Orvaux. Ce dernier achète le pourpris de Beaudoin le chapelain. En 1180, Robert de Meulan confirme cette acquisition et octroie une charte très solennelle dans laquelle il permet la construction d'un nouveau moulin à Beaumont. D'autres donations sont faites au cours des décennies qui suivent : par Robert de Meulan entre 1182 et 1190, Richard Cœur de Lion en 1190, Gilbert de Bigards en 1195, etc. En 1199, le pape Célestin confirme par une bulle les pensions dont les moines du Bec jouissent sur les églises Saint-Nicolas et Saint-Léonard de Beaumont et sur Saint-Pierre de Beaumontel[6].

En 1258, Saint Louis passe par Beaumont et afferme aux religieux du prieuré, des vignes sises près du château de la ville[3].

En 1307, Philippe IV le Bel accorde aux religieux du Bec et de Beaumont le privilège de relever directement de la couronne, de transporter, vendre et acheter dans tout le royaume des marchandises exemptes de tous droits[3].

De la fin du XVIe siècle jusqu'à la Révolution, le nombre de religieux occupant les lieux est très bas. Ainsi, en 1580, les moines ne sont que quatre. En 1634, seuls un prieur et deux chanoines sont présents. Enfin, en 1789, à la veille de la Révolution, avant que le prieuré ne soit dévasté, il ne reste que deux chanoines[3],[5].

Après la Révolution, les commerçants rouennais effectuent les réparations nécessaires à la conservation de l'édifice. Ils débouchent les croisées remplies de moellons et consolident les bâtiments à l'aide de matériaux provenant du château du président du Parlement de Rouen[3].

Liste non exhaustive des prieurs
Nom du commandeur Dates
Robert 1142-1156
Guillaume d'Acquigny 1156-1162
Hervé 1162-1165
Eustache 1165-1171
Ouen 1171-?
Osbern ?-1179
Robert d'Orvaux 1179-Début du XIIIe
Arnoul Début du XIIIe-1217
Raoul de la Chapelle 1217-1234
Robert de Fourques 1234-1253
Jean d'Auvillars 1253-1262
Guillaume de Lisieux 1300-?
Robert de Rabu 1367-1386
Chrétien de Trouart 1386-?
Dom Robert d'Évreux 1479-?
Lyonnet le Lou 1522-1557
Oger de Chambray 1557-1587
Marien de Martinbos 1587-?
Jean-Baptiste Jubert
grand vicaire de l'évêque d'Évreux
avant 1724

De la fabrique au monument historique (XIXe et XXe siècles)[modifier | modifier le code]

En 1820, l’édifice devient la propriété de l'industrie textile. Les bâtiments sont tour à tour transformés en une filature de coton, une fabrique de rubans et une manufacture de draps[3],[5].

En 1847, le prieuré de la Trinité est proposé à la ville pour la somme de 7 000 francs. Toutefois, la majorité du conseil l'adjuge à un homme qui va le détruire afin de récupérer les matériaux et les vendre. C'est ainsi que de nombreuses maisons de Beaumont-le-Roger ont été construites avec les pierres du prieuré[3].

En 1855, un incendie ravage les installations[5].

En 1862, M. Lenormand empêche la démolition totale du prieuré en le rachetant au nom de la société des antiquaires de Normandie. Toutefois, quelques années plus tard, une partie des murailles de soutènement est démolie pour l'élargissement de la route qui mène vers Brionne[3].

En 1916, le prieuré est classé au titre des monuments historiques. Il est aujourd'hui la propriété de l’État[3].

Description[modifier | modifier le code]

L'accès aux ruines se fait par une longue galerie voûtée dont la muraille est flanquée de contreforts massifs. Ceux-ci ont été rendus nécessaires par l'emplacement de l'édifice à flanc de coteau. En effet, cette position a conduit nécessairement à creuser dans le coteau et, par conséquent, oblige à soutenir le terrain par des murailles elles-mêmes « étançonnées par d'énormes piliers en pierre à la hauteur de quarante à quarante-trois pieds »[3].

Cette galerie, qui a été modifiée et restaurée à la fin du XVe siècle, est précédée d'un porche. Remanié au XIIIe siècle, celui-ci devait servir de poterne au château fort bâti au-dessus du prieuré[4].

Les vestiges les plus importants sont ceux de l'église priorale. Celle-ci date du XIIIe siècle et a été construite sur un plan rectangulaire. Elle s'achève à l'est par un chevet plat percé d'une grande et large baie. L'ensemble de l'édifice est divisé en huit travées éclairées par des hautes fenêtres en tiers point. Le mur nord est orné intérieurement sur toute sa longueur par des arcatures aveugles, assez profondes pour avoir servi de sièges aux moines. Accolés au pignon occidental, se dressent les restes de la salle capitulaire. Enfin, la base du clocher, qui a été édifié au XIVe siècle, flanque extérieurement le mur nord de l'église.

Protection aux monuments historiques[modifier | modifier le code]

Au titre des monuments historiques[10] :

  • les restes appartenant à l’État sont classés par arrêté du  ;
  • les anciens jardins et logement du deuxième desservant, la maison contemporaine qui y est construite situés l'Abbaye ainsi que les trois parcelles de bois contiguës situées Bruyère de Beaumont sont inscrits par arrêté du .

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. « Le pays d'Ouche », sur Atlas des paysages de la Haute-Normandie (consulté le ).
  2. Anne-Marie Flambard Héricher (préf. Vincent Juhel), Le château de Vatteville et son environnement, de la résidence comtale au manoir de chasse royal, XIe – XVIe siècle, vol. Mémoire de la Société des antiquaires de Normandie, t. XLVIII, Caen, Société des antiquaires de Normandie, , 393 p. (ISBN 978-2-919026-27-2), p. 54.
  3. a b c d e f g h i j k l et m Cathy Emma et Poulain France ; service territorial de l'architecture et du patrimoine de l'Eure (DRAC Normandie). Le prieuré de la Sainte-Trinité de Beaumont-le-Roger : historique complet, in : Connaissance no 4 – 28 avril 2014. En ligne - Consulté le 16 juillet 2023.
  4. a b c et d Jean-Marie Pérouse de Montclos, Le patrimoine en Normandie, Éditions Place des victoires, , 495 p. (ISBN 978-2-8099-1056-8), p. 72.
  5. a b c d e et f « Dominant la ville de Beaumont le Roger, le Prieuré de la Sainte Trinité », sur Site de Beaumont-le-Roger (consulté le ).
  6. a b c d e f g h et i Charpillon et Caresme A., Dictionnaire historique de toutes les communes du département de l'Eure : histoire, géographie, statistique, Volume 1, 1868, p. 960
  7. Deans of Lincoln, British History Online.
  8. M. Hermant, Histoire du diocèse de Bayeux, première partie contenant l'histoire des évêques, Chez Pierre F. Doublet, Caen, 1705, p. 169-177.
  9. Flambard Héricher 2023, p. 55.
  10. « Ancienne abbaye », notice no PA00099324, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Bibliographie[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]