Fabrice Burgaud
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Fabrice Burgaud, né le 23 octobre 1971 à Niort (Deux-Sèvres), est un magistrat français connu pour avoir instruit l'affaire d'Outreau. Figure clivante[1], il est le symbole du fiasco judiciaire d'Outreau pour certains, alors qu'il est pour d'autres victime du système médiatique qui en a fait un bouc émissaire en reprenant le discours de défense des acquittés[2].
Carrière
[modifier | modifier le code]Formation et début de carrière
[modifier | modifier le code]Il a d'abord intégré l'Institut d'études politiques de Bordeaux, avant de travailler dans une société de conseil. Il est reçu à l'École nationale de la magistrature (ENM) en janvier 1996, et en sort en 2000, 91e sur 161.
Nommé le 1er septembre 2000 juge d'instruction au tribunal de grande instance de Boulogne-sur-Mer, il hérite de l'enquête sur l'affaire de pédophilie dite d'Outreau par le hasard du tableau de permanence, quelques mois après son arrivée, âgé de 29 ans.
Avant que le dossier d'Outreau ne devienne un scandale, Fabrice Burgaud est nommé au parquet de Paris, où le procureur de Paris Yves Bot l'affecte, en juillet 2002, à la section antiterroriste. De ce fait, le magistrat se trouve muté à Paris alors que l'instruction de l'affaire d'Outreau n'est pas encore terminée. C'est son successeur qui signera, le 13 mars 2003, l'ordonnance de mise en accusation devant la cour d'assises.
En 2004, alors que le scandale naît et s'amplifie, il est muté à la section de l'exécution des peines. Traqué par les photographes, injurié dans des lettres anonymes, le juge Burgaud est sous protection policière et prend deux avocats, Jean-Yves Dupeux et Patrick Maisonneuve. Devant ses interlocuteurs, il a soutenu qu'il n'avait fait que son travail et entendait bien rester dans la magistrature.
L'affaire d'Outreau
[modifier | modifier le code]Audition devant la commission parlementaire
[modifier | modifier le code]Le 8 février 2006, Fabrice Burgaud est auditionné par les parlementaires pour faire le point sur ses actions en tant que juge d'instruction durant l'affaire d'Outreau. L'évènement est relayé par plusieurs chaînes de télévision (entre autres TF1, France 2, LCI et La Chaîne parlementaire) et les radios.
Le juge Burgaud dit dès le début : « Aujourd'hui, peut-être plus que tout autre, je peux sentir leur souffrance [des acquittés, dont certains étaient présents dans la salle d'audition], me représenter ce qu'ils ont vécu, l'enfermement, la séparation d'avec des êtres chers, leur honnêteté contestée… Je suis entièrement responsable de mon instruction et je ne souhaite pas éluder ma responsabilité »[3].
Le magistrat s'est dit choqué d'avoir été présenté comme une machine à appliquer le droit : « Je ne suis pas la personne qu'on a décrite et je n'ai pas tenu certains propos qu'on m'a prêtés. Avec le recul et la connaissance que j'ai aujourd'hui de l'affaire, j'aurais pu instruire autrement. J'ai peut-être commis des erreurs d'appréciation mais quel juge d'instruction n'en commet pas ? » Il évoque au passage la pression médiatique qui a pesé sur lui, le caractère solitaire de la mission du juge et le fait qu'aucun membre de sa hiérarchie ne lui a dit qu'il faisait « fausse route à l'époque de l'instruction »[4].
Il explique ses études, ses débuts en tant que juge, et son enquête, les difficultés qu'il a rencontrées pour trouver des preuves, et précise la nature des témoignages. Il avoue également ses faiblesses et son manque d'expérience pour prendre en charge une affaire d'une telle ampleur, mais n'estime pas être le seul coupable dans ce dysfonctionnement.
Le lendemain, les médias le décrivent comme embarrassé, peu convaincant et écrasé par l'énorme pression et les menaces[5],[6],[7],[8].
La presse a rapporté qu'à l'occasion de cette enquête, l'intéressé n'a ni présenté des excuses ni formulé de regrets[9],[10].
Sanction
[modifier | modifier le code]Le 24 avril 2009, le Conseil supérieur de la magistrature inflige une « réprimande avec inscription au dossier » au juge Burgaud, la plus faible sanction possible[11]. Sa défense envisage un recours auprès du Conseil d'État[12],[13], avant de renoncer définitivement à tout recours le 13 juillet 2009.
Suite de la carrière
[modifier | modifier le code]Le 1er septembre 2011, Fabrice Burgaud a été nommé magistrat du premier grade à la Cour de cassation, en qualité d'auditeur, c'est-à-dire chargé de préparer les dossiers soumis à la Cour[14],[15]. Il est responsable du bureau de droit européen au Service de documentation, des études et du rapport (SDER)[16].
Par décret du 21 décembre 2017[17], Fabrice Burgaud est promu avocat général référendaire à la Cour de cassation, il est affecté à la troisième chambre civile[18],[19].
En 2013 le documentaire Outreau, l'autre vérité apporte des éléments favorables au juge Burgaud dans son rôle au sein de l'affaire[20].
En 2024, un documentaire Netflix sur l'affaire "Outreau, un cauchemar français" montre la première interview du juge Burgaud depuis la fin de l'affaire. Dans ce documentaire, le juge ne montre aucun remord, ni regret, et semble toujours douter de l'innocence des acquittés[21]. Il va néanmoins diriger ses pensées « aux victimes, […] qui ont été négligées » selon lui.
Notes et références
[modifier | modifier le code]- « Même sanctionné, le juge Burgaud divise »
- « Outreau : pour le Net, Burgaud n'est qu'un « juge émissaire » »
- Le Temps
- La Libre Belgique
- Le Figaro
- Le Monde
- Libération
- Les Échos
- La Voix du Nord
- RTL
- Décision du CSM sur le blog Journal d'un avocat.
- Gilles Gaetner, La réprimande du juge Burgaud, L'Express, 24 avril 2009
- Laurence de Charette, Outreau : le juge Burgaud écope d'un blâme, Le Figaro, 24 avril 2009
- Décret du 6 juillet 2011 portant nomination (magistrature)
- Voir article de La Croix.
- Organigramme du SDER
- Décret du 21 décembre 2017 portant nomination (magistrature) (lire en ligne)
- « Audience solennelle d’installation du lundi 22 janvier 2018 | Cour de cassation », sur www.courdecassation.fr (consulté le )
- « Troisième chambre civile | Cour de cassation », sur www.courdecassation.fr (consulté le )
- « Procès d'Outreau, entre défense et vérité »
- « Outreau sur Netflix : l'effarante absence d'autocritique des acteurs de la catastrophe », sur Le Figaro, (consulté le )
Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Justice et politique : le couple infernal - par Patrick Maisonneuve, Paris, Plon, 2015, (ISBN 9782259229869).
- La Méprise : l'affaire d'Outreau - par Florence Aubenas, Éditions du seuil, 2005, (ISBN 978-2-7578-2010-0).
- Outreau : la vérité abusée, 12 enfants reconnus victimes - par Marie-Christine Gryson-Dejehansart, Paris, éd. Hugo et Cie, 2009, 263 p., réédité en livre numérique, version augmentée en 2015, (ISBN 2755603496).
- Que Dieu ait pitié de nous - par l'Abbé Dominique Wiel, témoignage sur l'affaire d'Outreau, Oh! éditions, (ISBN 2-915056-43-9).
Filmographie
[modifier | modifier le code]- Outreau, l'autre vérité, documentaire (2013) de Serge Garde
- Outreau, notre histoire (2011), documentaire de Rémi Lainé
- Présumé coupable (2011), film de fiction à propos d'Outreau, avec Philippe Torréton jouant le rôle d'Alain Marécaux.
- Outreau : Un cauchemar français (2024) mini-série documentaire revenant sur l'affaire d'Outreau.
Articles connexes
[modifier | modifier le code]- Affaire d'Outreau
- Outreau, l'autre vérité, documentaire