Dermacentor marginatus

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Dermacentor marginatus est une espèce de tiques de la famille des Ixodidae[1], qui est vectrice de plusieurs maladies zoonotiques dont des rickettsioses [2],[3],[4],[5], ce pourquoi cette tique est considérée comme posant des risques écoépidémiologiques et de santé publique particuliers pour l'Homme[6].

Description[modifier | modifier le code]

Habitat et répartition[modifier | modifier le code]

D. marginatus est thermophile (c'est-à-dire qu'elle recherche les milieux chauds) vit sur le pourtour méditerranéen. Elle habite généralement les steppes, les steppes alpines, les steppes forestières et les zones semi-désertiques. L'espèce est répartie de l'Afrique du Nord à l'Europe centrale jusqu'en Iran, au Kazakhstan et dans les zones montagneuses d'Asie centrale. Elle est présente entre les latitudes du 33e et du 51e parallèle nord de l'ouest du Paléarctique[7],[8].

En France, elle peut être trouvée jusqu’à 1 000 m d’altitude sur tout le territoire, hormis en zones froides. C'est plutôt une espèce des milieux ouverts et secs : Poitou, Aquitaine, Midi-Pyrénées, Midi méditerranéen et Corse[9].

Elle fait partie des espèces qui pourraient être favorisées par le réchauffement climatique qui lui permettrait de remonter vers le nord, mais aussi en altitude[10].

Espèces hôtes[modifier | modifier le code]

Les tiques adultes ont un large spectre d'hôtes et piquent occasionnellement les humains. Il semble que les principaux hôtes des adultes soient les moutons[11]. Les autres hôtes domestiques sont les chiens, les vaches, les chèvres et les chevaux. Les animaux sauvages hôtes sont le cerf, le lièvre, le hérisson, le loup et le sanglier. Les larves et les nymphes se nourrissent principalement de petits mammifères[12], mais des oiseaux sont également cités comme hôtes[13].

Un animal comme le sanglier peut véhiculer cette tique sur plusieurs dizaines de km lors de ses déplacements[14].

Cycle de vie[modifier | modifier le code]

Le cycle de vie de D. marginatus comprend trois repas sanguins. Les femelles adultes engorgées en automne entrent en diapause et ne pondent leurs œufs qu'au printemps suivant, plus ou moins en même temps que les femelles engorgées au début du printemps. Les larves et les nymphes engorgées se développent directement vers le stade de vie suivant sans diapause, ce qui donne une génération complète de l'œuf à la tique adulte en un an. Ainsi, le développement de l'œuf à la tique adulte peut avoir lieu en une seule saison de végétation. Ce cycle complet annuel n'est pas possible au delà d'une limite nord correspondant au sud de l'Allemagne, le long du Rhin et du Main, où les températures sont suffisamment élevées pour cette tique thermophile[10].

Les tiques adultes sont actives au printemps et au début de l'été ainsi qu'en automne ; les nombres les plus élevés de D. marginatus signalés l'ont été en février et mars, ce qui coïncide avec le maximum de cas de maladies liées à cette espèce[15]

Vecteur de maladie[modifier | modifier le code]

Lors d'une étude basée sur l'analyse du portage de rickettsies chez 70 tiques Dermacentor marginatus trouvées sur des sangliers et cochons d'élevage d'octobre et novembre 2000 dans le Sud de la France, le pathogène émergent Rickettsia slovaca a été identifié dans 11 tiques (15,7 % du total). De plus, cette étude a mis en évidence un nouveau génotype de Rickettsia (1,4% de l'échantillon) dont la pathogénicité doit encore être étudiée.

Également à titre d'exemple plusieurs souches de ricketsies responsables de la "Rocky Mountain spotted fever" ont été détectées en Europe centrale et de l'Est chez D. marginatus dès les années 1960[16].

Cette espèce est aussi susceptible de véhiculer des fièvres pourprées (maladie proche du typhus[17] (dont en France et en Allemagne[17]) ou encore la fièvre hémorragique de Crimée-Congo[18] dans des régions où les changements environnementaux anthropiques ont pu favoriser l'expansion des tiques (constatée dans de nombreuses forêts et régions anthropisées)[18].

Classification[modifier | modifier le code]

On s'est demandé si cette espèce pouvait se croiser avec une espèce morphologiquement proche Dermacentor reticulatus, mais des preuves génétiques et expérimentales (tentatives de croisements artificiels) ont à la fin conclu que non ; ces deux espèces sont bien deux entités taxonomiquement différentes[19].

Synonymie[modifier | modifier le code]

L'espèce a été initialement classée dans le genre Acarus sous le protonyme Acarus marginatus Sulzer, 1776[20].

Dermacentor marginatus a pour synonymes[20] :

  • Acarus marginatus Sulzer, 1776
  • Cynorhaestes marginatus Schulze, 1929
  • Dermacentor antrorum Reznik, 1950
  • Dermacentor antrorum Santos Dias, 1963
  • Dermacentor aulicus Roman & Jehl, 1948
  • Dermacentor dentipes Koch, 1844
  • Dermacentor gynaecoides Olenev, 1927
  • Dermacentor lacteolus Schulze, 1933
  • Dermacentor longicoxalis Olenev, 1927
  • Dermacentor marginatus subsp. lacteolus Schulze, 1933
  • Dermacentor marginatus subsp. longicoxalis Pomerantsev & Matikashvili, 1940
  • Dermacentor marginatus subsp. rotundicoxalis Pomerantsev & Matikashvili, 1940
  • Dermacentor marginatus Camicas et al., 1998
  • Dermacentor parabolicus Koch, 1844
  • Dermacentor reticulatus subsp. aulicus Hirst, 1916
  • Dermacentor rotundicoxalis Olenev, 1927
  • Dermacentor silvarum Olenev, 1931
  • Dermacentor variatus Oudemans, 1936
  • Haemaphysalis marmorata Berlese, 1888
  • Ixodes hungaricus Karpelles, 1893
  • Ixodes marginatus Fabricius, 1805
  • Ixodes marmoratus Risso, 1826

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Référence Classification de Hallan
  2. Beati, L., Humair, P. F., Aeschlimann, A., & Raoult, D. (1994). Identification of spotted fever group rickettsiae isolated from Dermacentor marginatus and Ixodes ricinus ticks collected in Switzerland. The American journal of tropical medicine and hygiene, 51(2), 138-148 (http://europepmc.org/abstract/med/7915498 résumé]).
  3. Beati, L., Finidori, J. P., & Raoult, D. (1993). http://europepmc.org/abstract/med/8095380 First isolation of Rickettsia slovaca from Dermacentor marginatus in France]. The American journal of tropical medicine and hygiene, 48(2), 257-268.
  4. Selmi, M., Bertolotti, L., Tomassone, L., & Mannelli, A. (2008). https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2600248/ Rickettsia slovaca in Dermacentor marginatus and tick-borne lymphadenopathy], Tuscany, Italy. Emerging infectious diseases, 14(5), 817.
  5. Baden-Wuerttemberg, L. (1976). Rickettsia slovaca in Dermacentor marginatus ticks, Germany. Tropenmed Parasitol, 27, 393-404.
  6. Nosek J (1972) The ecology and public health importance of Dermacentor marginatus and D. reticulatus ticks in Central Europe. Folia parasitologica, 19(1), 93.
  7. Jorge Alonso-Carné, Alberto García-Martín et Agustin Estrada-Peña, « Systematic errors in temperature estimates from MODIS data covering the western Palearctic and their impact on a parasite development model », Geospatial health, vol. 8, no 1,‎ , p. 1 (ISSN 1970-7096 et 1827-1987, DOI 10.4081/gh.2013.49, lire en ligne, consulté le )
  8. (en) Franz Rubel, Katharina Brugger, Martin Pfeffer et Lidia Chitimia-Dobler, « Geographical distribution of Dermacentor marginatus and Dermacentor reticulatus in Europe », Ticks and Tick-borne Diseases, vol. 7, no 1,‎ , p. 224–233 (DOI 10.1016/j.ttbdis.2015.10.015, lire en ligne, consulté le )
  9. France Lyme, consulté 2015-07-11
  10. a et b (en) Melanie Walter, Katharina Brugger et Franz Rubel, « The ecological niche of Dermacentor marginatus in Germany », Parasitology Research, vol. 115, no 6,‎ , p. 2165–2174 (ISSN 0932-0113 et 1432-1955, PMID 26993325, PMCID PMC4863919, DOI 10.1007/s00436-016-4958-9, lire en ligne Accès libre, consulté le )
  11. (de) Liebisch A, Rahman M S, « Prevalence of the ticks Dermacentor marginatus (Sulzer, 1776) and Dermacentor reticulatus (Fabricius, 1794) and their importance as vectors of diseases in Germany », Tropenmed Parasitol, vol. 27,‎ , p. 393–404
  12. (en) Petney T N, Pfäffle M P, Skuballa J D, « An annotated checklist of the ticks (Acari: Ixodida) of Germany », Syst Appl Acarol, vol. 17,‎ , p. 115–170 (lire en ligne Accès libre)
  13. (en) Farkas R, Estrada-Peña A, Jaenson T G T, Pascucci I, Madder M, « Basic biology and geographical distribution of tick species involved pathogens, including zoonoses. », dans Salman M, Tarrés-Call J (eds) Ticks and Tick-borne Diseases, CAB International, , p. 6–26
  14. Sanogo, Y. O., Davoust, B., Parola, P., Camicas, J. L., Brouqui, P., & Raoult, D. (2003). Prevalence of Rickettsia spp. in Dermacentor marginatus ticks removed from game pigs (Sus scrofa) in southern France. Annals of the New York Academy of Sciences, 990(1), 191-195 (lire en ligne).
  15. (en) José A. Oteo et Aránzazu Portillo, « Tick-borne rickettsioses in Europe », Ticks and Tick-borne Diseases, vol. 3, nos 5-6,‎ , p. 271–278 (DOI 10.1016/j.ttbdis.2012.10.035, lire en ligne, consulté le )
  16. Brezina, R., Rehacek, J., Ac, P., & Majerska, M. (1969). Two strains of rickettsiae of Rocky Mountain spotted fever group recovered from Dermacentor marginatus ticks in Czechoslovakia. Results of preliminary serological identification. Acta virologica, 13(2), 142.
  17. a et b Rehacek, J., Liebisch, A., Urvölgyi, J., & Kovacova, E. (1977). Rickettsiae of the spotted fever isolated from Dermacentor marginatus ticks in South Germany. Zentralblatt fur Bakteriologie, Parasitenkunde, Infektionskrankheiten und Hygiene. Erste Abteilung Originale. Reihe A: Medizinische Mikrobiologie und Parasitologie, 239(2), 275-281. (résumé)
  18. a et b Hoogstraal, H. (1979). Review Article: The Epidemiology of Tick-Borne Crimean-Congo Hemorrhagic Fever in Asia, Europe, and Africa. Journal of medical entomology, 15(4), 307-417.
  19. Zahler M & Gothe R (1997) Evidence for the reproductive isolation of Dermacentor marginatus and Dermacentor reticulatus (Acari: Ixodidae) ticks based on cross-breeding, morphology and molecular studies. Experimental & applied acarology, 21(10), 685-696 (résumé)
  20. a et b GBIF Secretariat. GBIF Backbone Taxonomy. Checklist dataset https://doi.org/10.15468/39omei accessed via GBIF.org, consulté le 17 avril 2023

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Références taxonomiques[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

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Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • C. L. Koch, 1844 : Systematische Übersicht über die Ordnung der Zecken. Archiv Für Naturgeschichte, Berlin, vol. 10, p. 217–239 (texte intégral).
  • Zahler M & Gothe R (1997) Evidence for the reproductive isolation of Dermacentor marginatus and Dermacentor reticulatus (Acari: Ixodidae) ticks based on cross-breeding, morphology and molecular studies. Experimental & applied acarology, 21(10), 685-696 (résumé).