Aller au contenu

Cola acuminata

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Fleurs femelles (à gauche) et mâles (à droite) de Cola acuminata (Jardin botanique de Rio de Janeiro.

Cola acuminata est un arbre de la famille des Sterculiacées (classification classique) ou des Malvacées (classification phylogénétique), originaire d'Afrique tropicale. C'est une des espèces de kolatiers qui produisent la noix de kola, au goût amer, très prisée en Afrique tropicale, pour ses vertus stimulantes et ses valeurs symboliques.

Il est appelé Faux colatier ou Cola mâle en français[1], ou plus simplement par le terme générique de Kolatier.

Histoire de la nomenclature

[modifier | modifier le code]

Après les premiers grands voyageurs européens, plusieurs botanistes pré-linnéens ont fait mention d'un fruit nommé Cola, très apprécié par certaines populations africaines. Ainsi, le naturaliste suisse Gaspard Bauhin le décrit dans Pinax (1596) d'après le récit de l'explorateur Filippo Pigafetta dans le Le Royaume de Congo et les contrées environnantes[2] (1591).

Malgré ces nombreuses mentions, Linné n'a pas jugé souhaitable d'introduire de kolatiers dans Species plantarum[3] (1753).

Le premier descripteur botanique est le naturaliste Palisot de Beauvois, qui part en Afrique en 1786 où il collecte un grand nombre de plantes et d'insectes, dans des régions jusque-là inconnues comme le Bénin. Parmi les espèces qu'il décrit se trouve le kolatier qu'il nomme Sterculia acuminata (Flore d'Oware et de Bénin[4]). « L'amande est d'un rouge tendre, tirant un peu sur le violet ; on la nomme, dans le pays, Kola ou Cola ».

Au début du XXe siècle la systématique des espèces de colatiers est très confuse[5]. Ce n'est qu'avec les travaux de Auguste Chevalier et Émile Perrot[6] (1911) qu'un peu d'ordre est mis dans la taxonomie. En 1932, les botanistes Schott et Endlicher créent le genre Cola auquel ils rapportent Sterculia acuminata.

Étymologie : le terme de cola a été emprunté à un dialecte d'Afrique de l'Ouest, le temne (Sierra Leone), où la noix de kola se dit kla[7] gola ou kola[8].

Orthographe: les deux orthographes cola et kola (ou de même colatier et kolatier) sont valides en français[9].

Description

[modifier | modifier le code]
Cola acuminata
au milieu : 1) pistil (à gauche) 2) colonne d'étamines et pistil (à droite),
en bas à droite : une capsule à 5 follicules en étoile.

Cola acuminata est un arbre de 7 à 13 m atteignant parfois 20 m de haut et un diamètre de 50 cm. Il comporte une cime large et un feuillage dense. L'écorce du tronc s'exfolie en plaques plus ou moins carrées[1].

Les feuilles simples, alternes sont oblongues, obovales à elliptiques atteignant 34 × 11 cm, avec un apex acuminé.

L'inflorescence est en panicules de cymes, portant des fleurs mâles et hermaphrodites, avec 5-7 sépales jaunâtres striés de pourpre, soudés à la base et pas de pétale. Les 20 anthères sont en double couronne autour d'une colonne et au centre le gynécée est formé de 5 à 7 carpelles[1]. Il peut aussi y avoir des fleurs mâles, femelles et hermaphrodites sur le même arbre[10].

Le fruit est une capsule à 1-6 follicules attachés en étoiles, coriaces ou ligneux, ovoïdes, roux, de 10-20 cm de long, à bec bien marqué. Il y a 1 à 12 graines par follicule, entourées d'un arille blanc ou rouge, formées en général de 4-6 cotylédons charnus, anguleux, roses à rouges.

Dans la langue commune, un follicule (issu d'un seul carpelle) s'appelle une « cabosse » ; on dit aussi à propos des graines que la noix de la « petite kola » (Cola acuminata), de couleur rose à rouge, se divise en 4 à 6 morceaux irréguliers (« kola quart »), à la différence de la noix de la « grande kola » (Cola nitida), de couleur blanc-jaunâtre à rouge, qui ne se divise qu'en deux (« kola demi »). La récolte se fait deux fois par an[11]. Au Cameroun, la petite kola porte des fruits mûrs entre octobre et décembre et la grande kola, entre avril et juin[12],[5]. En Côte d'Ivoire, l'entrée en production du colatier (Cola nitida) intervient sur deux grandes périodes[13] :

  • la petite récolte se produit au cours des mois d'avril-mai
  • la grande récolte a lieu pendant les mois d'octobre-novembre
Clés distinctives de Cola nitida et Cola acuminata[5]
Cola nitida Cola acuminata
Cabosse boursouflée, incurvée, verte, douce au toucher assez droite, roux, rugueuse au toucher
Graines
noix de kola
deux cotylédons plus que 2 cotylédons, gén. quatre
Récolte d'octobre à décembre d'avril à juin

Distribution

[modifier | modifier le code]

Cola acuminata est une espèce originaire d'Afrique tropicale ; elle est spontanée en Afrique centrale : Angola, Bénin, Nigeria, Togo, Cameroun, Gabon, Guinée équatoriale, Congo (RDC, Zaire)[14].

Elle a été introduite en Afrique de l'Ouest et probablement en Amérique.

Elle se rencontre dans les savanes humides et dans les zones forestières. Elle est largement cultivée.

Les parties les plus utilisées sont les graines (ou noix de cola) et les écorces. Pour être consommée, la graine est débarrassée de son tégument.

La noix de cola entre dans la composition de boissons.

Au Cameroun, la kola est un fruit récolté dans les forêts, les cacaoyères et sur des kolatiers domestiqués ; mais il n'existe pas de plantation exclusive de kolatiers[15]. La kola fait l'objet d'un commerce important tant à l'intérieur du pays qu'avec les pays voisins.

Composition

[modifier | modifier le code]

Les premiers à en étudier la composition sont Heckel & Schlagdenhauffen (1882[16], 1883[17], 1884[18], 1888[19], 1890[20],[21],[22], 1892[23], 1893[24]), qui découvrent le rouge de cola et vulgarisent l'usage du cola en médecine européenne[25].

On en tire des principes actifs excitants parmi lesquels on retrouve la caféine et la kolatéine. La noix de cola de Cola nitida est plus riche en caféine (jusqu'à 3,5 %) que celle de Cola acuminata (2,2 %)[10]. La caféine forme une association moléculaire avec des dérivés catéchiques.

Les noix de cola (la graine sans le tégument) de Cola acuminata ont un contenu phénolique total plus faible que celles de Cola nitida, ce qui explique qu'elles soient moins astringentes.

On note aussi la présence de polyphénols, surtout des flavan-3-ols : (+)-catéchol, (-)-épicatéchol et proanthocyanidols dimères du groupe B[26].

La noix de cola renferme[11] :

Glucides Protides Eau Lipides Matières minérales Tanins Fibres
30 à 40 % 8 à 12 % 10 à 12 % 0,6 à 8 % 2 à 4 % 3 % 1,4 %

Masticatoire

[modifier | modifier le code]

De la cabosse (follicule), on extrait des graines (noix de cola) à plusieurs cotylédons. Ce sont ces derniers qui sont mâchés pour leurs vertus stimulantes et comme coupe-faim.

Ils sont aussi utilisés dans des cérémonies rituelles au Cameroun (mariages, naissances, cérémonies funéraires). Lors des cérémonies de mariage, des noix de cola sont offertes par l'époux à la belle famille[1]. Chez les Bamiléké, la kola est un signe d'amour et d'amitié[15]. Au Soudan, son offrande est signe de paix[8].

Médecine indigène

[modifier | modifier le code]

Les feuilles, les fruits et les racines sont utilisés comme tonique ou contre la dysenterie, la diarrhée[1]. La noix de kola est réputée aphrodisiaque.

La noix de cola entre dans la composition de vin, sirops, bonbons, chocolats et pâtisserie.

À l'origine, le coca-cola en contenait aussi. Suivant son inventeur, Pemberton, sa boisson « est composée d'un extrait de feuilles péruviennes de coca, du plus pur des vins et de noix de cola », mais ce n'est plus le cas désormais[27].

Notes et références

[modifier | modifier le code]
  1. a b c d et e Oscar Eyog Matig, Ousseynou Ndoye, Joseph Kengue et Abdon Awono (éds.), Les fruitiers forestiers comestibles du Cameroun, Bioversity International / International Plant Genetic Resources Institute, , 204 p. (ISBN 92-9043-707-3, lire en ligne [PDF] sur doc-developpement-durable.org), p. 155.
  2. Filippo Pigafetta, Duarte Lopes, Le Royaume de Congo & les contrées environnantes (1591), éditions Chandeigne, (lire en ligne).
  3. {{BHL}} : numéro de référence (359209#page/629) non numérique
    {{BHL}} : paramètres non nommés, surnuméraires, ignorés.
  4. Palisot de Beauvois, Flore d'Oware et de Bénin, en Afrique, impr. Fain jeune & Cie, (lire en ligne [sur biodiversitylibrary.org]), p. 41.
  5. a b et c (en) Emmanuel Tachie-Obeng and Nick Brown, « Cola nitida & Cola acuminata, A State of Knowledge Report undertaken for The Central African Regional Program for the Environment », dans Clark LE. Sunderland TCH., The key non timber forest products of Central Africa : state of the knowledge, USAID, (lire en ligne [PDF] sur doc-developpement-durable.org).
  6. Auguste Chevalier et Émile Perrot, Les Kolatiers et les noix de Kola, éd. Augustin Challamel, coll. « Végétaux utiles de l'Afrique tropicale française » (no 6), , 16 pl. + 483 (lire en ligne [sur bibdigital.rjb.csic.es]).
  7. (en) Ernest Small, Top 100 Food Plants, NRC Research Press, , 636 p..
  8. a et b (en) Paul Lovejoy (en), chap. 5 « Kola nuts, The 'coffee' of central Sudan », dans Jordan Goodman, Andrew Sherratt et Paul E. Lovejoy, Consuming Habits: Drugs in History and Anthropology, Routledge, (réimpr. 2005) (1re éd. 1995), 256 p. (ISBN 0415090393, présentation en ligne).
  9. « Cola, Kola », sur cnrtl.fr (consulté en ).
  10. a et b (en) T.K. Lim, Edible Medicinal And Non Medicinal Plants, vol. 3 : Fruits, Springer Science & Business Media, , 898 p..
  11. a et b Mickaël Albert, La noix de kola (Cola sp., Sterculiacées) (thèse de doctorat en pharmacie), Université de Nantes, faculté de pharmacie, , 213 p. (lire en ligne [sur docplayer.fr]).
  12. « Le Kolatier Cola acuminata et Cola nitida - noix de kola » [PDF], World Agroforestry Centre (consulté en ).
  13. Jérôme Aloko-N'Guessan, « Cola, espace et sociétés : étude de géographie sociale et culturelle de la filière de la cola au marché de Gros Baouké », rev. CAMES (Université de Cocody, Abidjan, Côte d'Ivoire), vol. 2, série B,‎ , p. 25-35 (voir p. 27) (lire en ligne [PDF], consulté en ).
  14. (en) Référence GRIN : espèce Cola acuminata (P. Beauv.) Schott & Endl. .
  15. a et b « Kola (Cola acuminata) » [PDF], sur cifor.org, CIFOR Central Africa (consulté en ).
  16. [Heckel & Schlagdenhauffen 1882] Édouard Heckel et Frédéric Charles Schlagdenhauffen, « Sur la noix de kola, ou gourou, ou ombéné (graines de Sterculia acuminata, Pal. de Bauvois) » (séance du 20 mars 1882), Comptes-rendus hebdomadaires des séances de l'Académie des sciences, t. 94,‎ , p. 802-805 (lire en ligne [sur gallica]).
  17. [Heckel 1883] Édouard Heckel, « Des kolas africains », Bulletin de la Société de géographie de Marseille, t. 7,‎ , p. 105-127 (lire en ligne [sur gallica]).
  18. [Heckel & Schlagdenhauffen 1884] Édouard Heckel et Frédéric Charles Schlagdenhauffen, Des kolas africains au point de vue botanique, chimique et thérapeutique, Paris, impr. C. Marpon et E. Flammarion, , 87 p. (lire en ligne [sur gallica])
    Mémoire récompensé par le prix Bussy de l'Association scientifique des pharmaciens de France (1883) et par le prix Barbier de l'Institut de l'Académie des sciences (1885).
    .
  19. [Heckel et Schlagenhauffen 1888] Édouard Heckel et Frédéric Charles Schlagdenhauffen, « Un faux kola nouveau. Recherches sur les graines de Pentadesma butyracea Don, qui fournissent le beurre de kanya et sur l'emploi de ces semences pour sophistiquer celles du kola (Sterculia acuminata Pal. de Beauv.) », Répertoire de pharmacie, t. 4, 3e série,‎ , p. 1-11 et 41-46 (lire en ligne [sur archive.org]).
  20. [Heckel 1890] Édouard Heckel, « Sur la caféine et les préparations de kola » (séance du 8 avril 1890. Réponse d'une critique de Germain Sée, et observation de Léon Colin. Voir aussi p. 413-417, « Sur les préparations de kola et la caféine », 2e échange opposant Heckel et Sée ; p. 433-436, 3e échange opposant Heckel et Sée ; et p. 509-511. échange opposant Dujardin-Beaumetz et Sée (Georges Dujardin-Beaumetz)), Bulletin de l'Académie de médecine, t. 23, 3e série,‎ , p. 392-396 (lire en ligne [sur gallica]).
  21. [Heckel 1890] Édouard Heckel, « Expériences comparatives concernant l'action du kola et de la caféine sur la fatigue et l'essoufflement déterminés par les grandes marches », Marseille médical,‎ , p. 586-598 (BNF 30585351, lire en ligne [PDF] sur odyssee.univ-amu.fr).
  22. [Heckel 1890] Édouard Heckel, « Sur l'action du kola, à propos des effets de la caféine », Bulletin général de thérapeutique médicale et chirurgicale, t. 118,‎ , p. 345-351 (lire en ligne [sur biusante.parisdescartes.fr]).
  23. [Heckel 1892] Édouard Heckel, « Sur la constitution chimique et l'action physiologique du Rouge de Kola ; comparaison avec la caféine », Répertoire de pharmacie, t. 4, 3e série,‎ , p. 433-439 (lire en ligne [sur books.google.fr]).
  24. [Heckel 1893] Édouard Heckel, Les kolas africains. Monographie botanique, chimique, thérapeutique, physiologique et pharmaceutique (emploi stratégique et alimentaire), Paris, Société d'éditions scientifiques, coll. « Annales de l'Institut botanico-géologique colonial de Marseille » (no 1), , 406 p. (présentation en ligne, lire en ligne [sur biodiversitylibrary.org]).
    Mémoire couronné par l'Institut (Académie des sciences) et par l'Association scientifique des Pharmaciens de France [1]
  25. Chevalier et Perrot 1911, p. 219.
  26. Bruneton, J., Pharmacognosie - Phytochimie, plantes médicinales, 4e éd., revue et augmentée, Paris, Tec & Doc - Éditions médicales internationales, , 1288 p. (ISBN 978-2-7430-1188-8).
  27. William Reymond, Coca-Cola, L'enquête interdite, Flammarion, , 433 p. (présentation en ligne).

Sur les autres projets Wikimedia :

Liens externes

[modifier | modifier le code]