Bible de Ferrare

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Bible de Ferrare
Image illustrative de l’article Bible de Ferrare
Frontispice de la Bible de Ferrare.

Auteur Abraham Usque (traducteur)
Genre Bible
Version originale
Langue Judéo-espagnol calque
Titre Biblia en Lengua Espagñola…
Éditeur Yom-Tob ben Levi Athias
Lieu de parution Ferrare
Date de parution 1553

La Bible de Ferrare est une Bible hébraïque publiée en 1553 à Ferrare, en Italie du Nord dans le delta du Pô. Elle était destinée aux Juifs chassés d'Espagne en application du décret de l'Alhambra du 29 avril 1492, parmi lesquels un nombre important s'étaient exilés dans des villes d'Italie du Nord prêtes à les accueillir, comme Livourne et Ferrare. Rédigée en ladino, dans sa version de judéo-espagnol calque (forme écrite servant à l'étude de la Torah), et écrite en caractères latins, elle s'inscrivait dans la tradition des traductions de la Bible de l'hébreu à l'espagnol pratiquées depuis assez longtemps par les Juifs de la péninsule ibérique.

Publication[modifier | modifier le code]

La Bible de Ferrare est publiée à Ferrare en 1553 dans un contexte favorable : la maison d'Este est à cette époque accueillante pour les Juifs Séfarades chassés d'Espagne, puis pour leurs descendants nouveaux-chrétiens qui décident de revenir à la religion juive et qui doivent de ce fait fuir à leur tour[1]. Vers 1550, l'impression de livres hébraïques devient plus difficile à Venise, qui avait dominé ce marché en Italie durant la première moitié du siècle. Ferrare apparaît comme un lieu propice pour prendre cette place[2],[3].

La Bible de Ferrare a été réalisée par le théologien et typographe d'origine espagnole Yom-Tob Atias.

Le texte est dû à Abraham Usque, mais il s'est appuyé sur un texte qui s'est progressivement constitué en Espagne à partir du XIVe siècle[4].

Le livre a bénéficié d'un privilège du duc de Ferrare, Hercule II.

Deux tirages un peu différents ont été faits de cette édition. L'un (variante B) est dédié à Hercule II (Al yllustrissimo y excellentissimo Señor el Señor Don Hercole da Este El Segundo : quarto Duque de Ferrara, l'autre (variante A) à Gracia Nassi (A la muy magnifica Señora Dona Gracia Naci), qui avait soutenu financièrement la publication[5]. Les colophons diffèrent : le premier donne les noms des imprimeurs en portugais et en castillan et la date dans le calendrier chrétien (en primero de Março de 1553) ; le second donne le nom juif des imprimeurs et la date dans le calendrier hébraïque (en 14 de Adar de 5313)[3]. Il s'agit sans doute là, de la part des imprimeurs, d'une manœuvre prudente et subtile qui, en mettant en avant « l’intérêt philologique et humaniste d’offrir la traduction d’une œuvre fondamentale en espagnol, avait pour but de dissimuler une autre partie des exemplaires édités qui visaient une fin autre et étaient destinés à la communauté juive de Ferrare »[6].

Description[modifier | modifier le code]

Le titre figurant au frontispice est : BIBLIA en lengua española traducida palabra por palabra de la verdad hebrayca por muy excelentes letrados, vista y examinada por el oficio de la inquisicion. Le frontispice porte, sous le titre, une gravure représentant une nef au mât brisé, qui symbolise les pérégrinations difficiles des Séfarades[3].

L'ouvrage est imprimé en alphabet latin et en caractères gothiques, alors que dans l'empire ottoman les communautés séfarades imprimaient les ouvrages écrits en ladino en alphabet hébreu.

Le format du livre est in-folio.

Influence[modifier | modifier le code]

Casiodoro de Reina (1520-1594) s'est appuyé largement sur la Bible de Ferrare pour la partie Ancien Testament de sa traduction de la Bible en espagnol (Bâle, 1569), première édition de la Bible dans cette langue.

De nouvelles éditions de la Bible de Ferrare ont été publiées à Salonique en 1568 et, tout au long du XVIIe siècle à Amsterdam[7].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. (en) Pier Cesare Ioly Zorattini, « Sephardic Settlement in Ferrara under the House of Este », in New Horizons in Sephardic Studies, Albany, State University of New York Press, 1993, p. 5-14.
  2. Cecil Roth, « The Marrano Press at Ferrara, 1552-1555 », The Modern Language Review, XXXVIII (1943), p. 307-316.
  3. a b et c Dans la presse d’Abraham Usque à Ferrare : Les mystères autour de la Bible de Ferrare et de Menina e Moça (Le livre des nostalgies) de Bernardim Ribeiro, deux livres imprimés en 1553, par Yosef H. Yerushalmi (pour la Bible de Ferrare).
  4. Monique Boaziz-Aboulker, « Les problèmes de la traduction biblique… », article cité en bibliographie, p. 26.
  5. Sur le rôle de Gracia Nassi, (es) Maria Giuseppina Muzzarelli, « Beatriz de Luna, viuda de Mendes, Ilamada doña Gracia Nasi : una hebrea influyente (1510-c. 1569) », in Ottavia Niccoli (éd.), La mujer del Renacimiento, Madrid, Alianza Editorial, 1993, p. 115-147, voir p. 128 ; José Emilio Burucúa, « Les enjeux culturels du texte biblique dans l'Europe du XVIe siècle », Annales. Histoire, Sciences Sociales, 58, 2003/6, p. 1347-1366, voir section « La Bible de Ferrare » (en ligne).
  6. José Emilio Burucúa, « Les enjeux … », op. cit..
  7. 1611, 1630, 1646, 1661, 1695, etc. (en) Richard Gottheil, Meyer Kayserling, « Usque » in Jewish Encyclopedia.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Haïm Vidal Séphiha, Le Ladino, judéo-espagnol calque : Deutéronome, versions de Constantinople, 1547 et de Ferrare, 1553. Édition, étude linguistique et lexique, Paris, 1973.
  • (en) Moshe Lazar, The Ladino Bible of Ferrara, 1553. A Critical Edition, Culver City (California), Labyrinthos, 1992, 725 p. (ISBN 9780911437560)
  • (es) Moisés Orfali, « Contexto teológico y social de la Biblia de Ferrara » in Introducción a la Biblia de Ferrara. Actas del Simposio Internacional sobre la Biblia de Ferrara, Iacob M. Hassán et Angel Berenguer Amador (dir.), Madrid, Comisión Nacional Quinto Centenario-Universidad de Sevilla-CSIC, 1994, p. 229-249.
  • José Emilio Burucúa, « Les enjeux culturels du texte biblique dans l'Europe du XVIe siècle », Annales. Histoire, Sciences Sociales, 58, 2003/6, p. 1347-1366, voir section « La Bible de Ferrare » (en ligne).
  • Monique Boaziz-Aboulker, « Les problèmes de la traduction biblique à travers deux exemples : la Bible de Ferrare et la Bible d'Albe », Crisol. Publication du Centre de Recherches Ibériques et Ibéro-Américaines de l'Université Paris Nanterre, no 11, 2007, p. 25-48.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]