Expédit de Mélitène
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Selon le Martyrologium Hieronymianum, saint Expédit est un commandant romain d’Arménie converti au christianisme et décapité pour cette raison par l’empereur Dioclétien en l'an 303 de l’ère chrétienne, à Mélitène, en compagnie des autres martyrs Hermogène, Caius, Aristonique, Rufus et Galatas.
Ce saint, considéré comme intercesseur dans les causes urgentes, et souvent représenté avec le mot Hodie (aujourd'hui), est particulièrement vénéré dans l'île de La Réunion.
Réalité du personnage
Il n'y a pas de relique d'Expédit[1] et son existence réelle est, depuis longtemps, remise en cause.
La position de l’Église catholique
Certaines autorités de l’Église s’interrogent sur son existence réelle et l'historien d'art Louis Réau rapporte que Pie X avait « rayé, en 1906, son nom du martyrologe et prescrit, sans succès, l'enlèvement de ses images dans les églises[2]. »
Reste que les croyants se réfèrent encore à lui afin qu’il interfère dans les procès qui s’éternisent. Il est le saint patron des écoliers, des hommes d’affaires et des candidats au permis de conduire[réf. nécessaire]. Son nom figure au plus ancien martyrologe, celui de l’Église indivise, il est à ce titre vénéré dans l'Église grecque.
La légende des religieux et du colis anonyme
Il existe à la Réunion une légende, colportée par Prosper Ève, racontant que saint Expédit aurait été inventé par erreur par un groupe de sœurs de l'île de La Réunion qui reçurent, de Rome, des reliques emballées dans un paquet sur lequel était écrit « in expedito », et sans mention de quel saint provenaient ces reliques[1]. Mais cette légende est plus ancienne puisqu'on trouve déjà, en 1910, chez Christian Morgenstern, une première version allemande de la légende des religieuses qui reçoivent un colis anonyme et l'attribuent à saint Expeditus[3]. Les objets reçus ne sont alors pas des reliques mais des friandises et des objets utiles.
Selon Henri Gaidoz, pour les Bollandistes son nom figure parmi les premiers martyrs arméniens[4] et son aptitude à intercéder pour les cas d'urgence serait due à un jeu de mot sur son nom[4] (expeditus = prêt, efficace).
Culte
Le culte de saint Expédit, sous le nom d’Elpide ou Ilpide, se serait développé en Allemagne au XVIIe siècle[5]. Il est honoré le par l'Église catholique et l'Église orthodoxe. En 1781, il fut proclamé patron secondaire d'Acireale en Sicile.
Saint Expédit est vénéré dans certains pays d'Amérique du Sud, dont l'Argentine et le Chili. Il est très populaire au Brésil, où il est le saint patron de la Police militaire de l'État de São Paulo. Il est surtout connu depuis la fin des années 1990, lorsque Renato Geraldes, un imprimeur de São Paulo, a promis de diffuser son nom partout après avoir reçu la grâce. La fête de Saint-Expédit () donne lieu à de nombreuses manifestations, notamment dans le village qui porte son nom (Santo Expedito, État de São Paulo)[2]. Dans la ville de Buenos Aires également, le jour de sa fête, une procession traverse la ville jusqu'à la paroisse Nuestra Señora de Balvanera (es)[6].
On trouve sa statue dans de nombreuses églises en France. À Lourdes, elle cohabite avec Notre Dame en compagnie des statues de saint Benoît Labre, sainte Germaine de Pibrac et sainte Philomène[4]. À l'église Saint-Nizier de Lyon, c'est souvent sous sa statue que les résistants de l'ombre se donnaient rendez vous durant l’Occupation (1940-1944). Une statue avec des ex-voto se trouve au fond de la basilique de la Daurade à Toulouse. À Marseille, son culte est attesté dès 1894 puisqu'on en trouve une statue avec ex-voto dans la chapelle des Religieuses Minimes[4]. On retrouve sa statue dans l'église Saint-Cannat, dite aussi des Prêcheurs, au no 4 de la rue des Prêcheurs à Marseille, dans l'église des Grands-Carmes de Marseille[7] et dans l'église de la Mission de France. Il est présent également à Bordeaux, notamment dans l'église St Éloi.
En Espagne, une tradition populaire l'associe aux fêtes de la Semaine Sainte et de la Toussaint à Madrid[8] et à Séville[9], où il est d'usage de cuisiner des pâtisseries frites nommées huesos de san Expedito (es) (ossements de saint Expédit).
Saint Expédit à la Réunion
Depuis que son culte y a été introduit, dans les années 1930[10], saint Expédit est particulièrement prié à La Réunion, département français de l’océan Indien. Il s’agit d'un syncrétisme mêlant l’héritage catholique aux croyances venues de Madagascar ou d’Inde. Saint Expédit apparaît, en vérité, comme un ultime recours à beaucoup de monde, principalement aux déshérités de la société réunionnaise. Le culte de saint Expédit est destiné à lui demander une faveur : trouver du travail, gagner de l’argent ou d’autres choses plus ou moins importantes mais toujours avec une notion de promptitude dans l’exécution de la demande.
De très nombreux autels sont construits à son intention le long des routes, spécialement dans les Hauts. Ils sont généralement de taille suffisante pour accueillir une statue de légionnaire romain de quelques dizaines de centimètres de haut. Il en existe cependant de plus grands pouvant contenir plusieurs statues (par exemple, à Trois-Mares), des bougies, des fleurs rouges, etc. Ils sont toujours peints en rouge sang. Les ex-voto remerciant le saint n’y sont pas rares.
Les pratiquants demeurent difficiles à dénombrer, le culte de saint Expédit étant socialement dévalorisé et la fréquentation des autels se fait en secret. Mais leur bon entretien demeure un indice de l’audience persistante du saint.
Le culte de saint Expédit s’est développé à la Réunion à partir de l’église Notre-Dame-de-la-Délivrance, à Saint-Denis, qui a accueilli la première statue du saint installée dans l’Île. Il y a également une statue du saint à Saint-Leu, à l’église Notre-Dame-de-la-Salette.
Hagiographie et iconographie
Selon Prosper Ève, Expédit était sur le point de se convertir au christianisme, quand le diable, prenant la forme d’un corbeau, arriva en criant : « Cras ! Cras ! Cras ! » (« Cras », en latin, signifie « demain »). Ne voulant pas retarder sa conversion, Expédit l’écrasa en criant à son tour : « Hodie ! Hodie ! Hodie ! » (« aujourd'hui ! »)[1]. Expédit est donc souvent représenté portant la palme du martyre, avec le corbeau, et les inscriptions « Cras » et « Hodie »[2].
Représentations
Saint Expédit à l’écran
- Saint Expédit fait l'objet d'un documentaire intitulé Sur les chemins de saint Expédit de Pascal Benbrik, diffusé par la chaîne KTO. L'historien Prosper Eve et Monseigneur Gilbert Aubry, évêque de la Réunion y détaillent les véritables origines du culte et son lien étroit avec le dialogue inter-religieux[11].
- Saint Expédit est le sujet du documentaire Cachez ce Saint !, sur les traces d’Expédit. Ce film de 52 minutes détaille la manière dont le culte du saint s’est répandu, à partir d'une « vulgaire faute de frappe »[12].
- On en parle également dans la série française Les Monos, notamment dans l'épisode La Loi du plus fort de la saison 6 tournée à La Réunion.
- Dans le film Un drôle de paroissien, réalisé par Jean-Pierre Mocky et sorti en 1963, le premier tronc d’église choisi par Bourvil est celui de saint Expédit.
- André Bonzel, dont la famille s'appelait initialement Expédit, en parle dans son documentaire autobiographique Et j'aime à la fureur.
Notes et références
- Philippe Reignier, « Saint Expédit, à La Réunion: approche géo-ethnographique », Les Amis de l'Université, (consulté le ).
- anonyme, « Saint Expedit », http://amis.univ-reunion.fr, (consulté le ).
- Christian Morgenstern, « St. Expeditus », http://www.textlog.de, (consulté le ).
- Gaidoz 1898-99.
- Bénédictins de Ramsgate, Dix mille saints, dictionnaire hagiographique, Brepols, 1991.
- Celebración de San Expedito, Buenos Aires Ciudad.
- François Thomazeau, Marseille insolite, Paris, édition Les Beaux Jours/Compagnie parisienne du livre, , p. 163.
- Huesos de san expedito, el invitado de invierno
- Repostería de Convento: Huesitos de San Expedito.
- Monique Augras, « Secours d'urgence : le “show” de saint expédit », Sociétés, no 72, , p. 125-137.
- saintexpedit.net.
- Bernard Crutzen, Cachez ce Saint ! FMC Production/France Télévisions, 2010. Première diffusion le 8 février 2011, Archipel, France O.
Annexes
Bibliographie
- Philippe Reignier, « Un objet parmi d'autres. Saint Expedit à la Réunion », in Institutions et cultures. Les enjeux d'une rencontre, L'Harmattan, 2003.
- Philippe Reignier, « E.-X.-P.-E.-D.-I.-T. Un saint au maniement délicat », Ponctuation : la religion, ses passes et ses impasses, no 9, 2011.
- Philippe Reignier, Saint Expedit à la Réunion. Monographie, Thèse de 3e cycle, Département d'Anthropologie, université de la Réunion, 2001.
- Émilie Bonvin, Manuel des prières à saint Expédit, Éd. Cristal, (ISBN 9782848950471).
- Père Marie-Expédit, Saint Expédit, Éd. Téqui, (ISBN 2-7403-0265-7).
- Paul Sanda, Petit Grimoire du Sens, Éd. Arma Artis, (ISBN 2-87913-088-3) [a pour thème littéraire et méditatif le buste reliquaire polychrome de saint Expédit de l’église Saint-Michel de Cordes-sur-Ciel, ainsi que la statue en pied de la chapelle patriarcale orthodoxe gnostique (HELIOS - Association cultuelle 1905)].
- Émilie Bonvin, Saint Expédit, prières et neuvaines, Éd. Exclusif, Collection Poche, (ISBN 9782848910949).
- Henri Gaidoz, « Saint Expédit », dans Henri Gaidoz, Eugène Rolland et Emile Ernault, Mélusine : recueil de mythologie, littérature populaire, traditions & usages, vol. 9, Gaidoz, 1898-99 (lire en ligne), p. 169-179
Liens externes
- Site rassemblant des prières à saint Expédit sur saint-expedit.fr.
- Site du film documentaire Sur les chemins de saint Expedit
- Saint Expédit sur le site Nominis
- Ressource relative aux beaux-arts :