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Francisco César

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Francisco César est un conquistador espagnol d’origine portugaise qui participa à l’expédition de Sébastien Cabot au Rio de la Plata (1526-1530) avant de se joindre en 1532 à la troupe de Pedro de Heredia pour fonder Carthagène des Indes (1533). Il fit ensuite partie de l’expédition (1538) de Juan de Vadillo qui remonta le Rio Cauca jusqu’à la ville de Cali, reliant ainsi pour la première fois par voie terrestre la mer des Caraïbes au Pérou. César perdit cependant la vie (1538) avant d’arriver à destination.

Biographie

On ne connaît pas le lieu et la date de naissance de Francisco César, mais on le croit d’origine portugaise. En avril 1526, il s’embarqua à bord d’un navire qui faisait partie d’une flotte transportant l’expédition que Sébastien Cabot voulait mener jusqu’aux îles Moluques sur les traces de l’expédition de Fernand de Magellan (1519-1522). Cependant, Cabot changea d’avis en cours de route et décida plutôt de s’arrêter à l’embouchure du Rio de la Plata afin d’en explorer les sources jusqu’au fleuve Paraguay. C’est au cours de cette dernière partie de l’exploration que Francisco César se distingua lorsqu’il fut envoyé en mission à la tête d’une dizaine d’hommes afin de découvrir des mines d’argent dans les montagnes qui se dressaient à l’ouest. Cette incursion et les récits qui en ont été tirés sont à l’origine de la légende de la Cité des Césars. Finalement, Sebastien Cabot revint en Espagne en 1530 sans avoir rien accompli ou obtenu de tangible. Sur le chemin du retour, une trentaine d’hommes, dont Francisco César, abandonnèrent l’expédition pour s’établir à Porto Rico.

C’est là que les rencontra Pedro de Heredia quand la flottille qui transportait son expédition y fit escale en octobre 1532[1]. Heredia, qui s'en allait prendre possession du territoire situé sur la côte de l’actuelle Colombie entre la province de Santa Marta et la province de Panama dont la Couronne espagnole venait de lui accorder la gouvernance, les incorpora dans son armée.

Sous les ordres de Pedro de Heredia

Impressionné par la notoriété que Francisco César avait acquise au Rio de la Plata et par sa popularité auprès de ses hommes, Heredia le nomma lieutenant-gouverneur[2] de la province de Carthagène.

Après quelques excursions ayant pour but de trouver un site adéquat pour l’établissement de sa colonie, Heredia fonda Carthagène des Indes en 1533[3]. Plusieurs expéditions furent ensuite entreprises pour prendre contact avec les villages indigènes des territoires environnants. En plus de servir à établir des liens amicaux, ces expéditions avaient aussi pour objectifs de procéder à des échanges commerciaux afin de troquer des produits européens contre des vivres et de l’or, bien que ces communautés avaient peu d’or à offrir, car il n’y avait pas de mine d’or dans la région. Tout l’or qui était en leur possession était le fruit d’une accumulation séculaire et avait été acquis grâce à des échanges de tribu en tribu sans qu’ils en connaissent précisément la source. Par ailleurs, tout refus de collaborer de la part des autochtones était considéré par les Espagnols comme une déclaration de guerre et les villages fautifs étaient pris d’assaut, incendiés, et leurs habitants réduits en esclavage.

Le pillage des tombes du Zénu

Ce n’est qu’en 1534, lors d’une expédition menée plus au sud dans la région du fleuve Zénu, que d’importantes richesses furent découvertes dans des sépultures enfouies sous des tumulus que les indigènes de cette zone érigeaient pour honorer leurs morts. Cette découverte amena les Espagnols à entreprendre le pillage systématique de toutes les tombes qu’ils pouvaient trouver. C’est à partir de ce moment que des conflits éclatèrent parmi les conquistadors. Sous le prétexte de pousser plus loin les explorations afin de découvrir d’autres sépultures, Heredia envoya plusieurs expéditions plus au sud. Comme elles revinrent toutes les mains vides et décimées par la faim et les maladies, l’animosité contre le gouverneur prit de l’ampleur. Ils le soupçonnaient de les avoir éloignés afin de profiter de leur absence pour poursuivre le pillage des sépultures du Zénu pour son propre profit. De plus, la région du Zénu étant peu peuplée, elle ne pouvait assurer le ravitaillement d’une telle quantité de nouveaux arrivants, ce qui augmenta le mécontentement et le climat de suspicion contre le gouverneur, car il monopolisait le peu de ravitaillement disponible et le vendait à des prix exorbitants.

Entre temps, Alonso de Heredia, le frère du gouverneur, qui avait été tenter sa chance au Guatemala vint rejoindre Pedro et celui-ci le nomma lieutenant-gouverneur à la place de Francisco César, rétrogradant ce dernier au grade de capitaine et suscitant le mécontentement des soldats qui adulaient César et détestaient Alonso[2].

La mutinerie de César et de ses hommes

Simultanément, l’arrivée de plusieurs centaines d’hommes amenés par Rodrigo Duran, un associé de Heredia, aggrava la crise alimentaire. À cette nouvelle, Pedro revint d’urgence à Carthagène, pour rencontrer Duran. Celui-ci lui apprit qu’il devait immédiatement rembourser les dettes qu’il avait contractées en Espagne pour le transport de son armée à travers l’Atlantique. Sans d’autres ressources financières que le butin amassé au Zénu et dont le partage n’avait pas encore été effectué, Heredia demanda à son frère de lui faire parvenir ce butin afin qu’il puisse s’en servir pour payer ses dettes. Alonso ordonna à Francisco César de transporter le trésor jusqu’à Carthagène, mais celui-ci refusa, exigeant qu’un partage soit au préalable effectué selon la coutume entre tous les participants de l’expédition après que la part du Roi, le quinto royal, ait été prélevée.

Devant le refus de Francisco César d’obéir à son ordre, Alonso l’accusa de mutinerie et le condamna à mort. Cependant, personne n’accepta d’exécuter l’ordre de sorte que César fut envoyé à Carthagène afin que le gouverneur se prononce sur son sort. Menacé par une rébellion générale, Heredia fut obligé de réintégrer César à son poste de capitaine, encore une fois cependant sous les ordres d’Alonso.

L’affaire du golfe de Uraba

Après avoir exploré l’est et le sud du territoire de la province de Carthagène, Alonso dirigea ensuite sa troupe vers l’ouest, plus précisément vers la cuvette du golfe de Uraba, afin de vérifier des informations selon lesquelles des gens de la province de Panama menés par Julian Gutierrez y empiétaient sur le territoire carthaginois.

Afin de contrer cette invasion, Alonso fonda en 1535 la ville de San Sebastian de Buenavista[4] non loin de l’endroit où Alonso de Ojeda avait fondé, en 1509, le fortin de San Sebastian de Uraba, par la suite abandonné.

Toujours aussi mécontents, Francisco César et plusieurs de ses hommes profitèrent de l’occasion pour se joindre à l’armée de Julian Gutierrez.

Alerté, Pedro de Heredia vint rejoindre son frère avec des renforts et ils affrontèrent les Panaméens au cours d’un combat qui fit plusieurs victimes de part et d’autre. Surpassant en nombre les hommes de Gutierrez, la troupe des Heredia remporta la victoire. Gutierrez fut capturé et envoyé à Carthagène. Par contre, Francisco César réussit à s’échapper et il se replia dans les montagnes avec les survivants ainsi qu’avec Isabel del Corral, la femme métisse de Gutierrez et petite-fille d’un cacique de la région. Craignant que César et Isabel unissent les diverses tribus indigènes contre lui, Heredia leur offrit une paix sans condition.

L'expédition de Francisco César

Reconnaissant la valeur militaire de César et sa popularité auprès des soldats de sa propre armée, et qui le réclamaient comme chef, il le nomma à la tête d’une expédition d’une centaine d’hommes qu’il envoya au sud du golfe de Uraba afin d'aller explorer une région appelée Dadeiba dans l'espoir d'y trouver des mines qui alimenteraient en or les tribus de la côte. L’expédition se mit en marche en juillet 1536 pour ne revenir qu’au printemps 1537. Entre-temps, Juan de Vadillo, un juge en résidence nommé par l’Audience de Santo Domingo pour enquêter sur les abus et crimes commis par Pedro de Heredia, arriva à Carthagène et somma Heredia de se présenter devant lui.

À son retour à San Sebastián de Buenavista, Francisco César apprit que Pedro et son frère étaient emprisonnés à Carthagène et qu’il relevait dorénavant du juge en résidence Juan de Vadillo auprès de qui il devait se présenter pour lui faire part des informations qu’il avait recueillies au cours de son expédition au sujet d’un territoire appelé Buritica où se trouveraient une montagne d’or. Il n’avait pu s’en s’approcher à cause des lourdes pertes que sa troupe avait subies au cours d’une bataille qu’il avait remportée contre la tribu du cacique Nutibara qu’il avait rencontrée sur son chemin. La découverte d’une sépulture richement pourvue et le dépouillement des cadavres des indigènes morts sur-le-champ de bataille lui avaient cependant permis d’amasser un important butin d’ornements en or. De plus, le fait qu’il avait vu des femmes autochtones revêtues de mantes semblables à celles qui se portaient au Pérou l’incitait à croire qu’on pouvait atteindre ce pays en continuant plus loin l’exploration de ce territoire. Depuis que s’était répandue la nouvelle des fabuleux trésors que l’Inca Atahualpa avait rassemblés à Cajamarca, en 1533, pour payer sa rançon, le Pérou était devenu une véritable obsession à travers tout l’Empire espagnol.

Sous les ordres de Juan de Vadillo

Tout en procédant au procès des frères Heredia qui étaient accusés de s’être approprié les parts de butin de leurs hommes, de les avoir maltraités, d’avoir réduit en esclavage les indigènes, et d’avoir fraudé la caisse royale, Juan de Vadillo exerça la fonction de gouverneur de Carthagène et entreprit de s’enrichir en faisant exactement ce qui était reproché à l’ancien gouverneur. Parallèlement, il mit Francisco César à la tête d’une autre expédition, cette fois beaucoup plus imposante et mieux préparée que la précédente, avec la mission de partir de San Sebastian de Buenavista pour se rendre jusqu’au territoire du cacique de Buritica.

Cependant, la nouvelle était arrivée à Carthagène que les plaintes que Pedro de Heredia avait réussi à faire parvenir à la Couronne espagnole au sujet de l’injustice de son procès ainsi que des abus et fautes commises par Juan de Vadillo avaient été bien reçues à Séville, et un autre juge, Juan de Santa Cruz, était en route pour le soumettre à un procès. En apprenant cela, Juan de Vadillo changea ses plans[5]. Il décida de prendre lui-même le commandement de l’expédition qu’il avait précédemment confiée à Francisco César. Il pensait ainsi éviter le procès qu’on voulait lui imposer tout en espérant que l’importance des découvertes qu’il allait faire et les richesses qu’il allait apporter à la Couronne le mettraient à l’abri de ces poursuites.

Expédition de Juan de Vadillo

Juan de Vadillo quitta Carthagène le 19 septembre 1537 et arriva à San Sebastián de Buenavista le 23 décembre. Il consacra ensuite plusieurs semaines à amasser des vivres, principalement du maïs, avant d’entreprendre son voyage le 24 janvier 1538.

La décision de Juan de Vadillo de se substituer à Francisco César pour commander l’expédition qui allait se lancer à la découverte des mines de Buritica empêcha ce dernier d’être reconnu par l’Histoire comme le chef de la première expédition qui a réussi à ouvrir un chemin terrestre entre la mer des Caraïbes et le Pérou. César n’eut cependant pas à en souffrir, car il mourut en cours de route, tout comme 98 de ses compagnons.

Chroniques de l'expédition de Vadillo

Première partie de la Chronique du Pérou, de Pedro Cieza de León (1553).

Une relation exceptionnelle du déroulement de cette expédition nous est parvenue grâce à la plume du «  prince  » des chroniqueurs, Pedro Cieza de León, qui fit partie de l’expédition de Juan de Vadillo et qui lui consacra plusieurs chapitres de la première partie de sa Chronique du Pérou[6]. Ayant vécu avec Francisco César pendant plusieurs mois dans des conditions extrêmement difficiles, au point que César en perdit la vie, son témoignage est digne de mention :

« Pedro de Heredia envió a un capitán esforzado, diestro e muy valeroso, llamado Francisco César
Ciertamente César se mostró ser digno de tener tal nombre.
 »

Un autre chroniqueur, Juan de Castellanos, a consacré quarante-deux pages de son œuvre en vers, Elegías de varones ilustres de Indias, à l’expédition de Juan de Vadillo.

Gregorio Saldarriaga Escobar, un historien de l’Université de Antioquia a récemment découvert dans les Archives générales des Indes de Séville un récit de ce voyage que Juan de Vadillo a écrit alors que, un an plus tard, il faisait escale à Panama avant de retourner en Espagne[5]. Cette relation[7] est disponible sur internet.

Il faut cependant reconnaître que l’expédition de Vadillo (24 janvier 1538 au 24 décembre 1538), bien que composée de plusieurs centaines de cavaliers et de fantassins, d’esclaves africains et d’Indiens de service, n’est pas aussi connue aujourd’hui que les trois autres expéditions qui, presque simultanément et par des voies différentes, envahirent le territoire qui est aujourd’hui devenu la Colombie pour atteindre la savane de Bogota et y fonder la ville de Santa Fe : l’expédition de Gonzalo Jiménez de Quesada (1536-1539) qui est partie de Santa Marta pour remonter le fleuve Magdalena en espérant qu’il le mènera au Pérou; l’expédition de Nicolas Federman (1535-1539) qui est partie de Coro au Venezuela à la recherche d’un peuple riche en or dont il avait entendu parler; et l’expédition de Sebastian Belalcazar (1535-1539) qui est originellement partie de Quito en Équateur pour passer ensuite par Popayan et Cali avant de traverser la Cordillère centrale et atteindre le fleuve Magdalena en quête d’un mythique Eldorado.

Bibliographie

Notes et références

  1. (es) Maria del Carmen Gomez Perez, Pedro de Heredia y Cartagena de Indias, Sevilla, Escuela de Estudios Hispano-Americanos de Sévilla, (ISBN 84-00-05914-X), page 31.
  2. a et b (es) Soledad Acosta de Samper, « Biografias de hombres ilustres o notables, Relativa à la epoca del descubrimiento, conquista y colonizacion de la parte de America denominada actualmente EE. UU. de Colombia »
  3. (es) Jorge Orlando Melo, Historia de Colombia, el establecimiento de la dominación española (lire en ligne), page 86
  4. Notez qu'il ne faut pas confondre la ville de San Sebastian de Buenavista du département de Magdalena de l'actuelle Colombie avec la ville de San Sebastian de Buenavista fondée par Alonso de Heredia en 1535 à proximité de l'endroit où Alonso de Ojeda avait érigé San Sebastian de Uraba en 1509. Ce dernier établissement était situé à quelques kilomètres de l'actuelle ville de Necocli, département d'Antioquia, Colombie, sur la côte du golfe de Uraba et fut le premier établissement espagnol sur le continent sud-américain. Quant à la ville fondée par Heredia, elle fut abandonnée en 1550 http://www.necocli-antioquia.gov.co/MiMunicipio/Paginas/Pasado,-Presente-y-Futuro.aspx.
  5. a et b (es) Luis Caicedo, « 475 AÑOS DEL VIAJE DE JUAN VADILLO DE URABÁ A CALI EN 1538, A PARTIR DE LOS TEXTOS DE VADILLO, CIEZA Y CASTELLANOS »
  6. (es) Pedro Cieza de Leon, « Cronica del Peru »
  7. (es) Gregorio Saldarriaga Escobar, « Transcripción de la relación del viaje del licenciado Joan de Vadillo entre San Sebastián de Urabá y Cali, 1539 », Boletín de Antropología, Universidad de Antioquia, Medellín, Vol. 26, Nº 43, 2012, págs. 42-65,