Pollution de l'eau en Haiti

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

La pollution de l'eau en Haiti est devenue un enjeu considérable pour le pays. Les principales causes de cette pollution étant des déficiences majeures au niveau de la collecte des déchets solides et une absence ou dysfonctionnement des systèmes d'assainissements des eaux usées à travers le pays. En plus, l’accroissement considérable de la population couplé à une absence totale de planification urbaine par l’État entraîne une dégradation massive de l’environnement du pays tout en agissant sur la qualité de l'eau disponible[1]. En conséquence, les eaux de surface et les eaux souterraines peu profondes sont de plus en plus contaminées par des micro-organismes comme les bactéries, les protozoaires et les virus exposant homme, femme et enfant au choléra, à la typhoïde, à la cryptosporidiose et toutes sortes de maladie d’origine hydrique[1],[2].

Causes[modifier | modifier le code]

Eaux usées non traitées[modifier | modifier le code]

Haïti ne dispose pas de système collectif pour la collecte et le traitement des eaux usées. L'assainissement, quand il existe en Haïti, est de nature autonome ou le particulier a la responsabilité de la gestion et évacuations des eaux qu’il produit[3]. En conséquence, les eaux grises finissent généralement dans des canaux de drainage à ciel ouvert qui n'ont été dimensionnés que pour l’évacuation des eaux pluviales. D'autre part, lorsque les canaux de drainage n’existent pas, elles sont alors évacuées à même le sol à proximité des maisons, ce qui favorise la contamination par ruissellement et infiltration des eaux de surface et de la nappe phréatique[4],[3].

Pour ce qui est des eaux noires le constat est accablant : en Haïti seule 26 % de la population a accès à des systèmes sanitaires améliorés, soit 34.5 % en milieu urbain et 17 % en milieu rural[3]. Plus de la moitié de ces sanitaires n’ont pas été construits sur des fosses septiques et ils ne sont pas régulièrement vidangés. De plus, la vidange des systèmes sanitaires, quand elle se fait, est le plus souvent réalisée par des vidangeurs manuels et les excrétas sont tout simplement jetés dans des canaux ou dans des cours d'eau[3],[5]. En effet, le pays dispose d’un seul centre de traitement d’excrétas fonctionnel doté d’une capacité de 500 m3 par jour, pour une population de près 12 000 000[6] d’habitants et une superficie de 27750 km2 [5].

Autres[modifier | modifier le code]

Haïti a connu une croissance démographique considérable ces dernières années en plus d’une urbanisation non planifiée du milieu rural vers les espaces urbains, plus particulièrement vers la région métropolitaine de Port-au-Prince, ce qui entraîne la formation de nombreux bidonvilles dépourvus de tout accès aux services les plus basiques[1],[7]. Or, ces espaces sont de grands producteurs de déchets solides qui finissent généralement dans les ravines, les coins de rue, au bord des routes et d’autres espaces ouverte. En effet, des études réalisées sur la problématique de la gestion des déchets à Port-au-Prince ont montré que 87.7 % des ménages les plus pauvres utilisaient les ravines comme lieu d’élimination des déchets[7].

Toutes ces mauvaises pratiques d’assainissement combinées à des aquifères peu profonds et des roches fracturées entraînent la contamination généralisée, soit par ruissellement et/ou infiltrations d’effluents pollués, des ressources en eaux souterraines et de surface du pays[5],[7].

Qualité de l’eau[modifier | modifier le code]

Aucune enquête récente n’a été réalisée au niveau national sur la qualité de l’eau utilisée au quotidien par la population. Cependant, selon une enquête réalisée en avril 2012 dans le Département de l'Artibonite, sur 108 sources testées pour la qualité de l’eau, 2/3 d’entre elles présentaient des traces de E. Coli (Escherichia coli) et 25.9 % avaient une concentration de plus de 100 MPN/100mL qui sont des niveaux de très haut risque pour la santé humaine[3].

Autres études réalisées dans les trois principales villes du pays, à savoir Port-au-Prince, Cap-Haïtien et Les Cayes, ont démontré la présence de micro-organismes de type Giardia et Cryptosporidium à des niveaux dangereux pour la population[8],[9]. En effet, des valeurs de 4 à 1274 oocystes de Cryptosporidium et de 741 à 6088 oocystes de Cryptosporidium ont été retrouvés à Port-au-Prince et au Cap-Haïtien, dans les eaux destinées à l’usage par la population[10].

La présence de ces micro-organismes dans les eaux d’Haïti sont des marqueurs de pollution fécale.

Conséquences[modifier | modifier le code]

Les maladies d’origine hydriques telle la diarrhée, le choléra, la cryptosporidiose entre autres, sont très fréquentes dans le pays. Elles présentent en ce sens, un risque sanitaire élevé, pour les plus vulnérables.

Les maladies contagieuses, comme la diarrhée et celles dont la malnutrition est la conséquence, tuent respectivement 20 % et 28 % des enfants âgés de 0 à 5 ans[3]. La cryptosporidiose est une cause fréquente de diarrhée en Haïti. Elle est responsable de 17.5 % des diarrhées aiguës affectant les enfants de moins de 2 ans et 30 % des diarrhées chroniques affectant les personnes atteintes du VIH[9],[10].

Entre octobre 2010 et février 2019, une épidémie de choléra introduit par des soldats népalais a engendré le décès de près de 10 000 personnes et a contaminé plus de 820 000[11], pour connaître une résurgence dans le pays en octobre 2022 dans des conditions politiques, sécuritaires et environnementales très critiques.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b et c (en) Ketty Balthazard-Accou, Evens Emmanuel, Patrice Agnamey et Christian Raccurt, « Pollution of Water Resources and Environmental Impacts in Urban Areas of Developing Countries: Case of the City of Les Cayes (Haiti) », dans Environmental Health - Management and Prevention Practices, IntechOpen, (ISBN 978-1-78984-895-3, DOI 10.5772/intechopen.86951, lire en ligne)
  2. (en-US) « Why Clean Water|Haiti Water » (consulté le )
  3. a b c d e et f Document d’orientation stratégique pour l’assainissement en Haïti. Direction Nationale de l’Eau Potable et de L’Assainissement (DINEPA). Révision mars 2014
  4. L’évaluation des ressources en eau d’Haïti. Aout 1999. United States southern command.
  5. a b et c (en) « Haïti-Assainissement : La gestion des excréta, un immense problème qui semble être négligé (II) - Haiti | ReliefWeb », sur reliefweb.int, (consulté le )
  6. « Estimation de la population », sur ihsi.gouv.ht (consulté le )
  7. a b et c A. Bras, C. Berdier, E. Emmanuel et M. Zimmerman, « Problems and current practices of solid waste management in Port-au-Prince (Haiti) », Waste Management, vol. 29, no 11,‎ , p. 2907–2909 (ISSN 0956-053X, DOI 10.1016/j.wasman.2009.07.015, lire en ligne, consulté le )
  8. (es) Ketty Balthazard-Accou, Emmanue Evens, Patrice Agnamey et Philippe Brasseur, « Presencia de Cryptosporidium Oocysts y Giardia Cysts en el agua Superficialy en el agua subterránea en la ciudad de Cayos (Les Cayes), Haití. », Aqua-LAC, vol. 1, no 1,‎ , p. 63–71 (ISSN 1688-2873, DOI 10.29104/phi-aqualac/2009-v1-1-06, lire en ligne, consulté le )
  9. a et b (es) Ketty Balthazard-Accou, Evens Emmanuel, Momar Diouf et Patrice Agnamey, « Contaminación microbiológica de las aguas subterráneas por los Oocitos de Cryptosporidium en Haití. Evaluación de los riesgos para la salud de la población. », Aqua-LAC, vol. 9, no 1,‎ , p. 51–63 (ISSN 1688-2873, DOI 10.29104/phi-aqualac/2017-v9-1-05, lire en ligne, consulté le )
  10. a et b (en) Philippe Brasseur, Patrice Agnamey, Evens Emmanuel et Jean W. Pape, « Cryptosporidium Contamination of Surface and Water Supplies in Haiti », Archives of Environmental & Occupational Health, vol. 66, no 1,‎ , p. 12–17 (ISSN 1933-8244 et 2154-4700, DOI 10.1080/19338244.2010.506492, lire en ligne, consulté le )
  11. « Gavi, the Vaccine Alliance », sur www.gavi.org (consulté le )