Myrmarachne formicaria

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Saltique fourmi

Myrmarachne formicaria
Description de cette image, également commentée ci-après
Femelle Myrmarachne formicaria, la Saltique fourmi.
Classification WSC
Règne Animalia
Embranchement Arthropoda
Sous-embr. Chelicerata
Classe Arachnida
Ordre Araneae
Sous-ordre Araneomorphae
Famille Salticidae
Genre Myrmarachne

Espèce

Myrmarachne formicaria
(De Geer, 1778)

Myrmarachne formicaria, la Saltique fourmi[1] est une espèce d'araignée aranéomorphes de la famille des Salticidae. Par sa morphologie et sa démarche, cette Araignée sauteuse mime des fourmis rousses des genres Myrmica et Formica. Présente de la France au Japon, cette espèce est introduite depuis les années 2000 en Amérique du Nord.

Description[modifier | modifier le code]

Femelle Myrmarachne formicaria, vue de face.
Femelle Myrmarachne formicaria.
Mâle Myrmarachne formicaria.
Mâle Myrmarachne formicaria, vue de face.

Contrairement aux Araignées sauteuses typiques comme la Saltique zébrée (Salticus zebraneus) qui ont un corps compact, la Saltique fourmi présente un corps allongé de 5 à 6,5 mm de long, le céphalothorax étant rétréci. La coloration de base de ce dernier est brun-orange, seule la zone céphalique est plus foncée. La région oculaire est surélevée et la paire d'yeux postérieure est assez grande. L'opisthosome, l'équivalent de l'abdomen chez les araignées, est ovale, allongé, jaune à brun-orange, avec une coloration noire dans le dernier tiers. L'opisthosome est relié au céphalothorax par un pédicule étroit. Les pattes sont de couleur jaune à orange avec des marques noires et des bandes longitudinales sur les côtés. La première paire de pattes est rayée et possède des métatarses très foncés et légèrement épaissis[2],[3].

Le corps du mâle mesure de 5,0 à 6,5 mm alors que celui de la femelle mesure de 4,75 à 6,1 mm[3].

La femelle présente des pièces buccales aplaties mais normalement développées, alors que celles du mâle s'étendent plus ou moins horizontalement vers l'avant et sont à la fois aplaties et allongées[2]. Les pédipalpes du mâle sont particulièrement fins et forment une double boucle autour du bulbe. L'épigyne de la femelle est ornée d'une grande zone triangulaire blanche. Chez le mâle, l’abdomen est plus sombre que chez la femelle et le fémur de la patte antérieure est noir[3].

Myrmécomorphisme[modifier | modifier le code]

Physiquement, Myrmarachne formicaria mime l'apparence d'une fourmi de par la forme allongée de son corps, son pédicule semblable à un pétiole, sa première paire de pattes qui ressemble aux antennes, et la taille ainsi que la position des yeux postérieurs[2].

Cette espèce mime également les mouvements des fourmis, en premier lieu leur façon de marcher. Au lieu de la marche typique des Araignées sauteuses, elle alterne de courtes phases de course et de poses tout en suivant des tracés sinueux, comme s'il s'agissait d'une fourmi suivant une piste de phéromones. Par contre, contrairement à une idée reçue, l'araignée n'utilise pas uniquement ses trois paires de pattes pour marcher mais les quatre et ne maintient ses pattes avant en l'air, mimant les antennes d'une fourmi uniquement pendant les phases stationnaires[4]. Néanmoins, rien ne prouve que cette illusion est perceptible pour les prédateurs myrmécophobes et myrmécophiles[5].

Les fourmis mimées sont des espèces du genre Myrmica comme Myrmica rubra[2] et Myrmica scabrinodis[6] ou d'espèces du genre Formica telles Formica rufibarbis[7].

Il s'agit d'un mimétisme batésien de protection, l'araignée profitant du peu d'ennemis des fourmis parmi les oiseaux et les guêpes parasitoïdes des familles des Ichneumonidae et des Sphecidae[2]. Ce leurre semble plus efficace contre les prédateurs dont le système visuel est lent[4], notamment contre les autres araignées[8]. Les fourmis sont peu agressives envers elle, sans pour autant qu'elle n'imite le profil chimique de leur cuticule[9].

Espèces proches[modifier | modifier le code]

En Europe, deux autres espèces de Salticidae miment les fourmis : Synageles venator ne mesure que 3 à 4 mm de long, tandis que Leptorchestes berolinensis est de taille similaire à Myrmarachne formicaria, ses yeux sont au même niveau que le céphalothorax et ne sont pas surélevés, le dos du céphalothorax ne présentant pas de cassure. De plus, la hanche de la patte III est noire dans le genre Leptorchestes[2].

Écologie[modifier | modifier le code]

Myrmarachne formicaria se rencontre courant dans l'herbe ou sous les pierres dans les plaines et les collines jusqu'à 800 m d'altitude, où elle privilégie les zones plus chaudes, généralement les pelouses calcaires sèches, les forêts thermophiles, les dunes fixées par la végétation et les falaises, mais elle peut parfois se trouver dans des zones humides comme les pourtours de marais ou de tourbières, les prairies humides et les bancs de roseaux[2],[6],[10],[11].

Les soies des araignées sont en général d'autant plus denses et larges que l'espèce colonise des milieux secs. Ce n'est absolument pas le cas de Myrmarachne formicaria chez qui elles sont longues et fines et recouvrent à peine 2 % de l'abdomen avec 220 soies au mm2, à l'inverse d'une espèce comme Salticus scenicus qui porte 1 070 soies au mm2 pour un recouvrement de 142 %[12].

Répartition[modifier | modifier le code]

Myrmarachne formicaria est présente sur l'ensemble de l'écozone paléarctique en Macaronésie, en Europe, en Turquie, au Caucase, en Russie européenne, caucasienne et sibérienne, en Iran, en Chine, en Corée et au Japon[3].

En Europe, l'espèce est présente dans les pays suivants : Allemagne, Arménie, Autriche, Biélorussie, Belgique, Bosnie-Herzégovine, Bulgarie, Croatie, Espagne dont les îles Baléares, Finlande, France dont la Corse, Géorgie, Grèce, Crète, Hongrie, Italie, dont la Sardaigne et la Sicile, Lettonie, Liechtenstein, Luxembourg, Moldavie, Monténégro, Macédoine du Nord, Norvège, Pays-Bas, Pologne, Portugal, Roumanie, Royaume-Uni, Russie européenne, Serbie, Slovaquie, Slovénie, Suède, Suisse, Turquie, Ukraine, Tchécoslovaquie[3]. Sur ce continent, l'espèce peut être assez fréquente et n'est pas considérée comme une espèce menacée[2].

Myrmarachne formicaria est introduite en Amérique du Nord au Canada et aux États-Unis[3], la première population établie ayant été découverte dans l'Ohio en [13]. Elle est par la suite signalée à New York en et en Pennsylvanie en [14].

Biologie[modifier | modifier le code]

Femelle Myrmarachne formicaria prédatant une mouche.

Les mâles courtisent les femelles à l'aide de leurs chélicères surdimensionnées pendant la période d'accouplement. Ils les utilisent également lors de combats rituels intenses où deux mâles se tiennent face à face en se menaçant de leurs chélicères largement écartées. La plupart du temps, l'un des mâles se retire avant l'affrontement, mais il arrive qu'un combat ait lieu et que les deux mâles s'accrochent avec leurs chélicères[2],[15].

Comme toutes les Araignées sauteuses, la Saltique fourmi ne construit pas de toile mais pratique une chasse active au sol ou dans la litière de feuilles, généralement à proximité des fourmis qu'elle imite. L'araignée se nourrit de petites mouches, de moucherons et aussi de pucerons phytopathogènes[2].

Myrmarachne formicaria se rencontre tout au long de l'année, ses phases d'activité principales ayant lieu au printemps et en été, voire un peu plus tard pour la femelle[2],[6]. Elle hiverne souvent dans les coquilles d'escargots terrestres vides[16].

Taxonomie[modifier | modifier le code]

Myrmarachne formicaria est formellement décrite par Charles de Geer en . Elle appartient à la famille des Salticidae, les araignées sauteuses. Dans le monde, cette famille compte 6 089 espèces, dont 345 se trouvent en Europe. Le genre Myrmarachne est représenté par trois espèces en Europe, mais seule cette espèce se trouve en Europe occidentale et centrale[2].

Synonymie[modifier | modifier le code]

Myrmarachne formicaria a pour synonymes[17] :

  • Aranea joblotii Scopoli, 1763
  • Aranea formicaria De Geer, 1778
  • Attus formicarius Walckenaer, 1805
  • Attus formicoides Walckenaer, 1826
  • Salticus formicarius Sundevall, 1833
  • Pyrophorus semirufus C. L. Koch, 1837
  • Pyrophorus helveticus C. L. Koch, 1846
  • Pyrophorus siciliensis C. L. Koch, 1846
  • Pyrophorus tyrolensis C. L. Koch, 1846
  • Attus helveticus Walckenaer, 1847
  • Pyrophorus austriacus Doleschall, 1852
  • Salticus formicarius Blackwall, 1861
  • Saltica formicaria Simon, 1864
  • Pyrophorus venetiarum Canestrini, 1868
  • Pyrophorus flaviventris Canestrini & Pavesi, 1868

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. MNHN & OFB [Ed]. 2003-présent. Inventaire national du patrimoine naturel (INPN), Site web : https://inpn.mnhn.fr, consulté le 29 mai 2022
  2. a b c d e f g h i j k et l Christoph Hörweg & Jason Dunlop, « Myrmarachne formicaria ; Spider of the year 2019 », sur European arachnology society
  3. a b c d e et f (en) Nentwig W., Blick T., Bosmans R., Gloor D., Hänggi A., Kropf, « Myrmarachne formicaria (De Geer, 1778) », sur Araneae, spiders of Europe,
  4. a et b (en) Paul S. Shamble, Ron R. Hoyn Itai Cohen and Tsevi Beatus, « Walking like an ant: a quantitative and experimental approach to understanding locomotor mimicry in the jumping spider Myrmarachne formicaria », Proceedings of the royal society, vol. 284,‎ (DOI 10.1098/rspb.2017.0308)
  5. (en) Fiona R. Cross & Robert R. Jackson, « When it looks and walks like an ant », Learning & Behavior, vol. 46, nos 103–104,‎ (DOI 10.3758/s13420-017-0311-0, lire en ligne)
  6. a b et c (en) L. Jones-Walters, « Myrmarachne formicaria a request for information », Spider Recording Scheme Newsletter, vol. 29, no 5,‎
  7. (it) Brignoli, P. M., « I ragni mirmecomorfi », Rendiconti Instituto Lombardo di Scienze e Lettere, vol. 100,‎
  8. (en) VanAlstine, Niaomi and Ophals, Julia, « Success of Batesian Mimicry in the Ant-Mimicking Spider Myrmarachne formicaria », GREAT Day, vol. 89,‎ (lire en ligne)
  9. (en) Pekár, S., & Jiroš, P., « Do ant mimics imitate cuticular hydrocarbons of their models? », Animal Behaviour, vol. 82, no 5,‎ (DOI 10.1016/j.anbehav.2011.09.007)
  10. Ph. Ponel, « Recherches sur la communauté des arthropodes terrestres des sables littoraux de la plage de la Palud (île de Port-Cros) », Travaux scientifiques du Parc national de Port-Cros, vol. 10,‎ , p. 109-117 (lire en ligne)
  11. Denis, J., « Quelques araignées paludicoles de Gironde », Bulletin de la Société entomologique de France, vol. 57, no 5,‎ , p. 78-80
  12. Canard, A., « Résistance à la sécheresse, revêtement tégumentaire et valence écologique de Salticidés », Bulletin de la société neuchâtéloise de sciences naturelles, vol. 116, no 1,‎ , p. 59-66
  13. (en) Richard A. Bradley, Bruce Cutler, and Maggie Hodge, « The first records of Myrmarachne formicaria (Aranae, Salticidae) in the Americas », The Journal of Arachnology, vol. 34, no 2,‎ , p. 483-484 (DOI 10.1636/H04-67.1)
  14. (en) Lawrence Barringer, « First record of Myrmarachne formicaria (De Geer) (Araneae: Salticidae) in Pennsylvania », Insecta Mundi, vol. 0549,‎ , p. 1-2 (lire en ligne)
  15. (de) Bellmann H., Der Kosmos Spinnenführer: Über 400 Arten Europas, Kosmos, , 429 p. (ISBN 3-440-10114-2)
  16. (en) HULA, V., NIEDOBOVÁ, J., & KOŠULIČ, O., « Overwintering of spiders in land-snail shells in South Moravia (Czech Republic) », Acta Musei Moraviae, Scientiae biologicae, vol. 94, no 1,‎ , p. 1-12
  17. World Spider Catalog (WSC). Musée d'histoire naturelle de Berne, en ligne sur http://wsc.nmbe.ch. doi: 10.24436/2, consulté le 29 mai 2022

Liens externes[modifier | modifier le code]

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