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Utilisateur:Heur-history/Brouillon

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L'APROSOMA est l'acronyme qui désigne l'Association pour la promotion sociale de la masse au Ruanda-Urundi[1]. Il s'agit d'un mouvement hutu, actif entre 1957 et 1965. D'abord association, l'APROSOMA deviendra en 1959 un partie politique[2].

Contexte historique[modifier | modifier le code]

À la suite de la défaite de l'Allemagne à l'issue de la Première Guerre mondiale, le conseil des puissances alliées attribue en 1919 à la Belgique le mandat sur le Ruanda-Urundi. Après la Seconde Guerre, une charte des Nations-Unies remplace le régime des mandats par les tutelles, notamment en ce qui concerne l'autorité de la Belgique sur le Ruanda-Urundi en 1949[3].

Les Belges arrivent dans ce pays alors qu'il existe déjà un système hiérarchisé entre les Hutus et les Tutsis. Traditionnellement, les Hutus sont des paysans qui cultivent une terre dont le rendement se révèle trop faible pour faire face à la croissance démographique, alors que les grands troupeaux de bovidés confèrent aux Tutsis une supériorité économique. Leurs possessions leur permettent par la suite d'accéder plus facilement à l'enseignement et aux fonctions les plus importantes dans la société. Il s'opère donc naturellement un système féodal, qui se manifeste à travers un contrat de servage pastoral des Hutus envers les Tutsis appelé Ubuhake[4].

Dès 1956, des tensions politiques apparaissent au cours des élections communales, ainsi qu'avec la publication du Manifeste des Bahutu de mars 1957[5]. De plus, la mort du mwami Mutara, le 25 juillet 1959 ne fera que déstabiliser davantage le pays. En effet, les Tutsis placent sur le trône un jeune roi facilement manipulable, Kigeli V, soucieux de préserver leurs privilèges[6].

Apparition et évolution de l'APROSOMA[modifier | modifier le code]

L'APROSOMA est créée par Joseph Gitera Habyarimana[7] en novembre 1957[8]. Au départ, il s'agit d'une association dont le siège se trouve à Save, dans la région d'Astrida. À travers son journal "Ijwi iya rubanda rugufi"[9], l'APROSOMA encourage les Hutus à lutter contre leur asservissement[10]. L'association située dans le sud du Ruanda est liée au Mouvement social muhutu qui fut quant à lui créé la même année dans le nord du pays. Les deux associations possèdent à la base le même programme et partagent "l'objectif [...] de démocratisation des institutions administratives et politiques du pays et une réforme judiciaire radicale"[11].

Le 15 février 1959, l'association devient un parti politique et les opposants réagissent en créant l'Union national rwandaise (UNAR), un parti traditionaliste, nationaliste et majoritairement composé de Tutsis[12]. Au cours de cette même année, l'APROSOMA est le principal adversaire de l'UNAR[13]. La situation évolue lorsque le Mouvement social muhutu crée son parti politique, le Parmehutu, le 18 octobre 1959[14]. Ce dernier est fondé en raison de leurs désaccords sur les méthodes adoptées pour atteindre leur objectif commun. Le Parmehutu condamne les propos violents que tient le président de l'APROSOMA qui conteste le pouvoir en place. Le parti souhaiterait en effet l'indépendance progressive du pays avec la mise en place d'une monarchie constitutionnelle, d'une constitution démocratique et de réformes sociales. Ces revendications sont exprimées dans une lettre destinée au ministre belge Maurice Van Hemelrijck. En mars, Joseph Gitera écrit une lettre qui est cette fois adressée directement au roi Baudouin[15]. Il est ambigu lorsqu'il aborde le sujet de l'indépendance du pays, souhaitant "voir la Belgique poursuivre son oeuvre civilisatrice"[16], mais demandant à ce que soit instauré "la démocratisation immédiate de l'Administration du pays"[17].

En juin 1959, les Tutsis accusent les leaders de l'APROSOMA de s'opposer au pouvoir du mwami et à l'indépendance du Ruanda. Joseph Gitera Habyarimana réplique en incitant les Hutus à éviter tout contact avec les Tutsis. La virulence des propos du président du parti hutu lui vaut plusieurs réprimandes de la part de la hiérarchie religieuse. Pour cette raison, Aloys Munyangaju le remplace le 17 octobre 1959. Il est beaucoup plus modéré que son prédécesseur à l'égard des Tutsis. En outre, il est favorable à l'union du Ruanda et de l'Urundi, ce qui l'obligera à céder sa place de vice-président de l'Assemblée législative à un député du Parmehutu en 1962. Il a cependant un mandat de député de 1961 à 1965, dans le cadre duquel il se démarque par son respect de la démocratie et de la loi.

Le déclin de l'APROSOMA va se faire progressivement et au profit du Parmehutu, qui récupère les anciens membres de ce dernier. En 1965, les élections législatives marquent la fin de l'APROSOMA. Le Parmehutu devient alors l'unique parti hutu[18].


  1. HALL David, African Acronyms and abbreviations : a handbook, Londres, Mansell, 1996.
  2. "APROSOMA", HASQUIN Hervé (éd.), Dictionnaire d'histoire de Belgique. Les hommes, les institutions, les faits, le Congo belge et le Ruanda-Urundi, 2e éd. rev. et compl., Namur, Didier Hatier, 2000, p. 24-25.
  3. "Les problèmes du Ruanda", dans Courrier hebdomadaire du CRISP, n° 51, 1960/5, p. 2.
  4. DUMONT René, "Décolonisation et développement agricole au Centre-Est de l'Afrique : le Rwanda-Urundi", dans Tiers-Monde, t. 1, n° 4, 1960, p. 426.
  5. WILLAME Jean-Claude, "Le muyaga ou la "révolution" rwandaise revisitée", dans Revue française d'histoire d'outre-mer, t. 81, n° 304, 3e trimestre, 1994, p. 306.
  6. DUMONT René, op. cit., p. 431.
  7. Joseph Gitera Habyarimana est également l'un des signataires du Manifeste des Bahutu.
  8. HASQUIN René (éd.), op. cit..
  9. En français: "La voix du menu peuple".
  10. C.R.I.S.P., op. cit., p. 12.
  11. Ibid., p. 11.
  12. BRAECKMAN Colette, Rwanda : histoire d'un génocide, Paris, Fayard, 1994, p. 45.
  13. HASQUIN Hervé (éd.), op. cit..
  14. C.R.I.S.P., op. cit., p. 11.
  15. Ibid., p. 12-13.
  16. Ibid., p. 13.
  17. Ibid., p. 12-13.
  18. KIMONYO Jean-Paul, Rwanda : un génocide populaire, Paris, Karthala, 2008, p. 157-159.