Utilisateur:Charlestpt/Hauméa

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Hauméa (désignation de planète mineure 136108 Hauméa) est une planète naine située au-delà de l'orbite de Neptune. Elle est découverte en 2004 par une équipe dirigée par Mike Brown de Caltech à l'observatoire Palomar aux États-Unis et indépendamment en 2005 par une équipe dirigée par José Luis Ortiz Moreno à l'observatoire de la Sierra Nevada en Espagne, bien que le contexte de la découverte ait mené à des contreverses. Le 17 septembre 2008, l'objet est nommé d'après Hauméa, la déesse hawaïenne de l'accouchement, par l'Union astronomique internationale (UAI). C'est probablement le troisième plus grand objet transneptunien connu, après Éris et Pluton.

La masse d'Hauméa est environ un tiers de celle de Pluton et 1/1400 fois celle de la Terre. Bien que sa forme n'ait pas été directement observée, les calculs à partir de sa courbe de lumière sont cohérents avec le fait qu'il s'agit d'un ellipsoïde de Jacobi avec son grand axe deux fois plus long que son mineur. En octobre 2017, des astronomes annoncent la découverte d'un système d'anneaux autour de Hauméa, représentant le premier système d'anneaux découvert pour un objet transneptunien.

La forme allongée de Hauméa, sa rotation rapide, ses anneaux et son albédo élévé (à partir d'une surface de glace d'eau cristalline), seraient les conséquences d'une collision géante, qui a laissé Hauméa le plus grand membre d'une famille de collision. Celle-ci, appelée la famille de Hauméa, comprend plusieurs grands objets transneptuniens et les deux lunes connues de Hauméa, Hiʻiaka et Namaka.

Histoire[modifier | modifier le code]

Découverte[modifier | modifier le code]

Deux équipes revendiquent le mérite de la découverte d'Hauméa. Une équipe composée de Michael E. Brown de Caltech, David Rabinowitz de l'Université de Yale et Chad Trujillo de l'Observatoire Gemini à Hawaï découvrent Hauméa le 28 décembre 2004 sur des images qu'ils avaient prises le 6 mai 2004. Le 20 juillet 2005, ils publient un résumé en ligne d'un rapport destiné à annoncer la découverte lors d'une conférence en septembre 2005. À peu près à cette époque, José Luis Ortiz Moreno et son équipe de l'Instituto de Astrofísica de Andalucía de l'Observatoire de Sierra Nevada en Espagne découvrent Hauméa sur des images prises du 7 au 10 mars 2003. Ortiz envoie un courriel au Centre des planètes mineures (MPC) avec leur découverte dans la nuit du 27 juillet 2005.

Brown concède initialement le crédit de découverte à Ortiz, mais en vient à soupçonner l'équipe espagnole de fraude en apprenant que ses journaux d'observation avaient été accédés à partir de l'observatoire espagnol la veille de l'annonce de la découverte.

Ces journaux contenaient suffisamment d'informations pour permettre à l'équipe d'Ortiz de faire une pré-découverte Hauméa dans leurs images de 2003, et ils ont été consultés à nouveau juste avant qu'Ortiz ne prenne l'heure du télescope pour obtenir des images de confirmation pour une deuxième annonce au MPC le 29 juillet. Ortiz admet plus tard avoir accédé aux journaux d'observation de Caltech mais nie tout acte répréhensible, déclarant qu'il ne faisait que vérifier s'ils avaient découvert un nouvel objet. Par la suite, des images de pré-découvertes d'Hauméa sont identifiées le 22 mars 1955.

Le protocole de l'UAI est que le crédit de découverte pour une planète mineure va à celui qui soumet d'abord un rapport au MPC avec suffisamment de données de position pour une détermination décente de son orbite, et que le découvreur crédité a la priorité dans le choix d'un nom. Cependant, l'annonce de l'UAI le 17 septembre 2008 ne mentionne pas de découvreur. L'emplacement de la découverte est répertorié comme l'Observatoire de la Sierra Nevada de l'équipe espagnole mais le nom choisi, Hauméa d'après une déesse hawaïenne, est la proposition Caltech. L'équipe d'Ortiz avait proposé Ataegina, l'ancienne déesse ibérique du printemps, qui en tant que divinité chthonienne aurait été plus appropriée pour un plutino.

Jusqu'à ce qu'on lui donne un nom permanent, l'équipe de découverte de Caltech utilise le surnom de « Père Noël » entre eux, car ils avaient découvert Hauméa le 28 décembre 2004, juste après Noël. L'équipe espagnole est la première à déposer une réclamation pour découverte auprès du Centre des planètes mineures, en juillet 2005. Le 29 juillet 2005, Hauméa reçoit la désignation provisoire 2003 EL 61, d'après la date de l'image de la découverte espagnole. Le 7 septembre 2006, elle est numérotée et admise dans le catalogue officiel des planètes mineures sous le numéro (136108) 2003 EL 61 .

Suivant les directives établies à l'époque par l'UAI, les objets classiques de la ceinture de Kuiper (cubewanos) reçoivent des noms d'êtres mythologiques associés à la création. En septembre 2006, l'équipe de Caltech soumet des noms formels de la mythologie hawaïenne à l'UAI pour (136108) 2003 EL 61 et deux ses lunes afin de "rendre hommage à l'endroit où les satellites ont été découverts". Les noms sont proposés par David Rabinowitz de l'équipe Caltech. Hauméa est la déesse asocciée à l'île d'Hawaï, où se trouve l'observatoire du Mauna Kea. Il s'agit aussi de la déesse de la fertilité et de l'accouchement, de nombreux enfants étant issus de différentes parties de son corps ; ceci rappelle l'essaim de corps glacés pensés s'être détachés du corps principal lors d'une ancienne collision, la famille de Hauméa. Les deux lunes connues, également supposées s'être formées de cette manière, portent le nom de deux des filles de Hauméa, Hiʻiaka et Nāmaka.

La proposition de l'équipe Ortiz, Ataegina, ne répond pas aux exigences de dénomination de l'UAI car les noms des divinités chtoniennes sont réservés aux objets en résonance avec Neptune, tels que les plutinos qui résonnent 3:2 avec Neptune tandis qu'Hauméa est dans une résonance 7:12 seulement intermittente avec la planète. En raison des controverses sur la paternité de la découverte, cette décision est notamment contestée en Espagne.

Cortège[modifier | modifier le code]

Satellites[modifier | modifier le code]

Vue d'artiste d'Hauméa avec ses lunes Hiʻiaka et Namaka. La distance avec ses lunes n'est pas à l'échelle.

Hauméa possède au moins deux satellites naturels : Hauméa I Hiʻiaka et Hauméa II Namaka. Darin Ragozzine et Michael E. Brown les découvrent tous deux en 2005 grâce aux observations de l'observatoire W. M. Keck. Leur spectre ainsi que leur raies d'absorption similaires à ceux d'Hauméa conduisent à conclure qu'un scénario de capture est improbable pour la formation du système et que les lunes se sont probablement formées depuis des fragments provenant d'Hauméa elle-même suite à un impact.

Hauméa et ses lunes, pris en image par Hubble en 2008. Hiʻiaka est la lune la plus brillante et la plus extérieure, tandis que Namaka est la lune intérieure plus sombre.

Hiʻiaka, anciennement S/2005 (136108) 1 et d'abord surnommée Rudolphe par l'équipe de Caltech, est découverte le 26 janvier 2005. C'est la lune la plus extérieure et la plus lumineuse des deux. Elle fait environ 310 km de diamètre et orbite autour de Hauméa de façon presque circulaire tous les 49 jours avec un demi-grand axe d'environ 49 500 km. Seule la masse totale du système est connue, mais en supposant que le satellite possède la même densité et le même albédo qu'Hauméa, sa masse atteindrait 1 % de cette dernière[1]. De fortes caractéristiques d'absorption à 1,5 et 2 micromètres dans le spectre infrarouge indiquent qu'une glace d'eau cristalline presque pure recouvre une grande partie de la surface, ce qui est rare pour un objet de la ceinture de Kuiper[2].

Namaka, anciennement S/2005 (136108) 2 et d'abord surnommée Blitzen (un autre renne du Père Noël), est découverte le 30 juin 2005. Elle fait un dixième de la masse de Hiʻiaka et 170 km de diamètre[1]. Elle orbite Hauméa en 18 jours sur une orbite hautement elliptique inclinée de 13° par rapport à l'autre lune, cause de la perturbation de son orbite. L'excentricité relativement importante ainsi que l'inclinaison mutuelle des orbites des satellites sont inattendues car elles auraient dû être amorties par l'accélération par effet de marée. Un passage relativement récent par une résonance 3:1 avec Hiʻiaka pourrait expliquer les orbites actuelles des lunes d'Hauméa.

À l'heure actuelle, les orbites des lunes apparaissent presque exactement alignées par rapport à la Terre, Namaka occultant périodiquement Hauméa. L'observation de tels transits fournit des informations précises sur la taille et la forme d'Hauméa et de ses lunes, comme cela est le cas pour le système plutonien. Hiʻiaka occulte Hauméa pour la dernière fois en 1999, quelques années avant sa découverte, et ne le fera plus avant 130 ans.

Anneau[modifier | modifier le code]

Le , Hauméa réalise une occultation de l'étoile URAT1 533–182543[3]. Les observations de cet événement par une équipe internationale menée par José Luis Ortiz Moreno de l'Institut d'Astrophysique d'Andalousie dans un article publié dans Nature permettent de déduire la présence d'un anneau fin et sombre autour de la planète naine[4]. Il s'agit alors de la première détection d'un anneau planétaire autour d'une planète naine[3][5].

Simulation de la rotation d'Hauméa, entourée de son fin anneau.

L'anneau mesure près de 70 kilomètres de large, a un albédo géométrique de 0,5 et est situé à 2287 kilomètres du centre d'Hauméa, soit à un peu plus de 1000 kilomètres de sa surface. Il est ainsi largement en dessous de la limite de Roche de la planète naine, qui se trouve à environ 4400 km. Il se rapproche donc plus des anneaux de (10199) Chariclo ou de (2060) Chiron que des anneaux des planètes géantes. L'anneau contribuerait pour 5 % à la luminosité totale de la planète naine.

Le plan de l'anneau est incliné de 3,2 ± 1,4 deg par rapport au plan équatorial de Hauméa et coïncide approximativement avec le plan orbital de sa plus grande lune extérieure, Hiʻiaka. L'anneau est également proche de la résonance spin-orbite 1:3 avec la rotation d'Hauméa (qui correspond à un rayon de 2285 ± 8 km du centre de Hauméa). Dans une étude sur la dynamique des particules annulaires publiée en 2019, Othon Cabo Winter et ses collègues démontrent que la résonance 1:3 avec la rotation de Hauméa est dynamiquement instable, mais qu'il existe une région stable dans l'espace des phases cohérente avec l'emplacement actuel de l'anneau. Cela indique que les particules annulaires proviennent d'orbites circulaires périodiques proches de la résonance, mais pas exactement égales à celle-ci[6].

Famille collisionnelle[modifier | modifier le code]

Inclinaison de certains objets transeptuniens en fonction de leur distance au Soleil. La famille de Haumea est indiquée en vert, les autres cubewanos en bleu, les plutinos en rouge et les objets épars en gris.

Hauméa est le plus grand membre de sa famille collisionnelle, la famille de Hauméa. Il s'agit d'un groupe d'objets astronomiques avec des caractéristiques physiques et orbitales similaires qui se seraient formés lorsqu'un plus grand corps correspondant à une proto-Hauméa aurait été brisé par un impact. Cette famille est la première à être identifiée parmi les objets transneptuniens et comprend, en plus d'Hauméa et de ses lunes, (55636) 2002 TX300 (≈364 km), (24835) 1995 SM55 (≈174 km), (19308) 1996 TO66 (≈200 km), (120178) 2003 OP32 (≈230 km) et (145453) 2005 RR43 (≈252 km).

Michael Brown et ses collègues proposent que la famille est un produit direct de l'impact qui a enlevé le manteau de glace d'Hauméa, mais d'autres astronomes suggèrent une origine différente : le matériau éjecté lors de la collision initiale aurait plutôt fusionné en une grande lune d'Hauméa qui s'est ensuite brisée lors d'une deuxième collision en dispersant ses éclats vers l'extérieur. Ce deuxième scénario semble produire une dispersion des vitesses pour les fragments correspondant plus étroitement à la dispersion de vitesse mesurée empiriquement.

La présence de la famille collisionnelle pourrait impliquer qu'Hauméa et sa «progéniture» proviendraient du disque des objets épars. En effet, dans la ceinture de Kuiper aujourd'hui peu peuplée, la probabilité qu'une telle collision se produise au cours de l'âge du Système solaire est inférieure à 0,1 %. La famille n'aurait pas pu se former dans la ceinture primordiale plus dense de Kuiper car un groupe aussi soudé aurait été perturbé par migration planétaire de Neptune dans la ceinture, la cause supposée de la faible densité actuelle. Par conséquent, il semble probable que la région du disque épars dynamique, dans laquelle la probabilité d'une telle collision est beaucoup plus élevée, soit le lieu d'origine de l'objet qui a généré Hauméa et sa famille. Finalement, parce qu'il aurait fallu au moins un milliard d'années pour que le groupe se diffuse aussi loin qu'il l'a fait, la collision qui a créé la famille Hauméa s'est produite tôt dans l'histoire du Système solaire.

Exploration spatiale[modifier | modifier le code]

Hauméa photographiée par New Horizons en octobre 2007.

Hauméa n'a jamais été survolée par une sonde spatiale.

Joel Poncy et ses collègues estiment qu'une mission de survol d'Hauméa pourrait prendre 14,25 ans en utilisant une assistance gravitationnelle de Jupiter, sur la base d'une date de lancement en septembre 2025. Hauméa serait à 48,18 UA du Soleil à l'arrivée de la sonde. Un temps de vol de 16,45 ans pourrait également être atteint avec des dates de lancement en novembre 2026, septembre 2037 et octobre 2038, respectivement[7].

Hauméa est une cible envisagée pour une mission d'exploration, des travaux préliminaires d'élaboration de sonde destinée à l'étude du système hauméen ayant été réalisés. La masse de la sonde, la source d'alimentation énergétique et les systèmes de propulsion sont des domaines technologiques clés pour ce type de mission[8].

  1. a et b (en) « List of Known Trans-Neptunian Objects », Johnston's Archive, (consulté le )
  2. (en) Water Ice on the Satellite of Kuiper Belt Object 2003 EL61, « Barkume, K. M.; Brown, M. E.; Schaller, E. L. », The Astrophysical Journal, vol. 640, no 1,‎ , L87-L89 (DOI 10.1086/503159, résumé)
  3. a et b LESIA - Observatoire de Paris, « Première détection d’un anneau autour d’une planète naine », sur lesia.obspm.fr, (consulté le )
  4. « Découverte : un anneau autour de la planète naine Haumea - Ciel & Espace », sur www.cieletespace.fr (consulté le )
  5. « Un anneau pour la planète naine Haumea », sur Sciences et Avenir (consulté le )
  6. (en) O. C. Winter, G. Borderes-Motta et T. Ribeiro, « On the location of the ring around the dwarf planet Haumea », Monthly Notices of the Royal Astronomical Society, vol. 484, no 3,‎ , p. 3765–3771 (DOI 10.1093/mnras/stz246, arXiv 1902.03363)
  7. (en) R. McGranaghan, B. Sagan, G. Dove, A. Tullos et al., « A Survey of Mission Opportunities to Trans-Neptunian Objects », Journal of the British Interplanetary Society, vol. 64,‎ , p. 296-303 (Bibcode 2011JBIS...64..296M)
  8. (en) Joel Poncy, Jordi Fontdecaba Baiga, Fred Feresinb et Vincent Martinota, « A preliminary assessment of an orbiter in the Haumean system: How quickly can a planetary orbiter reach such a distant target? », Acta Astronautica, vol. 68, nos 5–6,‎ , p. 622–628 (DOI 10.1016/j.actaastro.2010.04.011, Bibcode 2011AcAau..68..622P)