Stibarsen

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Stibarsen
Catégorie I : Éléments natifs[1]
Image illustrative de l’article Stibarsen
Masse cristalline opaque de stibarsen, dimension 4,7 x 3,3 x 3,3 cm, Elk Mountain ou montagne de l'Élan, comté Gunnison, Colorado
Général
Classe de Strunz
Classe de Dana
Formule chimique AsSb SbAs
Identification
Masse formulaire[2] 196,682 ± 0,001 uma
As 38,09 %, Sb 61,91 %,
Couleur blanc d'étain à gris rougeâtre, blanc gris ou grisâtre à éclat métallique brillant, masse grisâtre parfois tachetée en clair (blanc) et en sombre (noir), gris bleuâtre si très riche en As (ternissement caractéristique à l'air)
Système cristallin Trigonal
Réseau de Bravais hexagonal
a = 4,025 Å ; c = 10,84 Å ; Z = 6 ou a = 4,045 Å ; c = 10,961 Å
V = 155,32 Å3
Classe cristalline et groupe d'espace Hexagonal scalénoédrique ou rhomboèdre
Groupe de point 3m 2/m,
Groupe d'espace R3m (no 166)
Symbole de Pearson hR6
Clivage très parfait dans une direction sur {0001}, clivage difficile sur {1012}
Cassure cassure gris bleuté ou gris sombre, cassure inégale (fragile)
Habitus cristaux lamelleux souvent à lames courbes et fines, parfois pseudo-cubiques, mais le plus souvent indistincts en masse ; lamelles microscristallines ; masses cristallines en nodules, en globules, en agrégats réniformes (forme rénale) ou botryoïdes 'grappes de raisin), en lames courbes ; masses mamelonnées parfois en éléments épais ; forme massive finement grenues, analogue à la galène
Échelle de Mohs 3 à 4, 3,5 pour l'ancienne allemontite
Trait poussière blanche
Éclat métal
Propriétés optiques
Fluorescence ultraviolet non fluorescent
Transparence opaque
Propriétés chimiques
Masse volumique mesurée par Rammelsberg à 20 °C pour l'ancienne allemontite : 6,203 g/cm3
Densité 5,8 à 6,3 (mesuré); 6,37 (calculé)
Fusibilité facile
Solubilité insoluble dans l'eau, mais attaqué par HNO3
Propriétés physiques
Magnétisme aucun

Unités du SI & CNTP, sauf indication contraire.

Le stibarsen ou autrefois l'allemontite est un corps chimique minéral, alliage ou solution solide à base d'arsenic et d'antimoine, de la catégorie des éléments natifs[3]. Il est possible de le qualifier d'antimoniure d'arsenic AsSb ou d'arséniure d'antimoine SbAs selon la prépondérance de l'arsenic ou de l'antimoine. Dans la pratique, une teneur inférieure à 20 % d'un des corps simples éléments natifs est assimilée à une impureté, et le minéral ne peut être du stibarsen, mais soit de l'antimoine natif soit de l'arsenic natif, plus ou moins impur.

Ce minéral, alliage naturel rare à ténacité fragile, se trouve dans les veines hydrothermales et dans certaines pegmatites granitiques. Il est présent dans certains filons métallifères, en masses le plus souvent testacées ou mamelonnées, parfois mais plus rarement en masses lamellaires ou granulaires.

Historique de la description et des appellations successives[modifier | modifier le code]

Le nom anglo-saxon stibarsen est la concaténation des termes abrégés en leur première syllabe, stibium et arsenic, le premier désignant en latin l'antimoine. L'allemonite est l'ancien nom du minéral de formule chimique approchée SbAs3 découvert en France avec le minerai des Challanches, traité en fonderie dans la localité voisine d'Allemont en Isère[4],[5],[6].

Dans les veines de sa montagne, le minéral formait des nodules irréguliers, superficiellement oxydés en kermésite fibreuse et parfois recouvert d'enduit protecteur de valentinite. Le chimiste Sage, bienveillant à l'égard de Romé de l'Isle, avait décrit cette matière minérale distincte en "pyrite arsénicale à facettes hexagones"[7]. L'abbé Haüy qui avait analysé et soupçonné le continuum de composition entre l'antimoine et l'arsenic, proposait la dénomination antimoine natif arsenifère. C'est finalement le minéralogiste autrichien Haidinger qui entérine l'appellation allemontite dans son opus de référence en 1845, intronisant du coup le lieu du premier topotype[8].

Les minéralogistes italiens l'ont retrouvé facilement en Valtelline, ainsi que leurs homologues américains à Comstock Lode dans l'état du Nevada.

Il apparaît aussi dans les pegmatites lithiées à Varuträsk, en Suède[9]. En effet, le minéralogiste et métallurgiste P. E. Wretblad l'a identifié en 1941 à partir d'échantillons trouvés en 1935 par le Dr Olof Ödman du Boliden Gruvaktiebolag dans les pegmatites LCT à Varuträsk, Skellefteå, dans la région du Västerbotten[10].

Le stibarsen est considéré comme un mélange ou alliage mal défini d'arsenic et d'antimoine[11] et sa description holiste en 1941, paradoxalement basée sur le topotype de Varustrâk, propose de garder une appellation unique stibarsen pour AsSb et l'allemontite ainsi que les différents mélanges intimes d'antimoine et d'arsenic[12]. Depuis 1982, l'International Mineralogical Association ou IMA a prononcé la déchéance du nom français en considérant pour de pragmatiques raisons que seul le minéral stibarsen est apte à décrire et référencer la diversité d'association de ces deux éléments natifs[13].

Cristallographie et cristallochimie[modifier | modifier le code]

La justification de ce choix apparaît clairement dans le fait que le stibarsen a bien la même structure cristalline que l'arsenic natif et l'antimoine natif, tout en dévoilant des valeurs intermédiaires de paramètres du réseau cristallin. La structure de groupe d'espace R3m No. 166 est dans la littérature tantôt décrite comme hexagonale, trigonale ou rhomboédrique à cause du chevauchement entre ces descriptions selon le réseau de Bravais et le système cristallin (système cristallin trigonal). La diffraction X mesure des intensités caractérisant des empilements ordonnés ou partiellement ordonnés d'atomes de Sb et As en sous-réseau SbAs[13]. Les atomes s'arrangent en couches voilées de structure graphite qui se déploient selon l'axe c. Il existe des liaisons faibles entre ses couches, ce qui explique la faible dureté de l'arsenic natif As, de l'antimoine Sb et du stibarsen AsSb.

Minéral a
(nm)
c
(nm)
ρ
(g/cm3)
ref.
As 0.376 1.055 5.78 [14]
AsSb 0.4025 1.084 6.37 [13]
Sb 0.43056 1.125 6.72 [15]

Propriétés physiques et chimiques, toxicologie[modifier | modifier le code]

Pour un chimiste, l'arsenic et l'antimoine forment des solutions solides continues[16].

La couleur du stibarsen est un gris métallique moins blanc que l'antimoine natif. L'altération est souvent similaire à celle de l'antimoine.

Chauffé au chalumeau, il fond avec des fumées à la fois arsenicales et antimonieuses. Le résidu forme un globule métallique qui prend feu et brûle en laissant un enduit blanc d'acide antimonieux.

L'allemontite, de même que le stibarsen, est décomposée par l'acide nitrique, le résidu blanc est à base d'acide antimonique.

Gîtes et gisements[modifier | modifier le code]

Les sections polies de la plupart des pièces minérales d'allemontite montrent des excroissances d'allemontite, soit avec de l'arsenic natif formé dans une veine ou avec de l'antimoine quasi-pure dans des pegmatites granitiques. Des variétés homogènes d'allemontite, à composition variable, nommées stibarsen ont été mises en évidence à Varuträsk en Suède.

Association minérale : antimoine natif, arsenic natif, quartz, sidérite

Gisements relativement abondants ou caractéristiques[modifier | modifier le code]

Structure cristalline commune à As, Sb et AsSb
  • Allemagne
  • Australie
  • Autriche
  • Bolivie
  • Canada
Dépôt aurifère de Hemlo près du Lac Supérieur, Ontario
Mine de l'Ingénieur, Atlin, Colombie Britannique
  • Chine
  • États-Unis
  • Finlande
  • France
Anciennes mines d'argent des Chalanches, Allemont, Isère, région Rhône-Alpes, France
  • Grèce
  • Italie
  • Japon
  • Mexique
Rio Moctezuma, Sonora
  • Pologne
  • Russie
  • Slovaquie
  • Suède
Varutrask, Skelleftea, Vasterbotten
  • Tadjikistan
  • Tchéquie
Přibram, Bohême

Usages[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. La classification des minéraux choisie est celle de Strunz, à l'exception des polymorphes de la silice, qui sont classés parmi les silicates.
  2. Masse molaire calculée d’après « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
  3. Un autre synonyme est wretbladite, du nom du métallurgiste P. E. Wretblad qui l'a étudié.
  4. Stibarsen.
  5. Allemontite.
  6. L'analyse de l'allemontite des Chalanches a été réalisée par M. Rammelsberg, et publiée dans le PA Tome LXII page 137 en 1834.
  7. Sage, Éléments de Minéralogie, tome II, 1777 page 71.
  8. Handbuch der Mineralogie, 1845, page 557.
  9. Quensel, P., Ahlborg, Knut & Westgren, A. Minerals of the Varuträsk Pegmatite. II. Allemontite: With an X-ray Analysis of the Mineral and of other Arsenic-Antimony Alloys. Geologiska Föreningens i Stockholm Förhandlinger. 59 (1937) p. 135-144
  10. Wretblad, P.E., Minerals of the Varuträsk Pegmatite XX. Die Allemontite und das System As-Sb. Geologiska Föreningens i Stockholm Förhandlinger, 63 (1941), p. 19-48.
  11. allemontite.
  12. Michael Fleischer "New mineral names" American Mineralogist 26 (1941) 456
  13. a b et c Peter Bayliss Crystal chemistry and crystallography of some minerals in the tetradymite group American Mineralogist, 76 (1991) 257–265
  14. Takumi Kikegawa et Hiroshi Iwasaki, « Pressure-Induced Rhombohedral-Simple Cubic Structural Phase Transition in As », Journal of the Physics Society Japan, vol. 56, no 10,‎ , p. 3417 (DOI 10.1143/JPSJ.56.3417)
  15. Won-Sa Kim, « Solid state phase equilibria in the Pt–Sb–Te system », Journal of Alloys and Compounds, vol. 252,‎ , p. 166 (DOI 10.1016/S0925-8388(96)02709-0)
  16. W. B. Pearson (dir.), A Handbook of Lattice Spacings and Structures of Metals and Alloys, page alliage As-Sb, p. 402-403.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • P.E. Wretblad, Bulletin de la société minéralogique, tome 74, 1951, page 189.
  • G. Gagarin et R. Cuomo, Bulletin de la société de minéralogie et de cristallographie, tome 75, 1952, page 324.
  • American Mineralogist 76, 1991, p. 257-265.
  • W. B. Pearson (dir.), A Handbook of Lattice Spacings and Structures of Metals and Alloys: International Series of Monographs on Metal Physics and Physical Metallurgy, Volume 4, Elsevier, 2013, 1054 pages.
  • Henri-Jean Schubnel, Jean-François Poullen, Jacques Skrok et Gérard Germain (coordination), Larousse des minéraux, Paris, Larousse, , 363 p. (ISBN 978-2-035-18201-2, OCLC 8629543). Entrée 'allemontite' p. 60.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Liens externes[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]