Pierre de Montmaur

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Pierre de Montmaur
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Professeur, hellénisteVoir et modifier les données sur Wikidata
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Collège de France (-)Voir et modifier les données sur Wikidata
Ordre religieux

Pierre de Montmaur, né en 1576 à Bétaille, dans le Quercy, et mort le à Paris, est un érudit, helléniste et poète français d’expression latine.

Biographie[modifier | modifier le code]

D’extraction obscure, Pierre de Montmaur, ordonné jésuite à Bordeaux, enseigna dans plusieurs collèges de l’ordre notamment à Périgueux et à Rome, pour être finalement nommé en 1623 professeur royal de littérature grecque au Collège de France où il demeura pendant 25 ans. Bibliophile, érudit, contemporain de Gilles Ménage, de Vincent Voiture et de Jean-Louis Guez de Balzac, il était un esprit profondément cultivé, polémiste à la verve inépuisable.

On pouvait lire, tracée de sa main en marge d'un livre de sa bibliothèque, la devise suivante : Quid scimus? Quid sumus? quid possumus?[1]

Doué d’une mémoire prodigieuse mais jouant les ignorants, d’une maigreur extrême mais doté d’un grand appétit, ses bons mots le firent admettre à la table des grands, auxquels ils disait plaisamment : « Fournissez les viandes et le pain, je me charge du sel. »

Lors de ces dîners — qu’il disait fréquenter par pure avarice — il profère mille saillies, afin d’exaspérer les « gens bien » qui le vouent rapidement aux gémonies. Il disait ainsi d’un financier chez qui tout le monde allait pour sa table mais que l’on trouvait fort ennuyeux : « On le mange, mais on ne digère pas. »

Un autre jour à table en grande et joyeuse compagnie, qui parlait, chantait et riait tout ensemble, il s’écria : « Eh ! Messieurs, un peu de silence ; on ne voit plus ce que l’on mange. »

Il se plaisait à se désigner lui-même comme "Le plus grand parasite que le globe ait jamais porté" et, faisant office de « poète-scribouille », prétendait vivre d’amour et d’eau croupie à croupetons, etc. Loin de l’eau croupie, il fut de fait le plus grand parasite du règne de Louis XIII.

Parasite littéraire également ? Il pasticha les textes des Grands Anciens. Iconoclaste, pour échapper à un avenir qu’il jugeait terne, il s’adonne à la composition d’anagrammes et d’acrostiches faute de briller comme avocat ou écrivain. Malgré son titre de « professeur royal », il exaspère rapidement par ses diatribes les grands de son temps.

Grand lettré, flirtant avec le burlesque, il sut se faire, par ses railleries, beaucoup d’ennemis parmi les gens de lettres et fut l’objet de leurs sarcasmes. On lui reprochait surtout sa pédanterie. Pour les exaspérer davantage, il se définissait comme le grotesque-pédant. On finit par lui donner pour emblème un âne au milieu de chardons, avec cette devise : « Pungant, dum saturent ».

En 1643, Jean-François Sarrasin, publiant (en latin) sa satire du Bellum parasiticum se joignit à l’avocat Charles Feramus et à Gilles Ménage pour lancer la guerre des pamphlets contre le « parasite pédant ».

Ils sont bientôt rejoints par Scarron, Charles Vion d'Alibray et Charles Sorel, qui l'attaquent en français cette fois-ci, et le ridiculisent sous les noms de Macrinus, Gargilius, Gomor, Mogor, Faimmort, Orbilius Musca, Gastrimargue

Mais ces satires ne sont pour le grand public que bataille de « cuistres contre cuistre » et ne semblent pas lui avoir porté grand tort.

Le , il est remplacé comme professeur de grec au Collège royal de France par Jean Aubert.

Il meurt le . Dubuisson-Aubenay note dans son Journal : «Mort du sieur de Montmor (sic), professeur royal en grec et intendant des devises et inscriptions pour les bâtiments royaux de France, d’une pleurésie, au septième jour. Il avait bénéfices, titres ou offices du Roi, rentes et beaucoup d’argent.»

Dans une lettre à Charles Spon datée du 1er avril suivant, Gui Patin écrira[2] : «Je vous dirai que le (sic) mourut ici un professeur du roi nommé Petrus Montmaur. C’était un très savant homme en grec et en latin, præsertim in lectione poetarum. Il avait une mémoire prodigieuse, débitait plaisamment et agréablement de belles et bonnes choses partout où il se trouvait, non sine jactantia et interdum mendacio, ce qui l’avait fait passer ici pour un grand emballeur, et même, ante aliquot annos, on fit plusieurs vers contre lui sous le nom de Mamerra (sic). Il savait et connaissait toutes les bonnes tables de Paris, desquelles ou de la plupart il avait été chassé comme un parasite, non sine dedecore et infamia. Il avait été autrefois jésuite, d’où il fut chassé pour quelque fausseté qu’il avait mise et fabriquée en quelques lettres. Il était natif du vicomté de Turenne. C’était un grand corps d’homme, grand vanteur et grand mazarin, vir malorum artium et malarum partiumNicolas Bourbon lui donne le titre de "Dictator parasiticæ artis".

Quelques mois plus tard, au cours de l'été 1650, le jeune François de La Mothe Le Vayer, fils du philosophe, fait paraître à Paris, sous l'anonymat, un roman burlesque intitulé Le Parasite Mormon.

Postérité[modifier | modifier le code]

Moins sévère que celle du XVIIe siècle, la critique contemporaine (voir Mark Bannister) le verrait plutôt s’inscrire dans une filiation humoristique qui ferait de lui un descendant de Villon et un précurseur de Voltaire

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Ferdinand de Laroussilhe, Note sur l'origine de Pierre de Montmaur"
  2. Gui Patin, Lettres (lire en ligne), p. I, p. 519

Sources[modifier | modifier le code]

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Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie sommaire[modifier | modifier le code]

  • Adrien de Valois, Valesiana, Paris, 1694, p. 36-38 (lire en ligne).
  • Nicolas de Bourbon, Borboniana, ou Fragment de littérature et d’histoire, dans Mémoires historiques, critiques et littéraires, par feu M. Bruys, t. II, Paris, 1751, p. 300-303, lire en ligne.
  • Claude-Pierre Goujet, Mémoire historique et littéraire sur le Collège royal de France, chez Augustin-Martin Lottin, Paris, 1758, tome 2, p. 555-566 (lire en ligne)
  • Pierre Bayle, Dictionnaire historique et critique, Desoer libraire, Paris, 1820 (nouvelle édition), tome 10 p. 500-514 (lire en ligne)
  • Albert-Henri Sallengre, Histoire de Pierre de Montmaur, professeur royal en langue grecque dans l'Université de Paris, 2 tomes, La Haye, 1715 (lire en ligne).
  • Auguste-Simon Irailh, Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l'histoire des révolutions de la république des lettres depuis Homère jusqu'à nos jours, Paris, 1761, I, p. 171-183.
  • Émile Fage, « Pierre de Montmaur le parasite », Bulletin de la Société des lettres, sciences et arts de la Corrèze, Tulle, 1881, p. 371-406 (lire en ligne).
  • Ferdinand de Laroussilhe, « Note sur l'origine de Pierre de Montmaur », Bulletin de la Société des études littéraires, scientifiques et artistiques du Lot, tome VII, Cahors, 1881, p. 298-301.
  • (la) N-M., Bernardin, De Petro Monmauro Graecarum Litterarum Professore Regio et ejus obtrectatoribus, Paris, 1895 (lire en ligne).
  • (en) Mark Bannister, 'The Montmaur Affair: poetry versus pedantry in the seventeenth century', French Studies XXXIII (oct. 1979), p. 397-410
  • (en) Ingrid A. R. De Smet, « Montmaur the pedant-parasite: Menippean satire in the Parisian salons », chapitre 7 de Menippean Satire and the Republic of Letters, 1581-1655 (Droz, Genève, 1996).
  • François de La Mothe Le Vayer, le fils, Le Parasite Mormon, Histoire comique, publié en 1650 sans nom d'auteur ni adresse (lire en ligne).
  • Claudine Nédélec & al., Discours sur les Œuvres de Monsieur Sarasin [et autres textes], dans L’Esthétique galante. Toulouse, Société de littératures classiques, 1989 [éd. par Alain Viala, Emmanuelle Mortgat, Claudine Nédélec, et Marina Jean].
  • Claudine Nédelec, « Burlesques et polémiques », Littératures classiques, vol. 59, no. 1, 2006, pp. 28-46.
  • « L’Affaire Pierre de Montmaur », colloque de l'Institut Universitaire de France, Université de Valenciennes (CALHISTE) et Université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines (ESR), Saint-Quentin-en-Yvelines et Paris, 14 et . (Actes à paraître)

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]