Alfred Maury

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Alfred Maury, né le à Meaux[1] et mort le à Paris, est un érudit français[2],[3].

Biographie[modifier | modifier le code]

Ayant terminé ses études, il entre à la Bibliothèque nationale en 1836, puis à la Bibliothèque de l’Institut le [3], où il se consacre à l’étude de l’archéologie, des langues anciennes et modernes, de la médecine et du droit. Doté d'une grande capacité de travail, d'une mémoire remarquable et d'un solide esprit critique, il produit sans grand effort bon nombre d'articles et d'ouvrages sur les sujets les plus divers. Il rend de grands services à l’Académie des inscriptions et belles-lettres[3], dont il est élu membre en 1857.

Alfred Maury est notamment un ami de Flaubert. Celui-ci aurait utilisé ses travaux historiques pour se documenter en vue de la rédaction de Salammbô.

Napoléon III emploie Maury dans un travail de recherche relatif à l’Histoire de César et il en est récompensé, proportionnellement à sa participation active, quoique modeste, à cette œuvre, par les postes de bibliothécaire des Tuileries (1860), professeur au Collège de France (1862) et directeur-général des Archives (1868). Ce n'est toutefois pas à la faveur impériale qu'il dut ces postes élevés.

Utilisant son influence pour l'avancement de la science et de l'éducation supérieure, il est, avec Victor Duruy, un des fondateurs de l'École des Hautes Études. Il meurt en son domicile dans le 6e arrondissement de Paris quatre ans après avoir pris sa retraite de son dernier poste, le [4].

Distinctions[modifier | modifier le code]

Publications[modifier | modifier le code]

Parmi ses nombreux ouvrages, on peut citer:

  • Les Fées au Moyen Âge et Histoire des légendes pieuses au Moyen Âge, deux livres remplis d'idées ingénieuses qui furent publiés en 1843 et réédités après la mort de l'auteur, avec de nombreux ajouts, sous le titre Croyances et légendes du Moyen Âge (1896);
  • Histoire des grandes forêts de la Gaule et de l'ancienne France (1850, une 3e édition corrigée parut en 1867 sous le titre Les Forêts de la Gaule et de l'ancienne France);
  • La Terre et l'Homme ou Aperçu historique de géologie, de géographie et d’ethnologie générales, servant d'introduction à l’Histoire universelle de Victor Duruy (1854);
  • Histoire des religions de la Grèce antique (3 vol., 1857-1859);
  • La Magie et l'astrologie dans l'Antiquité et au Moyen Âge (1860);
  • Histoire de l'ancienne Académie des sciences (1864);
  • Histoire de l'Académie des Inscriptions et Belles Lettres (1865);
  • un texte sur les rapports de l'archéologie française, écrit à l'occasion de l'Exposition universelle (1867);
  • plusieurs articles dans l'Encyclopédie moderne (1846-1851), dans la Biographie universelle de Michaud (1858 et années suivantes), dans le Journal des savants, dans la Revue des deux Mondes (1873, 1877, 1879-1880, etc.)

Une bibliographie détaillée de ses œuvres a été placée par Auguste Longnon en entête du volume Les Croyances et légendes du Moyen Âge[5].

Études sur le rêve[modifier | modifier le code]

Alfred Maury est aussi connu pour ses recherches sur le sommeil, lesquelles posent les prémisses de l'étude neurobiologique du rêve[6]. Dans Le Sommeil et les rêves[7] (1861), il présente les résultats d'une série d'études expérimentales : il expose des dormeurs à des stimuli externes pour observer si ceux-ci influencent le contenu onirique ; réveillant des sujets à intervalles réguliers, il remarque que les souvenirs d'activité onirique sont rares, infirmant l'idée que le rêve se produit de façon permanente pendant le sommeil (jusqu'alors, on ne situait pas le rêve dans une structure temporelle au sein du sommeil).

Principal représentant d’une théorie organique du rêve, Alfred Maury fit l'hypothèse qu'il était un phénomène épisodique ou aléatoire survenant à des moments particuliers : pendant l'endormissement, sous l'influence de stimuli externes ou internes ou avant le réveil[6]. Il fit plusieurs observations que l'on retrouve reprises par la psychanalyse ou parfois confirmées par la neuropsychologie : le matériau du rêve est constitué d'anciens souvenirs enfouis que certains événements du jour précédent ont ravivé ; les rêves ne sont pas aussi incohérents qu’ils le paraissent mais, comme les idées sont présentées sous forme d'images et comme la liaison entre elles s’opère par analogie, ces liens nous deviennent généralement incompréhensibles au réveil[8].

Enfin, le récit de son « rêve de la guillotine[n 1] » est resté célèbre[6] et a soutenu l'idée que de longs rêves pouvaient se produire en une fraction de seconde au réveil, hypothèse reprise de nos jours par le neurobiologiste Jean-Pol Tassin. De nombreuses personnalités vont commenter ce songe de Maury - comme Sigmund Freud et Theodor Reik - pour appréhender différentes facettes du fonctionnement psychique (Tréhel, G., 2018).

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. « J’étais un peu indisposé, et me trouvais couché dans ma chambre, ayant ma mère à mon chevet. Je rêve de la Terreur ; j’assiste à des scènes de massacre, je comparais devant le tribunal révolutionnaire, je vois Robespierre, Marat, Fouquier-Tinville, toutes les plus vilaines figures de cette époque terrible ; je discute avec eux ; enfin, après bien des événements que je ne me rappelle qu’imparfaitement, je suis jugé, condamné à mort, conduit en charrette, au milieu d’un concours immense, sur la place de la Révolution ; je monte sur l’échafaud ; l’exécuteur me lie sur la planche fatale, il la fait basculer, le couperet tombe ; je sens ma tête se séparer de mon tronc ; je m’éveille en proie à la plus vive angoisse, et je me sens sur le cou la flèche de mon lit qui s’était subitement détachée, et était tombée sur mes vertèbres cervicales, à la façon du couteau d’une guillotine. Cela avait eu lieu à l’instant, ainsi que ma mère me le confirma, et cependant c’était cette sensation externe que j’avais prise, comme dans le cas cité plus haut, pour point de départ d’un rêve où tant de faits s’étaient succédé. » (Alfred Maury, Le Sommeil et les rêves, (lire en ligne), chap. VI).

Références[modifier | modifier le code]

  1. Selon son état civil sur le registre de naissance des archives de Seine-et-Marne.
  2. Nicole Edelman, « Jacqueline Carroy et Nathalie Richard [dir.], Alfred Maury, érudit et rêveur. Les sciences de l’homme au milieu du XIXe siècle », Revue d’histoire du XIXe siècle, no 36,‎ (lire en ligne, consulté le )
  3. a b et c Wallon Henri, « Notice sur la vie et les travaux de M. Louis-Ferdinand-Alfred Maury, membre de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres », Comptes-rendus des séances de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, no 6,‎ , p. 530-579. (lire en ligne, consulté le )
  4. Archives de Paris 6e, acte de décès no 418, année 1892 (page 24/31)
  5. Article « Alfred Maury » de l'Encyclopædia Britannica 1911
  6. a b et c Michel Jouvet, Le Sommeil et le rêve, Odile Jacob, , p. 40-41
  7. Alfred Maury, Le Sommeil et les rêves. Études psychologiques sur ces phénomènes et les divers états qui s’y rattachent, suivies de recherches sur le développement de l’instinct et de l’intelligence avec le phénomène du sommeil, Didier, .
  8. Alfred Maury, Le Sommeil et les rêves, (lire en ligne), chap. VI.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Sources[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Charles-Olivier Carbonell, Histoire et Historiens. Une mutation idéologique des historiens français, 1865-1885., Toulouse, Privat, .
  • Jacqueline Carroy et Nathalie Richard (dir.), Alfred Maury érudit et rêveur. Les sciences de l'homme au milieu du XIXe siècle, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, .
  • Gilles Tréhel, Alfred Maury, Sigmund Freud, Theodor Reik et le rêve de la guillotine. Psychothérapies, 2018, 38(3), 215-224.

Liens externes[modifier | modifier le code]

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