Intégrale de Dirichlet

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L'intégrale de Dirichlet est l'intégrale de la fonction sinus cardinal sur la demi-droite des réels positifs

.

Il s'agit d'une intégrale impropre semi-convergente, c'est-à-dire qu'elle n'est pas absolument convergente () mais existe et est finie.

Étude de la convergence[modifier | modifier le code]

On considère la fonction

En 0, sa limite à droite vaut 1, donc f est prolongeable en une application continue sur [0, +∞[, si bien qu'elle est intégrable sur [0, a] pour tout a > 0.
Mais elle n'est pas intégrable en +∞, c'est-à-dire que

[1].

Cependant,

  • Dirichlet[2], dans son article historique de 1829 sur les séries de Fourier, mentionne en passant une preuve fondée sur le critère de convergence des séries alternées[3] :
    « On sait que a une valeur finie et égale à π/2. Cette intégrale peut être partagée en une infinité d'autres, prises la première depuis γ = 0 jusqu'à γ = π, la seconde depuis γ = π jusqu'à γ = 2π, et ainsi de suite. Ces nouvelles intégrales sont alternativement positives et négatives, chacune d'elles a une valeur numérique inférieure à celle de la précédente […]. » ;
  • dans le même esprit, la règle d'Abel pour les intégrales — ou une simple intégration par parties — fournit une preuve de convergence[4],[5] ;
  • les méthodes ci-dessous de calcul de l'intégrale fournissent encore d'autres preuves de son existence.

Calcul de l'intégrale[modifier | modifier le code]

Avec des suites[modifier | modifier le code]

La méthode consiste à poser

et à montrer que la différence de ces deux suites tend vers 0, que la première est constante, égale à π/2, et que la deuxième tend vers l'intégrale de Dirichlet[3],[6].

Avec le théorème des résidus[modifier | modifier le code]

En remarquant que x ↦ (sin x)/x est la partie imaginaire de x ↦ eix/x et en considérant la fonction complexe F : z ↦ eiz/z, le théorème des résidus appliqué aux intégrales du quatrième type, permettant de calculer une valeur principale de Cauchy — ou plus simplement ici : le théorème intégral de Cauchy —, donne le résultat voulu.

Plus précisément, F admet un unique pôle, en 0. Considérons le contour défini comme suit : pour deux réels R > ε >0, on choisit les demi-cercles et de centre O, de rayons R et ε, situés dans le demi-plan supérieur et on les relie par deux segments I et J. Cette courbe délimite un domaine borné du plan ne contenant pas l'origine.

Contour pour l'intégrale de Dirichlet.

Le théorème de Cauchy donne alors

d'où, en faisant tendre R vers +∞ et ε vers 0 :

ce qui permet de conclure :

On peut aller un peu plus vite en considérant la fonction z ↦ (eiz – 1)/z qui se prolonge en une fonction entière. On intègre alors sur le contour constitué du demi-cercle et de l'intervalle [–R, R]. Par le théorème intégral de Cauchy,

d'où, en faisant tendre R vers +∞ :

et l'on conclut comme précédemment.

Avec une transformée de Laplace[modifier | modifier le code]

On utilise la formule suivante des transformée de Laplace : si , alors .

Ainsi, en utilisant , d'où .

En revenant à la définition de la transformation de Laplace, la propriété admise donne alors

.

En passant à la limite[7] quand , on obtient .

Avec la « technique de Feynman »[modifier | modifier le code]

On considère l'intégrale paramétrique  ; on remarque déjà que l'intégrale de Dirichlet correspond à I(0).

Cette fonction est dérivable et la dérivée vaut :

Ainsi, , et faire tendre y vers l'infini permet d'établir que c = π/2. On en déduit que I(0) = π/2.

Non convergence absolue de l'intégrale[modifier | modifier le code]

La convergence de équivaut à celle de la série de terme général positif  ; or d'après la preuve sans mot figurée ci-contre, , d'où la divergence de la série donc de l'intégrale.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Voir par exemple cet exercice corrigé sur Wikiversité.
  2. Mr. Lejeune-Dirichlet, « Sur la convergence des séries trigonométriques qui servent à représenter une fonction arbitraire entre des limites données », J. reine angew. Math., vol. 4,‎ , p. 157-169 (p. 161) (arXiv 0806.1294).
  3. a et b Comme f est nulle à l'infini, pour étudier la limite éventuelle de son intégrale de 0 à a quand a +∞, il suffit de le faire pour a parcourant les valeurs d'une suite arithmétique arbitraire.
  4. S. Balac et F. Sturm, Algèbre et analyse : cours de mathématiques de première année avec exercices corrigés, PPUR, (lire en ligne), p. 940.
  5. Pour cette preuve et une variante, voir le devoir corrigé « Intégrale de Dirichlet » sur Wikiversité.
  6. Voir le devoir corrigé « Intégrale de Dirichlet » sur Wikiversité.
  7. Ce passage à la limite est justifié comme suit dans les p. 6-7 de (en) J. Michael Steele, « A scholium on the integral of and related topics », sur Wharton School, UPenn,  : d'après la deuxième formule de la moyenne, .

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Nino Boccara, Fonctions analytiques [détail de l’édition]
  • (de) Hans Fischer, « Die Geschichte des Integrals : eine Geschichte der Analysis in der Nussschale », Math. Semesterber., vol. 54, no 1,‎ , p. 13-30