Edward Lee (évêque)

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Edward Lee
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Archevêque d'York
Ancien archidiocèse d'York (d)
à partir du
Henry de Bruto (d)
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Edward Lee (v. 14821544) est un diplomate et ecclésiastique anglican, qui fut archevêque d'York de 1531 à sa mort.

Biographie[modifier | modifier le code]

Sa jeunesse[modifier | modifier le code]

Petit-fils du lord-maire de Londres Richard Lee, il naquit dans le Kent, d'où sa famille était originaire, sans doute en 1482. Thomas More était un ami de sa famille : il dédia l'un de ses premiers essais, Life of John Picus, à la sœur d'Edward, Joyce, qui était clarisse[1],[2].

Lee fut élu fellow de Magdalen College (Oxford) en 1500. Licencié ès arts, il partit pour Cambridge dès 1503, certainement à cause d'une épidémie de peste. C'est ainsi qu'il obtint le diplôme de maître ès arts à Cambridge en 1504[3], et fut ordonné diacre de l'église de Wells (Norfolk). En 1512 il obtint une prébende à Lincoln, puis une dispense pour sa licence de théologie, mais il n'obtint ce diplôme qu'en 1515, année où il obtint la charge d'avoué[4]. Thomas Cranmer passait sa maîtrise en 1515, et fit ainsi connaissance de celui qui serait son futur archevêque ; Lee lui obtint en effet un premier office auprès de la Cour (1526) : celui de commis d'ambassade en Espagne[5].

Controverses avec Érasme[modifier | modifier le code]

Il fréquenta en 1518 l’université de Louvain pour y étudier le grec ancien, et là il fit la connaissance d'Érasme, qui à ce moment s'affairait à passer le Nouveau Testament au crible de la critique humaniste[6]. D'un désaccord aimable entre les deux hommes surgirent rapidement diverses polémiques, Lee se faisant le défenseur de la tradition[7].

Érasme demanda par écrit à Lee d'expliciter certaines de ses annotations, mais dès 1519, Lee se posait en adversaire décidé d'Érasme, lequel déclara que Lee était un jeune homme avide de gloire, qui avait pour cette raison répandu des rumeurs sur son compte ; il se plaignit en outre que Lee avait discrédité à son insu son Nouveau Testament auprès de plusieurs congrégations, et il mit en garde Lee contre la rancœur des universitaires allemands. Toute l'année 1520, la controverse continua de se déchaîner, avec une égale violence de part et d'autre. Érasme affirma que le principal partisan de Lee était Henry Standish : il composa ses Epistolæ aliquot Eruditorum Virorum et adressa au roi Henri VIII une Apologie[4]. Thomas More, qui avait connu Lee depuis l'enfance, déplorait ces déchirements, et il s'entremit pour une réconciliation au moins formelle, à l'occasion des tractations diplomatiques entre Henri VIII et François Ier au Camp du Drap d'Or en 1520[8] ; la querelle ne s’apaisa toutefois que très lentement, et ne s'éteignit qu'en 1522[9].

Lee, par une analyse textuelle poussée, qui sera imitée plus tard par les érudits Noël Béda et Rodolfo Pio, avait réuni une multitude d'objections théologiques à L’Éloge de la Folie[10],[11]. Ainsi à propos de l’extase, il accuse Érasme de complaisance avec l'interprétation des mystiques rhénans, jugée hérétique par l’Église[12]. Érasme, s'il put facilement se disculper de toute assimilation avec les Béguines et les Turlupins, eut quelque peine à prendre ses distances avec Maître Eckhart ou Jean Tauler[13]. Ses écrits frisaient véritablement l’hérésie de Montanisme[10], et il se trouva ainsi rejeté sur la défensive : il évita désormais d'employer le terme d’« esprit » à cause de ses résonances platoniciennes[14].

Relations avec le roi[modifier | modifier le code]

En 1523, le roi le chargea d'accompagner Henry Parker (10e baron Morley) et William Hussey en ambassade auprès de l'archiduc Ferdinand d'Autriche pour lui remettre l’Ordre de la Jarretière, et ainsi exhorter le prince Habsbourg à poursuivre le combat contre les Luthériens et François Ier. Lee était en fait le négociateur de cette légation. Promu chapelain royal, il obtint dans l'année l’archidoyenné de Colchester. La Couronne le dépêcha par deux fois en ambassade auprès de Charles Quint en Espagne avec Francis Poyntz (1525, 1529), puis en janvier 1530 auprès du pape Clément VII et de l'empereur à Bologne, en compagnie du comte de Wiltshire et de John Stokesley, pour obtenir leur approbation de la répudiation de la reine Catherine d'Aragon[4].

Il rentra en Angleterre au printemps. En 1529 il fut promu chancelier de l'église de Salisbury, obtint en 1530 une prébende à York et à la chapelle royale, et enfin fut reçu Docteur en Théologie de l'université d'Oxford. Il sut bientôt se rendre indispensable à la Cour en s'occupant du divorce royal : le 1er juin 1531, il fut l'un des négociateurs dépêchés après de la reine pour la convaincre de renoncer à ses prérogatives. En septembre, le roi Henri sollicita du pape la nomination de Lee à l'archevêché d'York. Le 13 octobre, Lee et d'autres intercédèrent auprès de la reine Catherine pour l'inciter à retirer son appel auprès du Saint-Siège et se soumettre aux avis des évêques et docteurs de l'Université. Le pape Clément fulmina une bulle proclamant Lee archevêque le 30 octobre ; Lee fut consacré par le diocèse d'York le 10 décembre, et il fut intronisé par ses proches le 17 décembre[4].

Les difficultés financières le contraignent à poursuivre sa cour auprès du roi et de Thomas Cromwell, qu'il aide à rentrer en grâce à la chute du ministre Wolsey ; toutefois, en février 1533, il refuse, tout comme Étienne Gardiner de parapher un acte stipulant que le mariage avec Catherine était frappé de nullité ab initio ; mais il obtient du chapitre d'York l'approbation des motifs du divorce. Après l'exécution d'Elizabeth Barton et de ses complices, en avril 1534, la rumeur courut que Lee et d'autres prélats seraient incarcérés à la tour de Londres, ce qui n'eut pas lieu.

Il tenta, avec l'évêque Stokesley, de convaincre John Houghton, chartreux martyr détenu à la tour de Londres, de renoncer à la cause de la succession, moyennant quoi il aurait la vie sauve. Le 21 mai, il se rendit avec l'évêque de Durham auprès de la reine Catherine à Kimbolton pour lui présenter l'acte de succession et l'exhorter à la soumission. Lee parvint à transmettre au roi le 1er juin une proclamation du concile d'York faite le mois précédent, selon laquelle le pape n'avait pas davantage d'autorité juridique en terre anglaise qu'un évêque étranger. Mais malgré une profession de soumission à la Couronne adressée au roi le 17 février 1535, il était suspecté de défiance envers l'hégémonie royale en matière religieuse.

Aussi le roi lui envoya-t-il, ainsi qu'à un certain nombre d'évêques, l'ordre d'afficher ses directives dans sa cathédrale, avec instruction au clergé de les publier dans les paroisses : il s'agissait de dénoncer la suprématie papale en Angleterre, de reconnaître le divorce du roi et son remariage avec Anne Boleyn. Or il advint que le roi Henri apprit que l'archevêque Lee avait négligé ces instructions : le monarque lui rappela d'abord par lettre son serment de reconnaître l'autorité suprême du roi.

Lee répondit le 14 juin qu'il avait, conformément aux ordres du roi, prêché solennellement dans sa cathédrale sur l'injure faite au roi par le pape sur son mariage, mais il admit qu'il n'avait pas mentionné l'autorité suprême du roi. Il pria le roi de ne pas ajouter foi aux accusations de ses ennemis. Puis le 1er juillet il fit parvenir à Cromwell le livret qu'il avait préparé pour son clergé, ainsi qu'une brève proclamation au peuple sur l'autorité suprême du roi, précisant que son diocèse était si pauvre qu'il n'attirait aucun prélat tant soit peu cultivé, et qu'il n'y pouvait trouver plus de 12 prêtres instruits.

De nouveaux motifs de suspicions étant apparus, il fut interrogé quelques mois plus tard par l'émissaire du roi, Richard Layton, pour des propos qu'il aurait tenus au confesseur général de l'Abbaye de Syon, à propos de la prérogative de la Couronne. Il adressa une apologie au roi le 14 janvier 1536. Le 23 avril, il intercédait avec l'appui de Cromwell en faveur de deux institutions religieuses de sa province : l'abbaye d'Hexham, refuge utile lors des invasions écossaises, et le prieuré de Nostell, qu'il présentait comme une chapelle libre de droits rattachée à son diocèse. Au mois de juin, il protesta en public contre la condamnation des rites catholiques et fut considéré comme le chef de file des opposants à la Réforme[4].

Le Pèlerinage de Grâce et les dernières années[modifier | modifier le code]

Lorsqu’éclatèrent les insurrections dans le Nord, qui aboutirent au Pèlerinage de Grâce, à la fin de 1536, la position de Lee parut d'abord ambiguë : il se réfugia le 13 octobre avec Thomas Darcy (1er baron Darcy de Darcy) dans le Château de Pontefract, qui le 20 du mois se rendit aux rebelles, et l’archevêque fut contraint de faire le vœu du Pèlerinage de Grâce. Quoique d'abord favorable au mouvement, ses sentiments avaient alors probablement changé, car le 27 novembre, il réunit son clergé dans la cathédrale afin d'examiner les articles qu'on lui soumettait, mais prononça un sermon défavorable. Sur quoi le clergé refusa de reconnaître son autorité, et il fut forcé de quitter la chaire[4].

Tombé en disgrâce auprès du roi, il conserva pourtant l'amitié de Cromwell, et en juillet 1537, Lee remercia ce dernier de donner au souverain des rapports favorables sur ses sermons. Il était assisté dans ses devoirs diocésains par un évêque suffragant, ce qui lui permit de participer aux travaux de la commission qui composa le rituel accompagnant Trente-neuf articles. Au mois de mai 1539, il défendit devant le parlement d'Angleterre l'adoption des Six Articles et, avec quelques collaborateurs, rédigea la loi les mettant en application. Il fut membre de la commission formée au printemps 1540 pour arrêter les doctrines et la liturgie de l’Église d'Angleterre, et pour réunir les preuves de la nullité du mariage du roi avec Anne de Clèves[4].

À partir des années 1540, il fut l'un des protecteurs du jeune helléniste Roger Ascham mais son appui était modeste et non sans réserves ; il suffit pourtant à maintenir à flot Ascham à ses débuts d'humaniste et d'écrivain[15].

En 1541, la chancellerie d'Angleterre modifia les statuts de l'église d'York. Lee dut remettre l'année suivante les manoirs de Beverley, Southwell etc. à la Couronne, mais il reçut en contrepartie plusieurs prieurés confisqués à des congrégations dissoutes, échange qui ne s'avéra finalement pas défavorable au diocèse. Lee, qui fut le dernier archevêque d'York à pouvoir battre monnaie[4], s'éteignit le 13 septembre 1544, à l'âge de 62 ans, et fut inhumé dans sa cathédrale.

Œuvres[modifier | modifier le code]

Il composa :

Laurence Humphrey, président du Magdalen College d'Oxford, fit graver en 1566 des vers en son honneur sous les baies de la chambre du fondateur[4].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. D'après Alistair Fox, Thomas More : History and Providence, , p. 28–9, 33.
  2. Chambers 1963, pp. 15, 87–8.
  3. Lee, Edward dans (en) J. Venn et J. A. Venn, Alumni Cantabrigienses, Cambridge, Angleterre, Cambridge University Press, 1922–1958 (ouvrage en 10 volumes)
  4. a b c d e f g h et i « Lee, Edward »
  5. MacCulloch 1996, p.34.
  6. D'après Johan Huizinga, Erasmus and the Age of Reformation, Princeton University Press, , p. 133–4.
  7. Cf. Istvan Bejczy et Jane E. Phillips (trad. Erika Rummel), Collected Works of Erasmus, vol. 72 : Controversies with Edward Lee, .
  8. Ackroyd 1999, p. 212.
  9. Huizinga op. cit., pp. 157.
  10. a et b Screech 1988, pp. 201–4.
  11. Erika Rummel, « Desiderius Erasmus », sur Stanford Encyclopedia of Philosophy (consulté le ).
  12. Screech 1988, p. 118.
  13. Screech 1988, pp. 164–6.
  14. Screech 1988, p. 170.
  15. Lawrence.

Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Edward Lee » (voir la liste des auteurs).
  • Peter Ackroyd (1999), The Life of Thomas More
  • R. W. Chambers (1963), Thomas More
  • Diarmaid MacCulloch (1996), Thomas Cranmer
  • M. A. Screech (1988), Erasmus: Ecstasy and The Praise of Folly

Liens externes[modifier | modifier le code]