Crise du porc
La crise du porc est une crise économique touchant toute la chaîne de production et de commercialisation du porc en Europe, et tout particulièrement les éleveurs, notamment en Bretagne depuis l'année 2015. Ses causes sont à chercher dans la hausse des coûts d'alimentation, la dérégulation du marché et l'embargo russe sur le porc européen, début 2014. Cette crise entraîne une surproduction de porcs à l'échelle européenne, et de nombreuses manifestations d'éleveurs.
Causes
[modifier | modifier le code]La crise du porc est due à de multiples causes, dont la dérégulation du marché européen[1], la hausse du coût de l'alimentation des porcs[2], et l'embargo russe sur la viande de porc européenne décidé en février 2014[3], qui a privé la France de 10 % de son marché d'export[4]. Cette crise est structurelle. Elle relève d'un différend entre les éleveurs, qui ne peuvent poursuivre leur activité à cause des prix trop bas du marché, et les transformateurs de viande de porc, qui se disent pénalisés sur le plan européen[5]. L'Allemagne a modernisé ses élevages porcins pour obtenir une plus grande concentration d'animaux, et donc des coûts de production plus bas, entraînant une concurrence pour les éleveurs français[6],[7]. Les éleveurs allemands subissent également la concurrence européenne, en particulier celle des pays de l'Est[8].
Déroulement
[modifier | modifier le code]En Allemagne
[modifier | modifier le code]En 2007 et 2008, les naisseurs et les engraisseurs de porcs d'Allemagne souffrent de la crise, notamment sur le prix du porcelet[9]. Grâce à un fort développement et à des charges salariales faibles, l'Allemagne est en 2016 le 3e plus gros producteur de porc mondial, et le premier au niveau européen[10].
En France
[modifier | modifier le code]En 2013 et 2014, le déficit commercial de la France se creuse pour la viande de porc[11]. Pour tenter de résoudre les difficultés rencontrées par les éleveurs, le gouvernement français préconise un prix d'achat de la viande de porc à 1,40 € le kilo. Le , la Cooperl et Bigard/Socopa refusent de participer au marché du porc breton. La Cooperl signale par courrier la suspension de ses achats externes au cadran. La Cooperl préfère se fournir en Allemagne, où le cours du porc est moins cher de 25 centimes. Le syndicat des industriels de la viande publie un communiqué affirmant que les viandes européennes sont meilleures que les viandes françaises. La Fédération nationale porcine réagit en dénonçant un « chantage et une prise en otage des éleveurs », et des « pratiques mafieuses » de la part des industriels allemands et espagnols. Michel-Edouard Leclerc confirme pour sa part qu'il continue ses achats de porcs à 1,40 euro le kilo[12]. Une semaine plus tard, le prix de référence national du porc passe à 1,39 euro du kilo. Un quart des porcs proposés ne trouvent pas d'acheteur[13]. Jeudi 27 août, le ministre de l'agriculture Stéphane Le Foll réunit les acteurs de la filière pour tenter de résoudre la crise[14]. Fin novembre, la cotation du porc breton tombe à 1,07 €[15]. En janvier, les éleveurs porcins bretons se regroupent dans le mouvement des bonnets roses[16],[17]. En juillet 2015, les éleveurs de porcs français dénoncent un dumping[18] de la part de leurs homologues allemands, qui imposent leurs prix au reste de l'Europe, et demandent une réaction européenne. Ils réclament aussi une meilleure traçabilité à l'échelle européenne}[6].
Fin février 2016, les enseignes Leclerc et Intermarché, qui continuaient à acheter le porc français au prix conseillé de 1,40 € le kilo, font l'objet d'une enquête de la commission européenne pour entrave à la concurrence étrangère[19].
Conséquences
[modifier | modifier le code]En 2014 et 2015, certains éleveurs français affichent 200 000 euros de pertes par an et sont poussés au suicide[20]. La crise entraîne une restructuration au Danemark et aux Pays-Bas, où les élevages de taille moyenne disparaissent et sont rachetés par des structures qui s'agrandissent[9].
Pays touchés
[modifier | modifier le code]la crise touche tous les pays européens, sauf l'Espagne. Ainsi, les éleveurs français perdent en moyenne 5 euros par porc en 2015, les Allemands et les Danois 12 euros[9].
En France, la crise du porc touche tout particulièrement les éleveurs bretons. Ses conséquences en Bretagne entraînent des répercussions au niveau national, puisque le marché du porc breton fixe les prix pour toute la France[21].
Réactions
[modifier | modifier le code]La crise porcine entraîne des réactions de la part des défenseurs du bien-être animal, qui dénoncent le discours officiel appelant à une modernisation des élevages pour réduire les coûts de production. En effet, les porcs sont de plus en plus élevés hors sol, sans voir la lumière ou l'herbe, et sans prise en compte de leurs besoins. Jacques Julliard en conclu que la mort industrielle doit entraîner une profonde remise en question des rapports entre l'être humain et la nature[22].
Des éleveurs de porcs témoignent qu'ils évitent la crise en passant sur le marché de l'agriculture biologique[23],[24].
Notes et références
[modifier | modifier le code]- Anne-Aël Durand, « Crise du porc : « La FNSEA occupe le terrain, mais c’est un leurre » », Le Monde.fr, (ISSN 1950-6244, lire en ligne, consulté le )
- Laurence Girard, « Crise porcine : le coût de l’alimentation en question », Le Monde.fr, (ISSN 1950-6244, lire en ligne, consulté le )
- « L'embargo russe est-il responsable de la crise de la viande? », sur www.lexpress.fr (consulté le )
- (en-GB) aliner, « Les éleveurs veulent faire de la crise du porc un sujet européen », sur EurActiv.fr | Actualités & débats européens, dans votre langue, http://www.euractiv.com/about (consulté le )
- « INFOGRAPHIE. Comprendre la crise porcine en trois étapes », sur lexpansion.lexpress.fr (consulté le )
- « La crise du porc français, un danger pour l'Allemagne », sur La Tribune, La Tribune (consulté le )
- « L’agriculture française sous la pression du porc allemand », sur Atlantico.fr (consulté le )
- « Crise du porc : le modèle allemand / France Inter », sur France Inter (consulté le )
- « Crise du porc: tous les pays touchés… sauf l’Espagne » (consulté le )
- « Elevages de cochons: avale-t-on n’importe quoi? », sur rts.ch, (consulté le )
- « Crise du porc. Une étude de l'IFIP décrypte le malaise français », sur Ouest-France.fr (consulté le )
- « Cinq questions pour tout comprendre à la crise du porc », sur 20minutes.fr (consulté le )
- « Crise du porc : le prix est tombé sous la barre de 1,40 euro après la séance », sur Le Figaro (consulté le )
- « Crise du porc : nouvelle réunion avec la filière, Le Foll se veut rassurant », sur leparisien.fr, https://plus.google.com/+LeParisien (consulté le )
- « Crise du porc. Reprise décevante au marché de Plérin », sur Ouest-France.fr (consulté le )
- « En colère, des éleveurs de porcs lancent le mouvement des bonnets roses », sur Le Figaro (consulté le )
- « Crise du porc. Les raisons de la colère », sur Ouest-France.fr (consulté le )
- Patrick Edery, « « L’Europe doit agir contre le dumping de porc allemand » », Le Monde, (lire en ligne, consulté le )
- « Viande de porc : Intermarché accepte d'acheter plus cher aux éleveurs français, l'Europe refuse », sur Atlantico.fr (consulté le )
- « Le journal de 13h - Crise du porc : le cri du cœur d'un éleveur », sur MYTF1NEWS (consulté le )
- AFP, « La crise du porc, symbole du profond malaise de l'élevage français », sur Le Point, LePoint, (consulté le )
- Jacques Julliard, « La crise porcine, vue du cochon », sur Marianne (consulté le )
- « Crise du porc: il gagne mieux sa vie depuis qu'il produit bio », sur BFMTV (consulté le )
- « Pourquoi les petits élevages porcins bio ne connaissent ni la crise ni l’endettement », sur Basta ! (consulté le )