Couplage croisé

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En chimie organique, un couplage croisé est une réaction de couplage entre deux fragments moléculaires par formation d'une liaison carbone-carbone sous l'effet d'un catalyseur organométallique. Par exemple, un composé R–M, où R est un fragment organique et M un métal du groupe principal, réagit avec un halogénure organique R’–X, où X est un halogène, pour former un produit R–R’[1],[2].

Les chimistes Richard Heck, Ei-ichi Negishi et Akira Suzuki ont reçu le prix Nobel de chimie 2010 pour avoir développé des réactions de couplage catalysées au palladium[3],[4].

Réaction[modifier | modifier le code]

Mécanisme[modifier | modifier le code]

Le mécanisme réactionnel fait généralement intervenir une élimination réductrice des substituants organiques R et R’ sur un complexe métallique de type LnMR(R’), où L est un ligand ancillaire quelconque. L'intermédiaire LnMR(R’) se forme dans un processus en deux étapes à partir d'un précurseur Ln de faible valence. L'addition oxydante d'un halogénure organique RX sur un complexe LnM donne l'intermédiaire LnMR(X). Par la suite, le deuxième partenaire subit une transmétallation avec une source de R’-. L'étape finale est l'élimination réductrice des deux fragments de couplage pour régénérer le catalyseur et donner le produit organique. Les substrats insaturés, tels que les liaisons C(sp)–X et C(sp2)–X, se couplent plus facilement, en partie parce qu'ils s'additionnent facilement au catalyseur.

Catalyseurs[modifier | modifier le code]

Les catalyseurs employés dans les réactions de couplage croisé sont généralement à base de palladium en raison de la grande polyvalence de ce métal du groupe du platine en matière de groupes fonctionnels. Les composés organopalladium (en) sont généralement stables par rapport à l'eau et à l'air. Ces catalyseurs sont néanmoins d'emploi délicat pour l'industrie pharmaceutique, qui opère dans le cadre d'une réglementation restreignant l'usage des métaux lourds. Il est courant de réaliser les couplages au début des processus de synthèse afin de minimiser les traces résiduelles de métaux dans les produits[5]. La catalyse hétérogène à base de palladium est également bien développée[6].

Par ailleurs, on emploie couramment des catalyseurs à base de cuivre, en particulier pour le couplage mettant en œuvre des liaisons carbonehétéroatome[7],[8] ; on a également étudié l'emploi de catalyseurs à base de fer[9], de cobalt[10] et de nickel[11].

Groupe partant[modifier | modifier le code]

Le groupe partant X dans le partenaire organique est généralement un halogénure, bien que le triflate, le tosylate et d'autres pseudohalogénures aient été utilisés. Le chlorure est un groupe idéal en raison du faible coût des composés organochlorés. Souvent, cependant, les liaisons CCl sont trop inertes et des groupes partants bromure ou iodure sont nécessaires pour obtenir des vitesses de réaction acceptables. Le métal du groupe principal dans le partenaire organométallique est généralement un élément électropositif tel que l'étain, le zinc, le silicium ou le bore.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. (en) New Trends in Cross-Coupling: Theory and Applications, Thomas Colacot, 2014. (ISBN 978-1-84973-896-5)
  2. (en) Anthony O. King et Nobuyoshi Yasuda, « Palladium-Catalyzed Cross-Coupling Reactions in the Synthesis of Pharmaceuticals », Organometallics in Process Chemistry, Springer, no 6, p. 205-245, 2004, DOI 10.1007/b94551 (ISBN 978-3-540-01603-8).
  3. (en) « The Nobel Prize in Chemistry 2010 », sur nobelprize.org, (consulté le ).
  4. (en) Carin C. C. Johansson Seechurn, Matthew O. Kitching, Thomas J. Colacot et Victor Snieckus, « Palladium-Catalyzed Cross-Coupling: A Historical Contextual Perspective to the 2010 Nobel Prize », Angewandte Chemie International Edition, vol. 51, no 21,‎ , p. 5062-5085 (PMID 22573393, DOI 10.1002/anie.201107017, S2CID 20582425, lire en ligne).
  5. (en) Ann Thayer, « Removing Impurities », Chemical & Engineering News, vol. 83, no 36,‎ (lire en ligne).
  6. (en) Yin and Jürgen Liebscher, « Carbon−Carbon Coupling Reactions Catalyzed by Heterogeneous Palladium Catalysts », Chemical Reviews, vol. 107, no 1,‎ , p. 133-173 (PMID 17212474, DOI 10.1021/cr0505674, S2CID 36974481, lire en ligne).
  7. (en) Jean-Pierre Corbet et Gérard Mignani, « Selected Patented Cross-Coupling Reaction Technologies », Chemical Reviews, vol. 106, no 7,‎ , p. 2651-2710 (PMID 16836296, DOI 10.1021/cr0505268, lire en ligne).
  8. (en) Gwilherm Evano, Nicolas Blanchard et Mathieu Toumi, « Copper-Mediated Coupling Reactions and Their Applications in Natural Products and Designed Biomolecules Synthesis », Chemical Reviews, vol. 108, no 8,‎ , p. 3054-3131 (PMID 18698737, DOI 10.1021/cr8002505, lire en ligne).
  9. (en) Robin B. Bedford, « How Low Does Iron Go? Chasing the Active Species in Fe-Catalyzed Cross-Coupling Reactions », Accounts of Chemical Research, vol. 48, no 5,‎ , p. 1485-1493 (PMID 25916260, DOI 10.1021/acs.accounts.5b00042, lire en ligne).
  10. (en) Gérard Cahiez et Alban Moyeux, « Cobalt-Catalyzed Cross-Coupling Reactions », Chemical Reviews, vol. 110, no 3,‎ , p. 1435-1462 (PMID 20148539, DOI 10.1021/cr9000786, lire en ligne).
  11. (en) Brad M. Rosen, Kyle W. Quasdorf, Daniella A. Wilson, Na Zhang, Ana-Maria Resmerita, Neil K. Garg et Virgil Percec, « Nickel-Catalyzed Cross-Couplings Involving Carbon−Oxygen Bonds », Chemical Reviews, vol. 111, no 3,‎ , p. 1346-1416 (PMID 21133429, PMCID 3055945, DOI 10.1021/cr100259t, lire en ligne Accès libre).