Caractéristique d'un anneau

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En algèbre, la caractéristique d'un anneau (unitaire) A est par définition l'ordre pour la loi additive de l'élément neutre de la loi multiplicative si cet ordre est fini ; si cet ordre est infini, la caractéristique de l'anneau est par définition zéro.

On note, pour un anneau unitaire (A, +, ×), 0A l'élément neutre de « + » et 1A celui de « × ».

La caractéristique d'un anneau A est donc le plus petit entier n > 0 tel que

si un tel entier existe. Dans le cas contraire (autrement dit si 1A est d'ordre infini), la caractéristique est nulle.

Le sous-anneau de A engendré par 1A, appelé le sous-anneau premier[1] de A, est isomorphe à ℤ/c, où c est la caractéristique de A.

Lorsque l'anneau A est intègre et de caractéristique non nulle, cette caractéristique est un nombre premier et ce sous-anneau premier est un corps fini, appelé le sous-corps premier de A.

Remarque 1 : La présente définition est conforme à des ouvrages publiés au XXIe siècle[2]. Bourbaki[3] dit explicitement ne définir la caractéristique d'un anneau que si cet anneau contient un corps. Lang[4] considère l'idéal de ℤ formé par les n tels que n.1A = 0 ; si cet idéal est premier, c'est-à-dire de la forme cℤ où c est zéro ou un nombre premier, il définit la caractéristique de A comme étant le nombre c. Il ne la définit pas dans le cas contraire.

Remarque 2 : Certains auteurs n'exigent pas la présence d'un élément unitaire dans la définition d'un anneau (voir l'article détaillé), une structure souvent appelée pseudo-anneau. Dans ce cas, la définition précédente doit être remplacée par la suivante, plus générale. La caractéristique de A est le plus petit entier n, s'il existe, tel que, pour tout élément a de A, Si un tel n n'existe pas, la caractéristique est 0.

L'homomorphisme de Z dans A[modifier | modifier le code]

Il existe un unique morphisme d'anneaux unitaires de ℤ dans A (ℤ est en effet un objet initial de la catégorie des anneaux). Par définition, si n est un entier strictement positif, on a :

,

où 1A est répété n fois. Comme ℤ est un anneau euclidien, le noyau de est un idéal principal et, par définition, la caractéristique de A est son générateur positif. Plus explicitement, c'est l'unique entier naturel n tel que le noyau de soit l'idéal nℤ.

Propriétés sur les anneaux[modifier | modifier le code]

  • La caractéristique d'un anneau A est l'unique entier n positif ou nul tel que soit un sous-anneau unitaire de A.
    Ceci résulte de la définition ci-dessus et du théorème de factorisation.
    On en déduit en particulier :
  • Si B est un sous-anneau unitaire de A, alors A et B ont même caractéristique.
  • Les anneaux de caractéristique nulle sont ceux dont ℤ est un sous-anneau unitaire. Ils sont donc infinis.
    C'est le cas du corps des nombres complexes et de tous ses sous-anneaux unitaires, comme le corps des nombres réels ou le corps des nombres rationnels.
  • Tout anneau totalement ordonné est de caractéristique nulle.
    En effet, l'homomorphisme est croissant. Tout entier strictement positif est envoyé sur un élément strictement positif de l'anneau, a fortiori différent de 0.C'est par exemple le cas de (et ses sous-anneaux unitaires).
  • Le seul anneau dont la caractéristique vaut 1 est l'anneau nul.
  • La caractéristique d'un anneau intègre est soit nulle, soit un nombre premier.
En effet, si est un sous-anneau unitaire d'un anneau intègre alors il est lui-même intègre, donc n est nul ou premier.
  • Pour tout morphisme d'anneaux unitaires g : AB, la caractéristique de B divise celle de A.
    En effet, l'homomorphisme d'anneaux unitaires est l'homomorphisme composé gf. Si p et q sont les caractéristiques respectives de A et de B, le noyau de gf est donc , or g(f (p)) = g(0A) = 0B, si bien que contient p, autrement dit q divise p.
  • Si A est un anneau commutatif, et si sa caractéristique est un nombre premier p, alors pour tous éléments x, y dans A, on a (x + y)p = xp + yp. L'application qui à x associe xp est un endomorphisme d'anneau appelé endomorphisme de Frobenius.
    Le résultat découle immédiatement de la formule du binôme de Newton et de ce que p divise les coefficients binomiaux apparaissant dans le développement.
  • La caractéristique d'un produit d'anneaux A × B est le P.P.C.M des caractéristiques de ces anneaux.

Propriétés sur les corps[modifier | modifier le code]

Comme pour tout anneau intègre, la caractéristique d'un corps K est soit 0, soit un nombre premier p. De plus, dans le second cas, comme pour tout anneau de caractéristique p non nulle, K contient une copie de qui (puisqu'ici p est premier) est un corps : c'est l'unique corps fini Fp à p éléments.

  • Tout corps de caractéristique nulle contient une copie de .
    En effet, un tel corps K contient déjà (comme tout anneau de caractéristique nulle) une copie de . Comme K est un corps, il contient donc le corps des fractions de , à savoir le corps des rationnels. Tout corps possède donc un sous-corps minimal, son corps premier, isomorphe (selon sa caractéristique) à un corps fini Fp ou au corps .
  • Tout corps fini a pour caractéristique un nombre premier, et pour cardinal une puissance de ce nombre.
    Si K est un corps fini il est, comme tout anneau fini, de caractéristique non nulle. Par ce qui précède, sa caractéristique est donc un nombre premier p et K contient une copie du corps Fp. De fait, K est un espace vectoriel sur Fp. Donc son cardinal est p à la puissance sa dimension (laquelle, de ce fait, est nécessairement finie, autrement dit K est une extension finie de Fp).
  • Pour tout nombre premier p, il existe des corps infinis de caractéristique p  :
    par exemple le corps des fractions rationnelles sur Fp ou la clôture algébrique de Fp.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. (en) Shreeram Shankar Abhyankar, Lectures on Algebra, World Scientific, (lire en ligne), p. 21.
  2. Par exemple (en) Joseph Gallian (en), Contemporary Abstract Albegra, Cengage Learning, , 656 p. (ISBN 978-0-547-16509-7, lire en ligne), p. 252-253.
  3. N. Bourbaki, Algèbre, chapitres 4 à 7, Masson, , V.2.
  4. Serge Lang, Algèbre [détail des éditions], 2004, p. 97.