Proto-État
Un proto-État est littéralement un État en formation ; le terme « proto » vient du grec prôtos : « Premier en temps ou lieu ».
Description
[modifier | modifier le code]On parle de proto-État pour évoquer une structure ne pouvant être qualifiée d'État car trop primitive[non neutre]. Un proto-État dispose d'un certain nombre de caractéristiques propres aux États modernes sans réunir la totalité de celles-ci.
Pour Georges El Khoury, chargé d’enseignement à la Faculté de gestion de management de l'Université Saint-Joseph de Beyrouth, « le terme de proto-État a d’abord été utilisé par les préhistoriens, les historiens et les géographes pour désigner une organisation politique et sociale intermédiaire entre l’organisation de type communautaire (clans, tribus, chefferies, royautés pré-étatiques, etc.) et l’organisation politique de type étatique. »[1] Ce terme est inspiré du concept de proto-nation[2] développé par Jean Ziegler dans un contexte différent dans son ouvrage Terre qu'on a : « c'est une société hétérogène. Le pouvoir politique y fait l'objet de luttes, de négociations, de transactions permanentes. La proto-nation opère au niveau de la conscience collective une sorte de consensus contractuel. Ce consensus est extrêmement fragile, mais il existe. »[3]
Dans la littérature et dans différents contextes ou époques, on trouve des exemples de proto-États : le Mali post-colonial[évasif][2], la Palestine[4], ou le Hezbollah au Liban[5].
En Syrie, la guerre civile qui débute en 2011 voit le pays se fractionner en plusieurs zones dont certaines, le contrôle échappe au régime syrien, sont qualifiées par certains analystes de « proto-État », notamment :
- le Rojava, administration à dominante kurde qui contrôle le nord-est du pays est qualifié de proto-État en 2019 par Agnès Callamard, rapporteuse du Conseil des droits de l'homme des Nations-unies[6] ;
- selon Vincent Piolet, le groupe terroriste Daech est organisé « comme un proto-État » en 2016 (depuis 2019, cette organisation ne contrôle plus aucun territoire)[7] ;
- l’enclave syrienne d’Idleb contrôlée par le groupe rebelle islamiste Hay’at Tahrir al-Cham est qualifiée de « proto-État dans l’État » par le journaliste du quotidien libanais L'Orient-Le Jour Emmanuel Haddad[8].
Notes et références
[modifier | modifier le code]- Georges El Khoury, « Typologie de réformes de l’État : Un moyen de changement garantissant la souveraineté étatique »
- Pierre Jacquemot, « Le proto-État africain : quelques réflexions autour de l'histoire contemporaine du Mali », Tiers-Monde, t. 24, no 93 « Le rôle de l'État dans le Tiers Monde, sous la direction de Moïses Ikonicoff », –, p. 127-141 (DOI 10.3406/tiers.1983.4263, lire en ligne, consulté le ).
- Jean Ziegler, Terre qu'on a, Éditions de l'Atelier, (lire en ligne), page 89
- Adrien Jaulmes, « Ramallah, capitale d'un proto-État », sur Le Figaro,
- « Liban : les boucliers du Hezbollah », sur Le Monde.fr (consulté le )
- Allan Kaval et Hélène Sallon, « L’ONU interpelle la France sur le transfert « illégal » de djihadistes français en Irak », sur Le Monde,
- Vincent Piolet, « Géoéconomie du proto-État dirigé par Daech », Géoéconomie, (lire en ligne)
- « Hay’at Tahrir al-Cham bombe le torse à Idleb », sur L'Orient-Le Jour, (consulté le )