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Quelques mises au point sur le château de ma mère

. L'itinéraire des Pagnol

Beaucoup de gens s'intéressant au trajet de la famille Pagnol quand elle se rendait de la station de tramway de la Barasse jusqu'à la Bastide Neuve, aux Bellons, sont persuadés que les bouleversements intervenus dans la géographie locale depuis le début du 20ème siècle empêchent à jamais de le retrouver. Certains l'appellent même "l'itinéraire impossible".

Tout porte à croire au contraire que non seulement cet itinéraire est facile à reconstituer mais qu'il n'a pas changé au fil du temps.

Au début du 20ème siècle

Dans la Gloire de mon Père on voit Joseph Pagnol - l'Organisateur - déployer un plan pour trouver le chemin. Faisons comme lui !

Mieux. Voici justement une carte d'état-major dressée (levée) en 1870 (Marseille, carte N° 247) et révisée en 1898, c'est-à-dire quelques années avant que la famille Pagnol commence à effectuer ses trajets vers la Bastide Neuve, les premières grandes vacances à la villa pouvant être situées en 1904.

Les deux extrêmités du trajet figurent sur cette carte : La Barasse et Les Bellons. On mesure entre les deux points un écart d'environ 7 centimètres. L'échelle étant au 1/80.000, cela donne une distance à vol d'oiseau de 4,8 kilomètres, soit à peu près ce qu'affirme Joseph Pagnol (4 kilomètres). On voit d'autre part que le trajet ne se faisait pas en pleine nature mais empruntait , non des routes principales mais tout de même des chemins parfaitement répertoriés, certainement des chemins vicinaux.

Notons qu'au départ de la Barasse, deux possibilités s'offrent pour traverser le village de la Valentine : la première par un chemin vicianal (figuré en trait plein rouge), la seconde (en pointillé) en suivant deux rues formant un coude à angle droit. La différence entre les deux n'est pas énorme, cinq-cents mètres au maximum, et la famille Pagnol pouvaitt choisir l'un ou l'autre selon l'état, boueux ou non, des chemins.

Quoi qu'il en soit, elle avait à sa disposition un itinéraire on ne peut plus direct pour aller de la Barasse aux Bellons, presque rectiligne :

traversée de la Valentine (1,2 km),
de la Valentine à Camoins-les-Bains (à l'ouest du village, 2,0 km),
de Camoins-les-Bains au pied de la Treille (1,2 km) - ces trois sections en terrain pat -,
traversée de la Treille en montée d'abord assez rude, puis faux-plat de la Treille aux Bellons et à la Bastide Neuve (1,2 km).

Soit en tout 5,6 kilomètres. On est loin des 9 kilomètres annoncés par Joseph !

Il n'y avait donc nul besoin de chercher un raccourci. De plus, la Treille faisant partie de la commune de Marseille (elle est située à présent dans le 11ème arrondissement de la ville), comment peut-on envisager que ses résidents, qui avaient besoin de se rendre en ville chaque jour (agriculteurs pour les marchés, ouvriers, fonctionnaires), aient accepté sans protester un allongement de parcours de quatre ou cinq kilomètres imposés par quatre ou cinq grandes propriétés. Aux propriétaires sont imposés des servitudes (droits de passage) d'utilité publique.

La painte de Joseph contre les propriétaires qui seraient responsable d'un allongement du parcours de 4 à 9 kilomètres est d'autant plus injustifié qu'il ne porterait que sur une petite fraction de celui-ci. En effet, quand Bouzigue ouvre à la famille la porte du quatrième et dernier château, elle se trouve, à son grand étonnement, devant le café des Quatre-Saisons. Celui-ci ne figure pas sur la carte de 1898 mais il existe encore, situé juste avant le lieu-dit les Fabres, soit à seulement 2 kilomètres de la Barasse. Selon le père Pagnol il y aurait donc eu un allongement de 5 kilomètres pour cette seule portion de parcours, ce qui est encore plus difficile à admettre.

Itinéraire actuel

Le tracé n'a subi aucune modification, mise à part la traversée de la Valentine : la traversée directe (tracé rouge plein) est impossible par suite de l'implantation des Brasseries Heineken. Mais le trajet bis (tracé rouge pointillé) demeure inchangé

La voierie de Marseille a donné des noms aux chemins qui sont devenus des rues. Nous pouvons ainsi reprendre la composition du trajet sous la forme :

traversée de la Valentine : rue César Boy et rue de l'Audience,
de la Valentine aux Camoins : route des Camoins,
des Camoins à la Treille : route de la Treille
de la treille à la Bastide Neuve : chemin des Bellons.

Notons que les Bellons, et donc aussi la Bastide Neuve, font partie de la commune d'Allauch.

Les châteaux

Sur la carte de 1898 il est indiqué trois châteaux à proximité du trajet de la Barasse aux Bellons Ce sont :

le château de la Reynarde, à x km à l'est de la Barasse, qui existe toujours et est classé monument historique depuis 1996,
le château de la Millière, à y km de la Barasse, qui correspond à l'actuel Château-Régis, occupé par une institution scolaire privée, et également classé monument historique depuis 1996,
un lieu-dit la Bésine qui correspond, orthographiquement et géographiquement, à l'actuel château de la Buzine; il est situé à l'est de la route des Camoins, en surplomb, à la hauteur du lieu-dit les Quatre-Saisons, à z km de la Barasse.

Un quatrième château, celui de Carlevan, est situé beaucoup trop au nord, entre La Treille et Allauch, pour pouvoir être pris en compte. De même, le château Saint-Antoine, qui n'est pas mentionné sur l'une ou l'autre carte, - mais qui existe toujours quoique laissé à l'abandon par la municipalité de Marseille -, est à écarter puisque situé au sud de la Valentine, bien que beaucoup le considèrent comme un château possible du "raccourci" des Pagnol.

Donc, premières constations :

L'itinéraires des Pagnols de la Barasse aux Bellons était on ne peut plus direct, et il faisait 4 km et non 9.
Il ne passait au voisinage d'aucun château, tout au plus au pied de la Buzine, mais très en contrebas.