Théorème de Rouché
En analyse complexe, le théorème de Rouché[1] est un énoncé portant sur les zéros et les pôles des fonctions méromorphes. Il est nommé ainsi en l'honneur du mathématicien français Eugène Rouché.
Énoncé
[modifier | modifier le code]Soit un ouvert simplement connexe, soient f et g deux fonctions méromorphes sur avec un ensemble fini de zéros et de pôles. Soit γ un lacet simple à image dans formant le bord d'un compact . Si
- pour tout point z de γ
alors
où et sont respectivement le nombre de zéros et de pôles de (en tenant compte de leur multiplicité) contenus dans .
Exemple
[modifier | modifier le code]Considérons les deux fonctions polynomiales f et g définies par :
et considérons pour lacet le cercle . On vérifie que sur ce lacet :
et
- .
On peut donc appliquer le théorème de Rouché :
puisque f et g n'ont pas de pôle. Par ailleurs, g a un zéro triple à l'origine, ce qui nous indique donc que la fonction f admet trois zéros dans le disque ouvert .
Démonstration
[modifier | modifier le code]Si pour tout , alors f et g ne s'annulent pas sur (sinon l'inégalité stricte ne pourrait pas être vérifiée). Soit h la fonction méromorphe sur , holomorphe et ne s'annulant pas sur définie par :
- .
Pour tout point z de γ,
- .
L'image de par est donc contenue dans le disque ouvert de rayon 1 et de centre 1 et par conséquent elle ne tourne pas autour de l'origine. En appliquant le principe de l'argument on a donc :
- .
D'autre part,
- .
Par conséquent,
- .
Finalement, en utilisant à nouveau le principe de l'argument, on obtient
- .
Applications
[modifier | modifier le code]Démonstration du théorème fondamental de l'algèbre
[modifier | modifier le code]Soit un polynôme à valeurs dans et défini par :
en supposant . Soit suffisamment grand pour que pour tout (cercle de rayon R) on ait :
(par exemple convient).
Étant donné que admet un zéro d'ordre à l'origine, doit admettre zéros dans le disque ouvert par application du théorème de Rouché.
Généralisations
[modifier | modifier le code]Un siècle plus tard, Theodor Estermann[2] a affaibli l'hypothèse de Rouché, obtenant :
Soient f et g deux fonctions méromorphes à l'intérieur d'un lacet simple rectifiable γ et continues au bord, et telles que
- pour tout point z de γ.
Alors, comme ci-dessus,
- [3].
Références
[modifier | modifier le code]- Journal de l'École polytechnique, 1862, p. 217-218.
- (en) T. Estermann, Complex Numbers and Functions, Athlone Press, London, 1962, p. 156.
- (en) I-Hsiung Lin, Classical Complex Analysis: A Geometric Approach, vol. 1, World Scientific, (ISBN 978-9-81426123-4, lire en ligne), p. 558.
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Article connexe
[modifier | modifier le code]Théorème de Hurwitz sur les suites de fonctions holomorphes
Bibliographie
[modifier | modifier le code]- [PDF] Michèle Audin, Analyse complexe, notes de cours de l'université de Strasbourg disponibles en ligne
- Murray R. Spiegel, Variables complexes, McGraw-Hill (ISBN 978-2-7042-0020-7)